La perte partielle de données informatiques, même temporaire, justifie la résiliation du contrat d’infogérance aux torts exclusifs du prestataire. La sauvegarde des données ainsi que l’information du client en cas d’incident majeur constituent des obligations essentielles du contrat d’infogérance. Résiliation légitimePar lettre recommandée avec demande d’avis de réception, la société Cofegep, soutenant avoir subi des pertes de données considérables notamment en ce qui concerne son outil comptable Decisiv et dont les données d’un exercice ont été perdues, a résilié l’ensemble des contrats conclus avec la société Adealis. La perte des données est une inexécution fautive du contrat. La condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l’une des deux parties ne satisfera pas à son engagement. Dans ce cas, le contrat n’est point résolu de plein droit. La partie envers laquelle l’engagement n’a point été exécuté, a le choix ou de forcer l’autre à l’exécution de la convention lorsqu’elle est possible, ou d’en demander la résolution avec dommages et intérêts. La résolution doit être demandée en justice, et il peut être accordé au défendeur un délai selon les circonstances. Périmètre du contrat d’infogéranceLe contrat d’infogérance conclu pour une durée de 12 mois renouvelable par tacite reconduction et résiliable moyennant le respect d’un préavis de 3 mois avant son terme, avait pour objet une prestation d’assistance et de service ‘Evolutiv’IT Serenity (serveurs non hébergés ; matériel et applis sur site). Par ce contrat, la société Cofegep a délégué à la société Adealis la gestion, l’exploitation, l’optimisation et la sécurisation de son système et de son réseau informatique composé de 35 postes informatiques et de cinq serveurs, la sauvegarde des données de la société Cofegep étant réalisée dans les locaux de celle-ci. Un autre contrat d’infogérance prévoyait la redondance des serveurs. En vertu de ce contrat, la sauvegarde des données de la société Cofegep était cette fois réalisée dans le cloud de la société Adealis. Sauvegarde et restauration des données: deux obligations essentiellesPar ces contrats, la société Adealis s’était notamment engagée à assurer la sauvegarde quotidienne des données de la société Cofegep. L’obligation de sauvegarde des données que la société Adealis s’est engagée à contrôler au quotidien, et qui est commune aux deux contrats, revêtait un caractère essentiel. S’agissant de la maintenance des systèmes d’exploitation, la société Cofegep justifiait de 22 incidents de fonctionnement survenus sur une année dont elle a informé la société Adealis et auxquels celle-ci a remédié. Ces incidents, à considérer qu’ils caractérisaient une inexécution partielle du contrat, ne revêtaient pas un caractère de gravité suffisant justifiant la résiliation dudit contrat, dès lors que la société Adealis y a remédié, que ces incidents n’ont fait l’objet d’aucune mise en demeure et n’ont pas été visés dans la lettre de résiliation. S’agissant de la sauvegarde des données, un souci survenu sur cette machine virtuelle (souci électrique) a eu pour effet d’impacter négativement l’accès aux tables d’écritures comptables réelles sur un exercice comptable et d’endommager les tables référentielles de ce logiciel, de nombreuses lignes comptables n’étant plus accessibles. Les sauvegardes dossiers n’étaient donc plus à jour. Seuls 46 dossiers sur 204 dossiers étant alors récupérables dans le cadre d’une reconstruction de plate-forme vierge avec rappel des sauvegardes effectuées par la gestion des dossiers. En outre, la société Adealis ne produisait aux débats aucun rapport quotidien de sauvegarde ni aucun bordereau hebdomadaire de sauvegarde démontrant la permanence des sauvegardes de données. La perte de données subie par la société Cofegep, même temporaire, caractérise un manquement de la société Adealis à ses obligations contractuelles, dès lors que celle-ci était tenue d’assurer la sauvegarde quotidienne des données. Clause exonératoire de responsabilité écartéeLa circonstance que l’outil comptable Decisiv utilisé par la société Cofegep soit édité par la société Cegid et que les conditions générales des contrats d’infogérance stipule que la maintenance de logiciels spécifiques utilisés par le client l’est sous la responsabilité de leurs prestataires, est inopérante à exclure l’engagement de la responsabilité contractuelle de la société Adealis pour manquements à ses obligations, en particulier de sauvegarde quotidienne des données. Obligation d’information sur les incidentsEn outre, la société Adealis, qui s’était engagée à s’assurer du bon déroulement des sauvegardes journalières de données, a commis une faute en n’informant pas la société Cofegep de l’incident qui a eu pour effet d’occasionner la perte temporaire de ses données. La société Adealis a objecté vainement que cet incident présentait un caractère anodin dès lors qu’il a porté atteinte à l’intégrité des données dont elle était chargée d’assurer la sauvegarde journalière. Le manquement de la société Adealis à son obligation essentielle de sauvegarde quotidienne des données, dont elle n’a pas informé sa cliente et qui a causé à celle-ci la perte de données, a caractérisé une faute d’une gravité suffisante justifiant la résiliation des contrats d’infogérance. Télécharger la décision |
→ Questions / Réponses juridiques
Quelles sont les raisons justifiant la résiliation du contrat d’infogérance ?La résiliation du contrat d’infogérance peut être justifiée par la perte partielle de données informatiques, même si celle-ci est temporaire. Dans le cas de la société Cofegep, la perte de données concernant son outil comptable Decisiv a été considérée comme une inexécution fautive du contrat par la société Adealis. Cette situation a conduit Cofegep à résilier l’ensemble des contrats avec Adealis par lettre recommandée. La perte de données constitue une violation des obligations essentielles du contrat, notamment la sauvegarde des données et l’information du client en cas d’incident majeur. En effet, la sauvegarde des données est une obligation déterminante dans le cadre d’un contrat d’infogérance, et son manquement peut entraîner des conséquences juridiques significatives, y compris la résiliation du contrat aux torts exclusifs du prestataire. Comment se déroule la procédure de résiliation d’un contrat d’infogérance ?La résiliation d’un contrat d’infogérance doit être effectuée par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, comme l’a fait la société Cofegep. Dans ce contexte, la perte de données est considérée comme une inexécution fautive du contrat, ce qui permet à la partie lésée de demander la résolution du contrat. Il est important de noter que la résolution n’est pas automatique. La partie lésée a le choix entre exiger l’exécution du contrat ou demander sa résiliation, accompagnée de dommages et intérêts. La demande de résolution doit être faite en justice, et le tribunal peut accorder un délai au défendeur selon les circonstances. Cela souligne l’importance de suivre les procédures légales appropriées lors de la résiliation d’un contrat. Quelles sont les obligations essentielles d’un contrat d’infogérance ?Les obligations essentielles d’un contrat d’infogérance incluent la sauvegarde quotidienne des données et l’information du client en cas d’incident majeur. Dans le cas de la société Cofegep, la société Adealis avait la responsabilité de gérer, exploiter, optimiser et sécuriser le système informatique de Cofegep, ce qui incluait la sauvegarde des données. La sauvegarde des données est déterminante pour garantir la continuité des opérations et la protection des informations sensibles. Dans ce cas, Adealis a manqué à cette obligation, ce qui a conduit à la perte de données comptables importantes pour Cofegep. De plus, la société Adealis devait également fournir des rapports réguliers sur l’état des sauvegardes, ce qui n’a pas été fait. Ce manquement a contribué à la décision de Cofegep de résilier le contrat. Quelles sont les conséquences d’un manquement aux obligations contractuelles ?Un manquement aux obligations contractuelles, comme la sauvegarde des données, peut entraîner des conséquences juridiques significatives. Dans le cas de la société Adealis, le manquement à l’obligation de sauvegarde quotidienne des données a été considéré comme une faute grave, justifiant la résiliation des contrats d’infogérance. La perte de données, même temporaire, a été qualifiée d’inexécution fautive, ce qui a permis à Cofegep de demander la résiliation du contrat. En outre, la société Adealis a été tenue responsable de ne pas avoir informé Cofegep de l’incident ayant causé la perte de données. Cela souligne l’importance pour les prestataires d’infogérance de respecter leurs obligations contractuelles, car tout manquement peut entraîner des répercussions financières et juridiques, y compris des demandes de dommages et intérêts. Comment la clause exonératoire de responsabilité a-t-elle été interprétée dans ce cas ?Dans ce cas, la clause exonératoire de responsabilité stipulant que la maintenance des logiciels spécifiques est sous la responsabilité de leurs prestataires a été jugée inopérante. Bien que l’outil comptable Decisiv soit édité par la société Cegid, cela n’a pas exempté Adealis de sa responsabilité pour manquement à ses obligations contractuelles. La société Adealis était toujours tenue d’assurer la sauvegarde quotidienne des données, indépendamment des conditions générales des contrats d’infogérance. Cela démontre que les clauses exonératoires ne peuvent pas être utilisées pour échapper à des responsabilités essentielles, surtout lorsque des manquements graves ont été constatés. Ainsi, même si des tiers sont impliqués dans la fourniture de services, le prestataire d’infogérance reste responsable de la protection des données de son client. Quelles sont les implications de l’obligation d’information sur les incidents ?L’obligation d’information sur les incidents est déterminante dans un contrat d’infogérance. Dans le cas de la société Adealis, le manquement à cette obligation a été considéré comme une faute grave. Adealis n’a pas informé Cofegep de l’incident ayant causé la perte temporaire de données, ce qui a aggravé la situation. Cette obligation d’information est essentielle pour permettre au client de prendre des mesures appropriées en cas de problème. Le fait qu’Adealis ait minimisé l’incident en le qualifiant d’anodin n’a pas été accepté, car cela a eu un impact direct sur l’intégrité des données. Le non-respect de cette obligation a été un facteur déterminant dans la décision de Cofegep de résilier les contrats, soulignant l’importance de la transparence et de la communication dans les relations contractuelles. |
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