Contrefaçon de pièces détachées VW : notion de primo contrefacteur

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Contrefaçon de pièces détachées VW : notion de primo contrefacteur
L’Essentiel : Un fabricant taïwanais, livrant des pièces détachées en Espagne sans lien direct avec une société française, ne peut être poursuivi pour contrefaçon en France. Bien qu’il soit au premier échelon du circuit commercial, son absence d’actes d’importation ou de commercialisation en France le protège. De plus, la mention de son nom sur les conditionnements ne prouve pas comment les pièces sont arrivées en France. En Espagne, la « clause de réparation » permet la vente de pièces non agréées, ce qui justifie la légalité de ses transactions avec la société espagnole.

Un fabricant taïwanais qui livre en Espagne des pièces détachées à une société espagnole sans être jamais en relation directe avec la société française acheteuse desdites pièces détachées contrefaisantes, ne procède à aucun acte d’importation ou de commercialisation de contrefaçons en France et ne peut donc être poursuivie.  

Impact des conditionnements sur la contrefaçon

Le fait que des cartons contenant les pièces litigieuses ou les pièces litigieuses elles-mêmes mentionnent le nom de la société taïwanaise fournit uniquement une indication sur la provenance des marchandises litigieuses mais aucune sur la manière dont elles sont arrivées en France.

Notion de primo contrefacteur

En conséquence, la circonstance que la société taïwanaise se trouve au ‘premier échelon’ du circuit commercial ayant abouti à l’importation et à la détention en vue de la vente en France des pièces litigieuses ne suffit pas pour retenir sa responsabilité, dès lors qu’elle a pu régulièrement vendre et livrer en Espagne les marchandises litigieuses à une société espagnole et qu’aucun acte d’importation ou de commercialisation en France n’est démontré à son encontre.

Compétence de la juridiction française

La juridiction française n’est compétente à l’égard d’une société basée hors de l’union européenne que pour les actes qu’elle aurait commis en France ou pour sa participation à des actes commis en France à la condition que les demandes soient liées entre elles par un rapport si étroit qu’il y a intérêt à les instruire et à les juger en même temps afin d’éviter des solutions qui pourraient être inconciliables si les causes étaient jugées séparément (article 6-1 du règlement CE n° 442001 du 22 décembre 2000 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale).

Cas spécifique de l’Espagne: la clause de réparation

L’Espagne, au contraire de la France, a introduit dans son droit interne la disposition de l’article 14 de la directive 98 71CE du 13 octobre 1998 sur la protection juridique des dessins ou modèles qui prévoit : ‘Jusqu’à la date d’adoption des modifications apportées à la présente directive, sur proposition de la Commission, conformément aux dispositions de l’article 18, les Etats membres maintiennent en vigueur leurs dispositions juridiques existantes relatives à l’utilisation du dessin ou modèle d’une pièce utilisée dans le but de permettre la réparation d’un produit complexe en vue de lui rendre son apparence initiale et n’introduisent des modifications à ces dispositions que si l’objectif en est de libéraliser le marché de ces pièces’. Cette disposition, dite ‘clause de réparation’, autorise en Espagne (ainsi que dans d’autres pays européens) la fabrication, la vente, la distribution et l’importation de pièces détachées non agréées par les constructeurs automobiles. La vente et l’importation en Espagne des marchandises litigieuses par la société taïwanaise auprès de la société espagnole entraient donc dans l’application de cette disposition.

Q/R juridiques soulevées :

Quel est le rôle du fabricant taïwanais dans la chaîne d’approvisionnement des pièces détachées ?

Le fabricant taïwanais joue un rôle crucial en tant que fournisseur de pièces détachées à une société espagnole. Cependant, il est important de noter qu’il n’a jamais eu de relation directe avec la société française qui achète ces pièces. Cela signifie qu’il ne procède à aucun acte d’importation ou de commercialisation de contrefaçons en France. Par conséquent, il ne peut pas être poursuivi pour contrefaçon, car sa responsabilité est limitée à ses transactions avec la société espagnole.

Comment les conditionnements des pièces peuvent-ils influencer la perception de la contrefaçon ?

Les conditionnements, tels que les cartons contenant les pièces litigieuses, mentionnent le nom de la société taïwanaise. Cela peut donner une indication sur la provenance des marchandises, mais cela ne fournit aucune information sur la manière dont ces pièces sont arrivées en France. Ainsi, même si le nom du fabricant est visible, cela ne prouve pas qu’il a participé à des actes de contrefaçon en France. La provenance des marchandises ne suffit pas à établir une responsabilité légale.

Qu’est-ce que la notion de primo contrefacteur implique dans ce contexte ?

La notion de primo contrefacteur se réfère à la responsabilité d’un acteur dans la chaîne d’approvisionnement qui est le premier à introduire des produits contrefaisants sur un marché. Dans le cas du fabricant taïwanais, sa position au premier échelon du circuit commercial ne suffit pas à établir sa responsabilité. Il a pu vendre et livrer légalement des marchandises en Espagne, et il n’y a aucune preuve d’importation ou de commercialisation en France. Par conséquent, sa responsabilité en tant que primo contrefacteur ne peut pas être retenue.

Quelles sont les conditions de compétence de la juridiction française concernant les sociétés basées hors de l’Union européenne ?

La juridiction française n’est compétente pour juger une société basée hors de l’Union européenne que si cette société a commis des actes en France ou a participé à des actes commis en France. De plus, il doit exister un lien étroit entre les demandes pour qu’elles soient instruites et jugées ensemble. Cela vise à éviter des décisions contradictoires si les affaires étaient jugées séparément, conformément à l’article 6-1 du règlement CE n° 442001.

Quelle est la spécificité de la clause de réparation en Espagne par rapport à la France ?

La clause de réparation en Espagne, introduite par l’article 14 de la directive 98 71CE, permet l’utilisation de dessins ou modèles pour la réparation de produits complexes. Cela signifie que les pièces détachées non agréées par les constructeurs peuvent être fabriquées, vendues et importées. Contrairement à la France, où de telles dispositions peuvent être plus restrictives, cette clause en Espagne autorise la société taïwanaise à vendre et importer des pièces litigieuses auprès de la société espagnole, ce qui est conforme à la législation locale.

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