Conflit sur l’exécution des obligations contractuelles en matière de bail commercial

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Conflit sur l’exécution des obligations contractuelles en matière de bail commercial

L’Essentiel : La SAS Gabdimaline, spécialisée dans la restauration asiatique, a signé un bail de sous-location avec Biltoki pour un local de 12,44 m² dans les Halles de Talence, avec un loyer basé sur le chiffre d’affaires. En juin 2023, Biltoki a mis en demeure Gabdimaline pour un arriéré de loyer de 8 916,73 euros, suivi d’un commandement de payer. Le tribunal a débouté Biltoki de ses demandes d’expulsion, mais a condamné Gabdimaline à régler 29 393,97 euros. Gabdimaline a interjeté appel, et la cour a confirmé la décision, imposant des paiements supplémentaires pour loyers et frais d’appel.

Contexte des Parties

La SAS Gabdimaline est engagée dans la restauration traditionnelle asiatique, tandis que la société Merkatua, devenue Biltoki, se spécialise dans la gestion de marchés alimentaires. La Sarl Biltoki Talence, associée unique de Biltoki, a consenti des droits locatifs à des commerces alimentaires, dont la société Gabdimaline.

Accord de Sous-Location

Un bail commercial de sous-location a été signé le 19 octobre 2018 entre Biltoki et Gabdimaline pour un local de 12,44 m² dans les Halles de Talence, avec une durée de 9 ans. Le loyer est fixé à 8% du chiffre d’affaires HT, avec un minimum garanti de 17 400 euros par an.

Mise en Demeure et Commandement de Payer

Le 21 juin 2023, Biltoki Talence a mis en demeure Gabdimaline pour un arriéré de loyer de 8 916,73 euros. Un commandement de payer a été délivré le 11 juillet 2023 pour un montant total de 11 586,73 euros TTC, suivi d’une saisie conservatoire sur les meubles de Gabdimaline le 26 octobre 2023.

Procédure Judiciaire

Le 17 novembre 2023, Biltoki Talence a assigné Gabdimaline devant le tribunal judiciaire de Bordeaux pour faire constater l’acquisition de la clause résolutoire et ordonner son expulsion, tout en réclamant le paiement des arriérés de loyer.

Décision du Tribunal Judiciaire

Le 17 juin 2024, le juge des référés a débouté Biltoki Talence de ses demandes d’expulsion et de constatation de la clause résolutoire, tout en condamnant Gabdimaline à payer 29 393,97 euros pour loyers et charges. Les demandes reconventionnelles de Gabdimaline ont également été rejetées.

Appel de Gabdimaline

Gabdimaline a interjeté appel le 25 juin 2024, contestant la décision du tribunal. L’affaire a été fixée pour audience le 18 novembre 2024, avec une clôture de la procédure le 4 novembre 2024.

Incidents de Procédure

Le 14 novembre 2024, Gabdimaline a demandé l’irrecevabilité des conclusions de Biltoki Talence notifiées après la clôture de l’instruction. Biltoki Talence a réclamé la révocation de l’ordonnance de clôture.

Arguments des Parties

Gabdimaline a demandé l’infirmation de l’ordonnance de référé et le remboursement de 40 213,62 euros pour charges non régularisées. Biltoki Talence a demandé la confirmation de la condamnation de Gabdimaline pour 29 393,97 euros et a réclamé une provision supplémentaire de 22 834,73 euros.

Décision de la Cour d’Appel

La cour a confirmé l’ordonnance de référé, condamnant Gabdimaline à payer 17 009,63 euros pour loyers et charges dus depuis le 6 mars 2024, ainsi que 3 000 euros pour les frais d’appel. Gabdimaline a également été condamnée aux dépens d’appel.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conséquences de la mise en œuvre de la clause résolutoire dans le cadre d’un bail commercial ?

La clause résolutoire est une disposition contractuelle qui permet à un bailleur de mettre fin au contrat de bail en cas de manquement par le preneur à ses obligations, notamment le non-paiement des loyers.

Selon l’article L.145-41 du Code de commerce, « le bailleur peut, en cas de non-paiement des loyers, mettre en œuvre la clause résolutoire prévue au contrat ».

Cette clause doit être expressément stipulée dans le contrat de bail et son application nécessite généralement une mise en demeure préalable.

Dans le cas présent, la société Biltoki Talence a mis en demeure la société Gabdimaline de régler ses arriérés de loyer, ce qui constitue une étape préalable à l’application de la clause résolutoire.

Cependant, le juge des référés a débouté la société Biltoki Talence de sa demande de constatation de l’acquisition de la clause résolutoire, ce qui signifie que le non-paiement des loyers n’a pas conduit à la résiliation du bail à ce stade.

Comment se justifie le montant des loyers et charges dus par la société Gabdimaline ?

Le montant des loyers et charges dus par la société Gabdimaline est justifié par les dispositions contractuelles et les éléments comptables fournis par la société Biltoki Talence.

L’article 1103 du Code civil stipule que « les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits ».

Dans le bail commercial, il est précisé que le loyer est de 8% du chiffre d’affaires HT réalisé par le sous-locataire, avec un loyer minimum garanti de 17 400 euros HT par an.

L’article 8-4 du contrat de sous-location précise également que le paiement des charges doit être effectué mensuellement et d’avance, en même temps que le loyer.

La société Biltoki Talence a produit un grand livre comptable qui atteste que la société Gabdimaline est débitrice de la somme de 29 393,97 euros au 6 mars 2024, déduction faite des pénalités et frais de procédure.

Le juge des référés a considéré que ce montant ne pouvait être sérieusement contesté, ce qui a conduit à la condamnation de la société Gabdimaline à payer cette somme.

Quelles sont les implications de l’article 700 du Code de procédure civile dans cette affaire ?

L’article 700 du Code de procédure civile permet au juge de condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme au titre des frais exposés non compris dans les dépens.

Cet article vise à compenser les frais de justice engagés par la partie qui a obtenu gain de cause.

Dans le cas présent, la cour a condamné la société Gabdimaline à payer à la société Biltoki Talence la somme de 3 000 euros sur le fondement de cet article, en raison de la perte de la société Gabdimaline dans le cadre de l’appel.

Il est important de noter que cette somme est distincte des dépens, qui sont les frais de justice liés à la procédure elle-même.

La décision de la cour de faire application de l’article 700 souligne l’importance de la prise en charge des frais de justice par la partie qui succombe dans le litige.

Quels sont les effets de la décision de la cour d’appel sur les demandes de provision ?

La cour d’appel a confirmé l’ordonnance du juge des référés qui avait condamné la société Gabdimaline à payer une provision de 29 393,97 euros pour loyers et charges.

Elle a également accordé une provision supplémentaire de 17 009,63 euros, correspondant à des loyers et charges exigibles depuis le 6 mars 2024.

Cette décision est fondée sur l’article 834 du Code de procédure civile, qui permet d’accorder des provisions en cas d’urgence et lorsque l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable.

La cour a constaté que la société Gabdimaline n’avait pas contesté de manière sérieuse le montant des loyers et charges dus, ce qui a justifié l’octroi de ces provisions.

Ainsi, la décision de la cour d’appel a des effets significatifs sur la situation financière de la société Gabdimaline, qui se voit contrainte de régler des sommes importantes au titre des loyers et charges.

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

QUATRIÈME CHAMBRE CIVILE

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ARRÊT DU : 06 JANVIER 2025

N° RG 24/02950 – N° Portalis DBVJ-V-B7I-N2Z7

S.A.S. GABDIMALINE

c/

S.A.R.L. BILTOKI TALENCE

Nature de la décision : APPEL D’UNE ORDONNANCE DE REFERE

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la Cour : ordonnance rendue le 17 juin 2024 (R.G. 23/02462) par le Président du Tribunal Judiciaire de Bordeaux suivant déclaration d’appel du 25 juin 2024

APPELANTE :

S.A.S. GABDIMALINE, agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 3]

Représentée par Maître Baptiste GUYON de la SELARL ALTEA AVOCAT, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE :

S.A.R.L. BILTOKI TALENCE, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 1]

Représentée par Maître Eva DION substituant Maître Xavier DELAVALLADE de la SCP DELAVALLADE – RAIMBAULT, avocat au barreau de BORDEAUX, et assistée de Maître Virginie TERRIER, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 18 novembre 2024 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Anne-Sophie JARNEVIC, Conseiller chargé du rapport,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Jean-Pierre FRANCO, Président,

Madame Sophie MASSON, Conseiller,

Madame Anne-Sophie JARNEVIC,Conseiller,

Greffier lors des débats : Monsieur Hervé GOUDOT

ARRÊT :

– contradictoire

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

* * *

FAITS ET PROCÉDURE:

La SAS Gabdimaline a pour activité la restauration traditionnelle asiatique sur place et à emporter.

La société Merkatua, devenue société Biltoki, a pour activité la gestion de marchés alimentaires.

La Sarl Biltoki Talence a pour associé unique la société Biltoki.

Par acte sous seing privé du 1er juin 2017, la Sarl Halles de Talence a consenti des droits locatifs à des commerces alimentaires à la société Biltoki.

Par acte sous seing privé du 19 octobre 2018, la société Biltoki a consenti à la société Gabdimaline un bail commercial de sous-location portant sur un local à usage commercial situé au sein des Halles de Talence (Gironde), [Adresse 2]. Le local est situé au ‘Stand n° Q’ pour une surface d’environ 12,44 m². Le bail a été consenti pour une durée de 9 années à compter du 19 octobre 2018 jusqu’au 18 octobre 2027.

Par acte sous seing privé du 17 novembre 2022, un traité d’apport partiel d’actif a été conclu entre la société Biltoki en qualité de société apporteuse et la société Biltoki Talence en qualité de société bénéficiaire, cette dernière devenant bailleresse de la société Gabdimaline.

Le bail conclu prévoit que le loyer applicable est de 8% du chiffre d’affaires HT réalisé par le sous-locataire, avec un loyer annuel HT minimum garanti du 17 400 euros. Le loyer est payable mensuellement et d’avance le 1er de chaque mois.

Le 21 juin 2023, la société Biltoki Talence a mis en demeure la société Gabdimaline d’avoir à lui régler la somme de 8 916,73 euros au titre d’arriérés de loyer.

Le 11 juillet 2023, un commandement de payer visant la clause résolutoire a été délivré au preneur, par la société Biltoki, et non par la société Biltoki Talence, pour un montant de 11 586,73 euros TTC. La même société Biltoki a également fait pratiquer le 26 octobre 2023 une saisie-conservatoire sur le stand de la société Gabdimaline, saisissant les meubles professionnels s’y trouvant.

Par acte du 17 novembre 2023, la société Biltoki Talence a assigné la société Gabdimaline devant le tribunal judiciaire de Bordeaux statuant en référé, aux fins notamment de faire constater l’acquisition de la clause résolutoire, de voir ordonner l’expulsion de la société Gabdimaline des lieux, et de la voir condamner au paiement de l’arriéré de loyers.

Par ordonnance du 17 juin 2024, le juge des référés du tribunal judiciaire de Bordeaux a statué comme suit :

– Déboute la SARL Biltoki Talence de ses demandes aux fins de constat d’acquisition de la clause résolutoire et d’expulsion de la SARL Gabdimaline,

– Condamne la SARL Gabdimaline à payer à la SARL Biltoki Talence la somme de 29 393,97 euros au titre des loyers et provisions de charges arrêtés au 06 mars 2024, mensualité de mars comprise,

– Déboute la SARL Biltoki Talence du surplus de ses demandes,

– Déboute la SARL Gabdimaline de sa demande reconventionnelle,

– Dit que chacune des parties conservera la charge de ses dépens,

– Déboute les parties de leur demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration du 25 juin 2024, la SAS Gabdimaline a interjeté appel de cette décision, énonçant les chefs de la décision expressément critiqués, intimant la Sarl Biltoki Talence.

Le 3 juillet 2024, le président de la chambre saisie a constaté que l’affaire relevait d’une fixation à bref délai en application de l’article 905 du code de procédure civile, et fixé la date de l’audience au 18 novembre 2024, avec une clôture de la procédure le 4 novembre 2024.

Par ordonnance du 03 octobre 2024, la première présidente de chambre déléguée, saisie par la société Gabdimaline, a :

– ordonné la jonction entre les procédures enrôlées sous les n°RG 24/00127 et n°RG 24/00137 sous le numéro RG 24/00127.

– ordonné l’arrêt de l’exécution provisoire attachée à l’ordonnance de référé rendue le 17 juin 2024 par le tribunal judiciaire de Bordeaux,

– débouté la SARL Biltoki Talence de sa demande de radiation du rôle de la cour d’appel de l’affaire enregistrée sous le numéro RG 24/02950,

– condamné la SARL Biltoki Talence à payer à la SAS Gabdimaline la somme de 1000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et l’a déboutée de sa demande du même chef,

– condamné la SARL Biltoki Talence aux dépens.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES:

Par conclusions déposées en dernier lieu le 9 octobre 2024, auxquelles il convient de se reporter pour le détail des moyens et arguments, la SAS Gadbimaldine demande à la cour de :

Vu les articles, 117, 119, 700, 834, 835 du code de procédure civile

Vu les articles L.145-41 du code de commerce,

Vu les articles 1231-5 et 1219 du code civil du code civil,

Vu la jurisprudence,

Vu les pièces versées au dossier,

Recevant la SARL Gabdimaline en son appel et y faisant droit,

– Infirmer l’ordonnance déférée en ce qu’elle a :

‘ « Condamné la SARL Gabdimaline à payer à la SARL Biltoki Talence la somme de 29 393,97 euros au titre des loyers et provisions de charges arrêtés au 06 mars 2024, mensualité de mars comprise ;

‘ Débouté la SARL Gabdimaline de sa demande reconventionnelle ;

‘ Dit que chacune des parties conservera la charge de ses dépens ;

‘ Déboute les parties de leur demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ».

Statuant à nouveau :

A titre principal

– Condamner la société Biltoki Talence à verser à la société Gabdimaline la somme provisionnelle de 40 213,62 euros TTC au titre du remboursement des appels de charges versés et non régularisés,

En tout état de cause,

– Condamner Biltoki Talence aux dépens de première instance et d’appel ;

– Condamner Biltoki Talence à payer à Gabdimaline la somme de 10 000,00 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés en première instance et en cause d’appel.

Par conclusions déposées en dernier lieu le 4 novembre 2024, auxquelles il convient de se reporter pour le détail des moyens et arguments, la Sarl Biltoki Talence demande à la cour de :

Vu les articles L.145-1 et suivants du code de commerce,

Vu les articles 1103 et 1728 du code civil,

Vu le contrat de bail commercial de sous location du 19 octobre 2018,

Vu le courrier de mise en demeure du 21 juin 2023,

Vu l’ordonnance de référé du 17 juin 2024,

Vu le décompte,

– Confirmer l’ordonnance du juge des référés du 17 juin 2024 en ce qu’elle a condamné la société Gabdimaline à payer à la société Biltoki Talence la somme de 29 393,97 euros au titre des loyers et provisions de charges arrêtés au 6 mars 2024, mensualité de mars comprise,

– Confirmer l’ordonnance du juge des référés du 17 juin 2024 en ce qu’elle a débouté la société Gabdimaline de sa demande reconventionnelle,

A titre reconventionnel :

– Condamner la société Gabdimaline à payer à la société Biltoki la somme de 22 834,73 euros au titre des loyers et charges depuis le 6 mars 2024.

– Condamner la société Gabdimaline à payer à la société Biltoki la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Condamner la société Gabdimaline aux entiers dépens de la première instance et de l’appel.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et des moyens des parties, il est, par application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, expressément renvoyé à la décision déférée et aux derniers conclusions écrites déposées.

Une ordonnance de clôture est intervenue le 04 novembre 2024, pour l’audience fixée au 18 novembre 2024.

Par conclusions d’incident du 14 novembre 2024 adressées au président de la chambre, la société Gabdimaline demande de déclarer irrecevables toutes les conclusions de la société Biltoki Talence notifiées le 4 novembre 2024 ou ultérieures, de déclarer irrecevables les pièces n° 15 à 22 visées dans les conclusions du 4 novembre ou toutes pièces ultérieures, de condamner la société Bitoki Talence aux dépens de cette procédure d’incident ainsi qu’à lui payer 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions du 15 novembre 2024 adressées à la cour, la société Biltoki Talence demande la révocation de l’ordonnance de clôture et sa fixation au jour des plaidoiries.

A l’audience du 18 novembre 2024, la cour a mis l’affaire en délibéré au 6 janvier 2025, et a offert aux parties la possibilité de produire une note en délibéré au plus tard le 9 décembre 2024.

Par note en délibéré déposée le 25 novembre 2024, la société Gabdimaline, appelante, s’explique sur sa demande de provision supplémentaire, introduite par les conclusions contestées, et présente les mêmes prétentions que celles de ses conclusions du 9 octobre 2024 ci-dessus.

La société Biltoki Talence n’a pas déposé de note en délibéré.

MOTIFS DE LA DECISION:

Sur la procédure et la recevabilité des conclusions et pièces

1- Par ses conclusions du 14 novembre 2024, la société Gabdimaline demande de déclarer irrecevables toutes les conclusions de la société Biltoki Talence notifiées le 4 novembre 2024 ou ultérieures, de déclarer irrecevables les pièces n° 15 à 22 visées dans les conclusions du 4 novembre ou toutes pièces ultérieures. L’appelante fait valoir que l’ordonnance de clôture a été notifiée le 4 novembre 2022 à 10h44, et que, le même jour mais postérieurement, le conseil de la société Biltoki Talence a notifié : des conclusions par message à 16h49, des conclusions par message à 18h33, et encore des conclusions à 18h40, et que son conseil n’a pas disposé du temps utile pour les examiner, alors qu’elle font état de pièces nouvelles, et encore qu’une nouvelle demande de provision a été formulée. La société Gabdimaline réitère ses explications par sa note en délibéré du 25 novembre 2024 ci-dessus.

2- Par conclusions du 15 novembre 2024, la société Biltoki Talence a répliqué en demandant le rabat de l’ordonnance de clôture et le report de la clôture au jour des plaidoiries.

Sur ce,

3- Selon l’article 15 du code de procédure civile, les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu’elles produisent et les moyens de droit qu’elles invoquent, afin que chacune soit à même d’organiser sa défense. Et, en vertu de l’article 16 du même code, le juge doit en toutes circonstances faire observer, et observer lui-même, le principe de la contradiction.

4- Il est constant que le dépôt des conclusions de la société Biltoki Talence le 4 novembre 2024, ainsi que les pièces n° 15 à 22 notifiées au même moment, est tardif comme postérieur à la clôture de l’instruction de la procédure telle qu’elle avait été annoncée au parties le 3 juillet 2024, et qui était intervenue le même 4 novembre 2024.

5- Toutefois, restent recevables les conclusions relatives aux loyers, arrérages, intérêts et autres accessoires échus jusqu’à l’ouverture des débats, si leur décompte ne peut faire l’objet d’aucune contestation sérieuse, ainsi que les demandes de révocation de l’ordonnance de clôture.

6- Il apparaît que le retard dans le dépôt des conclusions et pièces ci-dessus de la société Biltoki Talence sont liées à une actualisation de sa créance de loyers et charges, et à la date de clôture de son exercice comptable, qui l’a empêchée de produire les justificatifs de régularisation de charges avant le 4 novembre 2024.

7- Il y a donc lieu de constater que le dépôt tardif est justifié, et, en conséquence, de révoquer en tant que de besoin l’ordonnance rendue la 4 novembre 2024, de reporter la clôture de l’instruction au jour des plaidoiries, mais aussi de constater que la cour a accordé aux parties, et donc à la société Gabdimaline, appelante, un délai supplémentaire du 18 novembre au 9 décembre 2024 pour déposer de nouvelles observations par note en délibéré, ce qui a permis de respecter le principe du contradictoire. Ainsi, la société Gabdimaline a pu ainsi disposer du temps nécessaire pour faire valoir toutes observations utiles, particulièrement dans sa note en délibéré précitée, en réponse aux conclusions du 4 novembre 2024 de la société Biltoki Talence.

8- La cour a donc fait respecter le principe du contradictoire, et il n’y a pas lieu de prononcer l’irrecevabilité de conclusions ou de pièces.

Sur les demandes des parties

9- Il sera observé que la demande de la société Biltoki Talence, bailleresse, de constat d’acquisition de la clause résolutoire et d’expulsion de la société Gabdimaline, rejetée par le premier juge, n’est pas renouvelée devant la cour d’appel.

10- La société Gabdimaline, preneuse au bail appelante, demande à la cour d’infirmer l’ordonnance de référé en ce qu’elle l’a condamnée à payer à la société Biltoki Talence la somme de 29 393,97 euros, et, statuant à nouveau, de condamner la société Biltoki Talence à lui payer une provision de 40 213,62 euros.

11- La société Biltoki Talence, bailleresse intimée, demande la confirmation de la condamnation de la société Gabdimaldine à lui payer une provision de 29 393,97 euros, ainsi que du débouté de la société Gabdimaldine de sa demande reconventionnelle. Elle demande aussi une nouvelle provision de 22 834,73 euros.

Sur ce,

12- Aux termes des dispositions de l’article 834 du code de procédure civile, dans tous les cas d’urgence, le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence, peuvent ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend, et de celles de l’article 835 du même code que ces mêmes magistrats peuvent toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite. Dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, ils peuvent accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire.

Sur la provision de 29 393,97 euros allouée pour loyers et charges

13- La société Gabdimaline, appelante, fait valoir que la provision sur charge à laquelle elle a été condamnée est sérieusement contestable en raison : des manquements contractuels répétés de la société Biltoki Talence justifiant son exception d’inexécution, de l’impossibilité de distinguer les charges et les loyers dans la provision accordée, du manque de caractère probant des pièces produites, s’agissant seulement d’un extrait d’un présumé grand livre du bailleur ; qu’il n’est pas produit un état récapitulatif des charges conforme à l’article 8-4 du contrat de sous-location ou L. 145-40-2 du code de commerce.

14- La société Biltoki Talence oppose que la provision allouée par le juge des référés de 29 393,97 euros au titre des loyers et provisions sur charges arrêtés au 6 mars 2024 doit être confirmée pour les motifs retenus par le premier juge ; que ce montant ressort de son grand livre comptable, déduction faite des pénalités et frais de procédure ; que ces loyers et charges ont fait l’objet d’une facturation non contestée par le preneur ; que celle-ci a donné son accord en 2020 sur les modalités de la répartition, d’ailleurs expressément indiquées dans le bail commercial ; et que les arguments opposés au paiement sont sans fondement.

Sur ce,

15- Il résulte de l’article 1103 du code civil que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits, et de l’article 1278 du même code que le preneur à bail est notamment tenu de payer le prix du bail aux termes convenus.

16- En l’espèce, l’article 6 – « Loyer » du Bail stipule que le loyer variable applicable est de 8% du chiffre d’affaires hors taxes réalisé par le Sous-Locataire avec un loyer annuel hors taxes minimum garanti prévu à d’un montant de de 17.400 euros HT.

17- Le loyer ci-dessus est, selon l’article 6-3 « Paiement du loyer », payable mensuellement et d’avance le 1er de chaque mois. L’article 8.4 « Paiement des charges-Provision » dispose que le paiement de la quote-part des charges communes et des charges privatives à rembourser par le Sous-Locataire au Locataire Principal aura lieu au moyen de provisions payables mensuellement et d’avance en même

temps que chaque terme de loyer et qu’un état des comptes et une actualisation des paiements seront fait au réel chaque fin de trimestre.

18- L’article 8-6 stipule que : « Si tout ou partie des loyers, charges et accessoires n’était pas réglé à bonne date, le Sous-Locataire devra payer au Locataire Principal, en sus des sommes dues et à titre d’indemnité destinée à compenser les frais occasionnés par ce recouvrement tardif, une somme égale à 6% du montant des sommes impayées si ce recouvrement au lieu avant l’intervention d’un huissier, et à 12% du montant de ces mêmes sommes si le recouvrement devait être poursuivi par un huissier et/ou par voie judiciaire, n’eût il été délivré qu’un simple commandement ».

19- La validité du bail n’est pas contestée, non plus que les facturations émises par le bailleur, qui font bien la distinction entre loyers et provisions sur charges (pièces 15 à 21 du bailleur).

20- Or, il résulte du grand livre comptable de la société Biltoki Talence (sa pièce n° 13), qui ne peut être sérieusement contesté par la preneuse, que la société Gabdimaline est bien débitrice de la somme de 29 393,97 euros de loyers et charges au 6 mars 2024, déduction faite des pénalités et frais de procédure.

21- La comptabilité régulière de la société Biltoki Talence est opposable à la société Gabdimaline, s’agissant d’un litige entre sociétés commerciales. Par ailleurs, la preneuse s’est engagée le 20 juillet 2023 à payer les « loyers minimums » et les « provisions pour charges habituelles » (pièce n° 9 du bailleur) et le 26 octobre 2023 « à régler comme prévu avec l’un des fondateurs 17 400 euros HT de loyer en 2023 sur 2023 et les provisions de charges » (pièce n° 8 du bailleur).

22- Les objections de la société preneuse sur une « inexécution » du bailleur qui justifierait l’absence de paiement sont inopérantes, en ce qu’elles ne portent que sur une absence alléguée mais non établie d’état récapitulatif des charges.

23- Ainsi, le montant de la dette locative ne peut être sérieusement contesté, et c’est de manière exacte que le juge des référés, après avoir écarté les frais de procédure et les pénalités, a condamné la société Gabdimaline à payer la provision de 29 393,97 euros.

Sur la demande d’une provision supplémentaire de 22 834,73 euros

24- Par ses dernières conclusions, la société Biltoki Talence, actualisant sa créance, demande une provision supplémentaire au titre des loyers et charges exigibles depuis le 6 mars 2024. Elle fait valoir que, depuis la décision du premier juge, elle n’a reçu que des paiements partiels et qu’une nouvelle dette locative de 22 834,73 euros est née.

25- La société Gabdimaline oppose que cette demande est sérieusement contestable ; que la preuve n’est pas rapportée par le demanderesse ; qu’à nouveau, elle est dans l’incapacité de comprendre le bien fondé des charges dont le paiement est sollicité ; qu’il est inclus des frais dont l’exigibilité n’est pas démontrée.

Sur ce,

26- La société Biltoki Talence justifie comme ci-dessus que, depuis la décision du premier juge, la société Gabdimaline n’a pas repris le paiement normal des loyers et charges, et qu’une nouvelle dette locative de 22 834,73 euros s’est constituée (grand livre, pièce n° 21), déduction faite de paiements partiels de 7 696,80 euros le 15 avril 2024 et de 1 800,90 euros le 13 juillet 2024.

27- Ces justifications ne sont pas utilement renversées en leur principe par la société Gabdimaline. Les pièces n° 19.6, 19.9, 19.10, 19.11 et 19.12 qu’elle invoque permettent toutefois de constater que les sommes de 807,60 euros, 220,22 euros, 69,28 euros, 864 euros et 3864 euros correspondent à de frais juridiques en lien avec la présente procédure, qui, comme déjà jugé en première instance, relèvent des frais irrépétibles et doivent être déduits de la somme demandée au titre des loyers et charges.

28- La société Gabdimaline sera en conséquence également condamnée à verser à la société Biltoki Talence la somme provisionnelle de 22 834,73 ‘ 5 825,10 = 17 009,63 euros.

Sur la provision demandée par la société preneuse en remboursement de charges et taxes

29- La société Gadbimaline demande une provision de 40 213,62 euros, rejetée par le juge des référés, correspondant aux appels de provisions pour charges et taxes foncières de 2018 à 2022. Elle soutient que ces appels sont sans cause, la société Biltoki Talence n’ayant pas respecté ses obligations de fourniture d’un état récapitulatif ; qu’aucune pièce ne correspond à un état récapitulatif des charges, comme l’a relevé le premier président dans son ordonnance.

30- La société Biltoki Talence oppose que la demande reconventionnelle a déjà rejetée par le premier juge ; qu’elle a toujours justifié des charges dans leur principe et leur montant ; que le preneur a reconnu à plusieurs reprises être redevable des charges pour 2023, sans contester le montant et le principe des charges antérieures.

Sur ce,

31- La société Biltoki Talence peut sans être sérieusement contredite affirmer qu’elle a toujours justifié des charges dans leur principe et leur montant, et justifié auprès des commerçants de la parfaite justification de la répartition (ses pièces n° 14 et 20)

32- Comme l’a relevé exactement le premier juge, il apparaît en sus que le gérant de la société Gabdimaline s’est engagé en juillet 2023 et en octobre 2023 à régler des provisions sur charges (pièces n° 8 et 9 du bailleur), et que la preneuse a bénéficié de régularisations régulières, de sorte que la demande de la société Gabdimaline, sérieusement contestable, a été écartée à bon droit par le juge des référés.

Sur les autres demandes

33- Partie tenue aux dépens d’appel, la société Gabdimaline paiera à la société Biltoki Talence la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en référé,

Fixe la clôture de l’instruction à la date des plaidoiries, et, vu le délai supplémentaire accordé aux parties pour présenter des observations par note en délibéré,

Dit n’y avoir lieu à prononcer l’irrecevabilité de conclusions ou de pièces,

Confirme l’ordonnance rendue entre les parties le 17 juin 2024 par le juge des référés du tribunal judiciaire de Bordeaux,

Y ajoutant,

Condamne la société Gabdimaline à payer à la société Biltoki Talence la somme de 17 009,63 euros à titre de provisions sur les loyers et charges dus depuis le 6 mars 2024,

Condamne la société Gabdimaline à payer à la société Biltoki Talence la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,

Condamne la société Gabdimaline aux dépens d’appel.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Jean-Pierre FRANCO, président, et par Monsieur Hervé GOUDOT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier Le Président


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