Contrôle des mesures d’isolement en milieu psychiatrique : respect des délais légaux et droits des patients.

·

·

Contrôle des mesures d’isolement en milieu psychiatrique : respect des délais légaux et droits des patients.

L’Essentiel : L’article L3222-5-1 du code de la santé publique encadre l’isolement et la contention des patients hospitalisés sans consentement, stipulant qu’ils ne doivent être utilisés qu’en dernier recours. Ces mesures doivent être justifiées par un risque immédiat et leur application doit être proportionnée. Le renouvellement nécessite l’information d’un proche et l’autorisation d’un juge, qui doit statuer dans un délai de 96 heures. En cas de non-respect de ces délais, comme dans le cas de Mme [Y] [R], la mesure d’isolement peut être levée, soulignant l’importance du contrôle judiciaire sur ces pratiques.

Cadre Légal de l’Isolement et de la Contention

L’article L3222-5-1 du code de la santé publique stipule que l’isolement et la contention ne doivent être utilisés qu’en dernier recours pour des patients hospitalisés sans consentement. Ces mesures doivent être justifiées par un risque immédiat pour le patient ou autrui, et leur mise en œuvre doit être adaptée, nécessaire et proportionnée. De plus, une surveillance stricte est requise, avec des évaluations régulières consignées dans le dossier médical.

Conditions de Renouvellement des Mesures

Le même article précise que le médecin peut renouveler les mesures d’isolement ou de contention au-delà des durées initiales, sous certaines conditions. Il doit informer un membre de la famille du patient et le directeur de l’établissement doit saisir le juge pour obtenir l’autorisation de prolonger ces mesures. Le juge doit statuer dans des délais précis pour garantir le respect des droits du patient.

Information et Droit de Saisine

L’article R3211-31-1 établit que l’information sur le renouvellement des mesures doit être communiquée à un proche du patient, qui a le droit de saisir le juge pour demander la levée de la mesure. Si le juge autorise le maintien, le médecin peut renouveler la mesure dans les mêmes conditions, avec des délais spécifiques pour la saisine et la décision du juge.

Contrôle Judiciaire des Mesures

Le juge ne peut pas se substituer à l’autorité médicale concernant l’évaluation du consentement ou le diagnostic, mais il doit contrôler la légitimité des mesures d’isolement et de contention. Il doit statuer sur ces mesures dans un délai de 96 heures après leur mise en place, conformément aux dispositions légales.

Décision du Juge et Conséquences

Dans cette affaire, le juge a rendu une décision concernant une mesure de contention sans avoir statué sur la mesure d’isolement, ce qui constitue une violation des délais légaux. En conséquence, la mesure d’isolement de Mme [Y] [R] a été levée, car le juge n’a pas respecté les obligations légales de contrôle dans le délai imparti.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions légales pour l’isolement et la contention des patients selon l’article L3222-5-1 du code de la santé publique ?

L’article L3222-5-1 du code de la santé publique précise que l’isolement et la contention ne peuvent être appliqués qu’en tant que pratiques de dernier recours.

Ces mesures concernent uniquement les patients en hospitalisation complète sans consentement.

Elles ne peuvent être mises en œuvre que pour prévenir un dommage immédiat ou imminent pour le patient ou autrui.

La décision doit être motivée par un psychiatre et doit être adaptée, nécessaire et proportionnée au risque après une évaluation du patient.

De plus, la mise en œuvre de ces mesures doit faire l’objet d’une surveillance stricte, tant somatique que psychiatrique, confiée à des professionnels de santé désignés par l’établissement.

Cette surveillance doit être tracée dans le dossier médical, avec des évaluations régulières : deux par 24 heures pour l’isolement et une toutes les 12 heures pour la contention.

Quelles sont les obligations d’information relatives au renouvellement des mesures d’isolement et de contention ?

Le paragraphe II de l’article L3222-5-1 stipule que, dans des cas exceptionnels, le médecin peut renouveler les mesures d’isolement ou de contention au-delà des durées initiales de 48 heures et 24 heures respectivement.

Ce renouvellement doit se faire sous les mêmes conditions que celles initialement établies.

Il est impératif d’informer au moins un membre de la famille du patient ou une personne susceptible d’agir dans son intérêt concernant le renouvellement envisagé.

De plus, le directeur de l’établissement doit informer le juge de cette situation.

Le juge doit être saisi d’une demande de maintien de la mesure avant l’expiration de la soixante-douzième heure pour l’isolement et de la quarante-huitième heure pour la contention.

Il doit statuer avant l’expiration de la quatre-vingt seizième heure pour l’isolement et de la soixante-douzième heure pour la contention.

Quel est le rôle du juge dans le contrôle des mesures d’isolement et de contention ?

L’article R3211-31-1 précise que le juge ne peut pas se substituer à l’autorité médicale concernant l’évaluation du consentement du patient, le diagnostic ou les soins.

Son rôle se limite à un contrôle des motifs des mesures d’isolement et de contention, en se basant sur les critères établis dans le paragraphe I de l’article L3222-5-1.

Le juge doit statuer sur les mesures d’isolement dans un délai de 96 heures après le début de la mesure.

Dans le cas présent, le juge a rendu une décision concernant la mesure de contention, mais n’a pas statué sur la mesure d’isolement dans le délai imparti.

Cela constitue une méconnaissance des dispositions légales, entraînant la nécessité d’ordonner la mainlevée de la mesure d’isolement.

Quelles sont les conséquences d’un non-respect des délais légaux par le juge ?

Le non-respect des délais légaux par le juge, comme stipulé dans l’article L3222-5-1, entraîne des conséquences directes sur la légalité des mesures d’isolement et de contention.

Dans l’affaire examinée, le juge n’a pas statué sur la mesure d’isolement pendant près de sept jours, ce qui constitue une violation des obligations légales.

Cette situation a conduit à l’ordonnance de mainlevée de la mesure d’isolement de Mme [Y] [R].

Il est essentiel que les juges respectent les délais pour garantir les droits des patients et assurer un contrôle judiciaire effectif sur les mesures privatives de liberté.

Le non-respect de ces délais peut également entraîner des recours juridiques de la part des patients ou de leurs représentants, visant à contester la légitimité des mesures appliquées.

COUR D’APPEL DE LYON
Tribunal judiciaire de Lyon
Cabinet de Emmanuelle WIDMANN

N°RG 25/00276 – JLD hospitalisation
Mme [Y] [R] née le 27/10/1982

ORDONNANCE RELATIVE A UNE MESURE D’ISOLEMENT
(2e demande)

rendue le 22 janvier 2025 à 13h26

Par, Emmanuelle WIDMANN, juge au tribunal judiciaire de Lyon, statuant sans audience selon la procédure écrite de principe prévue aux articles L3211-12-2 et L3222-5-1 du Code de la santé publique ;

Vu les articles L3211-1 et suivants, L.3212-1 et suivants, L3222-5-1, R3211-34 et suivants du Code de la santé publique ;

Vu les pièces relatives à l’admission en hospitalisation complète de la patiente Mme [Y] [R],

Vu les pièces du dossier et notamment le renouvellement de la mesure d’isolement du 21 janvier 2025 à compter de 22h07, après évaluation clinique par le Dr [N] [I] le 21 janvier 2025 à 19h41, considérant que l’état de la patiente, Mme [Y] [R], nécessite le renouvellement exceptionnel de la mesure débutée le 15 janvier 2025 à 20h05 ;

Vu l’impossibilité de délivrer les informations aux tiers en application du premier alinéa du II de de l’article L3222-5-1 du code de la santé publique ;

Vu la saisine du juge par le Directeur du CH [1] le 22 janvier 2025, enregistrée le même jour à 9h14, aux fins de maintien de la mesure sans demande de comparution du patient,

Vu l’avis du Ministère public ;

MOTIFS DE LA DECISION :

L’article L3222-5-1 du code de la santé publique dispose, dans son premier alinéa, que l’isolement et la contention sont des pratiques de dernier recours et ne peuvent concerner que des patients en hospitalisation complète sans consentement ; qu’il ne peut y être procédé que pour prévenir un dommage immédiat ou imminent pour le patient ou autrui, sur décision motivée d’un psychiatre et uniquement de manière adaptée, nécessaire et proportionnée au risque après évaluation du patient ; qu’enfin, leur mise en œuvre doit faire l’objet d’une surveillance stricte, somatique et psychiatrique, confiée par l’établissement à des professionnels de santé désignés à cette fin et tracée dans le dossier médical, comportant notamment deux évaluations par 24 heures (isolement)/12heures(contention);

Il dispose aussi, dans son paragraphe II, qu’à titre exceptionnel, le médecin peut renouveler sous les mêmes conditions, au delà des durées totales de 48 heures pour la mesure d’isolement et de 24 heures pour la mesure de contention, la mesure d’isolement ou de contention avec l’obligation d’informer au moins un membre de la famille du patient ou une personne susceptible d’agir dans l’intérêt de celui-ci, du renouvellement qui est envisagé ; que cette même information doit être délivrée par le directeur d’établissement au juge, ce dernier devant être saisi d’une demande de maintien de la mesure avant l’expiration de la soixante-douzième heure d’isolement et de la quarante-huitième heure de contention si l’état de santé du patient rend le renouvellement de la mesure nécessaire au delà de ces durées, et statuer avant l’expiration de la quatre-vingt seizième heure d’isolement ou la soixante-douzième heure de contention.

Il est aussi précisé à cet article qu’une mesure d’isolement ou de contention est regardée comme une nouvelle mesure lorsqu’elle est prise au moins quarante-huit heures après une précédente mesure d’isolement ou de contention et qu’en-deçà de ce délai, sa durée s’ajoute à celle des mesures d’isolement et de contention qui la précèdent et qu’en outre, l’information susvisée et la saisine du juge doivent être effectuées selon les mêmes modalités lorsque le médecin prend plusieurs mesures d’une durée cumulée de quarante-huit heures pour l’isolement et de vingt-quatre heures pour la contention sur une période de quinze jours.

L’article R3211-31-1 dispose que l’information relative au renouvellement de la mesure d’isolement ou de contentionest délivrée par tout moyen à au moins un membre de la famille du patient, ou une personne susceptible d’agir dans son intérêt. Cette personne a le droit de saisir le juge aux fins de mainlevée d’une mesure d’isolement ou de contention.

Si le juge autorise le maintien de la mesure d’isolement ou de contention, le médecin peut la renouveler dans les mêmes conditions. Le juge des libertés et de la détention est saisi avant l’expiration de la 168è heure (isolement)/120è heure ( contention) et doit rendre sa décision avant l’expiration de la 192è heure (isolement)/144è heure ( contention)

Dans le cadre de son contrôle, le juge ne peut se substituer à l’autorité médicale s’agissant de l’évaluation du consentement du patient, du diagnostic posé ou des soins. Il n’opère pas une appréciation de l’opportunité médicale de la mesure mais un contrôle de ses motifs au regard des critères posés au paragraphe I de l’article L3222-5-1 susvisé.

Attendu que les dispositions légales en vigueur imposent au juge de statuer sur les mesures d’isolement dans un délai de 96 heures après le début de la mesure.

Qu’en l’espèce, le juge a rendu une décision le 18 janvier 2025 à 17h58, mais que celle-ci ne portait pas sur la mesure d’isolement mais une mesure de contention.

De sorte, qu’il en résulte que le juge n’a pas opéré de contrôle sur la mesure d’isolement depuis le début de la mesure, soit pendant près de sept jours, en méconnaissance des dispositions légales qui lui imposent de statuer dans un délai de 96 heures.

En conséquence, il y a lieu d’ordonner la mainlevée de la mesure d’isolement de Mme [Y] [R].

PAR CES MOTIFS 

Ordonnons la mainlevée de la mesure d’isolement concernant Mme [Y] [R];

LE JUGE
Emmanuelle WIDMANN

– Copie de l’ordonnance notifiée par courriel au Directeur du Centre Hospitalier [1] pour notification à Mme [Y] [R] le 22 janvier 2025,
Le Greffier,

– Copie de l’ordonnance notifiée par courriel au directeur du Centre Hospitalier [1] le 22 janvier 2025,
Le Greffier,

– Avis de la présente ordonnance a été donné au procureur de la République le 22 janvier 2025,
Le Greffier,

– Copie de l’ordonnance notifiée par courriel au mandataire judiciaire le 22 janvier 2025,
Le Greffier,


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Chat Icon