Conseil d’État, 8 novembre 2017
Conseil d’État, 8 novembre 2017

Type de juridiction : Conseil d’Etat

Juridiction : Conseil d’État

Thématique : Église de Scientologie : l’accès aux données de l’ENM

Résumé

L’Église de Scientologie a sollicité l’École nationale de la magistrature (ENM) pour obtenir des données sur les formations relatives aux dérives sectaires, incluant les noms des intervenants et des participants. Le Conseil d’État a rejeté cette demande, considérant qu’elle risquait de porter atteinte à la vie privée. La Commission d’accès aux documents administratifs (CADA) a également émis un avis défavorable concernant la communication des identités, soulignant que la divulgation pourrait compromettre la sécurité des personnes. L’ENM a donc légitimement refusé de transmettre ces informations, protégeant ainsi l’intégrité des participants et la sécurité publique.

Formations sur les dérives sectaires

D’aucuns s’interrogeaient sur les motivations de l’Église de Scientologie qui a demandé à l’École nationale de la magistrature (ENM) la communication des noms des intervenants au sein de formations sur les dérives sectaires, ainsi que de ceux des inscrits et participants à ces formations. Tentative d’intimidation ou simple exercice d’un droit de communication, l’Église de Scientologie a été déboutée par le Conseil d’État.

Nature des données demandées

L’Église de Scientologie avait demandé à l’ENM un nombre important de documents : les programmes des sessions de formation relatives aux mouvements sectaires de 1998 à 2012, sans occultation des noms des intervenants mais également, la liste annuelle des inscrits et participants à ces sessions, les bulletins d’inscription remplis par ces derniers, les exposés, synthèses, rapports, comptes-rendus ou notes produits par les intervenants pour ces sessions, ainsi que la copie de toutes les correspondances échangées entre l’ENM et la Mission interministérielle de lutte contre les sectes (Mils), la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes) et le ministère de la justice entre 1998 et 2012.

Avis négatif de la CADA

Saisie pour avis, la Commission d’accès aux documents administratifs (CADA) avait  rendu un avis défavorable à la communication de l’identité des intervenants, des listes des inscrits et participants et des bulletins d’inscription mais un avis favorable à la communication des autres documents demandés. A la suite de cet avis, l’ENM avait communiqué à l’Église de Scientologie un petit nombre de documents.

Risque d’atteinte à la vie privée

Aux termes de l’article L. 311-6 du code des relations entre le public et l’administration, ne sont communicables qu’à l’intéressé les documents administratifs dont la communication porterait atteinte à la protection de la vie privée. Le risque d’atteinte à la vie privée que comporte la communication d’un document administratif s’apprécie au regard du seul contenu de ce document. Eu égard aux principes régissant l’accès aux documents administratifs, qui n’est pas subordonné à un intérêt établi, les motifs pour lesquels une personne demande la communication d’un document administratif sont en effet sans incidence sur sa communicabilité.

L’Église de Scientologie indiquait vouloir utiliser ces documents pour mettre en cause l’impartialité des magistrats ayant participé à ces formations et statuant dans des affaires impliquant l’Église de scientologie. Or, la communicabilité des documents demandés n’était  pas conditionnée à l’utilisation qu’envisageait d’en faire l’Église de Scientologie. Seul doit être pris en considération le risque d’atteinte à la vie privée et ce risque était réel en l’espèce.

Eu égard à l’objet des formations dispensées par l’ENM, la divulgation de l’identité tant des intervenants au sein des formations que de ceux des inscrits et participants à celles-ci serait de nature à porter atteinte à la sécurité publique ou à la sécurité des personnes. Il s’ensuit que l’ENM a pu légalement refuser de communiquer  les noms des intervenants, des inscrits et des participants sans qu’il y ait lieu de distinguer, parmi ces derniers, les magistrats des autres personnes.

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