L’Essentiel : M. et Mme [S] ont assigné le syndicat des copropriétaires en raison d’un empiétement causé par des travaux réalisés par M. [L] sur son lot. Le tribunal a ordonné un bornage et, après expertise, a condamné le syndicat à démolir les constructions empiétant sur leur propriété et à verser des dommages et intérêts. En appel, la cour a confirmé l’empiétement, ordonné la démolition partielle et la suppression des vues sur la propriété des époux [S], tout en allouant 3 000 euros pour préjudice de jouissance. Les frais de procédure ont été à la charge de M. [L] et du syndicat.
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Propriétés et ContexteM. et Mme [S] possèdent une parcelle à [Adresse 2] à [Localité 10], où se trouve leur maison avec jardin. Le fonds adjacent, situé à [Adresse 1], est en copropriété, dont M. [L] est propriétaire des lots n°8 et 13 depuis 2013. En 2014, M. [L] a réalisé des travaux sur le lot n°13. Conflit et AssignationM. et Mme [S] ont estimé que les travaux de M. [L] avaient causé un empiétement sur leur propriété. Ils ont donc assigné le syndicat des copropriétaires le 11 mars 2016 pour désigner un géomètre expert en vue d’un bornage. Le juge a accepté leur demande le 24 mai 2016, désignant M. [M] pour l’arpentage. Expertise et RapportLes opérations d’expertise ont été élargies le 12 juin 2018 pour inclure d’autres propriétaires. Le 19 mars 2019, le juge a demandé à l’expert de définir l’empiétement causé par M. [L]. Le rapport d’expertise a été déposé le 31 mars 2020. Jugement du TribunalLe 21 avril 2022, le tribunal judiciaire de Versailles a condamné le syndicat des copropriétaires à démolir les constructions empiétant sur la propriété de M. et Mme [S], à supprimer les vues sur leur propriété, et à verser des dommages et intérêts. Les demandes d’astreinte et de reconstruction de clôture ont été rejetées. Appels et Tentatives de MédiationLe syndicat des copropriétaires et M. [L] ont interjeté appel de cette décision en mai 2022. Une tentative de médiation ordonnée le 5 octobre 2023 a échoué. Conclusions des PartiesLe syndicat des copropriétaires a demandé l’infirmation du jugement, arguant que l’expert n’avait pas procédé au bornage et que les travaux avaient été réalisés par M. [L]. M. [L] a également contesté le jugement, soutenant qu’il n’avait pas modifié la limite de propriété. Décisions de la CourLa cour a confirmé l’existence d’un empiétement et a ordonné la démolition de la construction empiétant sur le fonds des époux [S]. Elle a infirmé la décision concernant la démolition de la partie en étage, considérant qu’il n’y avait pas eu de surélévation en violation de la servitude de cour commune. Suppression des Vues et Préjudice de JouissanceLa cour a confirmé la suppression des vues droites et obliques sur la propriété des époux [S], ordonnant à M. [L] de les remplacer par des fenêtres opaques. Elle a également confirmé l’allocation de 3 000 euros pour préjudice de jouissance, tout en rejetant les demandes supplémentaires des époux [S]. Frais de Procédure et Demandes AccessoiresM. [L] et le syndicat des copropriétaires ont été condamnés aux dépens de la procédure d’appel et à verser 3 000 euros aux époux [S] au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Les autres demandes des parties ont été rejetées. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la nature de l’empiétement constaté par l’expert judiciaire ?L’empiétement constaté par l’expert judiciaire, M. [H], a été évalué à 2,6 m². Ce dernier a établi que le bâtiment existant ne correspondait pas à l’état descriptif de division de copropriété, ce qui a conduit le tribunal à conclure à l’existence d’un empiétement sur le fonds des époux [S]. L’article 545 du Code civil stipule que « nul ne peut être contraint de céder sa propriété, si ce n’est pour cause d’utilité publique, et sous la condition d’une juste et préalable indemnité ». Ainsi, l’empiétement, qui constitue une atteinte à la propriété des époux [S], doit être traité conformément aux règles de la propriété et des servitudes. Il est également important de noter que l’article 678 du Code civil précise que « tout propriétaire peut faire établir un bornage de ses propriétés ». Cela signifie que les époux [S] ont le droit de demander un bornage pour clarifier les limites de leur propriété et faire cesser l’empiétement. Quelles sont les conséquences juridiques de la violation de la servitude de cour commune ?La violation de la servitude de cour commune, qui a été établie par un acte notarié, entraîne des conséquences juridiques significatives. En vertu de l’article 1221 du Code civil, « le débiteur est tenu d’exécuter son obligation ». Dans ce cas, M. [L] a été condamné à démolir la partie de la construction qui a été édifiée en violation de cette servitude. L’article 679 du Code civil précise que « le propriétaire d’un fonds servant ne peut, sans le consentement du propriétaire du fonds dominant, faire des ouvrages qui augmentent la servitude ». Cela signifie que M. [L] ne pouvait pas surélever le bâtiment sans l’accord des époux [S], ce qui constitue une violation de la servitude. En conséquence, le tribunal a ordonné la démolition de la partie de la construction en étage à l’extrémité nord du bâtiment, car elle a été édifiée en violation de la servitude de cour commune de 21 m². Comment le tribunal a-t-il évalué le préjudice de jouissance des époux [S] ?Le tribunal a évalué le préjudice de jouissance des époux [S] à 3 000 euros, en tenant compte des constatations faites par un commissaire de justice. L’article 1240 du Code civil stipule que « tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ». Les époux [S] ont soutenu que la vue directe sur leur jardin, résultant des travaux de M. [L], leur causait un préjudice. Cependant, la cour a noté que la végétation séparant les deux propriétés masquait en grande partie cette vue, ce qui a conduit à relativiser le préjudice. L’article 700 du Code de procédure civile permet également d’accorder une indemnité pour couvrir les frais irrépétibles, ce qui a été appliqué dans ce cas pour condamner M. [L] et le syndicat des copropriétaires à verser une somme supplémentaire aux époux [S]. Quelles sont les implications de la décision de la cour concernant la démolition de l’empiétement ?La décision de la cour concernant la démolition de l’empiétement a des implications importantes pour les parties concernées. En effet, la cour a infirmé le jugement de première instance qui ordonnait la démolition de la partie de la construction ainsi que la tuyauterie empiétant sur le fonds des époux [S]. L’article 564 du Code de procédure civile stipule que « le juge peut ordonner la démolition d’un ouvrage qui a été construit en violation des règles d’urbanisme ». Cependant, la cour a jugé que la démolition de l’empiétement de 2,6 m² était disproportionnée par rapport à la nature de l’infraction. Ainsi, la cour a condamné M. [L] à garantir le syndicat des copropriétaires des frais qu’il pourrait devoir supporter au titre de la démolition de cet empiétement, ce qui souligne la responsabilité de M. [L] dans cette affaire. Quelles sont les conséquences de la décision de la cour sur les frais de procédure ?La décision de la cour a également des conséquences sur les frais de procédure. En vertu de l’article 700 du Code de procédure civile, la cour a condamné in solidum M. [L] et le syndicat des copropriétaires à payer aux époux [S] la somme de 3 000 euros pour couvrir les frais irrépétibles. De plus, la cour a rejeté la demande de M. [L] visant à être dispensé de participer aux frais de procédure, ce qui signifie qu’il devra supporter sa part des frais liés à cette instance. L’article 246 du Code de procédure civile précise que « les dépens comprennent les frais de l’expertise judiciaire ainsi que les dépens des procédures de référés afférentes au présent litige ». Cela implique que les parties devront assumer les frais engagés durant toute la procédure, ce qui peut avoir un impact financier significatif sur M. [L] et le syndicat des copropriétaires. |
DE
VERSAILLES
Chambre civile 1-1
ARRÊT N°
CONTRADICTOIRE
Code nac : 70D
DU 19 NOVEMBRE 2024
N° RG 22/03381
N° Portalis DBV3-V-B7G-VGQB
AFFAIRE :
SDC [Adresse 1] ET [Adresse 7] [Localité 10]
C/
[U] [F] épouse [S]
…
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 21 Avril 2022 par le Tribunal Judiciaire de VERSAILLES
N° Chambre :
N° Section :
N° RG :21/02702
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
-la SELASU ANNE-LAURE DUMEAU,
-Me Marie-Hélène DANCKAERT,
-Me Christophe DEBRAY
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE DIX NEUF NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT QUATRE,
La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
SDC [Adresse 1] ET [Adresse 7]
prise en la personne de son syndic, le cabinet FONCIA GIV, sis [Adresse 6]
[Adresse 1] et [Adresse 7]
[Localité 10]
représenté par Me Anne-laure DUMEAU de la SELASU ANNE-LAURE DUMEAU, avocat postulant – barreau de VERSAILLES, vestiaire : 628
Me Catherine FRANCESCHI de la SELEURL FRANCESCHI AVOCAT, avocat – barreau de PARIS, vestiaire : C1525
APPELANTE
****************
Madame [U] [F] épouse [S]
née le 28 Octobre 1939 à [Localité 8]
de nationalité Française
et
Monsieur [W], [D], [A] [S]
né le 30 Juin 1935 à [Localité 9]
de nationalité Française
demeurant tous deux[Adresse 2]
[Localité 10]
représentés par Me Marie-Hélène DANCKAERT, avocat – barreau de VERSAILLES, vestiaire : 520
Monsieur [C] [L]
[Adresse 1]
[Localité 10]
représenté par Me Christophe DEBRAY, avocat postulant – barreau de VERSAILLES, vestiaire : 627 – N° du dossier 22222
Me Karine ALTMANN de la SELEURL AL-TITUDE, avocat – barreau de PARIS, vestiaire : E2070
INTIMÉS
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 23 Septembre 2024 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Pascale CARIOU, Conseillère chargée du rapport et Madame Sixtine DU CREST, Conseillère.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Anna MANES, Présidente,
Madame Pascale CARIOU, Conseillère,
Madame Sixtine DU CREST, Conseillère,
Greffier, lors des débats : Madame Natacha BOURGUEIL,
M. et Mme [S] sont propriétaires d’une parcelle située au [Adresse 2] à [Localité 10], cadastrée Section AD [Cadastre 4], sur laquelle est implantée une maison d’habitation avec jardin. Le fonds attenant, situé [Adresse 1], cadastré Section AD [Cadastre 5], est organisé sous le régime de la copropriété. M. [L] est propriétaire des lots n°8 et 13 au sein de cette copropriété qu’il a acquis en 2013.
En 2014, M. [L] a entrepris des travaux portant sur le lot n°13.
Estimant que ces travaux avaient conduit à un empiétement sur leur propriété, M. et Mme [S] ont, par exploit du 11 mars 2016, fait assigner le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] et [Adresse 7] (ci-après le syndicat des copropriétaires) afin de voir désigner un géomètre expert chargé de réaliser un bornage.
Par ordonnance du 24 mai 2016, le juge a fait droit à leur demande en désignant M. [M] pour procéder à l’arpentage des terrains des parties et en définir les limites séparatives.
Par ordonnance rendue le 12 juin 2018, les opérations d’expertise ont été déclarées communes aux consorts [T] – [V], propriétaires du fonds sis au [Adresse 3] et à M. [L]. M. [H] a été désigné en remplacement de M. [M].
Par une ordonnance du 19 mars 2019, le juge des référés a étendu la mission de l’expert en lui demandant de définir l’empiétement de la construction de M. [L] suite aux travaux que celui-ci a entrepris sur son lot et d’indiquer s’il existe des vues droites et obliques du [Adresse 1] sur la propriété de M. et Mme [S].
Le rapport d’expertise a été déposé le 31 mars 2020.
Par actes des 14 et 15 avril 2021, les époux [S] ont fait assigner le syndicat des copropriétaires et M. [L] devant le tribunal judiciaire de Versailles aux fins de voir condamner le premier à démolir la construction qui empiéterait sur leur construction.
Par jugement réputé contradictoire rendu le 21 avril 2022, le tribunal judiciaire de Versailles a :
– condamné le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] et [Adresse 7] à [Localité 10], représenté par son syndic, l’agence Hisyndic, à démolir la partie de la construction du bâtiment ainsi que la tuyauterie empiétant sur le fonds des époux [S], sis à [Adresse 11], cadastré Section AD [Cadastre 4], tel que cet empiétement est constaté par l’expert judiciaire, dans son rapport du 31 mars 2020, et ce dans un délai de six mois à compter de la signification du présent jugement,
– condamné le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] et [Adresse 7] à [Localité 10], représenté par son syndic, l’agence Hisyndic, à démolir la partie de construction en étage à l’extrémité nord du bâtiment qui a été édifiée en violation de la servitude de cour commune de 21m², tel que figurée sur le plan de l’expert judiciaire dans son rapport du 31 mars 2020, et ce dans un délai de six mois à compter de la signification du présent jugement,
– condamné le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] et [Adresse 7] à [Localité 10], représenté par son syndic, l’agence Hisyndic, à supprimer toutes les vues droites et obliques donnant sur la propriété des époux [S], telles que constatées par l’expert judiciaire, dans son rapport du 31 mars 2020, dans un délai de six mois à compter de la signification du présent jugement,
– rejeté la demande des époux [S] visant à assortir ces condamnations d’une astreinte,
– rejeté la demande des époux [S] portant sur la reconstruction de la clôture,
– condamné le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] et [Adresse 7] à [Localité 10], représenté par son syndic, l’agence Hisyndic, et M. [L] in solidum à payer aux époux [S] la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts,
– condamné le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] et [Adresse 7] à [Localité 10], représenté par son syndic, l’agence Hisyndic, et M. [L] in solidum à payer aux époux [S] la somme de 3 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– rejeté la demande de M. [L] au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] et [Adresse 7] à [Localité 10], représenté par son syndic, l’agence Hisyndic, et M. [L] in solidum à payer les dépens incluant les frais de l’expertise judiciaire ainsi que les dépens des procédures de référés afférentes au présent litige,
– débouté les parties du surplus de leurs demandes.
Par déclaration d’appel du 19 mai 2022, le syndicat des copropriétaires a interjeté appel de cette décision à l’encontre des époux [S] et de M. [L]. Le dossier a été enregistré sous le RG n°22/03381.
Par déclaration d’appel du 27 mai 2022, M. [L] a également interjeté appel de cette décision, à l’encontre de M. [W] [S] et de Mme [U] [F], épouse [S] et du syndicat des copropriétaires des [Adresse 1] et [Adresse 7]. Le dossier a été enregistré sous le RG n° 22/03582.
Par ordonnance de jonction du 23 mars 2023, le conseiller de la mise en état a joint les deux dossiers sous le RG n°22/03381.
Une tentative de médiation, ordonnée le 5 octobre 2023, a échoué.
Par dernières conclusions notifiées le 15 juillet 2024, le syndicat des copropriétaires demande à la cour de :
Vu les dispositions de l’article 544 du code civil,
Vu les dispositions des articles 122 et suivants du code de procédure civile,
Vu les dispositions des articles 334 et suivants du code de procédure civile,
Vu les dispositions de l’article 9 du code de procédure civile,
Vu les dispositions de l’article 564 du code de procédure civile,
Vu les dispositions de l’article 32 du code de procédure civile,
Vu les dispositions de l’article 1221 du code civil,
Vu les dispositions de l’article 1383 du code civil,
– le déclarer recevable et bien fondé en son appel,
Y faisant droit :
– infirmer le jugement rendu en ce qu’il :
* l’a condamné à démolir la partie de la construction du bâtiment ainsi que la tuyauterie empiétant sur le fonds des époux [S], sis à [Adresse 11], cadastré Section AD [Cadastre 4], tel que cet empiétement est constaté par l’expert judiciaire, dans son rapport du 31 mars 2020, et ce dans un délai de six mois à compter de la signification du présent jugement,
* l’a condamné à démolir la partie de construction en étage à l’extrémité nord du bâtiment qui a été édifiée en violation de la servitude de cour commune de 21m2, tel que figurée sur le plan de l’expert judiciaire dans son rapport du 31 mars 2020, et ce dans un délai de six mois à compter de la signification du présent jugement,
* l’a condamné à supprimer toutes les vues droites et obliques donnant sur la propriété des époux [S], telles que constatées par l’expert judiciaire, dans son rapport du 31 mars 2020, dans un délai de six mois à compter de la signification du présent jugement,
* l’a condamné, in solidum avec M. [L], à payer aux époux [S] la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts, outre la somme de 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Statuant à nouveau :
– déclarer les époux [S] irrecevables en toutes leurs demandes dirigées à son encontre,
– débouter les époux [S] de toutes leurs demandes, fins et prétentions,
A titre subsidiaire :
– dire et juger qu’il ne peut procéder à la démolition de l’empiétement,
– dire et juger que la démolition ordonnée est disproportionnée,
– dire et juger qu’il ne peut procéder à la suppression des vues droites et obliques créées par M. [L],
En conséquence :
– condamner M. [L] à leur verser une compensation financière au titre de l’empiétement,
– condamner M. [L] à procéder à l’installation de ‘ jours de souffrance ‘ afin de mettre un terme aux vues droites et obliques,
En tout état de cause :
– ordonner que la démolition de l’empiétement et la suppression des vues droites et obliques ordonnées le soient aux frais exclusifs de M. [L],
– condamner M. [L] à le garantir de toutes condamnations principales et accessoires qui interviendraient à son encontre, sans aucune reconnaissance de responsabilité,
– condamner solidairement les époux [S] et M. [L] à lui verser la somme de 10 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner solidairement les époux [S] et M. [L] aux entiers dépens de l’instance.
Par dernières conclusions notifiées le 13 juin 2024, M. [W] [S] et Mme [U] [F] épouse [S] demandent à la cour de :
– confirmer le jugement rendu en ce qu’il a :
* ordonné la démolition de la partie de la construction du bâtiment ainsi que la tuyauterie empiétant sur leur fonds, tel que cet empiétement est constaté par l’expert judiciaire dans son rapport du 31 mars 2020 et dans un délai de six mois à compter de la signification du jugement,
* ordonné la démolition de la partie de la construction en étage à l’extrémité nord du bâtiment qui a été édifiée en violation de la servitude de cour commune de 21m² tel que figurée sur le plan de l’expert judiciaire dans son rapport du 31 mars 2020 et dans un délai de six mois à compter de la signification du jugement,
* ordonné la suppression de toutes les vues droites et obliques donnant sur leur propriété,
* accordé aux époux [S] une indemnisation de 3000 euros pour préjudice de jouissance
* condamné le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] et [Adresse 7] à [Localité 10] à supporter toutes ces condamnations,
* rejeté la demande de M. [L] au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
* condamné le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] et [Adresse 7] à [Localité 10] et M. [L] à payer in solidum la somme de 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi que les dépens des procédures de première instance et des référés afférentes au présent litige,
– infirmer le jugement en ce qu’il :
* les a déboutés de leur demande d’assortir ces condamnations sous astreinte,
* les a déboutés de leur demande de reconstruction du mur de clôture,
Statuant à nouveau :
– les déclarer recevables et bien fondés en leur appel incident,
– condamner solidairement le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] et [Adresse 7] à [Localité 10] et M. [L] si la responsabilité de ce dernier était retenue par la cour,
– condamner in solidum le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] et [Adresse 7] à [Localité 10] et M. [L] à reconstruire la clôture sur les limites de propriété, dans le respect des dispositions d’urbanisme de [Localité 10] et selon les caractéristiques de la clôture ancienne,
– condamner in solidum le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] et [Adresse 7] à [Localité 10] et M. [L] à les indemniser pour la reconstruction d’une clôture végétalisée entre les deux propriétés, et cela à hauteur de 16 556,10 euros,
– condamner in solidum le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] et [Adresse 7] à [Localité 10] et M. [L] à les indemniser à hauteur de 16 653,45 euros pour la reconstruction d’un mur de soutènement entre les deux propriétés qui ne sont plus au même niveau désormais,
– condamner in solidum le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] et [Adresse 7] à [Localité 10] et M. [L] à exécuter les obligations nées de la décision à intervenir sous astreinte de 500 euros par semaine de retard à l’issue d’un mois d’inexécution après signification de la décision,
– condamner solidairement le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] et [Adresse 7] à [Localité 10] et M. [L] à leur payer la somme complémentaire de 30 000 euros en réparation de leur préjudice de jouissance,
– débouter le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] et [Adresse 7] à [Localité 10] de toutes leurs demandes formulées à leur encontre,
– débouter M. [L] de toutes ses demandes formulées à leur encontre,
– condamner solidairement le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] et [Adresse 7] à [Localité 10] et M. [L] à leur payer la somme de 8 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens de la présente instance.
Par dernières conclusions notifiées le 20 août 2024, M. [I] demande à la cour de :
Vu les articles 545, 678 et 679 du code civil,
Vu l’article 246 du code de procédure civile,
Vu l’article 1240 du code civil,
Vu le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Versailles le 21 avril 2022,
– le juger recevable et bien fondé en son appel,
– l’y déclarer bien fondé,
– infirmer le jugement rendu,
Y faisant droit :
– juger que l’extension de mission ordonnée par le juge des référés dans l’ordonnance du 19 mars 2019 présume d’une faute et d’une responsabilité, alors même que l’expert judiciaire ne peut donner qu’un avis,
– juger que le juge des référés a outrepassé ses compétences en accordant une extension de mission fondée sur l’appréciation d’un expert judiciaire, alors même qu’une telle décision relève de la compétence du juge du fond,
– juger qu’en tout état de cause, l’expert judiciaire n’a pas rempli sa mission conformément aux dispositions de l’article 238 du code de procédure civile en ne se prononçant pas sur la question du bornage, telle que prévue dans sa mission initialement fixée par l’ordonnance du 12 juin 2018,
– juger que l’expert judiciaire n’a pas pris en compte les existants et n’a pas tenu compte des documents remis par lui,
– juger que l’ensemble de ces éléments est de nature à remettre en cause l’expertise judiciaire de M. [H],
– juger que le jugement du tribunal administratif n’était pas pris en compte suivant la déontologie des experts géomètres, à remettre en cause l’expertise judiciaire de M. [H],
– juger qu’il a été autorisé, au terme d’une déclaration préalable et d’un permis de construire, à effectuer les travaux touchant le lot n°13 et a agi en toute régularité,
– juger qu’il n’a pas modifié la limite de propriété existante avec celle des époux [S],
– juger qu’à son acquisition du bien en mai 2013, le lot n°13 comportait déjà deux niveaux,
– juger qu’il n’a pas procédé à l’édification d’une construction nouvelle,
– juger que le plan de M. [N] n’est qu’un plan de présentation et ne saurai valoir de référence,
– juger que les époux [S] ne rapportent pas la preuve d’un préjudice de jouissance de leur propriété,
En conséquence :
– infirmer le jugement rendu en tous points,
– débouter les époux [S] ainsi que le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] et [Adresse 7] à [Localité 10], représenté par son syndic en exercice, de l’intégralité de leurs demandes dirigées à son encontre,
– condamner solidairement M. et Mme [S] à lui verser la somme de 160 200 euros, avec les intérêts au taux légal, à titre de dommages-intérêts,
– condamner solidairement M. et Mme [S] à restituer la somme de 24 607,52 euros de l’exécution provisoire du jugement de première instance, avec en sus les intérêts,
– condamner solidairement M. et Mme [S] à verser la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens,
– l’exonérer de sa participation aux frais de la procédure, conformément aux dispositions de l’article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965,
Reconventionnellement :
– faire application des dispositions de l’article 2 de la loi du 10 juillet 1965 concernant la jouissance de la cour commune qui lui est réservée.
La clôture de l’instruction a été ordonnée le 5 septembre 2024.
A titre liminaire, la cour rappelle que conformément aux dispositions de l’article 954, alinéa 3, du code de procédure civile, les prétentions sont récapitulées au dispositif des dernières conclusions et la cour ne statue que sur celles qui sont énoncées au dispositif.
Par prétention, il faut entendre, au sens de l’article 4 du code de procédure civile, une demande en justice tendant à ce que soit tranché un point litigieux.
Par voie de conséquence, les ‘dire et juger’ et les ‘constater’ ne constituent généralement pas des prétentions mais des moyens au soutien de celles-ci.
Il en est notamment ainsi des demandes de M. [L] tendant à ‘ juger que l’extension de mission ordonnée par le juge des référés dans l’ordonnance du 19 mars 2019 présume d’une faute et d’une responsabilité, alors même que l’expert judiciaire ne peut donner qu’un avis ( …) ‘ jusqu’à ‘ juger que les époux [S] ne rapportent pas la preuve d’un préjudice de jouissance de leur propriété ‘, soit la totalité de la page 44 des conclusions. Toutes ces demandes de ‘ juger ‘sont en réalité des moyens au soutien des réelles prétentions.
La cour n’y répondra que dans la mesure où elles viennent au soutien des prétentions formulées après le ‘ En conséquence ‘ (page 45) et, en tout état de cause, pas dans le dispositif de l’arrêt, mais dans ses motifs.
Sur les limites de l’appel
Le jugement est querellé en toutes ses dispositions.
Sur l’empiétement
Le tribunal, se fondant sur les conclusions du rapport d’expertise de M. [H], lequel estime que le bâtiment existant ne correspond pas à l’état descriptif de division de copropriété, a retenu qu’il existe un empiétement de 2,6 m².
Moyens des parties
Le syndicat des copropriétaires conclut à l’infirmation du jugement en faisant tout d’abord valoir que l’expert judiciaire n’ayant pas procédé au bornage des parcelles, ne pouvait pas constater un quelconque empiétement.
Il souligne ensuite que les travaux litigieux ont été entrepris par M. [L] et non par la copropriété et que dès lors les demandes des époux [S] à son égard sont irrecevables.
Il souligne que la servitude de cour commune est une servitude non altius tollendi, qui interdit de surélever les constructions existantes, et non une servitude non aedificandi.
Il affirme que M. [L] a conservé l’emprise du bâtiment qui préexistait qu’il a rénové sans modifier sa volumétrie.
M. [L] conclut, également à l’infirmation du jugement en soutenant que le rapport de M. [H] doit être remis en question et que la motivation du jugement, qui ne fait que reprendre les conclusions de celui-ci, sans prendre en compte le permis de construire, est insuffisante.
Pour l’essentiel, il soutient n’avoir jamais procédé à une nouvelle construction mais simplement à une rénovation du bâtiment existant, ce que confirmeraient le permis de construire qui lui a été délivré et le jugement rendu par le tribunal administratif le 18 novembre 2019.
M. et Mme [S] concluent à la confirmation du jugement en s’appuyant sur le rapport de M. [H] qui révèle selon eux un empiétement de 2,6 m². Ils affirment que l’atelier était à l’origine très en retrait de la limite séparative, que le bâtiment nouvellement édifié ne reprend pas l’emprise de l’ancien bâtiment car il est plus large et plus haut.
Ils contestent la portée du jugement rendu par le tribunal administratif en rappelant que le permis de construire est délivré sur la base de la déclaration du pétitionnaire et qu’il n’y a aucun contrôle in concreto.
Ils soutiennent que le plan de l’existant déposé à la mairie en vue du permis de construire mentionne à tort un ‘auvent’ comme étant un bâtiment, alors qu’il ne s’agissait que d’une place de parking et qu’à la place se trouve aujourd’hui un véritable bâtiment.
Appréciation de la cour
Le tribunal a repris les conclusions de l’expert pour juger qu’il y avait empiétement. M. [L] conteste la mission dévolue à l’expert ainsi que les conclusions de son rapport.
Dès lors, il apparaît nécessaire de reprendre un à un les points du rapport d’expertise et les critiques qui y ont été apportées.
Sur l’inachèvement de sa mission par M. [H]
Les contestations de M. [L] à l’encontre de l’ordonnance rendue par le juge des référés le 19 mars 2019, au demeurant non versée aux débat, en ce qu’elle étend la mission de l’expert et préjugerait ainsi d’une faute et d’une responsabilité, sont sans portée. Non seulement de telles critiques apparaissent tardives, mais encore M. [L] n’en tire aucune conclusion juridique quant au rapport d’expertise déposé sur le fondement de cette ordonnance dont il affirme seulement qu’il doit ‘ être remis en question’. De telles contestions sont donc sans aucune portée.
M. [H] n’aurait pas achevé sa mission en ne procédant pas au bornage.
La cour observe que M. [H] a établi un plan (annexe 3 du rapport) qui établit les limites des propriétés. Ce moyen n’est donc pas fondé.
Sur l’absence de prise en compte du permis de construire par l’expert
M. [L] reproche à l’expert de ne pas avoir pris connaissance du permis de construire et des pièces déposées à son appui. Pourtant, M. [H] indique en page 53 de son rapport ‘ Malgré mes demandes, il ne m’a été communiqué que des parties de documents et plan. L’ensemble du dossier PC ne m’a pas été communiqué ‘.
En tout état de cause, le permis de construire est délivré sur la base des déclarations du pétitionnaire. Il n’y a pas de contrôle sur place de l’existant. Ainsi, les plans déposés par M. [L] avec sa demande de permis de construire sont purement déclaratifs et leur force probante est relative : ils doivent être confrontés aux autres documents produits et la cour ne saurait en déduire l’absence d’empiétement.
Il en est de même du jugement rendu par le tribunal administratif qui a rejeté le recours contre le permis de construire.
Certes, le tribunal administratif a jugé que ‘ Il n’apparaît pas compte tenu de la portée des travaux projetés, qui n’impliquent pas de construction nouvelle ni de modification de la volumétrie du bâtiment, que cette circonstance ait empêché le service instructeur d’exercer son contrôle dès lors notamment que le caractère arboré ou non du jardin des requérants n’a pas d’impact significatif sur cette appréciation ‘ et encore ‘ En l’espèce, si les requérants font valoir qu’une partie de la parcelle d’assiette du projet est grevée d’une servitude de cour commune qui interdirait toute construction sur l’emplacement en cause , ce dont ils auraient informé les services de la ville des 2012, il ressort des pièces du dossier en tout état de cause que le permis de construire en cause ne porte pas sur une nouvelle construction mais sur la simple rénovation d’un bâtiment préexistant, avec notamment modification de façade et réfection de la toiture, sans création d’emprise supplémentaire. Le moyen est donc écarté ‘ (souligné par la cour).
Toutefois, ces conclusions reposent sur les plans établis par le pétitionnaire lui-même, sans contrôle de l’administration qu’ils correspondaient aux existants. Ainsi, le tribunal ne fait que constater que par rapport aux plans déposés, les travaux envisagés ne modifient pas la volumétrie du bâtiment et ne constituent pas une nouvelle construction, ce qui ne constitue pas la preuve que dans les faits, les travaux soient effectivement constitutifs d’une simple rénovation.
Cet argument n’emporte donc pas la conviction de la cour.
M. [L] reproche encore à l’expert de ne pas avoir pris en compte son acte d’acquisition tandis que l’expert précise en page 54 ‘ Je n’ai jamais pu obtenir l’acte de vente [L] complet ‘ (souligné par la cour), ce qui n’exclut donc pas une communication partielle.
En tout état de cause, M. [L] ne précise pas quelles mentions de son acte d’acquisition contrediraient ou démentiraient les conclusions de l’expert. Ce moyen n’est donc pas pertinent.
Sur les plans pris en compte par l’expert
M. [H] s’est fondé sur les plans établis en 1954 par M. [N], géomètre expert, au vu duquel le lot n°13, aujourd’hui propriété de M. [L], correspondait à un atelier et une remise en rez-de-chaussée. Selon l’expert, une partie abri-vitré se trouvait en retrait de la limite séparative et les bâtiments étaient séparés de la propriété de M. et Mme [S] par une courette.
M. [H] en déduit que l’état actuel ne correspond pas à la forme du bâtiment initial ni à son volume.
M. [L] affirme qu’il serait inopportun de se baser uniquement sur ce plan en soutenant ce qui suit (page 27 des conclusions):
‘ On peut même supposer des fausses informations sur ce plan car aucun expert ne se permettre pas de faire des fautes si grossières :
– Pans coupe sans cotations
– Au même temps on a représenté la palissade avant dépassement et après son dépassement.
– Sur le plan de 1919 quelque a tracé déjà la même ligne et pour temps la décision pour réalisation du pan coupé a été prise simplement en 1955 simplement Monsieur [H] sur son plan a bien pressante la palissade déjà dépassé et il a bien cote sa position, bien attendue d’après ses critères bien contestes. Rien plus faciles que ajoute une petite ligne au plan soft que ce si ses voix toute suite par un vrais professionnelle .On trouve en bas sur ce plan écriture et la précision de M. [N]. Dans l’état actuel des choses on ne peut pas considérer ce plan comme un « document » à prendre en compte ‘ (sic).
Ces explications pour le moins confuses, ainsi que celles qui suivent en pages 27 à 31, ne permettent pas à la cour de considérer que c’est à tort que M. [H] s’est fondé exclusivement sur le plan [N] pour conclure à l’existence d’un empiétement.
Ainsi, M. [L] qui affirme s’être contenté de rénover un bâtiment existant, sans construction nouvelle, n’apporte aucun élément concret et objectif au soutien de cette allégation.
S’agissant des arguments avancés par le syndicat des copropriétaires, ils ne sont pas davantage convaincants dès lors qu’ils s’appuient également principalement sur le permis de construire et le jugement rendu par le tribunal administratif dont la cour a déjà souligné les limites probatoires.
C’est donc à bon droit, par des motifs adoptés au surplus par la cour, que le tribunal, entérinant les conclusions du rapport de M. [H], a jugé que l’empiétement sur le fond des époux [S] était caractérisé.
Le jugement sera confirmé sur ce point.
Sur la suppression de l’empiétement
Le tribunal a condamné le syndicat des copropriétaires à procéder à la suppression de l’empiétement.
Moyens des parties
Le syndicat des copropriétaires poursuit l’infirmation du jugement en soulignant qu’il n’est pas à l’origine de la construction litigieuse qui appartient à M. [L]. Il souligne le caractère disproportionné de la démolition demandée eu égard à la modicité de l’empiétement. Il demande à la cour, au lieu de la démolition, de condamner M. [L] à payer aux époux [S] une indemnité financière.
Il sollicite la garantie de ce dernier dans l’hypothèse où sa condamnation à supprimer l’empiétement serait confirmée.
M. [L] conclut pareillement que le syndicat des copropriétaires ne peut pas être condamné à supprimer une construction lui appartenant. Il conteste le principe d’une condamnation sous astreinte en faisant valoir que rien ne démontre qu’il se soustrairait à une obligation de supprimer l’empiétement et rappelle que le tribunal a condamné le seul syndicat des copropriétaires à cette suppression.
M. et Mme [S] concluent à la confirmation du jugement en soulignant qu’au regard du règlement de copropriété, la totalité du sol des bâtiments et de la cour intérieure, les gros murs de façade et de refend, les fondations en particulier sont des parties communes.
Appréciation de la cour
Sur la disproportion
Il n’est pas démontré que la seule démolition de l’empiétement de 2,6 m² implique de démolir la totalité du bâtiment qui abrite aujourd’hui un cabinet médical. Le caractère disproportionné d’une telle condamnation, à supposer qu’elle soit de nature à écarter la démolition, n’est donc pas établi.
Par ailleurs, nul ne plaide par procureur. Le syndicat des copropriétaires n’est donc pas recevable à solliciter la condamnation de M. [L] à payer une indemnité financière aux époux [S] aux lieux et place de la démolition, alternative que le principal intéressé ne propose pas.
Sur la condamnation du syndicat des copropriétaires
Il ressort du règlement de copropriété les murs de façade et de refend sont des parties communes.
Le syndicat des copropriétaires est tenu de veiller à l’administration des parties communes et doit donc répondre, au titre de sa responsabilité civile, des travaux réalisés par un copropriétaire sur des parties communes (ici le sol de la copropriété) qui empiètent sur la parcelle voisine.
M. [I], en tant que propriétaire de la construction irrégulière doit répondre de l’empiétement.
Il y a donc lieu de condamner in solidum le syndicat des copropriétaires et M. [L] à procéder à la suppression de l’empiétement.
Il n’est pas justifié à ce stade d’assortir cette condamnation d’une astreinte.
Sur l’appel en garantie du syndicat des copropriétaires
Le syndicat des copropriétaires sollicite en cas de condamnation la garantie de M. [L].
Celui-ci indique lui-même dans ses conclusions que ce n’est pas au syndicat des copropriétaires de procéder à la démolition.
Dès lors, M. [L] sera condamné à garantir le syndicat des copropriétaires des sommes qu’il pourrait devoir supporter au titre des travaux de démolition.
Sur la violation de la servitude
Le jugement rappelle qu’un acte notarié des 19, 24 juin et 11 août 1975 a mis en place une servitude de cour commune au profit du fonds de M. et Mme [S], d’une superficie de 21 m², en échange d’une servitude de cour commune au profit de la copropriété du [Adresse 1] pour une même surface, les servitudes emportant interdiction de surélever le bâtiment existant.
Le tribunal, reprenant les conclusions de M. [H], conclut que le bâtiment actuel comporte deux niveaux alors qu’il ne comportait à l’origine qu’un rez-de-chaussée.
Moyens des parties
En application de l’article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé aux conclusions des parties pour un exposé des moyens de fait et de droit présentés sur ce point de l’élévation du bâtiment.
Appréciation de la cour
La cour constate que M. [H] ne développe pas les éléments sur lesquels il se fonde pour conclure que le bâtiment d’origine aurait été surélevé en son extrémité nord édifiée sur la cour commune.
Il indique simplement que le bâtiment d’origine comportait un seul niveau et que l’existant en comporte deux.
Pour autant, il ne produit aucun relevé de mesure, incontestable prise par un commissaire de justice, géomètre, expert … qui corroborerait l’affirmation selon laquelle il y a eu surélévation du bâtiment.
Il existe au contraire des indices qui permettent de conclure que si le bâtiment ‘ancien’ (atelier remise) était aménagé sur le seul rez-de-chaussée, il existait un espace supérieur, laissé vacant, et qui a fait l’objet d’un aménagement.
Ainsi, les photos produites par M. [L] en cours de chantier montrent un bâtiment ancien comportant un niveau supérieur à l’état brut.
Ensuite, il est établi que le bâtiment rénové a été décaissé, ce qui explique qu’il puisse comporter aujourd’hui un étage aménagé.
En l’absence d’élément démontrant de façon objective et certaine que le bâtiment aurait été surélevé en contradiction avec la servitude de cour commune, le jugement, en ce qu’il a ordonné la démolition de la partie de la construction en étage à l’extrémité nord, sera infirmé.
Sur les vues droites et obliques
Le tribunal, se fondant sur les constatations du rapport de M. [H], a ordonné la suppression des vues droites et obliques mises en évidence lors de l’expertise.
Moyens des parties
Le syndicat des copropriétaires ne conteste pas la matérialité de ces vues mais rappelle qu’il ne peut pas être condamné à supprimer des vues qui résultent de la propriété de M. [L]. Il suggère de substituer à la suppression des vues la transformation des ouvertures en jour de souffrance.
M. [L], qui sollicite l’infirmation du jugement également sur ce point, n’avance aucun moyen de droit ou de fait à l’appui de cette prétention.
M. et Mme [S], qui poursuivent la confirmation de la démolition de l’empiétement et de la partie surélevée, ne concluent pas davantage sur ce point spécifique.
Appréciation de la cour
C’est par des motifs exacts, que la cour adopte, que le tribunal a retenu l’existence de vues droites et obliques sur le fonds de M. et Mme [S].
M. [L] ne discute pas sérieusement l’existence de ces vues, de sorte que leur suppression doit être confirmée.
Seul M. [L] peut être condamné à cette suppression, la façade vitrée constituant une partie privative et non une partie commune.
Le jugement sera donc infirmé en ce qu’il a condamné le syndicat des copropriétaires à supprimer les vues et seul M. [L] supportera cette obligation.
La cour rappellera que la suppression des vues directes n’implique pas nécessairement la démolition de l’ouvrage mais peut résulter du remplacement des vitres ordinaires par des fenêtres opaques, ce qu’admettent du reste M. et Mme [S].
M. [L] sera condamné seul à supprimer le vues droites et obliques, au besoin par le remplacement des baies vitrées par des fenêtres opaques.
Sur la reconstruction de la clôture
C’est par d’exacts motifs, adoptés par la cour, tenant à l’absence d’éléments probants que le tribunal a débouté M. et Mme [S] de leur demande de reconstruction de la clôture qui autrefois séparait leur propriété du fonds de la copropriété.
Pas plus que devant les premiers juges, M. et Mme [S] ne démontrent que la disparition de la clôture, supposée être intervenue en leur absence en 2012, n’est imputable au syndicat des copropriétaires.
Le rejet de leur demande ne peut donc qu’être confirmé.
M. et Mme [S] sollicitent en outre la condamnation de M. [L] et du syndicat des copropriétaires à les indemniser au titre des conséquences du décaissement de son terrain qui selon eux, aurait occasionné un glissement de terrain.
Si de telles demandes, qui sont l’accessoire des demandes principales, sont donc parfaitement recevables bien que nouvelles en cause d’appel, elles ne pourront être accueillies, les intéressés ne démontrant pas autrement que par de simples allégations la nécessité de construire un mur de soutènement et le devis produit n’ayant pas été établi de façon contradictoire.
Sur la demande au titre du préjudice de jouissance
Le tribunal a alloué aux époux [S] la somme de 3 000 euros au titre du préjudice de jouissance qu’ils subissent dans leur jardin.
Moyens des parties
M. et Mme [S] sollicitent la confirmation du jugement en ce qu’il leur a alloué une somme de 3 000 euros et sollicitent une somme complémentaire de 30 000 euros en affirmant ne plus pouvoir profiter de leur jardin en raison de la vue directe sur leur jardin qu’ont les patients du cabinet médical, installés dans les locaux, propriété de M. [L].
M. [L] conteste l’existence du préjudice allégué.
Le syndicat des copropriétaires conclut au rejet des demandes au titre du préjudice de jouissance qu’il estime non établi.
Appréciation de la cour
Il ressort des procès-verbaux de constat établis les 25 octobre et 6 décembre 2022 par M. [Z], commissaire de justice, que les baies vitrées du cabinet médical donnent directement sur le jardin des époux [S]. Néanmoins, les photos révèlent que la végétation qui sépare les deux propriétés masque en grande partie les vues sur le jardin.
Dès lors, si le préjudice est réel, il doit être relativisé et les demandes des époux [S] apparaissent hors de toute proportion, le quantum sollicité en appel n’est en outre étayé par aucun élément.
Dans ces conditions, la cour confirmera le jugement en ce qu’il a alloué la somme de 3 000 euros au titre du préjudice de jouissance.
Sur la demande de dommages et intérêts présentée par M. [L]
Le sens du présent arrêt conduit la cour à débouter M. [L] de sa demande de dommages et intérêts, celui-ci n’apportant pas la preuve d’une faute pouvant être retenue à l’encontre des époux [S].
Sur la demande de dispense de participation aux frais de procédure de la copropriété
M. [L] succombe en grand partie, sa demande tendant à être dispensé de participer aux frais de procédure que supporte la copropriété sera nécessairement rejetée.
Sur la demande reconventionnelle de M. [L]
M. [L] sollicite reconventionnellement de ‘ faire application des dispositions de l’article 2 de la loi du 10 juillet 1965 concernant la jouissance de la cour commune qui lui est réservé ‘.
En l’absence du moindre moyen à l’appui de cette demande, M. [L] en sera débouté.
Sur les demandes accessoires
Le sens du présent arrêt commande de confirmer les dispositions du jugement relatives aux frais irrépétibles et aux dépens.
M. [L] et le syndicat des copropriétaires supporteront les dépens de la procédure d’appel et seront condamnés à payer à M. et Mme [S] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Les autres demandes présentées sur ce même fondement seront rejetées.
La Cour, statuant arrêt contradictoire et mis à disposition,
INFIRME le jugement en ce qu’il a :
– condamné le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] et [Adresse 7], représenté par son syndic, l’agence Hisyndic, à démolir la partie de la construction du bâtiment ainsi que la tuyauterie empiétant sur le fonds des époux [S], sis à [Adresse 11], cadastré Section AD [Cadastre 4], tel que cet empiétement est constaté par l’expert judiciaire, dans son rapport du 31 mars 2020, et ce dans un délai de six mois à compter de la signification du présent jugement,
– condamné le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] et [Adresse 7] à [Localité 10], représenté par son syndic, l’agence Hisyndic, à démolir la partie de construction en étage à l’extrémité nord du bâtiment qui a été édifiée en violation de la servitude de cour commune de 21m², tel que figurée sur le plan de l’expert judiciaire dans son rapport du 31 mars 2020, et ce dans un délai de six mois à compter de la signification du présent jugement,
– condamné le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] et [Adresse 7] [Localité 10], représenté par son syndic, l’agence Hisyndic, à supprimer toutes les vues droites et obliques donnant sur la propriété des époux [S], telles que constatées par l’expert judiciaire, dans son rapport du 31 mars 2020, dans un délai de six mois à compter de la signification du présent jugement,
CONFIRME le jugement en ce qu’il a :
– rejeté la demande des époux [S] visant à assortir les condamnations d’une astreinte,
– rejeté la demande des époux [S] portant sur la reconstruction de la clôture,
– condamné le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] et [Adresse 7] à [Localité 10], représenté par son syndic, l’agence Hisyndic, et M. [L] in solidum à payer aux époux [S] la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts,
– condamné le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] et [Adresse 7] à [Localité 10], représenté par son syndic, l’agence Hisyndic, et M. [L] in solidum à payer aux époux [S] la somme de 3 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– rejeté la demande de M. [L] au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] et [Adresse 7] à [Localité 10], représenté par son syndic, l’agence Hisyndic, et M. [L] in solidum à payer les dépens incluant les frais de l’expertise judiciaire ainsi que les dépens des procédures de référés afférentes au présent litige,
Statuant à nouveau et y ajoutant ;
DÉCLARE M. et Mme [S] recevables en leur demande au titre de la création d’un mur de soutènement,
CONDAMNE in solidum le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] et [Adresse 7] à [Localité 10] et M. [L] à démolir la partie de la construction du bâtiment ainsi que la tuyauterie empiétant sur le fonds des époux [S], sis à [Adresse 11], cadastré Section AD [Cadastre 4], tel que cet empiétement est constaté par l’expert judiciaire, dans son rapport du 31 mars 2020, et ce dans un délai de six mois à compter de la signification du présent jugement,
CONDAMNE M. [L] à garantir le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] et [Adresse 7] à [Localité 10] de tous les frais qu’il devrait supporter au titre de la démolition de cet empiétement,
CONDAMNE M. [L] à supprimer toutes les vues droites et obliques donnant sur la propriété des époux [S], telles que constatées par l’expert judiciaire, dans son rapport du 31 mars 2020, au besoin en remplaçant les baies vitrées par des fenêtres à verre opaque ou à verre dormant dans un délai de six mois à compter de la signification du présent jugement,
DIT n’y avoir lieu à astreinte,
DÉBOUTE M. et Mme [S] de leur demande de démolition de la partie de construction en étage à l’extrémité nord du bâtiment,
REJETTE la demande de M. et Mme [S] au titre de la création d’un mur de soutènement,
CONDAMNE in solidum M. [L] et le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] et [Adresse 7] à [Localité 10] aux dépens de la procédure d’appel,
CONDAMNE in solidum M. [L] et le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] et [Adresse 7] à [Localité 10] à payer à M. et Mme [S] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
DÉBOUTE le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] et [Adresse 7] à [Localité 10] et M. [L] de leur demande au titre des frais irrépétibles.
– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,
– signé par Madame Anna MANES, présidente, et par Madame Natacha BOURGUEIL, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier, La Présidente,
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