L’Essentiel : M. [C] [D], copropriétaire, a assigné M. [E] [M], syndic bénévole, pour annuler l’assemblée générale du 25 juin 2022 et réclamer des dommages et intérêts. Dans ses conclusions du 2 septembre 2024, il a élargi ses demandes à une autre assemblée générale. M. [E] [M] et le syndicat des copropriétaires ont contesté ces demandes, soulevant des incidents de procédure. Le juge a rejeté l’exception de nullité de l’assignation, mais a déclaré irrecevable la demande de nullité de l’assemblée du 13 mai 2023 pour cause de prescription. Chaque partie a été condamnée à supporter la moitié des dépens.
|
Contexte de l’affaireM. [C] [D] est copropriétaire d’un lot d’habitation dans une copropriété où M. [E] [M] agit en tant que syndic bénévole. Un litige a surgi concernant la gestion de la copropriété, entraînant une assignation en justice. Assignation et demandes de M. [C] [D]Le 20 septembre 2022, M. [C] [D] a assigné M. [E] [M] et le syndicat des copropriétaires pour annuler l’assemblée générale du 25 juin 2022 et demander des dommages et intérêts pour des fautes présumées de M. [E] [M]. Dans ses conclusions du 2 septembre 2024, il a élargi ses demandes, incluant l’annulation d’une autre assemblée générale et des sommes à verser pour divers préjudices. Réactions de M. [E] [M] et du syndicat des copropriétairesM. [E] [M] et le syndicat des copropriétaires ont contesté les demandes de M. [C] [D] par des conclusions notifiées le 6 février 2024, soulevant des incidents de procédure, notamment l’irrecevabilité de certaines demandes et la nullité de l’assignation. Décisions du juge de la mise en étatLe juge a examiné les arguments des parties. Il a rejeté l’exception de nullité de l’assignation, considérant qu’elle contenait suffisamment d’éléments. Concernant la demande de nullité de l’assemblée générale du 13 mai 2023, le juge a déclaré cette demande irrecevable en raison de la prescription. Prescription et frais d’instanceLe juge a également statué sur la prescription de la demande de restitution de rémunération indue, concluant que le délai de prescription ne commençait à courir qu’après un jugement sur la légalité de l’exercice des fonctions de syndic. En ce qui concerne les frais d’instance, chaque partie a été condamnée à supporter la moitié des dépens. Conclusion de l’ordonnanceL’ordonnance a rejeté plusieurs demandes et a renvoyé l’affaire à une audience ultérieure pour permettre aux défendeurs de présenter leurs conclusions. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les conditions de validité d’une assignation selon le code de procédure civile ?L’article 56 du code de procédure civile stipule que l’assignation doit contenir, à peine de nullité, un exposé des moyens en fait et en droit. Cet article précise que l’assignation doit être suffisamment motivée pour permettre à la partie assignée de comprendre les raisons de la demande. Dans le cas présent, l’assignation de M. [C] [D] a été jugée conforme aux exigences de l’article 56, car elle contenait un exposé des moyens en fait et en droit suffisamment précis pour soutenir la demande d’annulation de l’assemblée générale du 25 juin 2022. Ainsi, l’exception de nullité tirée de l’insuffisance de motivation de l’assignation a été rejetée. Quelles sont les conséquences du défaut d’intérêt à agir dans une procédure judiciaire ?L’article 122 du code de procédure civile définit la fin de non-recevoir comme tout moyen tendant à déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir. Cela inclut des motifs tels que le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, ou la chose jugée. Dans cette affaire, M. [C] [D] a abandonné ses demandes indemnitaires pour le compte du syndicat des copropriétaires, rendant ainsi la fin de non-recevoir tirée du défaut d’intérêt à agir sans objet. Il n’y avait donc plus lieu d’y statuer, ce qui montre l’importance de l’intérêt à agir dans le cadre d’une procédure judiciaire. Quels sont les délais de contestation des décisions des assemblées générales en copropriété ?L’alinéa 2 de l’article 42 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 stipule que les actions en contestation des décisions des assemblées générales doivent être introduites dans un délai de deux mois à compter de la notification du procès-verbal d’assemblée. Cette notification doit être réalisée par le syndic dans un délai d’un mois suivant la tenue de l’assemblée générale. Dans le cas présent, M. [C] [D] a été notifié du procès-verbal de l’assemblée générale du 13 mai 2023 le 22 mai 2023. Il a présenté sa demande de nullité pour la première fois le 6 octobre 2023, soit après l’expiration du délai de deux mois, rendant sa demande irrecevable. Comment la prescription affecte-t-elle les demandes de restitution de rémunération indue ?L’article 2224 du code civil précise que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. Dans cette affaire, le caractère indu de la rémunération perçue par M. [E] [M] de 2016 à 2023 ne pourra être établi qu’à l’issue du jugement statuant sur la légalité de son exercice en tant que syndic. Ainsi, le délai de prescription pour la demande de restitution de rémunération indue ne commencera à courir qu’à compter de ce jugement. Par conséquent, la fin de non-recevoir tirée de la prescription a été rejetée, soulignant l’importance de la connaissance des faits pour le déclenchement du délai de prescription. Quelles sont les implications des frais d’instance dans le cadre d’un litige ?Les frais d’instance, ou dépens, sont généralement à la charge de la partie qui succombe dans ses prétentions. Dans cette affaire, le juge a constaté que chacune des parties avait succombé partiellement, ce qui a conduit à une condamnation de M. [C] [D] et de M. [E] [M] ainsi que du syndicat des copropriétaires à la moitié des dépens de l’incident. Cela signifie que les frais d’instance sont partagés, ce qui est une pratique courante dans les litiges où les parties obtiennent des succès et des échecs respectifs. Il est également important de noter que les demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile, qui permet de demander le remboursement des frais d’avocat, n’ont pas été accordées dans cette affaire, en raison des circonstances particulières du litige. |
DOSSIER : N° RG 22/03843 – N° Portalis DBX4-W-B7G-RG3T
NAC: 71F
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE TOULOUSE
POLE CIVIL – Fil 2
ORDONNANCE DU 09 Janvier 2025
M. LE GUILLOU, Juge de la mise en état
M. PEREZ, Greffier
DEBATS à l’audience publique du 14 Novembre 2024
DEMANDEUR
M. [C] [D]
né le 17 Mars 1956 à [Localité 4], demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Yves REGNIER, avocat au barreau de TOULOUSE, avocat plaidant, vestiaire : 323
Copie revêtue de la formule
exécutoire délivrée
le
à
DEFENDEURS
M. [E] [M], demeurant [Adresse 3]
représenté par Me Florence GRACIE-DEDIEU, avocat au barreau de TOULOUSE, avocat plaidant/postulant, vestiaire : 375
Syndicat des copropriétaires [Adresse 1] représenté par son syndic M. [E] [M] demeurant à [Adresse 5], dont le siège social est sis [Adresse 3]
représentée par Me Florence GRACIE-DEDIEU, avocat au barreau de TOULOUSE, avocat plaidant/postulant, vestiaire : 375
M. [C] [D] est copropriétaire d’un lot à usage d’habitation au sein de la copropriété située [Adresse 1], dont M. [E] [M] exerce les fonctions de syndic bénévole.
Par acte de commissaire de justice en date du 20 septembre 2022, M. [C] [D] a fait assigner M. [E] [M] et le syndicat des copropriétaires aux fins d’annulation de l’assemblée générale du 25 juin 2022 et de condamnation de M. [E] [M] à verser, à lui et au syndicat des copropriétaires, des dommages et intérêts en réparation des préjudices résultant des fautes que celui-là aurait commises dans l’exercice de sa fonction de syndic.
Par dernières conclusions au fond en date du 2 septembre 2024, M. [C] [D] demande de :
– annuler les assemblées générales des 25 juin 2022 et 13 mai 2023,
– condamner M. [E] [M] à lui verser la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts,
– condamner M. [E] [M] à lui verser la somme de 302,48 euros au titre des travaux non dus,
– condamner M. [E] [M] à lui verser la somme de 113,66 au titre des millièmes qui lui ont été ajoutés à tort,
– condamner M. [E] [M] à lui rembourser la somme de 668,80 euros correspondant aux millièmes qu’il lui a versés au titre de la rémunération indue à hauteur de 17 600 euros,
– condamner M. [E] [M] et le syndicat des copropriétaires à lui régler chacun la somme de 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens.
Le juge de la mise en état a été désigné par ordonnance du 14 novembre 2022.
Par conclusions notifiées le 6 février 2024, M. [E] [M] et le syndicat des copropriétaires ont saisi le juge de la mise en état d’un incident.
Par dernières conclusions d’incident notifiées le 9 octobre 2024, M. [E] [M] et le syndicat des copropriétaires demandent de :
– juger irrecevable la demande formulée par M. [C] [D] de condamnation de M. [E] [M] pour le compte du syndicat des copropriétaires à hauteur de 17 600 euros,
– juger nulle l’assignation signifiée,
– juger irrecevable la demande de nullité de l’assemblée générale du 13 mai 2023,
– juger irrecevable et prescrite la demande de M. [C] [D] de condamnation à hauteur de 668,80 euros correspondant à un calcul global et forfaitaire établi par M. [C] [D] au titre de la rémunération prétendument indue de M. [E] [M] à hauteur de 17 600 euros calculée sur la période de 2016 à 2023, en large partie prescrite, et indéterminée,
– condamner M. [C] [D] à leur verser la somme de 1 800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens.
Par conclusions d’incident notifiées le 2 septembre 2024, M. [C] [D] demande de :
– débouter les demandeurs à l’incident de l’ensemble de leurs prétentions,
– condamner solidairement les demandeurs à lui verser la somme de 1 800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens.
Il est renvoyé aux écritures respectives des parties pour l’exposé des moyens.
L’affaire a été appelée à l’audience d’incident du 14 novembre 2024 et mise en délibéré au 9 janvier 2025.
Aux termes de l’article 789 du code de procédure civile :
« Le juge de la mise en état est, à compter de sa désignation et, jusqu’à son dessaisissement, seul compétent, à l’exclusion de toute autre formation du tribunal, pour :
1° Statuer sur les exceptions de procédure, les demandes formées en application de l’article 47 et les incidents mettant fin à l’instance ;
2° Allouer une provision pour le procès ;
3° Accorder une provision au créancier lorsque l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable. Le juge de la mise en état peut subordonner l’exécution de sa décision à la constitution d’une garantie dans les conditions prévues aux articles 514-5,517 et 518 à 522 ;
4° Ordonner toutes autres mesures provisoires, même conservatoires, à l’exception des saisies conservatoires et des hypothèques et nantissements provisoires, ainsi que modifier ou compléter, en cas de survenance d’un fait nouveau, les mesures qui auraient déjà été ordonnées ;
5° Ordonner, même d’office, toute mesure d’instruction ;
6° Statuer sur les fins de non-recevoir.
Par dérogation au premier alinéa, s’il estime que la complexité du moyen soulevé ou l’état d’avancement de l’instruction le justifie, le juge de la mise en état peut décider que la fin de non-recevoir sera examinée à l’issue de l’instruction par la formation de jugement appelée à statuer sur le fond.
Dans le cas visé au précédent alinéa, la décision du juge de la mise en état, qui constitue une mesure d’administration judiciaire, est prise par mention au dossier. Avis en est donné aux avocats. Les parties sont alors tenues de reprendre la fin de non-recevoir dans les conclusions adressées à la formation de jugement ».
Aux termes de l’article 122 du code de procédure civile : « Constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée ».
Sur la demande de nullité de l’assignation :
L’article 56 du code de procédure civile dispose que l’assignation contient à peine de nullité un exposé des moyens en fait et en droit.
Contrairement à ce que font valoir M. [E] [M] et le syndicat des copropriétaires, l’assignation contient, avec une précision suffisante, l’exposé des moyens en fait et en droit soulevés au soutien de la demande d’annulation de l’assemblée générale du 25 juin 2022.
Dès lors, l’exception de nullité tirée de l’insuffisance de motivation de l’assignation au regard des prescriptions de l’article 56 du code de procédure civile doit être rejetée.
Sur la fin de non-recevoir tirée du défaut d’intérêt à agir de M. [C] [D] pour le compte du syndicat des copropriétaires :
Dans ses dernières conclusions au fond notifiées le 3 septembre 2024, M. [C] [D] a abandonné ses demandes indemnitaires présentées pour le compte du syndicat des copropriétaires.
Dès lors, la fin de non-recevoir tirée du défaut d’intérêt à agir de M. [C] [D] pour le compte du syndicat des copropriétaires est devenue sans objet. Il n’y a plus lieu d’y statuer.
Sur l’irrecevabilité de la demande de nullité de l’assemblée générale du 13 mai 2023 :
Aux termes de l’alinéa 2 de l’article 42 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis : « Les actions en contestation des décisions des assemblées générales doivent, à peine de déchéance, être introduites par les copropriétaires opposants ou défaillants dans un délai de deux mois à compter de la notification du procès-verbal d’assemblée, sans ses annexes. Cette notification est réalisée par le syndic dans le délai d’un mois à compter de la tenue de l’assemblée générale ».
M. [C] [D] ne conteste pas que le procès-verbal de l’assemblée générale du 13 mai 2023 lui a été notifié le 22 mai 2023.
Il a présenté pour la première fois sa demande de nullité de cette assemblée générale par conclusions notifiées par voie électronique le 6 octobre 2023.
Or, à cette date, cette action était prescrite, étant sans incidence la circonstance que la notification du procès-verbal d’assemblée aurait été réalisée par un syndic irrégulièrement désigné.
En tout état de cause, les dispositions précitées de l’article 42 de la loi du 10 juillet 1965 imposent que la contestation soit formée par voie d’assignation et non de conclusions, à peine d’irrecevabilité. La demande d’annulation d’une décision d’assemblée générale ne peut être que principale et non additionnelle ou connexe en raison de l’autonomie de chaque assemblée générale.
Dès lors, la demande de nullité de l’assemblée générale du 13 mai 2023, présentée par M. [C] [D] par voie de conclusions, est irrecevable.
Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription de la demande de condamnation de M. [E] [M] à restituer son éventuelle rémunération indue :
Aux termes de l’article 2224 du code civil : « Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer ».
Le caractère indu de la rémunération perçue par M. [E] [M] de 2016 à 2023 ne saurait résulter que du jugement à venir statuant sur la légalité de l’exercice de ses fonctions de syndic bénévole au cours de ces années.
Dès lors, le délai de prescription de l’action en restitution des éventuelles rémunérations indues perçues ne commencera à courir qu’à compter de ce jugement.
Ainsi, la fin de non-recevoir tirée de la prescription de la demande de condamnation de M. [E] [M] à restituer son éventuelle rémunération indue ne peut qu’être rejetée.
Sur les frais d’instance :
Chacune des parties succombant partiellement, il y a lieu de condamner M. [C] [D], d’une part, et M. [E] [M] et le syndicat des copropriétaires, d’autre part, à la moitié des dépens de l’incident chacun.
Pour les mêmes motifs et dans les circonstances de l’espèce, il n’y pas lieu de faire droit aux demandes présentées au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Nous, M. Raphaël Le Guillou, juge de la mise en état, assisté de M. Benoît Perez, greffier, statuant publiquement, par ordonnance contradictoire et rendue en premier ressort :
REJETONS l’exception de nullité tirée de l’insuffisance de motivation de l’assignation au regard des prescriptions de l’article 56 du code de procédure civile,
DISONS n’y avoir lieu à statuer sur la fin de non-recevoir tirée du défaut d’intérêt à agir de M. [C] [D] pour le compte du syndicat des copropriétaires,
DÉCLARONS irrecevable la demande de nullité de l’assemblée générale du 13 mai 2023,
REJETONS la fin de non-recevoir tirée de la prescription de la demande de condamnation de M. [E] [M] à restituer son éventuelle rémunération indue,
DÉBOUTONS chacune des parties de sa demande présentée au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNONS M. [C] [D], d’une part, et M. [E] [M] et le syndicat des copropriétaires, d’autre part, à la moitié des dépens de l’incident chacun,
RENVOYONS l’affaire à l’audience de mise en état électronique du 13 mars 2025 pour conclusions des défendeurs.
LE GREFFIER LE JUGE DE LA MISE EN ETAT
Laisser un commentaire