L’Essentiel : M. [E] conteste la décision de la cour d’appel qui a jugé qu’il n’était pas coauteur de l’œuvre audiovisuelle réalisée pour la société Dmax. Il soutient que sa composition musicale pour le spot publicitaire devrait lui conférer ce statut. Selon lui, la version non sonorisée ne peut être considérée comme définitive, et c’est la version intégrant sa musique qui doit être reconnue. M. [E] invoque une violation des articles L. 113-7 et L. 121-5 du code de la propriété intellectuelle, arguant que sa contribution musicale constitue une collaboration essentielle à l’œuvre audiovisuelle.
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Oeuvre de collaborationLe moyen soulevé par M. [E] concerne le fait que la cour d’appel a jugé qu’il n’était pas coauteur de l’oeuvre audiovisuelle réalisée pour le compte de la société Dmax, le rendant ainsi irrecevable à agir en atteinte de ses droits d’auteur. M. [E] conteste cette décision en arguant que la composition musicale qu’il a créée pour le spot publicitaire devrait lui conférer la qualité de coauteur de l’oeuvre. Il soutient également que la version non sonorisée du spot publicitaire ne peut être considérée comme la version définitive de l’oeuvre audiovisuelle, et que c’est la version intégrant sa composition musicale qui devrait être prise en compte. Le moyen soulève ainsi des questions de collaboration, de définition de l’oeuvre audiovisuelle et de version définitive de celle-ci. Violation de l’article L. 113-7 du code de la propriété intellectuelle1. M. [E] conteste le fait de ne pas être reconnu comme coauteur de l’oeuvre audiovisuelle réalisée pour la société Dmax. Il soutient que la décision de la cour d’appel, selon laquelle l’oeuvre initiale n’est pas une oeuvre audiovisuelle au sens de la loi, viole l’article L. 113-7 du code de la propriété intellectuelle. 2. M. [E] affirme que sa composition musicale spécialement réalisée pour le spot publicitaire devrait le présumer coauteur de l’oeuvre audiovisuelle. Il conteste le fait que son travail ait été considéré comme indépendant et non collaboratif, violant ainsi l’article L.113-7 du code de la propriété intellectuelle. Violation de l’article L. 121-5 du code de la propriété intellectuelle3. Enfin, M. [E] soutient que la cour d’appel a erronément considéré que la version non sonorisée du spot publicitaire constituait la version définitive de l’oeuvre audiovisuelle. Il affirme que la version intégrant sa composition musicale livrée en octobre 2015 aurait dû être reconnue comme l’oeuvre audiovisuelle achevée, en violation de l’article L. 121-5 du code de la propriété intellectuelle. L’oeuvre de collaboration 4. Aux termes de l’article L. 113-2 du code de la propriété intellectuelle, est dite de collaboration l’oeuvre à la création de laquelle ont concouru plusieurs personnes physiques et est dite composite l’oeuvre nouvelle à laquelle est incorporée une oeuvre préexistante sans la collaboration de l’auteur de cette dernière. 5. Une oeuvre de collaboration se caractérise par une participation concertée et une communauté d’inspiration (1re Civ., 21 mars 2018, pourvoi n° 17-14.728, Bull. 2018, I, n° 57). 6. Selon l’article L. 113-3 du même code, une oeuvre est la propriété commune des coauteurs devant exercer leurs droits d’un commun accord, tandis qu’une oeuvre composite est la propriété de l’auteur qui l’a réalisée, sous réserve des droits de l’auteur de l’oeuvre préexistante. 7. Selon l’article L. 113-7 de ce code, est présumé, sauf preuve contraire, coauteur d’une oeuvre audiovisuelle réalisée en collaboration l’auteur des compositions musicales. 8. Après avoir rappelé que l’objet de la commande de la société Dmax à la société Pause B films était la réalisation d’un film publicitaire sans musique, la cour d’appel a retenu que M. [E] ne démontrait ni même n’alléguait avoir pris part à la conception de cette oeuvre non sonorisée, qu’il justifiait d’un travail indépendant effectué sur la base de la version définitive du film préalablement réalisé et que la bande son qu’il avait créée avait été incorporée à l’oeuvre préexistante, objet de la commande, sans la collaboration de son auteur, M. [Y]. 9. Ayant ainsi écarté la présomption simple posée à l’article L. 113-7 du code de la propriété intellectuelle, elle en a exactement déduit que M. [E] n’était pas coauteur de l’oeuvre audiovisuelle sur le fondement de laquelle il agissait en contrefaçon. Les problématiques associées à cette affaire portant sur les oeuvres de collaboration : 1. Qualification de l’oeuvre comme une oeuvre audiovisuelle au sens de l’article L. 113-7 du code de la propriété intellectuelle Oeuvres de collaboration : les thématiques associéesoeuvre audiovisuelle, coauteur, composition musicale, contrefaçon Oeuvres de collaboration : les définitions à connaître– Œuvre audiovisuelle : Création artistique résultant de la combinaison d’images et de sons, destinée à être diffusée sur un support audiovisuel tel que le cinéma, la télévision ou internet. – Coauteur : Personne ayant contribué de manière originale à la création d’une œuvre, et bénéficiant ainsi de droits d’auteur sur celle-ci. – Composition musicale : Création musicale originale résultant de l’agencement de notes, de rythmes et de mélodies, pouvant être protégée par le droit d’auteur. – Contrefaçon : Utilisation non autorisée d’une œuvre protégée par le droit d’auteur, entraînant une violation des droits de l’auteur et pouvant donner lieu à des sanctions pénales et civiles. Parties impliquées dans cette affaireLes sociétés impliquées dans cette affaire sont la société Karus productions et la société Pause B films, toutes deux des sociétés à responsabilité limitée unipersonnelle. * * * REPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS CIV. 1 CF COUR DE CASSATION Audience publique du 29 mars 2023 Rejet Mme DUVAL-ARNOULD, conseiller doyen faisant fonction de président Arrêt n° 215 F-D Pourvoi n° Q 22-13.809 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 29 MARS 2023 M. [H] [E], domicilié [Adresse 3], a formé le pourvoi n° Q 22-13.809 contre l’arrêt rendu le 11 janvier 2022 par la cour d’appel de Paris (pôle 5, chambre 1), dans le litige l’opposant : 1°/ à la société Karus productions, société à responsabilité limitée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 2], 2°/ à la société Pause B films, société à responsabilité limitée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 1], défenderesses à la cassation. Le demandeur invoque, à l’appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Chevalier, conseiller, les observations de la SCP Thomas-Raquin, Le Guerer, Bouniol-Brochier, avocat de M. [E], de la SCP Melka-Prigent-Drusch, avocat de la société Karus productions, de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Pause B films, après débats en l’audience publique du 14 février 2023 où étaient présents Mme Duval-Arnould, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Chevalier, conseiller rapporteur, M. Jessel, conseiller, et Mme Tinchon, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l’arrêt attaqué (Paris, 11 janvier 2022), par un devis accepté le 22 juillet 2015, la société Dmax a commandé la réalisation d’un film de communication non sonorisé à la société Pause B films, laquelle en a confié la rédaction du scénario et la réalisation à M. [Y], gérant de la société Karus productions. La société Dmax ayant souhaité que la composition de la musique du film soit confiée à M. [E], l’oeuvre audiovisuelle a été réalisée en octobre 2015. 2. M. [E], ayant constaté qu’une version modifiée de cette oeuvre intégrant une autre bande sonore que la sienne était diffusée sans son autorisation, notamment sur les sites internet des sociétés Pause B films et Karus productions, a assigné ces sociétés en contrefaçon de droit d’auteur. Examen du moyen Enoncé du moyen 3. M. [E] fait grief à l’arrêt de dire qu’il n’est pas coauteur de l’oeuvre audiovisuelle réalisée pour le compte de la société Dmax, de le dire en conséquence irrecevable à agir en atteinte de ses droits d’auteur et de le débouter de l’ensemble de ses demandes indemnitaires sur le fondement du « 1°/ que constitue une oeuvre audiovisuelle les séquences animées d’images sonorisées ou non ; qu’en retenant en l’espèce que « l’oeuvre initiale, qui est une oeuvre de commande d’un film publicitaire non sonorisée, n’est en conséquence pas une oeuvre audiovisuelle au sens de l’article L. 113-7 » du code de la propriété intellectuelle ; la cour d’appel a violé l’article L. 112-2 6° du code de la propriété intellectuelle ; 2°/ que constitue une oeuvre audiovisuelle, les séquences animées d’images, sonorisées ou non ; qu’est présumé, sauf preuve contraire, coauteur d’une oeuvre audiovisuelle réalisée en collaboration, l’auteur des compositions musicales spécialement réalisées pour l’oeuvre ; qu’en déniant 3°/ qu’une oeuvre audiovisuelle est réputée achevée lorsque sa version définitive a été établie d’un commun accord entre, d’une part, le réalisateur ou, éventuellement, les coauteurs et, d’autre part, le producteur et toute modification de cette version par addition, suppression ou changement d’un Réponse de la Cour 4. Aux termes de l’article L. 113-2 du code de la propriété intellectuelle, est dite de collaboration l’oeuvre à la création de laquelle ont concouru plusieurs personnes physiques et est dite composite l’oeuvre nouvelle à laquelle est incorporée une oeuvre préexistante sans la collaboration de l’auteur de cette dernière. 5. Une oeuvre de collaboration se caractérise par une participation concertée et une communauté d’inspiration (1re Civ., 21 mars 2018, pourvoi n° 17-14.728, Bull. 2018, I, n° 57). 6. Selon l’article L. 113-3 du même code, une oeuvre est la propriété commune des coauteurs devant exercer leurs droits d’un commun accord, tandis qu’une oeuvre composite est la propriété de l’auteur qui l’a réalisée, sous réserve des droits de l’auteur de l’oeuvre préexistante. 7. Selon l’article L. 113-7 de ce code, est présumé, sauf preuve contraire, coauteur d’une oeuvre audiovisuelle réalisée en collaboration l’auteur des compositions musicales. 8. Après avoir rappelé que l’objet de la commande de la société Dmax à la société Pause B films était la réalisation d’un film publicitaire sans musique, la cour d’appel a retenu que M. [E] ne démontrait ni même n’alléguait avoir pris part à la conception de cette oeuvre non sonorisée, qu’il justifiait d’un travail indépendant effectué sur la base de la version définitive du film préalablement réalisé et que la bande son qu’il avait créée avait été incorporée à l’oeuvre préexistante, objet de la commande, sans la collaboration de son auteur, M. [Y]. 9. Ayant ainsi écarté la présomption simple posée à l’article L. 113-7 du code de la propriété intellectuelle, elle en a exactement déduit que M. [E] n’était pas coauteur de l’oeuvre audiovisuelle sur le fondement de laquelle il agissait en contrefaçon. 10. Il s’ensuit que le moyen, inopérant en sa première branche, n’est pas fondé pour le surplus. |
Q/R juridiques soulevées :
Quel est le principal argument de M. [E] concernant son statut de coauteur ?M. [E] conteste la décision de la cour d’appel qui a jugé qu’il n’était pas coauteur de l’œuvre audiovisuelle réalisée pour la société Dmax. Il soutient que sa composition musicale, créée spécifiquement pour le spot publicitaire, devrait lui conférer la qualité de coauteur. Il argue que la version non sonorisée du spot ne peut pas être considérée comme la version définitive de l’œuvre audiovisuelle. Pour lui, c’est la version intégrant sa composition musicale qui doit être prise en compte, soulevant ainsi des questions sur la nature de la collaboration et la définition de l’œuvre audiovisuelle. Comment M. [E] justifie-t-il la violation de l’article L. 113-7 du code de la propriété intellectuelle ?M. [E] affirme que la cour d’appel a violé l’article L. 113-7 du code de la propriété intellectuelle en ne le reconnaissant pas comme coauteur de l’œuvre audiovisuelle. Il soutient que sa composition musicale, réalisée pour le spot publicitaire, devrait le présumer coauteur. Il conteste également que son travail ait été considéré comme indépendant, arguant qu’il a collaboré à la création de l’œuvre. En ne tenant pas compte de sa contribution, la cour aurait ainsi méconnu les dispositions de l’article L. 113-7, qui présume la qualité de coauteur pour les auteurs de compositions musicales dans le cadre d’œuvres audiovisuelles réalisées en collaboration. Quelle est la position de M. [E] sur la version définitive de l’œuvre audiovisuelle ?M. [E] soutient que la cour d’appel a erronément considéré que la version non sonorisée du spot publicitaire était la version définitive de l’œuvre audiovisuelle. Il affirme que la version intégrant sa composition musicale, livrée en octobre 2015, aurait dû être reconnue comme l’œuvre audiovisuelle achevée. Cette position est en contradiction avec l’affirmation de la cour, qui a retenu que la version non sonorisée était la version définitive. M. [E] argue que la reconnaissance de sa version comme définitive aurait des implications sur ses droits d’auteur et sur la nature de l’œuvre en tant que collaboration. Quelles sont les caractéristiques d’une œuvre de collaboration selon le code de la propriété intellectuelle ?Selon l’article L. 113-2 du code de la propriété intellectuelle, une œuvre de collaboration est celle à la création de laquelle ont contribué plusieurs personnes physiques. Elle se distingue d’une œuvre composite, qui est une œuvre nouvelle incorporant une œuvre préexistante sans la collaboration de l’auteur de cette dernière. Une œuvre de collaboration se caractérise par une participation concertée et une communauté d’inspiration, comme l’indique la jurisprudence. Les coauteurs d’une œuvre de collaboration exercent leurs droits d’un commun accord, tandis que l’œuvre composite appartient à l’auteur qui l’a réalisée, sous réserve des droits de l’auteur de l’œuvre préexistante. Comment la cour d’appel a-t-elle justifié sa décision concernant M. [E] ?La cour d’appel a justifié sa décision en rappelant que la commande de la société Dmax à la société Pause B films était pour un film publicitaire sans musique. Elle a conclu que M. [E] ne prouvait pas avoir participé à la conception de cette œuvre non sonorisée. La cour a également noté que M. [E] avait réalisé un travail indépendant basé sur une version définitive préalablement réalisée, et que sa bande sonore avait été intégrée à l’œuvre préexistante sans collaboration avec son auteur, M. [Y]. En écartant la présomption de coauteur posée par l’article L. 113-7, la cour a déduit que M. [E] n’était pas coauteur de l’œuvre audiovisuelle. Quelles sont les implications de cette affaire sur les droits d’auteur ?Cette affaire soulève des questions importantes sur les droits d’auteur, notamment en ce qui concerne la qualification d’une œuvre comme audiovisuelle et le statut de coauteur. La décision de la cour d’appel a des implications sur la reconnaissance des contributions créatives dans le cadre de collaborations artistiques. Elle met en lumière la nécessité de clarifier les rôles et les contributions des différents créateurs dans le processus de création d’une œuvre. Les décisions judiciaires dans ce domaine peuvent influencer la manière dont les droits d’auteur sont appliqués et interprétés, affectant ainsi les relations entre les artistes et les producteurs. |
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