L’Essentiel : Mme [K] [R] a été engagée par la SAS [4] en tant qu’auxiliaire petite enfance le 1er septembre 2016, sous un contrat à durée indéterminée. Après avoir constaté l’absence de paiement des primes conventionnelles, elle a demandé leur versement, mais l’employeur a refusé, entraînant une rupture conventionnelle. Le 17 octobre 2022, Mme [K] [R] a assigné la SAS devant le conseil de prud’hommes, qui a condamné la société à lui verser des sommes dues. En appel, la SAS a contesté cette décision, arguant que la convention collective n’était pas applicable, tandis que Mme [K] [R] a défendu ses droits basés sur son contrat.
|
Engagement de Mme [K] [R]Mme [K] [R] a été engagée par la SAS [4] en tant qu’auxiliaire petite enfance par un contrat à durée indéterminée le 1er septembre 2016. Ce contrat stipule que la convention collective « médico sociaux » s’applique à sa relation de travail, bien que la société ait contesté cette adhésion. Demande de paiement des primesAprès avoir constaté qu’elle n’avait pas perçu les primes conventionnelles, Mme [K] [R] a demandé leur paiement, mais l’employeur a refusé, arguant que la mention de la convention collective était une erreur. Ce désaccord a conduit à une rupture conventionnelle de son contrat. Assignation devant le conseil de prud’hommesLe 17 octobre 2022, Mme [K] [R] a assigné la SAS [4] devant le conseil de prud’hommes d’Arras pour obtenir le paiement des primes dues selon la convention collective. Le jugement rendu le 6 mai 2024 a condamné la société à verser plusieurs sommes à Mme [K] [R], incluant des primes, des salaires dus, des congés payés, ainsi que des dommages et intérêts pour résistance abusive. Appel de la décisionLa SAS [4] a interjeté appel de cette décision le 12 juillet 2024, contestant l’application de la convention collective et soutenant que les primes demandées n’étaient pas dues. Elle a également demandé la suspension de l’exécution provisoire du jugement. Arguments de la SAS [4]La société a avancé plusieurs arguments, notamment que la convention collective n’était pas applicable car elle n’était pas adhérente à un syndicat signataire. Elle a également contesté le droit de Mme [K] [R] à certaines primes, affirmant qu’elles étaient discrétionnaires ou non justifiées. Réponse de Mme [K] [R]Mme [K] [R] s’est opposée à la demande de la SAS [4] lors de l’audience, soutenant que ses droits étaient fondés sur la convention collective mentionnée dans son contrat. Décision du premier président de la cour d’appelLe premier président a examiné les arguments des deux parties et a constaté que la société avait des moyens sérieux d’annulation du jugement, notamment en ce qui concerne le calcul des sommes dues. Il a également pris en compte la situation financière fragile de la SAS [4], qui risquait de se retrouver en cessation de paiements. Ordonnance finaleEn conséquence, le 25 novembre 2024, le premier président a ordonné l’arrêt de l’exécution provisoire du jugement du conseil de prud’hommes, laissant chaque partie responsable de ses propres dépens. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la portée de la convention collective dans le contrat de travail de Mme [K] [R] ?La convention collective mentionnée dans le contrat de travail de Mme [K] [R] est celle des « médico sociaux ». Selon l’article L. 2221-1 du Code du travail, les conventions collectives ont pour but de déterminer les conditions d’emploi et de travail ainsi que les garanties sociales des salariés. L’article L. 2232-1 précise que les conventions collectives s’appliquent aux employeurs et aux salariés qui en sont signataires ou qui y adhèrent. Dans le cas présent, la SAS [4] a affirmé ne pas être adhérente à cette convention, ce qui soulève la question de son application. Il est également important de noter que l’article L. 2261-1 du Code du travail stipule que les conventions collectives peuvent être étendues par arrêté ministériel, ce qui n’est pas le cas ici. Par conséquent, l’absence d’adhésion de l’employeur à la convention collective pourrait remettre en question son application à Mme [K] [R]. En résumé, la portée de la convention collective dans le contrat de travail de Mme [K] [R] est contestée par l’employeur, qui soutient que la mention de cette convention était une erreur, ce qui pourrait affecter les droits de la salariée. Quelles sont les conditions pour suspendre l’exécution provisoire d’un jugement ?L’article 514-3 du Code de procédure civile énonce les conditions dans lesquelles le premier président peut être saisi pour arrêter l’exécution provisoire d’une décision. Il stipule que cela peut être fait lorsqu’il existe un moyen sérieux d’annulation ou de réformation et que l’exécution risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives. De plus, l’article 517-1 du même code, qui s’applique à l’exécution provisoire facultative, prévoit des conditions similaires. Cela signifie que pour qu’une demande de suspension soit acceptée, il faut démontrer à la fois l’existence d’un moyen sérieux et le risque de conséquences excessives. Dans le cas présent, la société [4] a avancé des arguments concernant la fragilité économique de sa situation, ce qui pourrait constituer un risque de conséquences manifestement excessives. L’article R. 1454-28 du Code du travail, qui limite l’exécution des décisions du conseil de prud’hommes, renforce également cette analyse. Ainsi, les conditions légales pour suspendre l’exécution provisoire du jugement du conseil de prud’hommes du 6 mai 2024 semblent remplies, justifiant la décision du premier président. Quels sont les droits de Mme [K] [R] concernant les primes conventionnelles ?Les droits de Mme [K] [R] concernant les primes conventionnelles sont régis par les dispositions de la convention collective applicable, qui, selon l’article L. 2232-1 du Code du travail, doit être respectée par l’employeur. L’article L. 3121-1 du Code du travail précise que les primes peuvent être définies par la convention collective ou par le contrat de travail. Dans ce cas, Mme [K] [R] a demandé le paiement de plusieurs primes, dont la prime de service, d’assiduité, de technicité, de sujétion spéciale et de vêtements de travail. Cependant, l’employeur conteste le droit de Mme [K] [R] à ces primes, arguant qu’elles ne s’appliquent pas à son poste ou qu’elles sont discrétionnaires. L’article L. 3221-1 du Code du travail stipule que les primes doivent être clairement définies pour être exigibles. En conséquence, les droits de Mme [K] [R] à ces primes dépendent de l’interprétation de la convention collective et de la preuve de leur application à son poste. Si la convention collective est jugée applicable, elle pourrait avoir droit à ces primes, sous réserve de leur conformité avec les dispositions légales. Quelles sont les conséquences d’une résistance abusive de l’employeur ?L’article 700 du Code de procédure civile prévoit que la partie qui gagne le procès peut demander le remboursement de ses frais d’avocat et de justice. En cas de résistance abusive, l’article 1382 du Code civil peut également être invoqué, stipulant que toute faute engage la responsabilité de son auteur. Dans le jugement du 6 mai 2024, le conseil de prud’hommes a condamné la SAS [4] à verser des dommages et intérêts à Mme [K] [R] pour résistance abusive. Cela signifie que l’employeur a été reconnu coupable d’avoir refusé de manière injustifiée de payer les sommes dues, malgré l’application de la convention collective. L’article L. 1235-1 du Code du travail précise que le salarié peut demander des dommages et intérêts en cas de non-respect des obligations contractuelles par l’employeur. La résistance abusive peut donc entraîner des conséquences financières pour l’employeur, qui doit compenser le préjudice subi par le salarié. En résumé, la résistance abusive de l’employeur peut entraîner des condamnations financières, y compris des dommages et intérêts, ainsi que le remboursement des frais de justice, conformément aux articles du Code de procédure civile et du Code du travail. |
Au nom du Peuple Français
C O U R D ‘ A P P E L D E D O U A I
RÉFÉRÉ DU PREMIER PRÉSIDENT
ORDONNANCE DU 25 NOVEMBRE 2024
N° de Minute : 159/24
N° RG 24/00117 – N° Portalis DBVT-V-B7I-VVTE
DEMANDERESSE:
S.A.S. [4]
ayant son siège [Adresse 5]
[Adresse 6]
[Localité 3]
repréentée par Me Alain COCKENPOT, avocat au barreau de Douai
DÉFENDERESSE :
Madame [K] [R]
demeurant [Adresse 1]
[Localité 2]
assistée de M. [L] [Y], délégué syndical
PRÉSIDENTE : Michèle Lefeuvre, première présidente de chambre désignée par ordonnance du 19 juillet 2024 pour remplacer le premier président empêché
GREFFIER : Christian Berquet
DÉBATS : à l’audience publique du 14 octobre 2024
Les parties ayant été avisées à l’issue des débats que l’ordonnance serait prononcée par sa mise à disposition au greffe
ORDONNANCE : contradictoire, prononcée publiquement par mise à disposition au greffe le vingt cinq novembre deux mille vingt quatre, date indiquée à l’issue des débats, par Michèle Lefeuvre, présidente, ayant signé la minute avec Christian Berquet, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire
117/24 – 2ème page
Mme [K] [R] est engagée par contrat à durée indéterminée du 1er septembre 2016 par la SAS [4], exploitant une micro-crèche, en qualité d’auxiliaire petite enfance.
Ce contrat, rédigé par l’Association Régionale de Gestion et de Comptabilité (AGRECO) à laquelle a adhéré la société [4], mentionne que la convention collective «’médico sociaux’» s’applique à la relation de travail.
Constatant ne pas avoir perçu les primes conventionnelles, Mme [K] [R] ainsi que deux autres salariées, a sollicité leur paiement, ce qu’a refusé l’employeur faisant valoir que cette convention collective à laquelle elle n’a pas adhéré a été mentionnée par erreur.
A la suite de ce désaccord, une rupture conventionnelle du contrat de travail a été conclue.
Par actes du 17 octobre 2022, Mme [K] [R] a fait assigner la SAS [4] devant le conseil de prud’hommes d’Arras aux fins d’être remplie de ses droits, notamment le paiement des différentes primes prévues par la convention collective «’médico sociaux.
Par jugement du’6 mai 2024, le conseil de prud’hommes d’Arras a’:
– condamné la SAS [4] à verser à Mme [K] [R] les sommes de’:
– 5’500 euros au titre des primes conventionnelles’;
– 3’641 euros au titre des salaires dus par la prévoyance pour la période du 16 avril au 5 juillet 2022 ;
– 364 euros au titre des congés payés y afférents’;
– 1’466 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et non-respect de la convention collective’;
– 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile’;
– ordonné l’exécution provisoire de la décision’;
– ordonné la condamnation au paiement de ces sommes avec intérêts au taux légal à compter de la réception par l’employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation, soit le 4 novembre 2022 s’agissant des créances de nature salariale, et à compter du jugement s’agissant des créances de nature indemnitaire avec capitalisation des intérêts’;
– débouté la SAS [4] de sa demande relative à l’article 700 du code de procédure civile’;
– condamné la SAS [4] aux dépens et frais de commissaire de justice (en cas d’exécution forcée de la décision).
La société [4] a interjeté appel de cette décision le 12 juillet 2024.
Par acte en date du’16 juillet 2024, la société [4] a fait assigner Mme [K] [R] à comparaitre devant le premier président de la cour d’appel de Douai aux fins de’voir, au visa de l’article 517-1 du code de procédure civile:
– ordonner la suspension de l’exécution provisoire dont est assorti le jugement rendu par le conseil de prud’hommes d’Arras le 6 mai 2024′;
– condamner les défenderesses aux entiers dépens.
Elle avance que’:
– sur les moyens sérieux d’annulation ou de réformation’:
– la convention collective des centres médico-sociaux, dont a fait application le premier juge, n’avait pas vocation à s’appliquer puisqu’elle n’est pas adhérente à l’un des syndicats d’employeurs signataire de ladite convention collective et que cette convention n’est pas étendue,
– Il appartenait à Mme [K] [R] de chiffrer et détailler ses demandes et ce, d’autant que le droit au versement de certaines primes, qu’elle n’avait pas vocation à percevoir, ne lui aurait pas été ouvert’;
– la prime de service et d’assiduité’est discrétionnaire pour l’employeur et aucun salarié ne l’a jamais perçue,
– la prime de technicité’a pour référence la filière sociale, éducative et enseignement, qui ne correspond absolument pas aux fonctions dévolues aux salariées au sein de l’entreprise,
– la prime de sujétion spéciale’ est destinée aux directeurs et en outre a été supprimée,
– la prime vêtements de travail n’est pas justifiée en absence de vêtement de travail
– les prestations complémentaires de prévoyance’de Mme [K] [R] sollicitées ne sont pas détaillées et la prévoyance Chorum précise qu’elle a obtenu le paiement de sa période d’arrêt de travail.
117/24 – 3ème page
– elle n’a commis aucune résistance abusive puisqu’elle s’est heurtée à l’incompréhension des salariées qui ont souhaité, malgré l’explication de l’erreur commise par l’expert-comptable, l’application d’une convention collective qui n’a pas vocation à s’appliquer entre les parties ,
– sur les conséquences manifestement excessives’: le montant total des condamnations prononcées par le conseil de prud’hommes dans les trois jugements du 6 mai 2024 totalise hors charges salariales la somme de 30’000 euros, alors qu’elle présente une fragilité économique et que sa trésorerie est insuffisante pour supporter le montant total des condamnations, au risque de devoir déclarer son état de cessation des paiements,
A l’audience, Mme [K] [R] assistée par M.[Y], défenseur syndical, s’est opposée à cette demande.
L’article R 1454-28 du code du travail prévoit que l’exécution de droit des décisions du conseil de prud’hommes ne porte que sur’le paiement des sommes au titre des rémunérations et indemnités mentionnées au 2ème de l’article R1454-14 dans la limite maximale de neuf mois de salaire calculés sur la moyenne des trois derniers mois de salaire.
Aux termes de l’article 514-3 du code de procédure civile s’appliquant à l’exécution provisoire de droit, en cas d’appel, le premier président peut être saisi afin d’arrêter l’exécution provisoire de la décision lorsqu’il existe un moyen sérieux d’annulation ou de réformation et que l’exécution risque d’entrainer des conséquences manifestement excessives.
L’article 517-1 du code de procédure civile, s’appliquant à l’exécution provisoire facultative, concernant en l’espèce la condamnation aux dommages-et-intérêts pour résistance abusive, prévoit les mêmes conditions pour que son arrêt puisse être ordonné.
Il ressort des pièces produites que le contrat de travail de Mme [K] [R] prévoit l’application d’une convention collective non étendue, le moyen contestant le fait que cette mention contractuelle vaut reconnaissance de son application à la salariée ne paraissant pas suffisamment sérieux pour entrainer une infirmation sur ce point.
Il n’en est cependant pas de même du moyen tenant à l’absence de calcul et de vérification des sommes qui seraient dues en application de cette convention collective litigieuse, une somme semblant forfaitaire ayant été accordée à la salariée au titre des différentes primes dont le paiement a été sollicité. L’employeur produit également des justificatifs de paiement des indemnités journalières par la prévoyance qui pourraient ne pas avoir été pris en considération. Il justifie ainsi de moyens sérieux susceptibles d’entrainer l’infirmation du jugement sur ces dispositions comme sur celles concernant la résistance abusive au paiement des sommes réclamées.
Par ailleurs, la société Les P’tites Nounettes, petite structure, a une situation financière fragile ne lui permettant pas de faire face au paiement des sommes qu’elle a été condamnée à verser tant à Mme [K] [R] qu’à deux autres salariées, au risque de se trouver en état de cessation des paiements.
Les conditions légales étant ainsi remplies, il sera fait droit à la demande d’arrêt de l’exécution provisoire du jugement du conseil de prud’hommes du 6 mai 2024.
Par ordonnance contradictoire rendue après débats en audience publique,
Ordonne l’arrêt de l’exécution provisoire assortissant le jugement du conseil de prud’hommes d’Arras du 6 mai 2024,
Laisse à chaque partie la charge de ses dépens.
Ainsi jugé et prononcé le 25 novembre 2024 par mise à disposition au greffe
Le greffier La présidente
Laisser un commentaire