Contrefaçon de jeu de société : nullité de l’assignation

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Contrefaçon de jeu de société : nullité de l’assignation

L’Essentiel : Les juridictions exigent une motivation précise des assignations en contrefaçon de droits d’auteur. L’éditeur d’un jeu de société doit définir, dès l’assignation, les caractéristiques originales de sa création. En l’absence d’une telle explication, le juge peut déclarer l’assignation nulle. Dans une affaire, l’éditeur a fourni une description technique sans expliciter les choix créatifs, rendant l’assignation irrecevable. De plus, le jeu n’a pas été produit en original, et la simple reproduction photographique ne permettait pas d’identifier les éléments contestés. L’absence de motivation en fait et en droit a conduit à la nullité de l’assignation.

Preuve dès le stade de l’assignation

Il semblerait que les juridictions s’attachent de plus en plus à l’exigence d’une parfaite motivation en fait et en droit des assignations en contrefaçon de droits d’auteur. Loin des exceptions tirées du non-respect des mentions de forme de l’assignation, contester la motivation d’une assignation devient un moyen de défende particulièrement efficace.

Il incombe ainsi à l’éditeur d’un jeu de société qui entend bénéficier de la protection des droits d’auteur de définir, dès le stade de l’assignation, les caractéristiques originales de sa création et qui serviront d’assiette aux droits d’auteur qu’il revendique. Si le juge de la mise en état n’a pas le pouvoir qui appartient au seul tribunal d’apprécier la suffisance de l’explication de l’objet de la demande, il est compétent pour sanctionner son inexistence par la nullité de l’assignation. En l’occurrence,  l’éditeur du jeu de société s’était livré à une description purement technique de son plateau de jeu découlant de la stricte observation objective de celui-ci, sans à aucun moment expliciter quels ont été les choix opérés par l’auteur et traduisant la personnalité de celui-ci.

Eléments de preuve insuffisants

Le jeu de société n’a pas non plus été produit aux débats en original et la seule reproduction photographique de celui-ci ne permettait de distinguer ni l’agencement précis du plateau du jeu ni les mentions portées sur ses différentes cases et encore moins la correspondance entre ses caractéristiques et celles listées à l’assignation. Le jeu argué de contrefaçon n’était donc ni décrit ni identifié dans l’assignation.

Si la protection d’une œuvre de l’esprit est acquise à son auteur sans formalité et du seul fait de la création d’une forme originale en ce sens qu’elle porte l’empreinte de la personnalité de son auteur et n’est pas la banale reprise d’un fonds commun non appropriable, il appartient à celui qui se prévaut d’un droit d’auteur dont l’existence est contestée de définir et d’expliciter les contours de l’originalité qu’il allègue puisque seul l’auteur, dont le juge ne peut suppléer la carence, est en mesure d’identifier les éléments traduisant sa personnalité et qui justifient son monopole et le principe de la contradiction posé par l’article 16 du code de procédure civile commande que le défendeur puisse connaître précisément les caractéristiques qui fondent l’atteinte qui lui est imputée et apporter la preuve qui lui incombe de l’absence d’originalité.

Assignation nulle pour défaut de motivation

De manière similaire, l’éditeur du jeu a revendiqué des droits d’auteur sur la notice du jeu sans  expliciter quelles en étaient les caractéristiques originales. Aucune comparaison n’étant opérée, l’assignation a été déclarée irrecevable. L’absence d’identification précise des créations opposées et d’explicitation des caractéristiques originales revendiquées tout comme l’absence d’identification et de description du jeu de société argué de contrefaçon ne permettait pas au supposé contrefacteur de se défendre. L’assignation n’étant ni motivée en fait ni en droit, a été déclarée nulle.

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Q/R juridiques soulevées :

Quelle est l’importance de la motivation dans une assignation en contrefaçon de droits d’auteur ?

La motivation dans une assignation en contrefaçon de droits d’auteur est cruciale, car elle permet de justifier la demande et d’expliquer les raisons pour lesquelles l’éditeur revendique ses droits. Les juridictions exigent une motivation claire tant en fait qu’en droit, ce qui signifie que l’assignation doit non seulement énoncer les faits, mais aussi les bases juridiques sur lesquelles elle repose.

En cas de contestation, une assignation mal motivée peut être déclarée nulle. Cela signifie que l’éditeur doit définir les caractéristiques originales de sa création dès le stade de l’assignation. Si cette définition est absente ou insuffisante, le juge peut sanctionner cette carence par la nullité de l’assignation, rendant ainsi la défense du supposé contrefacteur difficile, voire impossible.

Quels sont les éléments de preuve requis pour une assignation en contrefaçon ?

Pour qu’une assignation en contrefaçon soit recevable, il est essentiel de fournir des éléments de preuve suffisants. Cela inclut la production de l’œuvre originale, ainsi qu’une description détaillée de ses caractéristiques. Dans le cas d’un jeu de société, par exemple, il est nécessaire de présenter le jeu en original et de fournir des éléments visuels qui permettent de distinguer son agencement et ses spécificités.

Une simple reproduction photographique ne suffit pas, car elle ne permet pas d’identifier clairement les éléments revendiqués. L’assignation doit donc inclure une identification précise du jeu argué de contrefaçon, ainsi qu’une explication des éléments qui traduisent l’originalité de l’œuvre. Sans cela, la protection des droits d’auteur ne peut être efficacement revendiquée.

Quelles sont les conséquences d’une assignation mal motivée ?

Les conséquences d’une assignation mal motivée peuvent être sévères. Si l’assignation ne précise pas les caractéristiques originales des créations opposées, elle peut être déclarée irrecevable. Cela signifie que le supposé contrefacteur ne peut pas se défendre adéquatement, car il n’a pas accès aux informations nécessaires pour contester les accusations.

Dans le cas où l’assignation est jugée nulle, cela entraîne la perte de la possibilité de faire valoir ses droits devant le tribunal. L’absence d’identification et de description des œuvres en question empêche également le juge de se prononcer sur la validité des droits d’auteur revendiqués. En somme, une assignation mal motivée compromet gravement la capacité de l’éditeur à protéger ses créations.

Comment un éditeur peut-il éviter une assignation nulle ?

Pour éviter qu’une assignation soit déclarée nulle, un éditeur doit veiller à fournir une motivation complète et précise dès le début de la procédure. Cela implique de définir clairement les caractéristiques originales de l’œuvre, d’expliquer les choix créatifs qui la distinguent et de fournir des éléments de preuve tangibles, tels que l’œuvre originale ou des reproductions détaillées.

Il est également essentiel de comparer l’œuvre en question avec celle qui est arguée de contrefaçon, afin de démontrer les similitudes et les différences. En s’assurant que toutes ces informations sont bien documentées et présentées de manière claire, l’éditeur augmente ses chances de succès dans la protection de ses droits d’auteur et de faire valoir ses revendications devant le tribunal.


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