Fixation de la date de consolidation en matière de maladie professionnelle et ses implications financières

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Fixation de la date de consolidation en matière de maladie professionnelle et ses implications financières

L’Essentiel : Le 18 septembre 2013, M. [C] [D] a déclaré une glomérulonéphrite extra-membraneuse comme maladie professionnelle, entraînant deux greffes de rein. Après un jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale en 2017, la caisse a reconnu la pathologie et a fixé la date de consolidation au 4 décembre 2017, attribuant un taux d’incapacité de 80%. Contestant cette décision, M. [C] [D] a saisi le tribunal en 2018, qui a ordonné une expertise. En 2022, la cour d’appel a fixé la date de consolidation au 26 avril 1993, condamnant la caisse à ajuster la rente et à couvrir les frais d’expertise.

Contexte de la maladie professionnelle

Le 18 septembre 2013, M. [C] [D] a déclaré une maladie professionnelle, spécifiquement une glomérulonéphrite extra-membraneuse ayant nécessité deux greffes de rein, auprès de la caisse primaire d’assurance maladie des Yvelines. Cette déclaration était accompagnée d’un certificat médical daté du 21 septembre 2013.

Décisions de la caisse et du tribunal

Suite à un jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale le 7 septembre 2017, qui a reconnu le caractère professionnel de la pathologie, la caisse a pris en charge l’affection de l’assuré par une décision du 20 octobre 2017. Le 9 février 2018, la caisse a fixé la date de consolidation de l’assuré avec séquelles indemnisables au 4 décembre 2017, et le 30 avril 2018, elle a attribué un taux d’incapacité permanente partielle de 80% ainsi qu’une rente annuelle.

Contestation et expertise

Après le rejet de sa contestation amiable, M. [C] [D] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale le 10 juillet 2018 pour contester divers aspects de la décision de la caisse. Le tribunal a rendu un jugement le 27 juin 2019, ordonnant une expertise médicale pour déterminer la date de consolidation de l’état de santé de l’assuré. Le rapport de l’expert a été déposé le 6 mai 2021.

Jugement du pôle social

Le 14 septembre 2021, le tribunal a fixé la date de consolidation au 22 avril 2013 et a invité la caisse à ajuster le montant de la rente. Les deux parties ont interjeté appel de ce jugement.

Arrêt de la cour d’appel

Le 10 novembre 2022, la cour a infirmé le jugement précédent, annulé l’expertise réalisée et ordonné une nouvelle expertise. Cette dernière a été effectuée par un expert en néphrologie, qui a fixé la date de consolidation au 26 avril 1993, date de la première séance de dialyse de l’assuré.

Conclusion et décisions finales

La cour a décidé de fixer la date de consolidation de l’état de santé de M. [C] [D] au 26 avril 1993, en lien avec sa maladie. La caisse a été condamnée à ajuster le calcul et le paiement de la rente due à l’assuré, ainsi qu’à couvrir les dépens d’appel. Les frais d’expertise technique seront pris en charge par la caisse nationale de l’assurance maladie.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la définition de la date de consolidation selon le code de la sécurité sociale ?

La date de consolidation est définie par l’article L. 442-6 du code de la sécurité sociale. Cet article stipule que la caisse fixe la date de la consolidation de la blessure d’après l’avis du médecin traitant ou, en cas de désaccord, d’après l’avis émis par l’expert.

La date de consolidation s’entend du moment où l’état de la victime est stabilisé définitivement et n’est plus susceptible d’amélioration, même s’il subsiste encore des troubles.

Elle correspond au moment où la lésion se fixe et prend un caractère permanent, sinon définitif, tel qu’un traitement n’est plus, en principe, nécessaire, si ce n’est pour éviter une aggravation.

Quelles sont les conséquences de la fixation de la date de consolidation sur le paiement de la rente ?

La fixation de la date de consolidation a des conséquences directes sur le calcul et le paiement de la rente due à l’assuré. Selon l’arrêt du 10 novembre 2022, la caisse primaire d’assurance maladie des Yvelines doit tirer toutes les conséquences quant au calcul et au versement de la rente due à M. [C] [D].

Cela signifie que si la date de consolidation est fixée au 26 avril 1993, la caisse doit recalculer la rente en tenant compte de cette date, ce qui pourrait entraîner un paiement rétroactif pour la période antérieure à la date de première constatation médicale.

L’article L. 142-11 du code de la sécurité sociale précise également que les frais résultant de l’expertise technique sont pris en charge par la caisse nationale de l’assurance maladie, ce qui souligne l’importance de l’expertise dans la détermination des droits à indemnisation.

Quels sont les droits de l’assuré en cas de contestation des décisions de la caisse ?

L’assuré a le droit de contester les décisions de la caisse, comme le stipule l’article L. 142-1 du code de la sécurité sociale. Cet article permet à l’assuré de saisir le tribunal des affaires de sécurité sociale pour contester les décisions relatives à la reconnaissance de la maladie professionnelle, au taux d’incapacité, et aux modalités de calcul de la rente.

Dans le cas présent, M. [C] [D] a exercé ce droit en saisissant le tribunal pour contester les modalités de calcul de sa rente et la date de consolidation.

Le tribunal a alors ordonné une expertise médicale pour déterminer la date de consolidation, ce qui est un droit fondamental de l’assuré pour faire valoir ses droits à indemnisation.

Quelles sont les obligations de la caisse en matière d’expertise médicale ?

Les obligations de la caisse en matière d’expertise médicale sont clairement définies dans les articles R. 141-1 et suivants du code de la sécurité sociale. Ces articles stipulent que la caisse doit désigner un médecin expert pour examiner l’assuré et établir un rapport sur son état de santé.

L’expert doit procéder à l’examen dans un délai de cinq jours suivant la réception du protocole et établir des conclusions motivées dans un délai maximum de quarante-huit heures.

Le rapport doit être remis au greffe dans un délai d’un mois, et la caisse doit transmettre une copie de ce rapport à l’assuré et au service du contrôle médical.

Ces dispositions garantissent que l’expertise est réalisée de manière rapide et efficace, permettant ainsi à l’assuré de bénéficier d’une évaluation juste de son état de santé et de ses droits à indemnisation.

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 89A

Ch.protection sociale 4-7

ARRÊT N°

RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE

DU 09 JANVIER 2025

N° RG 24/00103 – N° Portalis DBV3-V-B7I-WI5I

AFFAIRE :

[C] [F] [W] [D]

C/

CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DES YVELINES

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 14 Septembre 2021 par le pôle social du tribunal judiciaire de VErsailles

N° RG : 18/01017

Copies exécutoires délivrées à :

Me Mylène BARRERE

M. [D]

Copies certifiées conformes délivrées à :

M. [D]

CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DES YVELINES

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE NEUF JANVIER DEUX MILLE VINGT CINQ,

La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Monsieur [C] [F] [W] [D]

[Adresse 1]

[Localité 3]

représenté par Mme [T] [N] [J] ÉPOUSE [D] (Conjoint) en vertu d’un pouvoir général

APPELANT

****************

CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DES YVELINES

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 2]

non comparante, ni représentée

Ayant pour avocate Me Mylène BARRERE, avocate au barreau de PARIS

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 23 Octobre 2024, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Charlotte MASQUART, conseillère chargée d’instruire l’affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Marie-Bénédicte JACQUET, conseillère, faisant fonction de présidente,

Madame Aurélie PRACHE, présidente de chambre,

Madame Charlotte MASQUART, conseillère,

Greffière, lors des débats et du prononcé : Madame Juliette DUPONT,

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 18 septembre 2013, M. [C] [D] (l’assuré) a souscrit auprès de la caisse primaire d’assurance maladie des Yvelines (la caisse) une déclaration de maladie professionnelle pour une ‘glomérulonéphrite extra membraneuse ayant entraîné deux greffes de rein’, accompagnée d’un certificat médical initial du 21 septembre 2013.

Après jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale du 7 septembre 2017 constatant le caractère professionnel de la pathologie déclarée par l’assuré, la caisse a pris en charge son affection au titre de la législation sur les risques professionnels, par décision du 20 octobre 2017.

Par décision du 9 février 2018, la caisse a fixé la date de consolidation de l’assuré avec séquelles indemnisables au 4 décembre 2017.

Par décision du 30 avril 2018, la caisse a fixé un taux d’incapacité permanente partielle à hauteur de 80% et a attribué à l’assuré une rente annuelle d’un montant de 12 964,01 euros, et ce à compter du 5 décembre 2017.

Sa contestation amiable ayant été rejetée, l’assuré a saisi, le 10 juillet 2018, le tribunal des affaires de sécurité sociale, devenu le pôle social du tribunal judiciaire de Versailles aux fins de contester ‘les modalités de calcul, le calcul de la rente, la décision et les modalités de paiement et le point de départ de l’indemnisation de la maladie professionnelle’.

Par jugement du 27 juin 2019, le tribunal a :

– déclaré irrecevables les demandes de l’assuré de révision de son taux d’incapacité permanente partielle et de reconnaissance de la faute inexcusable de son dernier employeur ;

– constaté que la caisse avait fait droit à la demande de l’assuré et que la date de première constatation médicale de sa maladie professionnelle devait être fixée au 10 octobre 1990 ;

– déclaré recevable la demande de l’assuré relative à la fixation de sa date de consolidation ;

– avant dire droit, ordonné une expertise médicale technique avec pour mission donnée à l’expert de dire si l’état de l’assuré en lien avec sa pathologie ‘insuffisance rénale glomérulonéphrite extra-membraneuse et greffe rénale 12/1993-04/2013″ pouvait être considéré comme consolidée au 21 septembre 2013 ou au 4 décembre 2017 et dans la négative dire à quelle date l’état de l’assuré est consolidé.

Le Professeur [V], désigné en qualité d’expert, a déposé son rapport le 6 mai 2021.

Par jugement du 14 septembre 2021 (RG n°18/01017), le pôle social du tribunal judiciaire de Versailles a :

– fixé la date de consolidation de la maladie professionnelle dont est atteint l’assuré au 22 avril 2013 ;

– invité la caisse à en tirer toutes conséquences quant au montant de la rente due à l’assuré ;

– dit qu’il appartiendra aux parties de saisir éventuellement le tribunal en cas de contestation portant sur le calcul de la rente ;

– condamné la caisse aux entiers dépens.

L’assuré et la caisse ont interjeté appel du jugement.

Par arrêt du 10 novembre 2022, la cour a :

– ordonné la jonction, sous le numéro de RG 21/02943, des procédures enregistrées sous les numéros de 21/02943 et 21/02985;

– infirmé en toutes ses dispositions le jugement entrepris ;

– annulé l’expertise médicale technique ordonnée par jugement du 10 mai 2019 et réalisée par le professeur [V] ;

– ordonné une expertise médicale technique sur le fondement de l’article R. 142-17-1, I, du code de la sécurité sociale ;

– dit que cette expertise sera effectuée conformément aux dispositions des articles R. 141-1 et suivants du même code, dans leur rédaction issue du décret n° 2010-344 du 31 mars 2010, applicable au litige ;

– fixé comme suit la mission de l’expert :

– prendre connaissance des pièces communiquées par l’assuré, M. [C] [D] , et le service du contrôle médical fonctionnant auprès de la caisse primaire d’assurance maladie des Yvelines ;

– procéder à un examen clinique de l’assuré, après avoir informé celui-ci des lieu, date et heure de l’examen, ainsi que le médecin traitant et le médecin conseil qui peuvent assister à l’expertise ;

– déterminer la date de consolidation de l’état de santé de M. [C] [D] relative à la maladie professionnelle déclarée, la glomérulonéphrite extra membraneuse ;

– rappelé :

– que le médecin expert sera désigné conformément aux dispositions des articles R. 141-1 et R. 141-2 du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction susvisée ;

– qu’il devra procéder à l’examen de l’assuré dans les cinq jours suivant la réception du protocole qui lui sera adressé par la caisse primaire d’assurance maladie des Yvelines ;

– qu’il devra immédiatement établir des conclusions motivées en double exemplaire et adresser, dans un délai maximum de quarante-huit heures, l’un des exemplaires au médecin traitant et à la caisse intéressée ;

– que le rapport du médecin expert comporte : le rappel du protocole mentionné ci-dessus, l’exposé des constatations qu’il a faites au cours de son examen, la discussion des points qui lui ont été soumis et ses conclusions motivées ;

– que le médecin expert devra remettre son rapport au greffe dans le délai d’un mois à compter de la date de réception de la demande d’expertise qui lui a été adressée par la caisse primaire d’assurance maladie des Yvelines ;

– que le greffe transmettra, au plus tard dans les quarante-huit heures suivant sa réception, copie dudit rapport au service du contrôle médical de la caisse dont la décision est contestée ainsi qu’à l’assuré ;

– dit que le nom de l’expert ainsi désigné sera communiqué à la cour d’appel de céans par la partie la plus diligente ;

– rappelé que, par application des dispositions de l’article L.142-11 du code de la sécurité sociale, les frais résultant de l’expertise technique ainsi ordonnée sont pris en charge par la Caisse nationale de l’assurance maladie, et ce dès l’accomplissement par ledit expert de sa mission ;

– réservé les dépens ;

– dit que l’affaire sera radiée du rôle des affaires en cours et qu’elle sera enrôlée à nouveau à l’initiative des parties ou à la diligence de la cour, à réception du rapport d’expertise technique.

L’expert a établi son rapport le 23 décembre 2023.

L’affaire a été plaidée à l’audience du 23 octobre 2024.

La caisse, bien que régulièrement convoquée, n’a pas comparu ni personne en son nom.

Mme [T] [D], représentant son époux, munie d’un pouvoir à cet effet, demande à la cour d’entériner les conclusions de l’expert, qui a fixé la date de consolidation de l’état de santé de son époux au 26 avril 1993.

Elle demande à la caisse d’en tirer les conséquences en ce qui concerne le paiement de la rente due sur la période du 26 avril 1993 au 3 décembre 2017, date à laquelle il a bénéficié d’une rente.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Selon l’article L. 442-6 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige, la caisse fixe la date de la consolidation de la blessure d’après l’avis du médecin traitant ou, en cas de désaccord, d’après l’avis émis par l’expert.

La date de consolidation s’entend du moment où l’état de la victime est stabilisé définitivement et n’est plus susceptible d’amélioration, même s’il subsiste encore des troubles. Elle correspond au moment où la lésion se fixe et prend un caractère permanent, sinon définitif, tel qu’un traitement n’est plus, en principe nécessaire, si ce n’est pour éviter une aggravation.

Le professeur [X] [R], expert en néphrologie et transplantation rénale, désigné en qualité de médecin expert en application de l’article L.141-1 du code de la sécurité sociale, a examiné la victime le 22 décembre 2023 et a fixé la date de consolidation au 26 avril 1993, date de la première séance de dyalise pour insuffisance rénale terminale.

Le professeur [R] précise que la ‘lors de la mise en dyalise, les lésions rénales étaient permanentes et définitives. Aucun traitement ne pouvait modifier les lésions rénales. La dyalise et la greffe rénale sont des traitements de suppléance de l’insuffisance rénale terminale, elle-même fixée au 26 avril 1993′.

Ces conclusions sont claires et dépourvues d’ambiguïté’; elles ne sont contestées par aucune pièce médicale ni aucun document.

Il convient donc de fixer au 26 avril 1993, la date de consolidation de l’état de santé de la victime, en lien avec la maladie, ‘glomérulonéphrite extra membraneuse’.

La caisse sera condamnée à en tirer les conséquences quant au calcul et au paiement de la rente versée à la victime.

La caisse sera également condamnée aux dépens d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement et par arrêt réputé contradictoire,

Vu l’arrêt du 10 novembre 2022,

Fixe à la date du 26 avril 1993 la consolidation de l’état de santé de M. [C] [D] en lien avec la maladie ‘glomérulonéphrite extra membraneuse’, prise en charge par la caisse primaire d’assurance maladie des Yvelines, par décision du 20 octobre 2017 ;

Dit que la caisse primaire d’assurance maladie des Yvelines devra en tirer toutes les conséquences quant au calcul et au versement de la rente due à M. [C] [D] ;

Condamne la caisse primaire d’assurance maladie des Yvelines aux dépens de première instance et d’appel ;

Rappelle que, par application des dispositions de l’article L. 142-11 du code de la sécurité sociale, les frais résultant de l’expertise technique sont pris en charge par la caisse nationale de l’assurance maladie.

Prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Marie-Bénédicte JACQUET, conseillère, faisant fonction de présidente, et par Madame Juliette DUPONT, greffière, à laquelle la magistrate signataire a rendu la minute.

La greffière La conseillère


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