L’Essentiel : Monsieur X, admis en soins psychiatriques le 17 décembre 2024, a vu sa hospitalisation prolongée par le tribunal judiciaire de Paris le 26 décembre, malgré son opposition. Son avocat a contesté cette décision, évoquant des irrégularités, notamment l’absence d’arrêté préfectoral. L’audience d’appel, tenue le 2 janvier 2025, a permis de soulever ces points. L’avocat général a défendu la légalité de la procédure, soulignant que l’absence de notification n’avait pas porté préjudice à Monsieur X. Finalement, le magistrat a confirmé le maintien de l’hospitalisation, considérant que l’état mental du patient ne lui permettait pas de consentir aux soins nécessaires.
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Admission en soins psychiatriquesMonsieur X, se présentant sous le nom de [J] [O], a été admis en soins psychiatriques le 17 décembre 2024, suite à une demande du représentant de l’État de Paris. Cette admission a été effectuée sous la forme d’une hospitalisation complète. Demande de poursuite de l’hospitalisationLe 19 décembre 2024, le préfet de police de Paris a saisi le tribunal judiciaire de Paris pour obtenir la poursuite de l’hospitalisation complète de Monsieur X. Le magistrat a ordonné le maintien de cette mesure le 26 décembre 2024, sans le consentement de l’intéressé. Appel de l’ordonnanceMonsieur X a interjeté appel de l’ordonnance le 27 décembre 2024. L’audience a eu lieu le 2 janvier 2025, où son avocat a soulevé des irrégularités dans la procédure, notamment l’absence d’arrêté préfectoral et une notification jugée irrégulière. Arguments de la défenseL’avocat de Monsieur X a soutenu que l’absence d’arrêté préfectoral violait le code de la santé publique et que la notification de l’admission était inappropriée, car le patient aurait été informé de manière contradictoire concernant son état de santé. Position de l’avocat généralL’avocat général a fait valoir que la requête du préfet était antérieure à l’établissement du certificat médical, ce qui a permis au magistrat de contrôler la régularité de la décision d’hospitalisation. Il a également noté que l’absence de notification n’avait pas causé de préjudice à Monsieur X. Évaluation médicaleUn certificat médical du 31 décembre 2024 a recommandé le maintien de l’hospitalisation complète. Les certificats médicaux ont indiqué que Monsieur X présentait des troubles mentaux nécessitant des soins, avec des idées délirantes persistantes. Conditions de maintien de l’hospitalisationLe juge a examiné si les conditions légales pour le maintien de l’hospitalisation étaient réunies, en se basant sur les certificats médicaux et l’avis d’un psychiatre. Il a conclu que Monsieur X ne pouvait pas consentir aux soins nécessaires en raison de son état mental. Décision finaleLe magistrat a déclaré l’appel recevable et a confirmé l’ordonnance de maintien de l’hospitalisation complète. Les dépens ont été laissés à la charge de l’État, et la décision a été rendue le 3 janvier 2025. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les conséquences de l’absence d’arrêté préfectoral de maintien des soins psychiatriques sans consentement ?L’absence d’arrêté préfectoral de maintien des soins psychiatriques sans consentement est régie par l’article L3213-1 II du Code de la santé publique, qui stipule que le représentant de l’État doit prendre une décision dans les trois jours suivant l’admission en soins psychiatriques. Il est important de noter que, selon l’article L. 3216-1 du même code, l’irrégularité affectant une décision administrative de soins psychiatriques sans consentement n’entraîne la mainlevée de la mesure que si elle a causé une atteinte aux droits de la personne concernée. Ainsi, le juge doit d’abord établir si l’irrégularité est avérée, puis déterminer si cette irrégularité a eu des conséquences préjudiciables pour les droits de l’intéressé. Dans le cas présent, le préfet a saisi le magistrat du siège du tribunal judiciaire dès le 19 décembre 2024, ce qui a entraîné son dessaisissement. En l’absence de grief établi de la part de Monsieur X, le moyen soulevé concernant l’absence d’arrêté préfectoral sera donc rejeté. La notification de la décision d’admission a-t-elle été effectuée conformément aux exigences légales ?L’article L. 3211-3, alinéa 3, du Code de la santé publique impose que toute personne faisant l’objet de soins psychiatriques sans consentement soit informée le plus rapidement possible de la décision d’admission et des raisons qui la motivent. Cette notification doit être adaptée à l’état de santé du patient. En l’espèce, il est mentionné que la notification a été tentée le 18 décembre 2024, mais n’a pu être réalisée en raison de l’état de santé de Monsieur X. Le certificat médical établi le même jour indique que le patient a été informé de la décision d’admission. Toutefois, l’état de santé du patient, constaté par deux personnels soignants, a été jugé incompatible avec une notification efficace. Il n’est pas démontré qu’une atteinte aux droits de Monsieur X ait résulté de cette notification irrégulière. Par conséquent, le moyen soulevé sera également rejeté. Quelles sont les conditions de poursuite de la mesure d’hospitalisation complète selon le Code de la santé publique ?Les conditions de poursuite de la mesure d’hospitalisation complète sont définies par l’article L. 3213-1 du Code de la santé publique. Cet article stipule que l’admission en soins psychiatriques sans consentement vise des personnes dont les troubles mentaux nécessitent des soins et compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte à l’ordre public. Le juge ne peut pas se substituer au médecin dans l’appréciation de l’état mental du patient, mais il doit vérifier si les troubles justifiant l’hospitalisation persistent et nécessitent des soins. Dans le cas de Monsieur X, les certificats médicaux indiquent qu’il présente des idées délirantes et une mégalomanie persistantes, rendant son consentement impossible. De plus, son comportement antérieur, qui a conduit à son interpellation, a mis en danger la sûreté des personnes. Ainsi, les conditions légales pour le maintien de la mesure d’hospitalisation complète sont réunies, et l’ordonnance critiquée est confirmée. |
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 1 – Chambre 12
SOINS PSYCHIATRIQUES SANS CONSENTEMENT
ORDONNANCE DU 03 JANVIER 2025
(n°720, 5 pages)
N° du répertoire général : N° RG 24/00720 – N° Portalis 35L7-V-B7I-CKQZL
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 26 Décembre 2024 -Tribunal Judiciaire de PARIS (Magistrat du siège) – RG n° 24/03975
L’audience a été prise au siège de la juridiction, en audience publique, le 02 Janvier 2025
Décision réputée contradictoire
COMPOSITION
Sabine RACZY, présidente de chambre à la cour d’appel, agissant sur délégation du Premier Président de la cour d’appel de Paris,
assistée de Agnès ALLARDI, greffier lors des débats et de la mise à disposition de la décision
APPELANT
Monsieur X SE DISANT [O] [J] (Personne faisant l’objet de soins)
né le 17 Juin 1983 à [Localité 6]
demeurant SDC
Actuellement hospitalisé au [3] site [7]
comparant en personne assisté de Me Nina ITZCOVITZ, avocat commis d’office au barreau de Paris,
INTIMÉ
M. LE PRÉFET DE POLICE DE PARIS
demeurant [Adresse 2]
non comparant, non représenté,
PARTIE INTERVENANTE
M. LE DIRECTEUR DU [3] SITE [7]
demeurant [Adresse 1]
non comparant, non représenté,
MINISTÈRE PUBLIC
Représenté par Madame M.-D. PERRIN, avocate générale,
Comparante,
DÉCISION
Monsieur X se disant [J] [O] a été admis le 17 décembre 2024 en soins psychiatriques sous la forme d’une hospitalisation complète sur le site [7] du [3] à [Localité 5] à la demande du représentant de l’Etat de Paris.
Par requête du 19 décembre 2024, le préfet de police de Paris a saisi le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Paris aux fins de poursuite de l’hospitalisation complète de Monsieur X se disant [J] [O].
Par ordonnance en date du 26 décembre 2024, le magistrat du siège du Tribunal Judiciaire de Paris a ordonné la poursuite de la mesure d’hospitalisation complète sans consentement de Monsieur X se disant [J] [O].
Monsieur X se disant [J] [O] a interjeté appel de cette ordonnance le
27 décembre 2024.
Les parties ont été convoquées à l’audience du 2 janvier 2025. L’audience s’est tenue au siège de la juridiction en audience publique.
L’avocat de Monsieur X se disant [J] [O] soutient que la procédure est irrégulière en raison de :
1.L’absence d’arrêté préfectoral de maintien des soins psychiatriques sans consentement, en violation de l’article L3213-1 II du code de la santé publique
2.La notification irrégulière de l’arrêté préfectoral portant admission en soins psychiatriques, le formulaire de notification mentionnant le 18 décembre 2024 que la notification était impossible en raison de l’état de santé du patient, alors que sur le certificat médical de 24h daté lui aussi du 18 décembre 2024, il est mentionné qu’il a été informé de la décision d’admission
Sur le fond, il indique que M. X se disant [J] [O] estime ne pas avoir besoin d’une mesure d’hospitalisation complète.
L’avocat général expose que la requête du préfet saisissant le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Paris est du 19/12, soit antérieurement à l’établissement du certificat médical de 72h, et qu’il s’est ainsi trouvé dessaisi à cette date au profit de l’autorité judiciaire. Il relève également que compte tenu de la diligence du préfet, le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Paris a pu contrôler rapidement la régularité et le bien-fondé de la décision d’hospitalisation. Il estime donc que M. X se disant [J] [O] n’a subi aucun grief de l’absence de décision de maintien du préfet. En ce qui concerne la notification de la décision d’admission, il relève qu’il est mentionné sur la décision qu’une notification a été tentée le 18 décembre 2024, et qu’elle n’a pu être réalisée en raison de l’état de santé de l’intéressé.
Le certificat médical de situation du 31 décembre 2024 suggère le maintien de la mesure d’hospitalisation complète.
L’office du juge judiciaire implique un contrôle relatif à la fois à la régularité de la décision administrative d’admission en soins psychiatriques sans consentement et au bien-fondé de la mesure, en se fondant sur des certificats médicaux.
Il résulte de l’article L. 3216-1 du code de la santé publique que l’irrégularité affectant une décision administrative de soins psychiatriques sans consentement n’entraîne la mainlevée de la mesure que s’il en est résulté une atteinte aux droits de la personne qui en fait l’objet. Il appartient donc au juge de rechercher, d’abord, si l’irrégularité affectant la procédure est établie, puis, dans un second temps, si de cette irrégularité résulte une atteinte aux droits de l’intéressé.
Sur l’absence d’arrêté préfectoral de maintien des soins psychiatriques sans consentement
Monsieur [J] [O] fait valoir que l’arrêté prévu dans les trois jours francs de l’hospitalisation par l’article L3213-1 II ne figure pas au dossier et ne lui a pas été notifié.
Il convient cependant de constater que le préfet de police de Paris a saisi dès le 19 décembre 2024 le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Paris aux fins de poursuite des soins psychiatriques sous la forme d’une hospitalisation complète, et qu’il s’est trouvé ainsi dessaisi au profit du magistrat judiciaire sur la décision de poursuite de la mesure d’hospitalisation. En outre, il convient de constater que M. [J] [O] n’invoque aucun grief résultant de l’absence de la décision de maintien. En l’absence d’un grief établi, le moyen sera donc rejeté.
Sur la notification de la décision d’admission
Il résulte des dispositions de l’article L. 3211-3, alinéa 3, du code de la santé publique que toute personne faisant l’objet de soins psychiatriques sans consentement est informée :
– le plus rapidement possible et d’une manière appropriée à son état, de la décision d’admission, ainsi que des raisons qui la motivent ;
– dès l’admission ou aussitôt que son état le permet, et, par la suite après chacune des décisions maintenant les soins s’il en fait la demande, de sa situation juridique, de ses droits et des voies de recours qui lui sont ouvertes.
Il est constant que le droit à l’information relève, pour la Cour européenne des droits de l’Homme, des obligations résultant de l’article 5, § 2, de la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales (CEDH, 21 févr. 1990, Van der Leer, req. n° 11509/85).
En l’espèce, il convient de constater qu’il est mentionné sur le formulaire de notification de la décision d’admission que l’état de santé de M. X se disant [J] [O] ne lui permettait pas de prendre connaissance de la décision et d’en comprendre les raisons qui la motivent. L’état de santé est constaté au vu du formulaire par deux personnels soignants, et le fait qu’il ait pu à un moment dans la journée être en mesure d’être informé par le médecin de la décision dans le certificat de 24h ne permet pas d’affirmer que son état est resté stable toute la journée. Par ailleurs, il n’est pas démontré l’existence d’un grief qui aurait été causé par l’absence de notification. Le moyen sera donc rejeté.
Sur la réunion des conditions de poursuite de la mesure au titre de l’article L.3213-1 du code de la santé publique
Aux termes de l’article L. 3213-1 du code de la santé publique, l’admission en soins psychiatriques sans consentement décidée par le représentant de l’Etat dans le département vise des personnes dont les troubles mentaux nécessitent des soins et compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l’ordre public. Il appartient au préfet de motiver ses décisions au regard de ces dispositions.
Dans l’exercice de son office, le juge ne saurait se substituer au médecin dans l’appréciation de l’état mental du patient et de son consentement aux soins (1re Civ., 27 septembre 2017, n°16-22.544). Pour autant, la motivation sur le trouble à l’ordre public ne relève pas du médecin mais du représentant de l’Etat dans le département et les articles L. 3213-1,
L. 3213-3 et R. 3213-3 du code de la santé publique n’exigent pas la mention, dans le certificat médical circonstancié qu’ils prévoient, que les troubles nécessitant des soins « compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l’ordre public», une telle qualification relevant, sous le contrôle du juge, des seuls pouvoirs du préfet, sauf à prévoir, lorsqu’un certificat conclut à la nécessité de lever une mesure, les incidences éventuelles de ces troubles sur la sûreté des personnes.
Au visa de ces textes, il appartient au juge judiciaire d’apprécier si les troubles mentaux qui ont justifié la mesure d’hospitalisation sous contrainte de Monsieur X se disant [J] [O] persistent, nécessitent des soins et sont de nature à compromettre la sûreté des personnes ou de porter atteinte de façon grave à l’ordre public.
Il résulte des certificats médicaux établis et de l’avis motivé rendu par un psychiatre de l’établissement en date du 24 décembre 2024 que Monsieur X se disant [O] [J] a été hospitalisé après avoir été interpellé par les forces de l’ordre alors qu’il faisait exploser des pétards dans la rue près du [4]. Il voulait voir le Président de la République et indiquait être le messie envoyé par Jésus. Dans son avis motivé, le médecin note la persistance d’idée délirantes et mégalomaniaques.
Le certificat de situation du 31 décembre 2024 relève que durant son hospitalisation, le patient a présenté une amélioration des troubles du comportement mais une persistance des idées délirantes de mégalomanie avec une anosognosie totale des troubles. Le tableau clinique impose la poursuite d’une hospitalisation complète continue sous mesure de contrainte pour poursuite de l’évaluation clinique et thérapeutique et mise à l’abri.
Compte-tenu de son état clinique, le patient n’est pas en mesure de consentir durablement aux soins : la mesure de contrainte doit donc être maintenue.
Il en résulte que Monsieur X se disant [J] [O] présente des troubles psychiatriques qui rendent impossible son consentement aux soins indispensables à son état, que ces soins nécessitent une hospitalisation complète et qu’il existe un risque de trouble grave à la sûreté des personnes et à l’ordre public, compte tenu également des circonstances de son interpellation sur la voie publique qui ont occasionné des blessures aux forces de l’ordre.
Il se déduit de ces circonstances que les conditions légales du maintien de la mesure sont réunies, et qu’il y a lieu de confirmer l’ordonnance critiquée.
Le magistrat délégué du premier président, statuant en dernier ressort, publiquement, par décision contradictoire mise à disposition au greffe,
DÉCLARE l’appel recevable,
CONFIRME l’ordonnance critiquée,
LAISSE les dépens à la charge de l’État.
Ordonnance rendue le 03 JANVIER 2025 par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE MAGISTRAT DÉLÉGATAIRE
Notification ou avis fait à :
X patient à l’hôpital
ou/et ‘ par LRAR à son domicile
X avocat du patient
X directeur de l’hôpital
‘ tiers par LS
X préfet de police
‘ avocat du préfet
‘ tuteur / curateur par LRAR
X Parquet près la cour d’appel de Paris
AVIS IMPORTANTS :
Je vous informe qu’en application de l’article R.3211-23 du code de la santé publique, cette ordonnance n’est pas susceptible d’opposition. La seule voie de recours ouverte aux parties est le pourvoi en cassation . Il doit être introduit dans le délai de 2 mois à compter de la présente notification, par l’intermédiaire d’un avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation.
Le pourvoi en cassation est une voie extraordinaire de recours qui exclut un nouvel examen des faits ; il a seulement pour objet de faire vérifier par la Cour de Cassation si la décision rendue est conforme aux textes législatifs en vigueur.
Ce délai est augmenté d’un mois pour les personnes qui demeurent dans un département ou territoire d’outre-mer et de deux mois pour celles qui demeurent à l’étranger.
RE’U NOTIFICATION LE :
SIGNATURE DU PATIENT :
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