Conseil d’Etat, 5 février 2020
Conseil d’Etat, 5 février 2020

Type de juridiction : Conseil d’Etat

Juridiction : Conseil d’Etat

Thématique : BFM TV c/ TF1

Résumé

La société TF1 n’est plus contrainte de proposer des offres couplées pour la commercialisation de ses espaces publicitaires sur la TNT. Elle peut désormais promouvoir les programmes de LCI et diffuser des messages publicitaires à cet effet. En 2015, L’ARCOM avait imposé des restrictions pour éviter que TF1 n’utilise sa position dominante pour favoriser LCI au détriment de ses concurrents. Cependant, L’ARCOM a récemment jugé que ces interdictions n’étaient plus nécessaires, arguant que leur suppression ne nuirait pas au développement des services concurrents, notamment en raison des audiences élevées de TF1 lors d’événements sportifs majeurs.

La société TF1 n’est plus dans l’obligation de proposer des offres couplées, pures ou mixtes, dans la commercialisation des espaces publicitaires des services de TNT.  TF1 pourra également procéder à la promotion des programmes du service LCI et diffuser des messages publicitaires destinés à promouvoir les programmes de ce service.

BFM et NextRadioTV

Les sociétés BFM
et NextRadioTV ont saisi sans succès le Conseil d’Etat pour faire annuler la
décision de l’ARCOM de ne pas reconduire ces interdictions faites à TF1 lors du
déploiement de la TNT. En 2015, l’ARCOM avait agrée la modification des
modalités de financement du service La Chaîne Info (LCI), en subordonnant cet
agrément à plusieurs modifications des conventions annexées aux autorisations
dont bénéficient les services Télévision française 1 (TF1) et LCI. Au nombre de
ces modifications, figurant trois obligations: i) la société TF1
s’interdisait de subordonner la commercialisation des espaces publicitaires du
service TF1 à l’achat d’espaces publicitaires du service LCI (pratique dite du
 » couplage pur « ) ou d’accorder un avantage quelconque aux annonceurs
qui achètent les espaces publicitaires de LCI (pratique dite du  » couplage
mixte « ) ; ii) la société LCI s’interdisait de pratiquer le couplage pur
entre la commercialisation de ses espaces publicitaires et ceux des autres
services de télévision dont les espaces sont commercialisés par la régie
publicitaire du groupe TF1 ; iii) la
société TF1 s’interdisait toute promotion croisée des programmes du service LCI
sur le service TF1 et toute diffusion de message publicitaire destiné à
promouvoir les programmes de ce service.

L’interdiction des pratiques de couplage

L’interdiction
des pratiques de couplage de vente d’espaces publicitaires et de promotion
croisée dont était assorti l’agrément délivré à la société LCI était motivée
par le risque que la société TF1 et, s’agissant du couplage avec les espaces
publicitaires des autres chaînes commercialisés par la régie publicitaire du
groupe TF1, cette régie, n’utilisent leur position sur le marché de la
publicité télévisuelle pour avantager le service LCI dans des conditions de
nature à évincer de ce marché les services concurrents de LCI.

La nouvelle
position de l’ARCOM se fonde, d’une part, sur le fait que l’interdiction du
couplage de vente d’espaces publicitaires ne constituait plus une mesure
nécessaire et, d’autre part, sur ce que, s’agissant de l’interdiction de
promotion des programmes de LCI sur le service TF1, seule sa suppression avant
le 31 août 2018 aurait été de nature à entraver le développement des services
concurrents de LCI, en raison des fortes audiences dont le service TF1
bénéficierait à l’occasion de la Coupe du monde de football qui devait se
dérouler en juillet 2018.

Des chiffres mitigés 

En l’état du droit, le groupe TF1 constitue un acteur prépondérant sur le marché de la publicité télévisuelle compte tenu de sa part de marché et de l’avantage que constitue la détention de cinq services de télévision gratuits.. Au sein de ce groupe, le service TF1 lui-même, qui constitue l’élément le plus attractif dans le cadre d’une offre publicitaire groupée, a connu depuis plusieurs années une érosion sensible de sa part de marché, qui s’est poursuivie entre 2015 et 2017, alors que celle de son premier concurrent, le groupe Métropole Télévision (M6), s’est maintenue sensiblement au même niveau.

Si la part d’audience du service LCI a progressé à la suite de la modification des modalités de son financement, cette progression est restée modeste et s’est interrompue en 2018. Si le nombre d’annonceurs recourant aux espaces publicitaires de LCI a nettement augmenté à compter de 2016, l’équilibre économique du service s’est détérioré dans la mesure où les recettes publicitaires perçues n’ont pas compensé les pertes consécutives au changement de modalités de financement. A l’inverse, le service BFM TV et, dans une moindre mesure, le service L’Equipe, principaux concurrents de LCI, ont enregistré une croissance sensible de leur chiffre d’affaires et une amélioration de leur résultat net.

S’agissant de la promotion croisée des programmes de LCI par le service TF1, rendue à nouveau possible à compter du 31 août 2018, les parts d’audience que le service TF1 est susceptible de réaliser à compter de cette date, notamment à l’occasion d’évènements sportifs importants, ne sont pas comparables aux pics d’audience liés à la diffusion des matchs de la Coupe du monde de football de 2018. Si, au-delà du 31 août 2018 et donc au-delà de cet événement, LCI est susceptible de retirer un avantage de la promotion de ses programmes par le service TF1, plusieurs services concurrents, dont BFM TV, sont exploités au sein de groupes qui peuvent recourir à la promotion croisée à l’occasion de programmes recueillant une forte audience et sont, ainsi, susceptibles de faire bénéficier leur chaîne d’information d’un avantage comparable. Enfin, il n’était pas établi que la promotion pratiquée par TF1 au profit du service LCI aurait un impact majeur et durable sur l’audience de ce dernier service. Télécharger la décision

 


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