Conseil d’État, 13 mai 2019
Conseil d’État, 13 mai 2019

Type de juridiction : Conseil d’État

Juridiction : Conseil d’État

Thématique : Traitement des affaires judiciaires : FTV mise en demeure

Résumé

Le Conseil d’État a confirmé la mise en demeure de L’ARCOM à l’encontre de France Télévisions pour son traitement d’une affaire judiciaire en cours. L’émission « Envoyé spécial » a été critiquée pour avoir accordé trop de crédit à la partie civile, créant un reportage déséquilibré centré sur les accusations contre l’accusé. Cette diffusion, survenue peu après l’audition de la partie civile, a été jugée contraire aux obligations de la chaîne, notamment en ce qui concerne la présomption d’innocence et le respect des procédures judiciaires. France Télévisions doit veiller à un traitement rigoureux et mesuré des affaires en cours.

Mise en demeure de l’ARCOM

Le Conseil d’État a confirmé la mise en demeure de l’ARCOM adressée à France Télévisions. En cause, l’absence de mesure dans l’évocation d’une procédure juridictionnelle criminelle en cours et de vigilance dans le traitement des procédures judiciaires.

Obligations de France Télévisions

Aux termes de l’article 35 du cahier des charges de la société France Télévisions (décret du 23 juin 2009), la diffusion d’émissions, d’images, de propos ou de documents relatifs à des procédures judiciaires ou à des faits susceptibles de donner lieu à une information judiciaire nécessite qu’une attention particulière soit apportée d’une part au respect de la présomption d’innocence, c’est-à-dire qu’une personne non encore jugée ne soit pas présentée comme coupable, d’autre part au secret de la vie privée et enfin à l’anonymat des mineurs délinquants.

La société doit ainsi veiller, dans la présentation des décisions de justice, à ce que ne soient pas commentées les décisions juridictionnelles dans des conditions de nature à porter atteinte à l’autorité de la justice ou à son indépendance. Lorsqu’une procédure judiciaire en cours est évoquée à l’antenne, la société doit veiller, dans le traitement global de l’affaire, à ce que : i) l’affaire soit traitée avec mesure, rigueur et honnêteté ; ii) le traitement de l’affaire ne constitue pas une entrave caractérisée à cette procédure ; iii) le pluralisme soit assuré par la présentation des différentes thèses en présence, en veillant notamment à ce que les parties en cause ou leurs représentants soient mis en mesure de faire connaître leur point de vue.

Accusations et présomption d’innocence

En l’espèce, l’émission « Envoyé spécial »  évoquait les difficultés rencontrées par une femme qui avait porté plainte contre un supérieur hiérarchique pour viol ou agression sexuelle, des faits également dénoncés par deux employées de mairie, qui avaient donné lieu à des poursuites pénales pour viol contre le maire de la commune dont la procédure est en cours devant la Cour d’assises.

l’ARCOM a estimé que le crédit accordé à la partie civile, les déclarations des témoins interrogés et les commentaires hors champ concouraient à l’établissement d’un reportage déséquilibré, essentiellement centré sur les charges retenues contre l’accusé, traduisant un défaut de mesure dans l’évocation d’une procédure judiciaire criminelle en cours. En outre, la séquence avait été diffusée quelques heures seulement après l’audition devant la cour d’assises de la partie civile concernée et avant que le jury ne délibère.

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