L’Essentiel : Le 2 février 2023, le tribunal de Pontoise a statué en faveur de l’association Soliha, ordonnant l’expulsion de Mme [C] [T] pour dettes locatives s’élevant à 10 827,99 euros. En appel, Mme [C] [T] a contesté le jugement, demandant une révision des montants et la possibilité de régler sa dette sur 36 mois. Cependant, la cour a confirmé la décision initiale, rectifiant la date de la clause résolutoire et augmentant le montant dû à 13 299,24 euros. Elle a également débouté Mme [C] [T] de ses demandes de délais de paiement et d’indemnisation pour préjudice moral.
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Convention d’occupation précairePar acte sous seing privé du 16 octobre 2013, Pact Arim du Val d’Oise a consenti à Mme [C] [T] une convention d’occupation précaire pour un logement à usage d’habitation. Un avenant a été signé le 10 mai 2016 par l’association Soliha Solidaires pour l’Habitat, renouvelant la convention d’occupation. Commandement de payer et assignationEn raison d’échéances impayées, l’association a délivré un commandement à Mme [C] [T] le 16 novembre 2017, lui demandant de régler une somme de 1 312,39 euros. Par la suite, l’association a assigné la locataire devant le juge des contentieux de la protection pour obtenir la résiliation du contrat, son expulsion et le paiement des redevances dues. Jugement du tribunal de PontoiseLe 2 février 2023, le tribunal a déclaré recevable l’action de l’association, constaté l’acquisition de la clause résolutoire au 17 janvier 2018, ordonné l’expulsion de la locataire, et condamné Mme [C] [T] à payer 10 827,99 euros pour dettes locatives, ainsi qu’une indemnité d’occupation mensuelle de 292,56 euros. Appel de Mme [C] [T]Mme [C] [T] a interjeté appel le 7 août 2023, demandant l’infirmation du jugement sur plusieurs points, notamment la recevabilité de l’action, le montant de la dette, et l’expulsion. Elle a également proposé de régler sa dette sur 36 mois tout en restant dans les lieux. Réponse de l’association SolihaL’association a demandé à la cour de confirmer le jugement initial et de débouter Mme [C] [T] de ses demandes. Elle a également sollicité une rectification d’erreur matérielle concernant la date de la convention d’occupation. Décision de la courLa cour a confirmé le jugement du tribunal de Pontoise, en rectifiant la date de la clause résolutoire et en condamnant Mme [C] [T] à verser 13 299,24 euros pour les arriérés. Elle a également débouté Mme [C] [T] de sa demande de délais de paiement et de son indemnisation pour préjudice moral. Condamnation aux dépensMme [C] [T] a été condamnée aux dépens de la procédure d’appel et à verser 500 euros à l’association au titre des frais de procédure. La décision a été prononcée publiquement et signée par le président et la greffière. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la nature de la convention d’occupation signée entre Mme [C] [T] et l’association Soliha Solidaires pour l’Habitat ?La convention d’occupation signée entre Mme [C] [T] et l’association Soliha Solidaires pour l’Habitat est qualifiée de convention d’occupation précaire. Cette qualification est importante car elle détermine le régime juridique applicable. En effet, selon l’article 1714 du Code civil, le contrat de bail est un contrat par lequel une personne s’engage à donner à une autre la jouissance d’un bien moyennant un loyer. Cependant, la convention d’occupation précaire, comme son nom l’indique, ne confère pas les mêmes droits qu’un bail classique. Elle est généralement utilisée dans des situations où l’occupation du bien est temporaire et sans droit au renouvellement. L’article 8 de la loi du 6 juillet 1989 précise que les conventions d’occupation précaire ne sont pas soumises aux dispositions de cette loi, ce qui signifie que les règles de protection des locataires ne s’appliquent pas dans ce cas. Ainsi, la nature précaire de la convention permet à l’association de mettre fin à l’occupation sans avoir à respecter les formalités d’un bail classique. Quelles sont les conséquences de l’acquisition de la clause résolutoire dans la convention d’occupation ?L’acquisition de la clause résolutoire dans la convention d’occupation a des conséquences significatives pour Mme [C] [T]. Selon l’article 1225 du Code civil, la clause résolutoire est une stipulation par laquelle les parties conviennent qu’en cas d’inexécution d’une obligation, le contrat sera résilié de plein droit. Dans le cas présent, l’association Soliha Solidaires pour l’Habitat a délivré un commandement de payer à Mme [C] [T] pour des redevances impayées. L’article 24 de la loi du 6 juillet 1989 stipule que le locataire doit être mis en demeure de payer avant que la clause résolutoire puisse être mise en œuvre. En l’espèce, Mme [C] [T] n’ayant pas réglé la somme due dans le délai imparti, la clause résolutoire est devenue effective à compter du 17 janvier 2018. Cela signifie que l’association a le droit de demander l’expulsion de la locataire et de récupérer le logement, ainsi que de réclamer le paiement des arriérés de loyer. Comment est déterminée l’indemnité d’occupation en cas d’occupation sans droit ni titre ?L’indemnité d’occupation en cas d’occupation sans droit ni titre est déterminée selon des critères spécifiques. L’article 3 de la loi du 6 juillet 1989 précise que l’indemnité d’occupation est destinée à compenser les pertes de loyer subies par le bailleur, mais également à indemniser le préjudice résultant de l’occupation. Cette indemnité peut être supérieure au loyer initialement convenu, car elle prend en compte la valeur locative du bien et les circonstances particulières de chaque cas. Dans le jugement, il est mentionné que l’indemnité d’occupation a été fixée à 292,56 euros, ce qui a été jugé raisonnable par le tribunal. L’indemnité d’occupation est donc calculée en fonction de la valeur du bien sur le marché locatif, ainsi que des pertes subies par le bailleur en raison de l’occupation illégale. Quelles sont les conditions pour obtenir un délai de paiement des dettes locatives ?Pour obtenir un délai de paiement des dettes locatives, plusieurs conditions doivent être remplies. L’article 1343-5 du Code civil stipule que le juge peut reporter ou échelonner le paiement des sommes dues, en tenant compte de la situation du débiteur et des besoins du créancier. Le débiteur doit présenter une offre sérieuse et précise de règlement, ainsi que des éléments de preuve concernant sa situation financière, tels que ses revenus et ses charges prévisibles. Il est également important de considérer le montant et l’ancienneté de la dette, ainsi que les efforts déjà accomplis pour l’honorer. Dans le cas de Mme [C] [T], la cour a estimé qu’elle n’avait pas justifié de sa situation financière ni présenté d’éléments permettant de penser qu’elle pourrait régler sa dette dans le délai proposé. Ainsi, sa demande de délai de paiement a été rejetée, car l’association Soliha Solidaires pour l’Habitat ne pouvait pas être contrainte de laisser le logement sans contrepartie financière. Quelles sont les implications de la demande d’indemnisation pour préjudice moral ?La demande d’indemnisation pour préjudice moral implique que la partie qui en fait la demande doit prouver l’existence d’un préjudice réel et la responsabilité de l’autre partie. L’article 1240 du Code civil stipule que tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. Dans le cas de Mme [C] [T], qui a été déboutée de sa demande d’indemnisation, il a été jugé qu’elle ne pouvait pas prouver l’existence d’un préjudice moral résultant de la situation. La cour a considéré que, n’ayant pas obtenu gain de cause sur ses demandes principales, elle ne pouvait pas non plus prétendre à une indemnisation pour préjudice moral. Ainsi, la demande d’indemnisation a été rejetée, soulignant l’importance de la preuve dans les demandes d’indemnisation en matière de préjudice moral. |
DE
VERSAILLES
Code nac : 51A
Chambre civile 1-2
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 26 NOVEMBRE 2024
N° RG 23/05929 – N° Portalis DBV3-V-B7H-WBNK
AFFAIRE :
[F] [B] [C] [T]
C/
Association SOLIHA SOLIDAIRES POUR L’HABITAT AGENCE IMMOBILIERE SOCIALE
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 02 février 2023 par le Juge des contentieux de la protection de PONTOISE
N° RG : 1121001991
Expéditions exécutoires
Copies certifiées conformes délivrées
le : 26.11.24
à :
Me Genusha WARAHENA LIYANAGE
Me Jeanine HALIMI
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT SIX NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT QUATRE,
La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
APPELANTE
Madame [F] [B] [C] [T]
née le 09 juillet 1987 à [Localité 5] (CAMEROUN)
[Adresse 1]
[Localité 3]/FRANCE
bénéficiaire de l’aide juridictionnelle totale
Représentant : Me Genusha WARAHENA LIYANAGE, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 257
****************
INTIMÉE
Association SOLIHA – SOLIDAIRES POUR L’HABITAT – AGENCE IMMOBILIERE SOCIALE
N° SIRET : 511 957 003
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représentant : Me Jeanine HALIMI de la SELARL JEANINE HALIMI, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : 397
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 23 septembre 2024 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Isabelle BROGLY, magistrate honoraire chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Philippe JAVELAS, Président,
Madame Anne THIVELLIER, Conseillère,
Madame Isabelle BROGLY, Magistrate honoraire,
Greffière lors des débats : Madame Céline KOC
Greffière placée lors du prononcé : Madame Gaëlle RULLIER
Par acte sous seing privé du 16 octobre 2013, Pact Arim du Val d’Oise a consenti à Mme [C] [T] une convention d’occupation précaire portant sur un logement à usage d’habitation situé [Adresse 1], à [Localité 3].
Par avenant en date du 10 mai 2016, l’association Soliha Solidaires pour l’Habitat a signé une nouvelle convention d’occupation avec Mme [C] [T].
Suite à des échéances impayées, l’association Soliha Solidaires pour l’Habitat a, par acte de commissaire de justice du 16 novembre 2017, fait délivrer à la locataire un commandement visant la clause résolutoire d’avoir à lui payer la somme de 1 312, 39 euros au titre des redevances et charges impayés, terme de novembre 2017 inclus.
Par acte de commissaire de justice délivré à étude le 28 août 2018, l’association précitée a assigné Mme [C] [T] à comparaître devant le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Pontoise aux fins d’obtenir, sous le bénéfice de l’exécution provisoire, notamment la résiliation du contrat conclu avec la locataire, son expulsion et sa condamnation au paiement des redevances impayées.
L’affaire a été radiée le 1er octobre 2019. L’association a sollicité sa réinscription au rôle le 27 septembre 2021. L’affaire a été appelée à l’audience du 27 janvier 2022 puis renvoyée successivement jusqu’au 6 décembre 2022.
Par jugement contradictoire du 2 février 2023, le juge des contentieux et de la protection du tribunal judiciaire de Pontoise a :
– déclaré recevable l’action engagée et tendant à la réalisation du contrat de bail,
– constaté à compter du 17 janvier 2018, l’acquisition de plein droit de la clause résolutoire insérée à la convention du 16 octobre 2013 liant les parties et dit que la locataire devra quitter les lieux et les rendre libres de toute occupation en satisfaisant aux obligations des locataires sortants, notamment par la remise des clefs,
– ordonné l’expulsion, à défaut de départ volontaire, de la locataire ainsi que celle de tous occupants de son chef et ce au besoin avec le concours de la force publique à l’expiration du délai de deux mois suivant la signification d’un commandement de libérer les lieux,
– condamné la locataire à payer à l’association Soliha Solidaires pour l’Habitat la somme de 10 827,99 euros correspondant à la dette locative, mois de septembre 2022 inclus et ce, avec intérêts au taux légal à compter de l’assignation,
– fixé le montant de l’indemnité d’occupation mensuelle à la somme de 292,56 euros,
– condamné la locataire à payer à l’association Soliha Solidaires pour l’Habitat, à compter du 1er octobre 2022, l’indemnité mensuelle d’occupation, jusqu’à la date de libération effective des lieux,
– dit que le sort des meubles sera réglé conformément aux articles L.433-1 à L433-3 du code des procédures civiles d’exécution,
– débouté la locataire de l’ensemble de ses demandes reconventionnelles,
– condamné la locataire aux dépens,
– ordonné l’exécution provisoire de la présente décision,
– débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
Par déclaration reçue au greffe le 07 août 2023, Mme [C] [T] a relevé appel de ce jugement.
Aux termes de ses conclusions signifiées le 27 octobre 2023, Mme [C] [T] demande à la cour de bien vouloir :
– infirmer le jugement précité en ce qu’il :
* a déclaré recevable l’action engagée et tendant à la réalisation du contrat de bail,
* a constaté à compter du 17 janvier 2018, l’acquisition de plein droit de la clause résolutoire insérée au bail du 16 octobre 2013 liant les parties et dit qu’elle devra quitter les lieux et les rendre libres de toute occupation en satisfaisant aux obligations des locataires sortants, notamment par la remise des clefs,
* a ordonné son expulsion, à défaut de tout départ volontaire, ainsi que celle de tous occupants de son chef et ce, au besoin avec le concours de la force publique à l’expiration du délai de deux mois suivant la signification d’un commandement de libérer les lieux,
* l’a condamnée à payer à l’association Soliha Solidaires pour l’Habitat la somme de 10 827,99 euros correspondant à la dette locative, mois de septembre 2022 inclus et ce, avec intérêts au taux légal à compter de l’assignation,
* fixé le montant de l’indemnité d’occupation mensuelle à la somme de 292,56 euros,
* l’a condamnée à payer à l’association Soliha Solidaires pour l’Habitat, à compter du 1er octobre 2022, l’indemnité mensuelle d’occupation jusqu’à la date de libération effective des lieux,
* a dit que le sort des meubles sera réglé conformément aux articles L.433-1 à L433-3 du code des procédures civiles d’exécution,
* l’a déboutée de l’ensemble de ses demandes reconventionnelles,
* l’a condamnée aux dépens,
* a ordonné l’exécution provisoire de la présente décision,
* a débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
– statuer à nouveau :
– à titre principal
– déclarer que la dette locative n’est pas justifiée,
– débouter l’association Soliha Solidaires pour l’Habitat de sa demande portant sur le remboursement de la dette et sur le paiement de l’indemnité d’occupation, la débouter de sa demande relative à la résiliation de la convention d’occupation,
– à titre subsidiaire :
– se voir autoriser à s’acquitter de la dette locative sur 36 mois et à rester dans les lieux pendant cette période, suspendre les effets de la clause résolutoire pendant l’exécution des délais accordés,
– en tout état de cause :
– débouter l’association Soliha Solidaires pour l’Habitat de toutes ses demandes, plus amples ou contraires,
– condamner l’association Soliha Solidaires pour l’Habitat à lui verser la somme de 5 000 euros en réparation du préjudice moral subi,
– ordonner en tant que besoin la compensation entre les condamnations prononcées,
– déclarer que chacune des parties conservera la charge de ses propres frais et dépens.
Aux termes de ses conclusions signifiées le 2 janvier 2024 par RPVA, l’association Soliha Solidaires pour l’Habitat demande à la cour de bien vouloir :
– débouter Mme [C] [T] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
– confirmer le jugement précédemment rendu en ce qu’il l’a déclarée recevable en son action engagée tendant à la résiliation de la convention,
– confirmer le jugement précédemment rendu en ce qu’il a :
* constaté, à compter du 17 janvier 2018, l’acquisition de plein droit de la clause résolutoire insérée au bail du 16 octobre 2013 liant les parties et dit que la locataire devra quitter les lieux et les rendre libres de toute occupation en satisfaisant aux obligations des locataires sortants, notamment par la remise des clefs,
* ordonné l’expulsion de la locataire, à défaut de tout départ volontaire, ainsi que celle de tous occupants de son chef et ce au besoin avec le concours de la force publique à l’expiration du délai de deux mois suivant la signification d’un commandement de libérer les lieux,
* condamné Mme [C] [T] à lui payer la somme de 10 827,99 euros au titre de la dette locative, mois de septembre 2022 inclus et ce avec intérêts au taux légal à compter de l’assignation,
* fixé le montant de l’indemnité d’occupation mensuelle à la somme de 292,56 euros,
* condamné la locataire à lui payer, à compter du 1er octobre 2022, une indemnité mensuelle d’occupation, jusqu’à la date de libération effective des lieux,
* dit que le sort des meubles sera réglé conformément aux articles L.433-1 à L433-3 du code des procédures civiles d’exécution,
* débouté la locataire de l’ensemble de ses demandes reconventionnelles,
– rectifier l’erreur matérielle et de ce cas, par application des dispositions de l’article 462 du code de procédure civile, rectifier le précédent jugement en précisant qu’il a constaté à compter du 17 janvier 2018 l’acquisition de plein droit de la clause résolutoire insérée dans la convention d’occupation consentie suivant actes sous seing privé du 29 octobre 2013 et avenant du 10 mai 2016 à effet du 1er juin 2016.
– statuer à nouveau, condamner la locataire à lui payer 13 299,24 euros au titre des loyers charges et indemnités d’occupation arrêtée au 13 décembre 2023, terme du mois de décembre 2023 inclus,
en tout état de cause :
– condamner Mme [C] [T] au paiement de la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner Mme [C] [T], au visa de l’article 696 du code de procédure civile, aux entiers dépens de la procédure d’appel et de celle de première instance, dont distraction au profit de la SELARL Jeanine Halimi.
La clôture de l’instruction a été prononcée le 05 septembre 2024.
Conformément à l’article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens soutenus par les parties, la cour se réfère à leurs écritures et à la décision déférée.
Sur l’appel de Mme [C] [T]
– Sur le montant de la redevance dite brute et sur les charges
Au soutien de son appel, Mme [C] [T] conteste le montant de la dette au motif d’une part, que le mode de calcul de la redevance est erroné et d’autre part, que les charges facturées ne sont pas justifiées. Elle fait valoir notamment que l’APL versée au-delà de 132 euros devrait s’imputer sur les autres postes de la redevance, à savoir la participation au ménage et le forfait pour les charges, ces deux postes devant être calculés en fonction du montant de ses revenus.
L’association Soliha Solidaires pour l’Habitat réplique que c’est à juste titre que le premier juge a écarté les arguments de Mme [C] [T] en se référant à l’avenant du 10 mai 2016 qui quantifie les sommes dues en détaillant ce que l’association appelle une ‘redevance brute’.
Sur ce,
La cour estime que le premier juge, à l’issue d’un examen très attentif et exhaustif des pièces produites aux débats, par une juste application des règles de droit exempte d’insuffisance et par des motifs pertinents qu’elle approuve, a fait une exacte appréciation des faits de la cause et du droit des parties pour faire droit à la demande en paiement de l’association Soliha Solidaires pour l’Habitat, les moyens développés par l’appelante au soutien de son appel ne faisant que réitérer sous une forme nouvelle, mais sans justification complémentaire utile, ceux dont le premier juge a connu et auxquels il a répondu.
En effet, si la convention du 16 octobre 1983 liant initialement les parties mentionne expressément un loyer mensuel de 830 euros, l’avenant signé le 10 mai 2016 quantifie, en distinguant chaque poste, les sommes dues, la redevance brute ainsi désignée par la bailleresse étant composée de :
* la participation au ménage : 203,51 euros,
* l’APL estimée à : 132,00 euros,
* d’un forfait de charges : 89,05 euros.
Contrairement à ce que soutient Mme [C] [T], l’APL versée au-delà de 132 euros ne doit pas s’imputer sur les autres postes de la redevance, dans la mesure où le contrat fait référence à une estimation de l’APL et non à la fixation ferme et définitive de l’allocation, ce qui répond à une certaine logique dès lors que le montant de l’APL calculé et alloué dépend de nombreux facteurs susceptibles d’évolution dont l’association n’a pas la maîtrise. Il s’ensuit que c’est à raison que l’association Soliha Solidaires pour l’Habitat soutient que la dernière convention, fondée sur l’accompagnement social, induit le reversement de la totalité de l’APL à son profit, que son montant soit inférieur ou supérieur au montant de l’APL estimé à la somme de 132 euros mais qu’en contrepartie, les frais de participation au ménage et aux charges demeurent intégralement à la charge du résident.
Le jugement doit donc être confirmé en ce qu’il a jugé que c’est à bon droit que l’association Soliha Solidaires pour l’Habitat a délivré le 16 novembre 2017 à Mme [C] [T] le commandement d’avoir à lui payer la somme de 1 312,39 euros au titre des redevances impayées, terme de novembre 2017 inclus.
– Sur l’acquisition de la clause résolutoire et ses conséquences
Mme [C] [T] ne s’étant pas acquittée de la somme due dans le délai de deux mois du commandement de payer, les conditions de la clause résolutoire insérée à la convention d’occupation se sont trouvée réunies au 17 janvier 2018.
Le jugement est donc confirmé en sa disposition ayant constaté l’acquisition de la clause résolutoire au 17 janvier 2018, ainsi qu’en ses dispositions subséquentes relatives à l’expulsion et au sort des meubles.
Mme [C] [T] se borne à contester le montant de l’indemnité d’occupation fixée par le premier juge sans apporter le moindre argument de nature à justifier que son calcul serait erroné.
La cour rappelle que l’indemnité d’occupation, en cas d’occupation sans droit ni titre, est destinée non seulement à compenser les pertes de loyer subies par le bailleur, mais également à l’indemniser du préjudice qu’il subit du fait de l’occupation qui rend indisponible, le logement anciennement loué. Il en résulte qu’elle peut être supérieure au loyer et qu’elle tient compte des circonstances particulières de chaque cas.
En raison de sa nature mixte, indemnitaire et compensatoire, l’indemnité d’occupation constitue une dette de jouissance correspondant à la valeur équitable des lieux et assure, en outre, la réparation du préjudice résultant d’une occupation sans bail.
Aux termes de sa décision, le premier juge a estimé excessif le montant de l’indemnité mensuelle d’occupation sollicité par l’association Soliha Solidaires pour l’Habitat et l’a ramené à la somme de 292,56 euros. Le jugement doit être confirmé sur ce point.
Le jugement doit néanmoins être émendé sur le montant de la condamnation de Mme [C] [T] au paiement des redevances impayées, compte tenu de l’actualisation de la demande de l’association Soliha Solidaires pour l’Habitat en cause d’appel.
L’association Soliha Solidaires pour l’Habitat produit un décompte actualisé au 13 décembre 2023, de l’examen duquel il ressort que Mme [C] [T] lui est redevable de la somme de 13 299,24 euros au titre des redevances, charges et indemnités d’occupation impayées à cette date.
Statuant à nouveau de ce seul chef, Mme [C] [T] doit être condamnée à verser à l’association Soliha Solidaires pour l’Habitat la somme de 13 299,24 euros selon décompte arrêté au 13 décembre 2023.
– Sur la demande de délais formée par Mme [C] [T] et par voie de conséquence sur la demande tendant à voir suspendre les effets de la clause résolutoire
Mme [C] [T] demande à la cour d’être autorisée à s’acquitter de la dette locative sur 36 mois et à rester dans les lieux pendant cette période et par voie de conséquence de suspendre les effets de la clause résolutoire pendant l’exécution des délais accordés.
L’association Soliha Solidaires pour l’Habitat s’oppose aux délais sollicités par Mme [C] [T], qui selon elle, est de parfaite mauvaise foi. Elle fait observer que le logement, objet de la convention, s’inscrivait dans une dispositif d’accompagnement social et formalisé suivant contrat d’accompagnement social en date du 10 juin 2016 avec Mme [C] [T], que l’accompagnement social prévu avait pour objectif de favoriser l’accès de la famille dans le logement d’hébergement dans une perspective d’insertion durable essentiellement ciblée vers l’autonomie du bénéficiaire et la recherche d’un logement, que la résidente n’a manifesté aucune volonté de s’investir dans l’accompagnement social lié au logement, qu’elle ne s’est pas présentée aux rendez-vous prévus pour le suivi social de la famille, ni répondu aux sollicitations des assistantes sociales, qu’en outre, en dépit de plusieurs relances, elle n’a toujours pas justifié de son assurance habitation pourtant obligatoire, qu’elle a cessé tout règlement depuis juillet 2017 et n’a jamais repris le paiement des redevances depuis.
Sur ce,
En l’espèce, le contrat de résidence conclu entre les parties n’est pas soumis aux dispositions l’article 24-V de la loi du 6 juillet 1989 modifiée par l’ordonnance du 19 décembre 2014.
Aux termes de l’article 1343-5 du code civil, le juge peut notamment, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.
Il appartient cependant au débiteur qui sollicite de tels délais de présenter une offre sérieuse et précise de règlement et d’apporter des éléments de preuve concernant sa situation financière, à savoir notamment ses revenus et ses charges prévisibles, éléments permettant de penser raisonnablement qu’il est en capacité de régler l’intégralité de sa dette dans le délai proposé. Il convient également de tenir compte du montant et de l’ancienneté de la dette et des efforts déjà accomplis pour l’honorer.
En l’espèce, s’il est constant que l’association Soliha Solidaires pour l’Habitat est un organisme social dont la mission est de loger et d’accompagner des personnes en grande précarité, il ne peut lui être imposé de laisser indéfiniment à la disposition du résident un logement sans contrepartie financière et ce, d’autant plus qu’aucune redevance n’est plus réglée depuis juillet 2017 et que la dette ne cesse d’augmenter.
Mme [C] [T] doit être déboutée de sa demande de délais de paiement et par voie de conséquence de sa demande tendant à voir suspendre les effets de la clause résolutoire.
– Sur la demande indemnitaire de Mme [C] [T]
Mme [C] [T] qui succombe en ses demandes principales ne peut qu’être déboutée de sa demande d’indemnisation du préjudice moral qu’elle allègue.
Sur la demande de rectification d’erreur matérielle formée par l’association Soliha Solidaires pour l’Habitat
L’association Soliha Solidaires pour l’Habitat sollicite la rectification de l’erreur matérielle affectant le jugement dont appel en ce que le premier juge a constaté à compter du 17 janvier 2018, l’acquisition de plein droit de la clause résolutoire insérée au bail du 16 octobre 2013 liant les parties et dit que la locataire devra quitter les lieux et les rendre libres de toute occupation en satisfaisant aux obligations des locataires sortants, notamment par la remise des clefs. Elle fait valoir que le contrat du 16 octobre 2013 a été conclu entre l’association Pact Arim du Val d’Oise aux droits de laquelle elle se trouve aujourd’hui et Mme [Y], propriétaire de l’appartement, objet de la procédure, alors que la convention d’occupation précaire liant les parties à la présente procédure a été régularisée par acte sous-seing privé du 29 octobre 2013 et par avenant du 10 mai 2016 à effet au 1er juin 2016.
L’association Soliha Solidaires pour l’Habitat demande à la cour de rectifier le jugement en ce sens : ‘constate à compter du 17 janvier 2018, l’acquisition de plein droit de la clause résolutoire insérée dans la convention d’occupation précaire consenti par l’association à Mme [C] [T] suivant acte sous-seing privé en date du 29 octobre 2013 puis par avenant du 10 mai 2016 à effet au 1er juin 2016″.
Sur ce,
Il ressort effectivement de la décision précitée que le premier juge a commis une erreur sur la date de la signature de la convention d’occupation précaire régularisée entre l’association Soliha Solidaires pour l’Habitat et Mme [C] [T], qu’il y a donc lieu de la rectifier selon les modalités précisées au dispositif du présent arrêt.
Sur les mesures accessoires
Mme [C] [T] doit être condamnée aux dépens de la procédure d’appel, les dispositions du jugement contesté relatives aux dépens de première instance étant, par ailleurs, confirmées.
Il y a lieu de faire droit à la demande de l’association Soliha Solidaires pour l’Habitat au titre des frais de procédure par elle exposés en cause d’appel en condamnant Mme [C] [T] à lui verser la somme de 500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
La cour,
Statuant par arrêt contradictoire et par mise à disposition au greffe,
Rectifie le jugement rendu le 2 février 2023 par le juge des contentieux et de la protection du tribunal judiciaire de Pontoise en ce sens : ‘constate à compter du 17 janvier 2018, l’acquisition de plein droit de la clause résolutoire insérée dans la convention d’occupation précaire consenti par l’association à Mme [C] [T] suivant acte sous-seing privé en date du 29 octobre 2013 puis par avenant du 10 mai 2016 à effet au 1er juin 2016″,
Confirme pour le surplus le jugement rendu le 2 février 2023 par le juge des contentieux et de la protection du tribunal judiciaire de Pontoise en toutes ses dispositions, sauf à l’émonder sur le montant de l’arriéré impayé au titre des redevances, charges et indemnités d’occupation dus par Mme [C] [T], compte tenu de l’actualisation de la demande de l’association Soliha Solidaires pour l’Habitat à ce titre en cause d’appel,
Statuant à nouveau de ce seul chef,
Condamne Mme [C] [T] à verser à l’association Soliha Solidaires pour l’Habitat la somme de 13 299,24 euros selon décompte arrêté au 13 décembre 2023 à ce titre,
Y ajoutant,
Déboute Mme [C] [T] de sa demande d’indemnisation du préjudice moral qu’elle allègue,
Déboute Mme [C] [T] de sa demande de délais de paiement et par voie de conséquence de celle tendant à voir suspendre les effets de la clause résolutoire,
Condamne Mme [C] [T] à verser à l’association Soliha Solidaires pour l’Habitat la somme de 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne Mme [C] [T] aux dépens d’appel qui pourront être recouvrés conformément aux règles régissant l’aide juridictionnelle.
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Monsieur Philippe JAVELAS, président et par Madame Gaëlle RULLIER, greffière placée, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La greffière placée, Le président,
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