L’Essentiel : L’isolement et la contention, selon l’article L 3222-5-1 du code de la santé publique, ne doivent être appliqués qu’en dernier recours pour des patients hospitalisés sans consentement, justifiés par un risque immédiat. La mesure d’isolement est limitée à douze heures, renouvelable sous conditions, avec obligation d’informer la famille et le magistrat. Dans le cas de Mme [N], hospitalisée pour psychose chronique, l’isolement a été jugé nécessaire pour prévenir un risque hétéroagressif. Les évaluations médicales ont confirmé la régularité de la mesure, qui a été validée par le magistrat. Les recours contre cette décision ont été rejetés.
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MOTIFS DE LA DÉCISIONLes dispositions de l’article L 3222-5-1 du code de la santé publique stipulent que l’isolement et la contention ne doivent être utilisés qu’en dernier recours pour des patients en hospitalisation complète sans consentement. Ces mesures doivent être justifiées par un risque immédiat pour le patient ou autrui, sur décision d’un psychiatre, et doivent être surveillées de manière stricte. DURÉE ET RENOUVELLEMENT DES MESURESLa mesure d’isolement est limitée à douze heures, renouvelable jusqu’à quarante-huit heures sous certaines conditions. Le médecin doit informer un membre de la famille du patient et le directeur de l’établissement doit notifier le magistrat du tribunal judiciaire en cas de renouvellement. Ce dernier peut mettre fin à la mesure si les conditions ne sont plus réunies. CONTRÔLE JUDICIAIRELe magistrat du siège du tribunal judiciaire a pour rôle de contrôler la régularité et le bien-fondé des mesures d’isolement et de contention. Il doit s’assurer que les droits du patient sont respectés et peut ordonner la mainlevée de la mesure si les conditions ne sont plus remplies. CAS DE Mme [N]Mme [N] a été hospitalisée sans consentement depuis le 26 juin 2024 et a été placée sous isolement le 28 décembre 2024. La mesure a été renouvelée dans les limites légales, et le magistrat a confirmé la régularité de la mesure le 5 janvier 2025. ÉVALUATIONS MÉDICALESLes évaluations médicales de la patiente ont été effectuées conformément aux exigences légales, avec deux évaluations par période de vingt-quatre heures. Les documents fournis montrent que la patiente a été régulièrement examinée par un psychiatre. JUSTIFICATION DE LA MESURELa patiente souffre de psychose chronique et a été hospitalisée pour une décompensation délirante. Les évaluations médicales indiquent qu’elle est dans le déni de ses troubles et présente un risque élevé de passage à l’acte hétéroagressif. La mesure d’isolement est donc considérée comme justifiée pour prévenir un dommage imminent. CONCLUSIONLes moyens soulevés contre la mesure d’isolement ont été rejetés, et l’ordonnance du magistrat du siège du tribunal judiciaire a été confirmée. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les conditions légales pour l’isolement et la contention des patients en psychiatrie selon l’article L 3222-5-1 du code de la santé publique ?L’article L 3222-5-1 du code de la santé publique précise que l’isolement et la contention ne peuvent être appliqués qu’en dernier recours, et uniquement pour des patients en hospitalisation complète sans consentement. Ces mesures doivent être justifiées par la nécessité de prévenir un dommage immédiat ou imminent pour le patient ou autrui. Elles doivent être décidées par un psychiatre et mises en œuvre de manière adaptée, nécessaire et proportionnée au risque, après une évaluation du patient. La mise en œuvre de ces mesures doit faire l’objet d’une surveillance stricte, tant somatique que psychiatrique, assurée par des professionnels de santé désignés, et doit être consignée dans le dossier médical. La durée maximale de la mesure d’isolement est de douze heures, renouvelable dans certaines conditions, mais ne pouvant excéder quarante-huit heures au total, avec des évaluations obligatoires toutes les vingt-quatre heures. Quel est le rôle du magistrat du siège du tribunal judiciaire dans le cadre des mesures d’isolement et de contention ?Le magistrat du siège du tribunal judiciaire joue un rôle crucial dans le contrôle des mesures d’isolement et de contention. Selon l’article L 3222-5-1, le directeur de l’établissement doit informer le magistrat sans délai en cas de renouvellement de ces mesures. Le magistrat peut se saisir d’office pour mettre fin à la mesure si les conditions ne sont plus réunies. Il statue dans un délai de vingt-quatre heures après avoir été saisi, et peut ordonner la mainlevée de la mesure si les conditions ne sont plus justifiées. Si la mesure est maintenue, le magistrat autorise le renouvellement, mais le médecin doit informer un membre de la famille du patient, en respectant la volonté du patient et le secret médical. Quelles sont les obligations d’évaluation et de suivi lors de l’application des mesures d’isolement ?L’article L 3222-5-1 impose des obligations strictes concernant l’évaluation des patients sous isolement. La mesure d’isolement initiale ne peut excéder douze heures, mais doit faire l’objet de deux évaluations au cours des vingt-quatre heures suivantes. Le renouvellement de la mesure doit se faire dans le respect des conditions initiales, sans délai spécifique imposé pour les évaluations au-delà de douze heures. Il est essentiel que les évaluations soient documentées et que les décisions de renouvellement soient justifiées par des éléments cliniques pertinents. Les extraits du registre de l’établissement doivent prouver que les évaluations ont été effectuées conformément aux exigences légales, garantissant ainsi le respect des droits du patient. Comment la jurisprudence interprète-t-elle le bien-fondé des mesures d’isolement dans le cas de Mme [N] ?Dans le cas de Mme [N], la jurisprudence a confirmé le bien-fondé des mesures d’isolement en se basant sur l’état de santé de la patiente. Les documents médicaux indiquent qu’elle souffre de psychose chronique et présente des comportements opposants aux soins, avec un risque élevé de passage à l’acte hétéroagressif. Les évaluations médicales ont révélé un déni de ses troubles et une posture imprévisible, justifiant ainsi la nécessité de l’isolement pour prévenir un dommage imminent. La décision du magistrat a été fondée sur des éléments cliniques concrets, et la mesure a été jugée proportionnée et adaptée à la situation de la patiente. Ainsi, la jurisprudence a validé la continuité de la mesure d’isolement, considérant qu’elle était justifiée par la protection de la patiente et d’autrui. |
DE VERSAILLES
Chambre civile 1-7
Code nac : 14P
N°
N° RG 25/00169 – N° Portalis DBV3-V-B7J-W6HU
(article L.3222-5-1 du Code de la santé publique modifié par la loi n°2022-46 du 22 janvier 2022 renforçant les outils de gestion de la crise sanitaire et modifiant le code de la santé publique)
Copies délivrées le :
à :
[M] [N]
Me Pascale GOUAILHARDOU-CRUZEL
HOPITAL [2]
Ministère public
ORDONNANCE
ISOLEMENT ET CONTENTION
Le 13 Janvier 2025
prononcé par mise à disposition au greffe,
Nous Delphine BONNET , à la cour d’appel de Versailles, déléguée par ordonnance de monsieur le premier président pour statuer en matière d’hospitalisation sous contrainte (article L.3222-5-1 du Code de la santé publique modifié par la loi n°2022-46 du 22 janvier 2022 renforçant les outils de gestion de la crise sanitaire et modifiant le code de la santé publique) assistée de Maëva VEFOUR, avons rendu l’ordonnance suivante :
ENTRE :
Madame [M] [N]
Hospitalisée à l’hôpital [2] de [Localité 1]
[Localité 1]
Assistée de Me Pascale GOUAILHARDOU-CRUZEL, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : 177
APPELANTE
ET :
HOPITAL [2]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Localité 1]
INTIMEE
ET COMME PARTIE JOINTE :
M. LE PROCUREUR GENERAL DE LA COUR D’APPEL DE VERSAILLES
ayant rendu un avis écrit
Vu l’article 17 de la loi n°2022-46 du 22 janvier 2022 renforçant les outils de gestion de la crise sanitaire et modifiant le code de la santé publique ;
Vu le décret n°2022-419 du 23 mars 2022 relatif à la procédure applicable devant le magistrat du siège du tribunal judiciaire en matière d’isolement et de contention mis en ‘uvre dans le cadre de soins psychiatriques sans consentement ;
Vu l’hospitalisation psychiatrique complète au sein de l’établissement [2] de [Localité 1] dont fait l’objet Mme [M] [N], née le 2 avril 1994, depuis le 26 juin 2024 ;
Vu le placement en isolement le 28 décembre 2024 à 18 h 29, dont la poursuite a été autorisée par décision du magistrat du siège du tribunal judiciaire de Nanterre du 31 décembre 2024 à l8 h 05 puis par décision du 5 janvier 2025 à 21 h 25 ;
Vu la saisine du magistrat statuant en application du code de la santé publique en date du 11 janvier 2025 à 10 h 53 aux fins de maintien d’une mesure d’isolement émanant du directeur du centre hospitalier ;
Vu la décision du 11 janvier 2025 par laquelle le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Nanterre a autorisé le maintien de la mesure d’isolement dont fait l’objet Mme [N] ;
Vu l’appel interjeté par le conseil de Mme [N] le 11 janvier 2025 à 15 h 01 ;
Vu l’avis du procureur général qui conclut à la confirmation de l’ordonnance ;
Vu l’avis médical rédigé par le docteur [C] [D] le 13 janvier 2025 aux termes duquel il conclut à la nécessité du maintien en isolement ;
Mme [N] a sollicité une audition devant la cour et après audition de cette dernière par le truchement d’une communication téléphonique à laquelle elle a consenti, vu l’impossibilité de recourir à un moyen de communication audio-visuelle, la décision suivante a été rendue.
Aux termes des dispositions nouvelles de l’article L 3222-5-1 du code de la santé publique :
« I.- L’isolement et la contention sont des pratiques de dernier recours et ne peuvent concerner que des patients en hospitalisation complète sans consentement. Il ne peut y être procédé que pour prévenir un dommage immédiat ou imminent pour le patient ou autrui, sur décision motivée d’un psychiatre et uniquement de manière adaptée, nécessaire et proportionnée au risque après évaluation du patient. Leur mise en ‘uvre doit faire l’objet d’une surveillance stricte, somatique et psychiatrique, confiée par l’établissement à des professionnels de santé désignés à cette fin et tracée dans le dossier médical.
La mesure d’isolement est prise pour une durée maximale de douze heures. Si l’état de santé du patient le nécessite, elle peut être renouvelée, dans les conditions et selon les modalités prévues au premier alinéa du présent I, dans la limite d’une durée totale de quarante-huit heures, et fait l’objet de deux évaluations par vingt-quatre heures.
II. – A titre exceptionnel, le médecin peut renouveler, au-delà des durées totales prévues au I, les mesures d’isolement ou de contention, dans le respect des conditions prévues au même I. Le directeur de l’établissement informe sans délai le magistrat du siège du tribunal judiciaire du renouvellement de ces mesures. Le magistrat du siège du tribunal judiciaire peut se saisir d’office pour y mettre fin. Le médecin informe du renouvellement de ces mesures au moins un membre de la famille du patient, en priorité son conjoint, le partenaire lié à lui par un pacte civil de solidarité ou son concubin, ou une personne susceptible d’agir dans son intérêt dès lors qu’une telle personne est identifiée, dans le respect de la volonté du patient et du secret médical.
Le directeur de l’établissement saisit le magistrat du siège du tribunal judiciaire avant l’expiration de la soixante-douzième heure d’isolement ou de la quarante-huitième heure de contention, si l’état de santé du patient rend nécessaire le renouvellement de la mesure au-delà de ces durées.
Le magistrat du siège du tribunal judiciaire statue dans un délai de vingt-quatre heures à compter du terme des durées prévues au deuxième alinéa du présent II.
Si les conditions prévues au I ne sont plus réunies, il ordonne la mainlevée de la mesure. Dans ce cas, aucune nouvelle mesure ne peut être prise avant l’expiration d’un délai de quarante-huit heures à compter de la mainlevée de la mesure, sauf survenance d’éléments nouveaux dans la situation du patient qui rendent impossibles d’autres modalités de prise en charge permettant d’assurer sa sécurité ou celle d’autrui. Le directeur de l’établissement informe sans délai le magistrat du siège du tribunal judiciaire, qui peut se saisir d’office pour mettre fin à la nouvelle mesure.
Si les conditions prévues au même I sont toujours réunies, le magistrat du siège du tribunal judiciaire autorise le maintien de la mesure d’isolement ou de contention. Dans ce cas, le médecin peut la renouveler dans les conditions prévues audit I et aux deux premiers alinéas du présent II. Toutefois, si le renouvellement d’une mesure d’isolement est encore nécessaire après deux décisions de maintien prises par le magistrat du siège du tribunal judiciaire, celui-ci est saisi au moins vingt-quatre heures avant l’expiration d’un délai de sept jours à compter de sa précédente décision et le médecin informe du renouvellement de ces mesures au moins un membre de la famille du patient, en priorité son conjoint, le partenaire lié à lui par un pacte civil de solidarité ou son concubin, ou une personne susceptible d’agir dans son intérêt dès lors qu’une telle personne est identifiée, dans le respect de la volonté du patient et du secret médical. Le magistrat du siège du tribunal judiciaire statue avant l’expiration de ce délai de sept jours. Le cas échéant, il est à nouveau saisi au moins vingt-quatre heures avant l’expiration de chaque nouveau délai de sept jours et statue dans les mêmes conditions. Le médecin réitère l’information susmentionnée lors de chaque saisine du magistrat du siège du tribunal judiciaire.
Pour l’application des deux premiers alinéas du présent II, lorsqu’une mesure d’isolement ou de contention est prise moins de quarante-huit heures après qu’une précédente mesure d’isolement ou de contention a pris fin, sa durée s’ajoute à celle des mesures d’isolement ou de contention qui la précèdent.
Les mêmes deux premiers alinéas s’appliquent lorsque le médecin prend plusieurs mesures dont la durée cumulée sur une période de quinze jours atteint les durées prévues auxdits deux premiers alinéas.
Les mesures d’isolement et de contention peuvent également faire l’objet d’un contrôle par le magistrat du siège du tribunal judiciaire en application du IV de l’article L. 3211-12-1″.
Il est rappelé que l’office du magistrat du siège du tribunal judiciaire consiste à opérer un contrôle de la régularité de la mesure et de son bien-fondé, ce qui suppose d’exercer un contrôle du respect des droits du patient.
Mme [N] a été placée sans son consentement sous le régime de l’hospitalisation psychiatrique complète depuis le 26 juin 2024 ; le psychiatre de l’établissement a prescrit le placement de la patiente sous le régime de l’isolement le 28 décembre 2024 à 18 h 29, renouvelé dans la limite maximale de 48 heures sur une période de 15 jours ;
* sur le contrôle de la régularité de la mesure
Aucune irrégularité de la mesure d’isolement, antérieure à une décision du magistrat du siège du tribunal judiciaire se prononçant sur cette mesure, ne peut être soulevée lors d’une instance ultérieure devant ce même juge.
En l’espèce, la mesure d’isolement a fait l’objet d’une décision de maintien par le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Nanterre le 5 janvier 2025 à 21h25 ; les pièces communiquées permettent de s’assurer de la régularité de la mesure à compter de cette décision, dès lors que sont versés l’extrait du registre de l’établissement hospitalier et l’information donnée à la patiente d’une part et à sa mère d’autre part par appel téléphonique du 10 janvier 2025 à 11 h 10.
* sur l’absence d’examen intervenu toutes les douze heures
Si la mesure d’isolement initiale est prise pour une durée maximale de douze heures, le texte précité n’impose pas que les évaluations au-delà de ce délai soient prises toutes les douze heures mais il impose que le patient soit évalué à deux reprises sur une période de 24 heures. L’alinéa 2 du I) de ce texte précise également que le renouvellement au-delà de la période initiale de douze heures doit intervenir « dans les conditions et selon les modalités prévues au premier alinéa du présent I » lequel ne prévoit pas de délai.
Est versé au dossier l’extrait du registre de l’établissement d’accueil qui comporte bien les deux évaluations de la patiente par un psychiatre par 24 heures ; la mesure d’isolement du patient a bien fait l’objet de décisions et d’évaluations médicales à une fréquence satisfaisant aux règles rappelées ci-dessus, soit deux par vingt-quatre heures d’où il suit que le moyen n’est pas fondé.
* sur le bien fondé de la mesure
La patiente, psychotique chronique, a été hospitalisée pour une décompensation délirante avec troubles du comportement.
L’extrait du registre de l’établissement montre que les différents examens au cours de la mesure d’isolement mettent en avant que Mme [N] est dans le déni de ses troubles et dans l’opposition aux soins. Elle adopte une posture de défiance, d’imprévisibilité et de toute puissance. Le risque de passage à l’acte hétéroagressif est jugé très élevé. Il est noté le 12 janvier à 9 h 43 ‘patiente tendue, impulsive, en déni du trouble, persécutée, imprévisible’. Le 13 janvier, il est noté ‘patiente très délirante’. L’avis médical du 13 janvier 2025 du docteur [D] mentionne ‘patiente très délirante, très méfiante et réticente, opposante aux soins, déni total des troubles… l’alliance thérapeutique est précaire’.
La mesure reste donc justifiée et nécessaire pour prévenir un dommage imminent ou immédiat pour la patiente ou pour autrui.
Par conséquent, il convient de rejeter les moyens et de confirmer la décision.
Rejette les moyens ;
Confirme l’ordonnance du magistrat du siège du tribunal judiciaire de Nanterre en date du 11 janvier 2025 ;
Fait à VERSAILLES le 13 janvier 2025 à h
LA GREFFIERE LA CONSEILLERE
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