Conflit sur la légitimité des représentants de proximité au sein d’une entreprise : enjeux d’éligibilité et respect des accords collectifs.

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Conflit sur la légitimité des représentants de proximité au sein d’une entreprise : enjeux d’éligibilité et respect des accords collectifs.

L’Essentiel : L’accord collectif signé le 10 octobre 2019 par Fiducial sécurité humaine a établi des comités sociaux et économiques (CSE) dans ses établissements, prévoyant des représentants de proximité. En 2022, lors du renouvellement des mandats, deux listes de candidats ont été soumises, mais seule celle du délégué syndical central a été retenue. Le syndicat a contesté cette décision en justice, arguant que l’accord exigeait que les listes soient présentées par des syndicats ayant au moins un élu au CSE. Le tribunal a rejeté la demande, affirmant qu’aucune règle ne précisait la procédure en cas de plusieurs listes.

Contexte de l’accord collectif

La société Fiducial sécurité humaine a conclu un accord collectif le 10 octobre 2019 avec les organisations syndicales représentatives, visant à établir des comités sociaux et économiques (CSE) dans ses trois établissements. Cet accord stipule la mise en place de représentants de proximité pour chaque établissement.

Renouvellement des mandats

En 2022, dans le cadre du renouvellement des mandats des représentants de proximité, deux listes de candidats ont été soumises pour le syndicat Sud solidaires prévention et sécurité. L’une a été présentée par M. [O], délégué syndical central, et l’autre par le secrétaire général du syndicat, chacune transmise par courriel à des dates différentes.

Réunion du CSE et désignation des représentants

Lors de la réunion du CSE du 28 janvier 2022, la liste soumise par le délégué syndical central a été retenue, et les représentants de proximité ont été désignés à partir de cette liste, sans prendre en compte celle du secrétaire général.

Action en justice du syndicat

Le 11 février 2022, le syndicat a déposé une requête auprès du tribunal judiciaire pour annuler les désignations effectuées le 28 janvier. Il a demandé que la société soit contrainte d’organiser de nouvelles désignations et a réclamé des dommages-intérêts pour avoir empêché une représentation valable des salariés.

Arguments du syndicat

Le syndicat a contesté le jugement qui a débouté sa demande, arguant que l’accord collectif exigeait que les listes de candidats soient présentées par des organisations syndicales ayant au moins un élu au CSE. Il a soutenu que la décision du CSE d’écarter la liste du secrétaire général était erronée.

Réponse du tribunal

Le tribunal a justifié sa décision en affirmant qu’aucune stipulation de l’accord n’imposait que les listes soient présentées par une personne mandatée par une organisation syndicale. Il a également noté qu’aucune règle ne précisait la procédure à suivre en cas de soumission de plusieurs listes par le même syndicat.

Violation des textes par le jugement

Cependant, le jugement a été critiqué pour avoir mal interprété l’article 8.2 de l’accord, qui stipule que les représentants de proximité doivent être désignés à partir de listes présentées par des syndicats représentatifs. Le tribunal a ainsi été accusé d’avoir violé les dispositions de l’accord en permettant la désignation sur une seule liste non mandatée.

Q/R juridiques soulevées :

Quel est le contexte de l’accord collectif signé par Fiducial sécurité humaine ?

La société Fiducial sécurité humaine a conclu un accord collectif le 10 octobre 2019 avec les organisations syndicales représentatives. Cet accord vise à établir des comités sociaux et économiques (CSE) dans ses trois établissements.

Il stipule également la mise en place de représentants de proximité pour chaque établissement, afin d’assurer une meilleure représentation des salariés.

Quelles ont été les actions entreprises lors du renouvellement des mandats en 2022 ?

En 2022, dans le cadre du renouvellement des mandats des représentants de proximité, deux listes de candidats ont été soumises pour le syndicat Sud solidaires prévention et sécurité.

L’une des listes a été présentée par M. [O], délégué syndical central, tandis que l’autre a été soumise par le secrétaire général du syndicat. Chaque liste a été transmise par courriel à des dates différentes.

Comment s’est déroulée la réunion du CSE du 28 janvier 2022 ?

Lors de la réunion du CSE du 28 janvier 2022, la liste soumise par le délégué syndical central a été retenue.

Les représentants de proximité ont été désignés à partir de cette liste, sans prendre en compte celle du secrétaire général, ce qui a suscité des contestations par la suite.

Quelle action en justice a été entreprise par le syndicat ?

Le 11 février 2022, le syndicat a déposé une requête auprès du tribunal judiciaire pour annuler les désignations effectuées le 28 janvier.

Il a demandé que la société soit contrainte d’organiser de nouvelles désignations et a réclamé des dommages-intérêts pour avoir empêché une représentation valable des salariés.

Quels arguments le syndicat a-t-il avancés dans sa contestation ?

Le syndicat a contesté le jugement qui a débouté sa demande, arguant que l’accord collectif exigeait que les listes de candidats soient présentées par des organisations syndicales ayant au moins un élu au CSE.

Il a soutenu que la décision du CSE d’écarter la liste du secrétaire général était erronée et ne respectait pas les dispositions de l’accord.

Quelle a été la réponse du tribunal concernant la demande du syndicat ?

Le tribunal a justifié sa décision en affirmant qu’aucune stipulation de l’accord n’imposait que les listes soient présentées par une personne mandatée par une organisation syndicale.

Il a également noté qu’aucune règle ne précisait la procédure à suivre en cas de soumission de plusieurs listes par le même syndicat.

Quelles critiques ont été formulées à l’encontre du jugement du tribunal ?

Le jugement a été critiqué pour avoir mal interprété l’article 8.2 de l’accord, qui stipule que les représentants de proximité doivent être désignés à partir de listes présentées par des syndicats représentatifs.

Le tribunal a ainsi été accusé d’avoir violé les dispositions de l’accord en permettant la désignation sur une seule liste non mandatée.

Quels moyens le syndicat a-t-il invoqués dans sa demande d’annulation ?

Le syndicat a fait grief au jugement de le débouter de sa demande d’annulation des désignations des représentants de proximité intervenues le 28 janvier 2022.

Il a également demandé à la société d’organiser de nouvelles élections et a réclamé des dommages-intérêts pour avoir empêché une représentation valable des salariés de l’établissement IDF-Normandie.

Quelles sont les implications de l’article 8.2 de l’accord collectif ?

L’article 8.2 de l’accord collectif du 10 octobre 2019 stipule que les représentants de proximité sont élus sur la base des listes établies et présentées par les organisations syndicales ayant au moins un élu au sein du CSE d’établissement.

Le tribunal a été accusé d’avoir violé cet article en rejetant la demande d’annulation de l’élection, en se basant sur des motifs erronés.

SOC. / ELECT

CZ

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 27 novembre 2024

Cassation

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 1226 F-D

Pourvoi n° N 23-18.687

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 27 NOVEMBRE 2024

Le syndicat Sud solidaires prévention et sécurité sûreté, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° N 23-18.687 contre le jugement rendu le 6 juillet 2023 par le tribunal judiciaire de Nanterre (contentieux des élections professionnelles), dans le litige l’opposant à la société Fiducial sécurité humaine, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l’appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Lanoue, conseiller référendaire, les observations de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat du syndicat Sud solidaires prévention et sécurité sûreté, de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Fiducial sécurité humaine, après débats en l’audience publique du 23 octobre 2024 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Lanoue, conseiller référendaire rapporteur, M. Rinuy, conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon le jugement attaqué (tribunal judiciaire de Nanterre, 6 juillet 2023) et les productions, le 10 octobre 2019, la société Fiducial sécurité humaine (la société) a conclu avec les organisations syndicales représentatives un accord collectif relatif à la mise en place des comités sociaux et économiques au sein de ses trois établissements. Cet accord prévoit la mise en place de représentants de proximité.

2. En vue du renouvellement des mandats des représentants de proximité, prévu en 2022 en application de l’accord collectif, ont été déposées deux listes distinctes de candidats pour le syndicat Sud solidaires prévention et sécurité, sûreté (le syndicat), l’une par M. [O], délégué syndical central du syndicat, transmise au comité social et économique de l’établissement IDF-Normandie (le CSE) par courriel du 19 janvier 2022, l’autre par le secrétaire général du syndicat, transmise à la société par courriel du 27 janvier 2022.

3. Lors de sa réunion du 28 janvier 2022, le comité social et économique a pris en compte la liste présentée par le délégué syndical central et désigné comme représentants de proximité des salariés figurant sur cette liste.

4. Par requête enregistrée le 11 février 2022, le syndicat a saisi le tribunal judiciaire en annulation de ces désignations. Dans le dernier état de ses écritures, il a sollicité l’annulation des désignations des représentants de proximité intervenues le 28 janvier 2022, qu’il soit enjoint à la société d’organiser de nouvelles désignations des représentants de proximité sous astreinte, outre la condamnation de la société à lui verser une certaine somme à titre de dommages-intérêts.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

5. Le syndicat fait grief au jugement de le débouter de sa demande d’annulation des désignations des représentants de proximité intervenues le 28 janvier 2022 au sein de Fiducial sécurité humaine établissement IDF-Normandie, de le débouter de sa demande tendant à enjoindre à la société Fiducial sécurité humaine d’organiser de nouvelles élections sous un mois à compter de la décision à intervenir et de le débouter de sa demande tendant à condamner la société à lui verser des dommages-intérêts pour avoir empêché les salariés de l’établissement IDF-Normandie de disposer d’une délégation du personnel de représentants de proximité valable, alors « qu’en application de l’article 8.2 de l’accord collectif du 10 octobre 2019 relatif au périmètre de mise en place et à l’organisation du comité social et économique au sein de la société Fiducial sécurité humaine, les représentants de proximité sont élus sur la base des listes établies et présentées par les organisations syndicales ayant au moins un élu au sein du CSE d’établissement » ; qu’en l’espèce, il est constant qu’au cours de la réunion du 28 janvier 2022, les élus du CSE de l’établissement IDF-Normandie ont décidé de ne retenir que les listes présentées par le délégué syndical central », écartant ainsi la liste signée par le secrétaire général du syndicat et adressée à la société par courriel du 27 janvier 2022 ; qu’en rejetant la demande d’annulation de cette élection, aux motifs erronés qu’aucune des stipulations n’impose, comme condition d’éligibilité, que les listes de candidats soient présentées par une personne mandatée à cette fin par une organisation syndicale représentative », le tribunal a violé l’article 8.2 de l’accord collectif du 10 octobre 2019 relatif au périmètre de mise en place et à l’organisation du comité social et économique. »

Réponse de la Cour

Vu l’article 8.2 de l’ « Accord collectif relatif au périmètre de mise en place et à l’organisation du CSE prosegur sécurité humaine » du 10 octobre 2019 et l’article 1984 du code civil :

6. Aux termes du premier de ces textes, au cours de la première réunion du CSE, seront rappelées les modalités de désignation des représentants de proximité, à charge pour les organisations syndicales ayant au moins un élu au sein du CSE d’établissement de présenter leur liste pour chacun des secteurs pour la réunion suivante.

7. Pour dire que les membres du CSE pouvaient valablement décider de retenir uniquement les listes présentées par le délégué syndical central, le jugement retient qu’aucune des stipulations de l’accord n’impose, comme condition d’éligibilité, que les listes de candidats soient présentées par une personne mandatée à cette fin par une organisation syndicale représentative et qu’aucune disposition ne réglemente davantage la marche à suivre dans l’hypothèse où deux listes se réclament du même syndicat.

8. En statuant ainsi, alors qu’il résulte de l’article 8.2 de l’accord précité que les représentants de proximité sont désignés sur des listes de candidats présentées par des syndicats représentatifs et qu’un délégué syndical ne peut présenter de liste de candidats au nom de son syndicat que lorsqu’il a expressément reçu mandat à cette fin, le jugement a violé les textes susvisés.


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