L’Essentiel : M. X, représenté par Me Léa Cohen, a contesté une ordonnance de rétention administrative rendue le 29 décembre 2024 par le tribunal de Toulouse. Cette ordonnance prolongeait sa rétention de 26 jours, malgré l’absence des représentants du Ministère public. En appel, M. X a soulevé des irrégularités, notamment concernant le contrôle d’identité qui avait précédé sa mise en rétention. Le tribunal a constaté que ce contrôle n’était pas justifié, entraînant la nullité de la procédure. En conséquence, l’ordonnance initiale a été infirmée, et M. X a été libéré, tout en étant rappelé à son obligation de quitter le territoire français.
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Contexte de l’affaireM. X, se présentant sous l’identité de [H] [D], a été assisté par son avocate, Me Léa Cohen, lors d’une audience au tribunal judiciaire de Toulouse. L’affaire a été examinée en l’absence des représentants du Ministère public et de la préfecture de l’Hérault, qui avaient été régulièrement avisés. Ordonnance de rétention administrativeLe vice-président du tribunal a rendu une ordonnance le 29 décembre 2024, qui a joint plusieurs procédures, rejeté des exceptions de nullité, et déclaré recevables la requête du préfet de l’Hérault ainsi que l’arrêté de placement en rétention administrative. Cette ordonnance a ordonné la prolongation de la rétention de M. X pour une durée de 26 jours. Appel de M. XM. X a interjeté appel de cette ordonnance par l’intermédiaire de son conseil, demandant l’infirmation de la décision et sa remise en liberté immédiate. L’appel a été reçu au greffe de la cour le 29 décembre 2024 et a été soutenu oralement lors de l’audience du 30 décembre 2024. Motivations de l’appelL’appel a été jugé recevable, ayant été interjeté dans les formes et délais légaux. M. X a soulevé des irrégularités concernant la procédure de rétention, notamment en ce qui concerne le cadre juridique de son interpellation et le contrôle d’identité qui a précédé sa mise en rétention. Irrégularité du contrôle d’identitéLe tribunal a constaté que le contrôle d’identité de M. X, effectué dans le cadre d’une opération d’expulsion, n’était pas justifié conformément aux exigences du code de procédure pénale. L’absence de raisons plausibles de soupçonner une infraction a conduit à la nullité du contrôle d’identité et, par conséquent, à celle de la procédure subséquente. Décision finaleEn conséquence, le tribunal a infirmé l’ordonnance initiale et ordonné la mainlevée de la mesure de maintien en rétention de M. X. Il a également rappelé à M. X son obligation de quitter le territoire français, et a notifié cette décision aux parties concernées. |
Q/R juridiques soulevées :
Sur la recevabilité de l’appelL’appel interjeté par M. X se disant [H] [D] est jugé recevable car il a été effectué dans les formes et délais légaux. Selon l’article 905 du Code de procédure civile, « l’appel est formé par déclaration au greffe de la cour d’appel, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision ». Dans cette affaire, l’appel a été reçu au greffe le 29 décembre 2024, respectant ainsi le délai imparti. Il est donc fondé de considérer que l’appel est recevable, permettant ainsi d’examiner le fond de la demande de l’appelant. Sur la régularité de la procédure antérieure à la rétention administrativeM. X se disant [H] [D] conteste la régularité de la procédure qui a conduit à sa rétention administrative, en se basant sur l’article 78-2 du Code de procédure pénale. Cet article stipule que « les officiers de police judiciaire peuvent inviter à justifier de son identité toute personne à l’égard de laquelle existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis ou tenté de commettre une infraction ». Dans le cas présent, le contrôle d’identité de M. X a été effectué sans que des raisons plausibles de soupçon soient établies. Le procès-verbal de saisine indique que le contrôle a été réalisé dans le cadre d’une opération d’expulsion, ce qui ne justifie pas un contrôle d’identité selon les exigences de l’article 78-2. Ainsi, l’irrégularité du contrôle d’identité constitue une atteinte substantielle aux droits de l’étranger, affectant sa liberté d’aller et venir. En conséquence, le contrôle d’identité est déclaré nul, entraînant l’invalidation de la procédure subséquente, y compris la garde à vue de M. X. Il est donc fondamental de respecter les dispositions légales pour garantir les droits des individus concernés. Sur les conséquences de l’irrégularité du contrôle d’identitéL’irrégularité constatée dans le contrôle d’identité de M. X se disant [H] [D] a des conséquences directes sur la légalité de la rétention administrative. L’article L. 512-1 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) précise que « la rétention administrative ne peut être ordonnée que si l’étranger fait l’objet d’une mesure d’éloignement ». Or, dans ce cas, la mesure de rétention a été fondée sur un contrôle d’identité irrégulier, ce qui remet en question la légitimité de la rétention. De plus, l’article L. 552-1 du CESEDA stipule que « la rétention ne peut excéder 45 jours », mais cette durée ne peut être appliquée que si la procédure a été régulièrement engagée. Ainsi, l’irrégularité du contrôle d’identité entraîne l’infirmation de l’ordonnance de rétention, et la mainlevée de la mesure doit être ordonnée sans délai. Il est essentiel de garantir le respect des droits fondamentaux des étrangers, notamment en matière de liberté et de procédure légale. |
Minute 24/1394
N° RG 24/01391 – N° Portalis DBVI-V-B7I-QWZ6
O R D O N N A N C E
L’an DEUX MILLE VINGT QUATRE et le 30 décembre à 15 h 30
Nous V. BAFFET-LOZANO, conseillère, magistrate déléguée par ordonnance de la première présidente en date du 12 décembre 2024 pour connaître des recours prévus par les articles L. 743-21 et L.342-12, R.743-10 et suivants du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.
Vu l’ordonnance rendue le 29 décembre 2024 à 16 h 39 par le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Toulouse ordonnant le maintien au centre de rétention de :
X se disant [H] [D] connu sous X se disant [H] [G]
né le 21 Juin 1997 à [Localité 3] (ALGERIE)
de nationalité Algérienne
Vu l’appel formé le 29 décembre 2024 à 21 h 21 par courriel, par Me Léa COHEN, avocate au barreau de TOULOUSE,
A l’audience publique du 30 décembre 2024 à 11 heures, assistée de M. POZZOBON, greffière avons entendu :
assisté de Me Léa COHEN, avocate au barreau de TOULOUSE
qui a eu la parole en dernier ;
En l’absence du représentant du Ministère public, régulièrement avisé;
En l’absence du représentant de la PREFECTURE DE L’HERAULT régulièrement avisée ;
avons rendu l’ordonnance suivante :
Vu l’ordonnance du 29 décembre 2024 du vice-président désigné par le président du tribunal judiciaire de Toulouse qui a joint les procédures, rejeté les exceptions de nullité soulevées, déclaré recevables la requête du préfet de l’Hérault et l’arrêté de placement en rétention administrative et ordonné la prolongation pour une durée de 26 jours de la rétention de M. X se disant [H] [D] sur requête de la préfecture de l’Hérault du 27 décembre 2024 et de celle de l’étranger du même jour ;
Vu l’appel interjeté par M. X se disant [H] [D] par courrier de son conseil reçu au greffe de la cour le 29 décembre 2024 à 21h21, soutenu oralement à l’audience, auquel il convient de se référer en application de l’article 455 du code de procédure civile et aux termes duquel il sollicite l’infirmation de l’ordonnance et sa remise immédiate en liberté ;
Entendu les explications fournies par l’appelant, assisté par son conseil, à l’audience du 30 décembre 2024 ;
Vu l’absence du préfet de l’Hérault, non représenté à l’audience ;
Vu l’absence du ministère public, avisé de la date d’audience, qui n’a pas formulé d’observation.
MOTIVATION
Sur la recevabilité de l’appel’:
L’appel est recevable pour avoir été interjeté dans les formes et les délais légaux.
Sur la régularité de la procédure antérieure à la rétention administrative’:
M. X se disant [H] [D] soulève in limine litis qu’il est fait référence à l’article 78-2 du code de procédure pénale dans le procès-verbal d’interpellation et à la flagrance dans le procès-verbal de saisine et mise à disposition et que le cadre de son interpellation est donc flou. De même, il estime, qu’en l’absence de décision judiciaire et de réquisition, le cadre juridique de l’expulsion est incertain.
Hors les cas de contrôles d’identité réalisés sur réquisitions du parquet, l’article 78-2 du code de procédure pénale prévoit que les officiers de police judiciaire et, sur l’ordre et sous la responsabilité de ceux-ci, les agents de police judiciaire et agents de police judiciaire adjoints mentionnés aux articles 20 et 21-1° peuvent inviter à justifier, par tout moyen, de son identité toute personne à l’égard de laquelle existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner :
-qu’elle a commis ou tenté de commettre une infraction ;
-ou qu’elle se prépare à commettre un crime ou un délit ;
-ou qu’elle est susceptible de fournir des renseignements utiles à l’enquête en cas de crime ou de délit ;
-ou qu’elle a violé les obligations ou interdictions auxquelles elle est soumise dans le cadre d’un contrôle judiciaire, d’une mesure d’assignation à résidence avec surveillance électronique, d’une peine ou d’une mesure suivie par le juge de l’application des peines;
-ou qu’elle fait l’objet de recherches ordonnées par une autorité judiciaire.
En l’espèce le contrôle d’identité de M. X se disant [H] [D] est ainsi exposé dans le procès-verbal de saisine-interpellation’:
«’A heure du présent, sommes requis pour nous transporter au [Adresse 1] à [Localité 2], pour une assistance huissier.
Sur place, prenons contact avec Madame [W], huissier de justice mandaté par les ACM, pour expulser des squatteurs dans un appartement situé au rez de chaussée de la résidence.
A l’intérieur de l’appartement, constatons la présence d’un individu.
Effectuons un contrôle d’identité sur l’individu présent dans le logement, conformément à l’article 78-2 du code de procédure pénale.
L’individu de sexe masculin, nous informe dans un français correct se nommer [Z] [S] né le 20 mars 2001 à [Localité 3], être de nationalité algérienne, être démuni de tout document d’identité sur lui.
Ayant ainsi fait apparaître sa qualité d’étranger, lui demandons de justifier de son droit de circuler ou de séjourner sur le territoire français, disposition prévue conformément à l’article L.812-1 et L.812-2 du CESEDA’».
Il apparaît donc que les services de police du commissariat de [Localité 2] ont apporté leur concours à une opération d’expulsion le 23 décembre 2024, assistant l’huissier de justice mandaté par l’office HLM de [Localité 2].
L’opération de police administrative seulement destinée à faciliter la mission de l’huissier à des fins civiles exclut tout contrôle d’identité. S’il est possible d’organiser une opération de contrôle d’identité parallèlement à cette opération administrative, elle doit alors satisfaire aux exigences du code de procédure pénale et notamment des articles 78-2 et suivants.
Or il résulte du procès verbal de saisine établi le 23 décembre à 9h20 que les fonctionnaires de police ont constaté dans un appartement la présence d’un individu et l’ont invité à justifier son identité sans que ce contrôle soit justifié au sens des articles 78-2, 78-2-1 et 78-2-2 du code de procédure pénale et notamment sans que soient caractérisées des raisons plausibles de soupçonner la commission d’une infraction. Selon ce même procès-verbal, la personne contrôlée a bien spontanément déclaré être étrangère et en situation irrégulière mais dans le cadre de contrôle d’identité et non préalablement à celui-ci, ce qui aurait pu justifier son déclenchement.
En conséquence le contrôle d’identité de M. X se disant [H] [D] est entaché d’une irrégularité.
Cette irrégularité constitue une atteinte substantielle aux droits de l’étranger qui en outre n’a pas été régularisée en ce qu’elle porte atteinte à sa liberté d’aller et venir.
Il convient donc de déclarer le contrôle d’identité nul ainsi que la procédure subséquente qui en est le prolongement direct puisque l’intéressé a été placé en garde à vue sur la base de ce contrôle.
En conséquence, et sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres moyens, l’ordonnance entreprise sera infirmée.
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Statuant, au terme de débats tenus publiquement, par ordonnance mise à disposition au greffe après avis aux parties ;
Infirmons l’ordonnance rendue par le vice-président désigné par le président de [Localité 4] le 29 décembre 2024,
Ordonnons la mainlevée de la mesure de maintien en rétention sans délai de M. X se disant [H] [D] connu sous l’identité de X se disant [G] [H],
Rappelons à M. X se disant [H] [D] connu sous l’identité de X se disant [G] [H] qu’il a l’obligation de quitter le territoire français,
Disons que la présente ordonnance sera notifiée à la préfecture de l’Hérault, service des étrangers, à M. X se disant [H] [D] connu sous X se disant [G] [H] ainsi qu’à son conseil, et communiquée au ministère public.
LA GREFFIERE LA MAGISTRATE DELEGUEE
M. POZZOBON V. BAFFET-LOZANO, conseillère.
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