Constitutionnalité des procédures simplifiées et droits de la défense

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Constitutionnalité des procédures simplifiées et droits de la défense

L’Essentiel : Le demandeur soulève une question prioritaire de constitutionnalité sur la conformité des articles 525 et 526, alinéa 2, du code de procédure pénale. Le tribunal de police reformule la question pour examiner si ces articles portent atteinte aux droits de la défense et au principe du contradictoire. Bien que les dispositions soient applicables à la procédure en cours, la question n’est pas nouvelle et ne présente pas de caractère sérieux. La Cour de cassation conclut qu’un renvoi au Conseil constitutionnel n’est pas nécessaire, estimant que les dispositions critiquées garantissent une bonne administration de la justice.

Présentation de la question prioritaire de constitutionnalité

Le demandeur soulève une question prioritaire de constitutionnalité concernant la conformité de l’article 525 du code de procédure pénale, qui permet au ministère public de soumettre un dossier au juge du tribunal de police pour une décision sans débat préalable, ainsi que de l’alinéa 2 de l’article 526, qui stipule que le juge n’est pas tenu de motiver son ordonnance pénale.

Reformulation par le tribunal de police

Le tribunal de police reformule la question en se demandant si les articles 525 et 526, alinéa 2, portent atteinte aux droits et libertés garantis par l’article 61-1 de la Constitution.

Conditions de reformulation

La reformulation de la question par le juge est permise tant qu’elle ne modifie pas l’objet et la portée de la question initiale.

Libellé final de la question

La question est finalement libellée pour examiner si les articles 525 et 526, alinéa 2, violent les droits de la défense, le principe du contradictoire et l’obligation de motivation des jugements, en référence aux articles 7, 8, 9 et 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789.

Applicabilité des dispositions législatives contestées

Les dispositions législatives en question sont applicables à la procédure en cours et n’ont pas été déclarées conformes à la Constitution par le Conseil constitutionnel dans une décision antérieure.

Caractère non nouveau de la question

La question posée n’est pas nouvelle, car elle ne concerne pas l’interprétation d’une disposition constitutionnelle que le Conseil constitutionnel n’aurait pas encore eu l’occasion d’appliquer.

Absence de caractère sérieux de la question

La question ne présente pas un caractère sérieux, car les dispositions critiquées permettent une bonne administration de la justice et garantissent au contrevenant le droit à un recours juridictionnel effectif, respectant le principe du contradictoire et les droits de la défense.

Décision de la Cour de cassation

En conséquence, la Cour de cassation décide de ne pas renvoyer la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel, concluant ainsi à l’absence de nécessité d’un tel renvoi.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la portée de l’article 525 du code de procédure pénale en matière de procédure simplifiée ?

L’article 525 du code de procédure pénale, modifié par la Loi n° 72-5 du 5 janvier 1972, stipule que :

« Le ministère public qui choisit la procédure simplifiée communique au juge du tribunal de police le dossier de la poursuite et ses réquisitions.

Le juge statue sans débat préalable par une ordonnance pénale portant soit relaxe, soit condamnation à une amende.

S’il estime qu’un débat contradictoire est utile ou que des sanctions autres que l’amende devraient être éventuellement prononcées, le juge renvoie le dossier au ministère public aux fins de poursuite dans les formes de la procédure ordinaire. »

Cet article permet donc au ministère public de soumettre un litige à une procédure simplifiée, ce qui peut soulever des questions quant à la protection des droits de la défense.

En effet, la possibilité pour le juge de statuer sans débat préalable peut être perçue comme une atteinte au principe du contradictoire, qui est fondamental dans le cadre d’un procès équitable.

Il est donc essentiel d’examiner si cette procédure respecte les droits garantis par la Constitution et les principes fondamentaux du droit.

Quelles sont les implications de l’alinéa 2 de l’article 526 du code de procédure pénale ?

L’alinéa 2 de l’article 526 du code de procédure pénale, modifié par la Loi n° 2004-204 du 9 mars 2004, dispose que :

« Le juge n’est pas tenu de motiver l’ordonnance pénale. »

Cette disposition soulève des interrogations quant à l’obligation de motivation des décisions judiciaires, qui est un principe fondamental du droit français.

La motivation des décisions est essentielle pour garantir la transparence et la compréhension des décisions de justice par les justiciables.

L’absence de motivation peut ainsi être perçue comme une violation des droits de la défense et du droit à un procès équitable.

Il est donc crucial d’évaluer si cette absence de motivation dans le cadre d’une ordonnance pénale respecte les droits et libertés garantis par la Constitution et les conventions internationales.

Les articles 525 et 526 portent-ils atteinte aux droits garantis par la Constitution ?

La question posée est de savoir si les articles 525 et 526, alinéa 2, du code de procédure pénale portent atteinte aux droits et libertés garantis par l’article 61-1 de la Constitution.

Il est important de rappeler que l’article 61-1 de la Constitution permet de soulever une question prioritaire de constitutionnalité lorsque des dispositions législatives sont susceptibles de porter atteinte aux droits et libertés garantis.

Dans ce cas, les articles contestés sont critiqués pour leur impact sur les droits de la défense, le principe du contradictoire et l’obligation de motivation des jugements.

Cependant, la Cour a estimé que ces dispositions répondent à l’objectif de valeur constitutionnelle d’une bonne administration de la justice.

Le contrevenant a la possibilité de former opposition à la décision du juge, ce qui lui garantit un recours juridictionnel effectif.

Ainsi, la Cour a conclu qu’il n’y avait pas lieu de renvoyer la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel, considérant que les garanties offertes par la procédure simplifiée étaient équivalentes à celles d’une procédure ordinaire.

N° M 24-90.013 F-D

N° 01518

19 NOVEMBRE 2024

SL2

QPC PRINCIPALE : NON LIEU À RENVOI AU CC

M. BONNAL président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 19 NOVEMBRE 2024

Le tribunal de police de Grasse, par jugement en date du 8 décembre 2023, reçu le 2 septembre 2024 à la Cour de cassation, a transmis une question prioritaire de constitutionnalité dans la procédure suivie contre la société Cabinet Draillard en qualité de redevable pécuniairement de l’amende encourue du chef d’excès de vitesse.

Des observations ont été produites.

Sur le rapport de M. Leblanc, conseiller référendaire, et les conclusions de M. Aubert, avocat général référendaire, après débats en l’audience publique du 19 novembre 2024 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Leblanc, conseiller rapporteur, M. Sottet, conseiller de la chambre, et Mme Lavaud, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l’article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

1. La question prioritaire de constitutionnalité, telle que présentée dans son mémoire par le demandeur, est ainsi rédigée :

« En application des dispositions de l’article 61-1 de la Constitution et de la loi organique n°2009-1523 du 10 décembre 2009, le demandeur a l’honneur de soulever la double question prioritaire de constitutionnalité relative à la constitutionnalité de :

1°/ l’article 525 du code de procédure pénale, modifié par la Loi n° 72-5 du 5 janvier 1972, aux termes duquel il est prévu que le ministère public qui choisit la procédure simplifiée communique au juge du tribunal de police le dossier de la poursuite et ses réquisitions », que le juge statue sans débat préalable par une ordonnance pénale portant soit relaxe, soit condamnation à une amende », et que s’il estime qu’un débat contradictoire est utile ou que des sanctions autres que l’amende devraient être éventuellement prononcées, le juge renvoie le dossier au ministère public aux fins de poursuite dans les formes de la procédure ordinaire » ;

2°/ de l’alinéa 2 de l’article 526 du code de procédure pénale, modifié par la Loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 mais identique dans sa rédaction aux versions antérieures, aux termes duquel il est prévu que le juge n’est pas tenu de motiver l’ordonnance pénale ».»

2. La question prioritaire de constitutionnalité, telle que reformulée par le tribunal de police, est ainsi rédigée :

« Les articles 525 et 526, alinéa 2, du code de procédure pénale portent-ils atteinte aux droits et libertés garantis par l’article 61-1 de la Constitution ? ».

3. Si la question peut être reformulée par le juge à effet de la rendre plus claire ou de lui restituer son exacte qualification, c’est à la condition de ne pas en modifier l’objet et la portée.

4. Il y a donc lieu de considérer, au regard des énonciations du mémoire spécial, que la question est ainsi libellée :

« Les articles 525 et 526, alinéa 2, du code de procédure pénale portent-ils atteinte aux droits et libertés garantis par les articles 7, 8, 9 et 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, en ce qu’ils violent les droits de la défense, le principe du contradictoire et l’obligation de motivation des jugements et arrêts de condamnation ? ».

5. Les dispositions législatives contestées sont applicables à la procédure et n’ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif d’une décision du Conseil constitutionnel.

6. La question, ne portant pas sur l’interprétation d’une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n’aurait pas encore eu l’occasion de faire application, n’est pas nouvelle.

7. La question posée ne présente pas un caractère sérieux, dès lors que les dispositions légales critiquées, qui permettent au ministère public de soumettre le litige à la procédure simplifiée de l’ordonnance pénale, répondent à l’objectif de valeur constitutionnelle d’une bonne administration de la justice sans priver le contrevenant, qui peut former opposition à la décision du juge, du droit à un recours juridictionnel effectif, respectant le principe du contradictoire et les droits de la défense, sur lequel il sera statué par décision motivée, offrant ainsi au justiciable des garanties équivalentes à celles dont il aurait bénéficié lors de poursuites par voie de citation directe.

8. En conséquence, il n’y a pas lieu de renvoyer la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

DIT N’Y AVOIR LIEU DE RENVOYER au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en audience publique du dix-neuf novembre deux mille vingt-quatre.


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