Double option contentieuse ouverte au pigisteLe pigiste privé de la présomption de contrat de travail de journaliste professionnel, peut toujours se placer sur le terrain du droit commun pour établir l’existence d’un contrat de travail. Toutefois, cette qualification suppose la preuve d’un lien de subordination. Conditions de la requalificationDans l’affaire soumise, un pigiste a collaboré avec la société Move Publishing pour le magazine Moto journal en qualité de pigiste rédacteur et à ce titre rémunéré sous forme de piges. Le volume de son activité ainsi que de sa rémunération ayant diminué sensiblement sur plusieurs années, il a, demandé à la société Move Publishing de lui fournir régulièrement du travail ou à défaut de mettre un terme à leurs relations contractuelles, demande à laquelle la société n’a pas donné suite. Par la suite, le pigiste a saisi la juridiction prud’homale d’une demande de requalification de sa relation en contrat de travail. Indépendance totale du pigistePour confirmer l’absence de contrat de travail, la Cour de cassation a considéré que le pigiste avait bénéficié d’une totale indépendance dans l’exercice de ses prestations et que le seul impératif auquel il était soumis concernait la date de réception des articles. Le pigiste pouvait ainsi rester plusieurs mois sans contacter la société Move Publishing et donc sans avoir de commande d’articles. A ce titre, il était indifférent que l’employeur ait établi des bulletins de salaire, ceux-ci étant rendus nécessaires par l’obligation faite à l’entreprise de presse de prélever diverses cotisations liées au statut de journaliste pigiste. S’agissant de l’application de la convention collective des journalistes, il convient de rappeler que sa seule application n’induit ni une présomption de salariat ni reconnaissance du statut de journaliste professionnel. Rappel sur la présomption légale de contrat de travailPour rappel, l’article L. 7112-1 du code du travail dispose que « toute convention par laquelle une entreprise de presse s’assure, moyennant rémunération, le concours d’un journaliste professionnel est présumée être un contrat de travail » ; cette présomption subsiste quels que soient le mode et le montant de la rémunération ainsi que la qualification donnée à la convention par les parties. L’article L 7111-3 du même code définit le journaliste professionnel comme étant « celui qui a pour occupation principale, régulière et rétribuée l’exercice de sa profession dans une ou plusieurs agences de presse et qui en tire le principal de ses ressources ». Il résulte de la combinaison de ces textes que seul le journaliste professionnel qui travaille pour une entreprise de presse peut revendiquer l’application des dispositions du code du travail et notamment de la présomption de salariat. En l’occurrence, le pigiste ne pouvait bénéficier de la présomption légale car ne tirant pas l’essentiel de ses ressources, de son activité de journaliste. Le pigiste n’étant pas reconnu comme un journaliste professionnel et ne bénéficiant pas d’un contrat de travail apparent, il lui appartenait donc de démontrer qu’il était lié avec l’entreprise de presse par un contrat de travail de droit commun. Il résulte des articles L.1221-1 et suivants du code du travail que le contrat de travail suppose un engagement à travailler pour le compte et sous la subordination d’autrui moyennant rémunération ; la reconnaissance d’un contrat de travail est donc conditionnée par la réunion de trois éléments : i) l’exécution d’un travail, ii) le versement d’une rémunération, iii) l’existence d’un lien de subordination. Le lien de subordination est caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné. Le pigiste ne produisait aucune pièce de nature à justifier : i) de l’existence d’instructions et de directives sur le contenu rédactionnel de ses articles données par la Société Move Publishing, le seul impératif auquel il était soumis concernait la date de réception des articles en raison des contrainte liées à la parution des publications périodiques, ii) de l’existence d’un contrôle effectif de son travail par celle-ci, iii) de l’obligation de travailler dans les locaux de l’entreprise, étant précisé que le pigiste était établi aux États-Unis, iii) de l’obligation de respecter des horaires de travail, iv) de la fourniture par la société Move Publishing du matériel et des outils nécessaires à l’accomplissement de son travail, v) de son intégration à un service organisé, étant précisé qu’il n’a jamais participé à des réunions de travail ou de rédaction, vi) du pouvoir de sanction de la société à ses éventuels manquements. Il s’ensuivait que la qualité de collaborateur permanent lié à la société Move Publishing par un contrat de travail de droit commun ne pouvait être reconnue. |
→ Questions / Réponses juridiques
Qu’est-ce qu’un pigiste et quel est son statut légal ?Un pigiste est un journaliste qui travaille de manière indépendante, souvent pour plusieurs publications, sans être lié par un contrat de travail classique. Dans le cadre de la législation française, le pigiste ne bénéficie pas de la présomption de contrat de travail de journaliste professionnel, ce qui signifie qu’il doit prouver l’existence d’un lien de subordination pour établir un contrat de travail. Cette absence de présomption implique que le pigiste doit démontrer qu’il est sous l’autorité d’un employeur, ce qui est souvent difficile à prouver. En effet, le lien de subordination est un élément clé pour la requalification d’une relation de travail, et il doit être établi par des preuves concrètes. Quelles sont les conditions nécessaires pour requalifier une relation de pigiste en contrat de travail ?Pour qu’une relation de pigiste soit requalifiée en contrat de travail, plusieurs conditions doivent être remplies. Tout d’abord, il doit y avoir une exécution d’un travail pour le compte d’un employeur. Ensuite, il doit y avoir un versement de rémunération pour ce travail. Enfin, le lien de subordination doit être clairement établi. Le lien de subordination se caractérise par l’existence d’instructions, de directives, et d’un contrôle effectif de l’employeur sur le travail du pigiste. Si le pigiste ne peut pas prouver qu’il était soumis à ces conditions, la requalification en contrat de travail ne pourra pas être accordée. Quels éléments la Cour de cassation a-t-elle pris en compte pour juger de l’indépendance du pigiste ?La Cour de cassation a examiné plusieurs éléments pour déterminer l’indépendance du pigiste dans l’affaire soumise. Elle a noté que le pigiste avait une totale liberté dans l’exercice de ses prestations, n’étant soumis qu’à la date de réception des articles. Il a été observé que le pigiste pouvait rester inactif pendant plusieurs mois sans contact avec la société Move Publishing, ce qui démontre une absence de lien de subordination. De plus, la Cour a souligné que la présence de bulletins de salaire ne suffisait pas à établir un contrat de travail, car ceux-ci étaient nécessaires pour le prélèvement des cotisations. Comment la présomption légale de contrat de travail s’applique-t-elle aux journalistes professionnels ?La présomption légale de contrat de travail, selon l’article L. 7112-1 du code du travail, stipule que toute convention entre une entreprise de presse et un journaliste professionnel est présumée être un contrat de travail. Cette présomption s’applique indépendamment du mode de rémunération ou de la qualification donnée à la convention. Cependant, pour bénéficier de cette présomption, le journaliste doit tirer l’essentiel de ses ressources de son activité de journaliste. Dans le cas du pigiste, qui ne répondait pas à cette définition, il ne pouvait pas revendiquer les protections offertes par le code du travail, ce qui a conduit à la nécessité de prouver un lien de subordination pour établir un contrat de travail. Quels sont les critères qui définissent le lien de subordination dans un contrat de travail ?Le lien de subordination dans un contrat de travail est défini par plusieurs critères. Premièrement, il doit y avoir un pouvoir de l’employeur de donner des ordres et des directives concernant le travail à réaliser. Deuxièmement, l’employeur doit avoir la capacité de contrôler l’exécution du travail et de sanctionner les manquements. Dans le cas du pigiste, il a été constaté qu’il n’existait pas d’instructions précises sur le contenu de ses articles, ni de contrôle effectif de son travail par la société Move Publishing. De plus, le pigiste n’était pas tenu de travailler dans les locaux de l’entreprise, ce qui renforce l’idée d’une indépendance totale dans l’exercice de ses fonctions. |
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