Conditions de rétention et obligations administratives en matière d’éloignement des étrangers

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Conditions de rétention et obligations administratives en matière d’éloignement des étrangers

L’Essentiel : Monsieur [B] [C], ressortissant tunisien, a reçu un arrêté d’obligation de quitter le territoire le 10 décembre 2023, suivi d’une décision de rétention le 30 décembre 2024. Lors de l’audience, il a affirmé résider en France chez son cousin depuis trois semaines pour régulariser sa situation. Son avocate a contesté la prolongation de la rétention, arguant de l’irrecevabilité de la requête préfectorale, faute de pièces justificatives. Malgré l’absence du préfet, l’appel de Monsieur [B] [C] a été jugé recevable. Finalement, l’ordonnance de rétention a été confirmée, laissant la possibilité de se pourvoir en cassation.

Procédure et moyens

L’affaire concerne Monsieur [B] [C], un ressortissant tunisien, qui a reçu un arrêté d’obligation de quitter le territoire national le 10 décembre 2023, suivi d’une décision de placement en rétention le 30 décembre 2024. Le 3 janvier 2025, un magistrat a ordonné le maintien de sa rétention pour une durée maximale de 26 jours. Monsieur [B] [C] a interjeté appel de cette décision le même jour.

Déclarations de Monsieur [B] [C]

Lors de l’audience, Monsieur [B] [C] a expliqué qu’il réside en France chez son cousin et qu’il est en France depuis trois semaines pour régulariser sa situation. Il a affirmé ne pas être impliqué dans des activités illégales et a demandé sa libération pour pouvoir rentrer chez lui.

Arguments de l’avocate

L’avocate de Monsieur [B] [C] a demandé l’infirmation de l’ordonnance de rétention, arguant que la requête préfectorale pour prolonger la rétention était irrecevable en raison de l’absence de pièces justificatives nécessaires. Elle a également souligné que le préfet n’avait pas pris les mesures nécessaires pour exécuter l’éloignement dans les premiers jours de la rétention.

Présence du préfet

Le préfet des Alpes-Maritimes, bien que régulièrement convoqué, n’était ni présent ni représenté lors de l’audience.

Recevabilité de l’appel

L’appel interjeté par Monsieur [B] [C] a été jugé recevable, car il a été effectué dans le délai imparti et accompagné d’une déclaration motivée.

Irrecevabilité de la requête préfectorale

La requête préfectorale pour prolonger la rétention a été examinée à la lumière des exigences légales. Il a été déterminé que la requête était accompagnée des pièces justificatives nécessaires, ce qui a conduit au rejet de l’argument d’irrecevabilité.

Diligences de l’autorité préfectorale

L’autorité préfectorale a justifié ses actions en démontrant qu’elle avait contacté le consul de Tunisie pour obtenir un laissez-passer pour Monsieur [B] [C] dans un délai raisonnable après son placement en rétention. Le juge a noté que la consultation du fichier EURODAC n’était pas obligatoire et que Monsieur [B] [C] n’avait pas prouvé avoir demandé cette consultation.

Confirmation de l’ordonnance

L’ordonnance du magistrat a été confirmée, et les parties ont été informées de leur droit de se pourvoir en cassation contre cette décision dans un délai de deux mois.

Q/R juridiques soulevées :

Sur la recevabilité de l’appel

L’article R743-10 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) stipule que :

* »L’ordonnance du magistrat du siège du tribunal judiciaire est susceptible d’appel devant le premier président de la cour d’appel, dans les vingt-quatre heures de son prononcé, par l’étranger, le préfet de département et, à Paris, le préfet de police. »*

Ce délai court à compter de la notification faite à l’étranger si celui-ci n’assiste pas à l’audience.

Dans le cas présent, l’ordonnance a été rendue le 3 janvier 2025 à 12h04 et notifiée à Monsieur [B] [C] le même jour.

Il a interjeté appel à 16h44, en adressant une déclaration d’appel motivée au greffe de la cour.

Ainsi, son recours est déclaré recevable conformément aux dispositions de l’article R743-11 alinéa 1 du CESEDA, qui exige que la déclaration d’appel soit motivée et enregistrée par le greffe.

Sur le moyen tiré de l’irrecevabilité de la requête préfectorale en prolongation de la rétention

L’article R742-1 du CESEDA précise que :

* »Le magistrat du siège du tribunal judiciaire est saisi aux fins de prolongation de la rétention par simple requête de l’autorité administrative, dans les conditions prévues au chapitre III, avant l’expiration, selon le cas, de la période de quatre jours mentionnée à l’article L. 742-1. »*

Cette requête doit être accompagnée de toutes pièces justificatives utiles, comme l’indique l’article R743-2 alinéas 1 et 2 du CESEDA :

* »A peine d’irrecevabilité, la requête est motivée, datée et signée, selon le cas, par l’étranger ou son représentant ou par l’autorité administrative qui a ordonné le placement en rétention. »*

Il est donc impératif que la requête soit accompagnée d’une copie du registre de rétention actualisé.

En l’espèce, la requête préfectorale a été accompagnée des pièces justificatives nécessaires, y compris le registre de rétention, les arrêtés de placement en rétention, et d’autres documents pertinents.

Ainsi, le moyen d’irrecevabilité sera rejeté.

Sur le moyen tiré du défaut de diligences de l’autorité préfectorale

L’article L741-3 du CESEDA stipule que :

* »Un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L’administration exerce toute diligence à cet effet. »*

Il appartient au juge de vérifier les diligences accomplies par l’administration pour s’assurer que la rétention ne dépasse pas le temps nécessaire.

Dans cette affaire, l’autorité préfectorale a justifié avoir saisi le consul de Tunisie le 31 décembre 2024, moins de vingt-quatre heures après le placement en rétention, pour obtenir un laissez-passer.

Cette action est considérée comme une diligence nécessaire au sens de l’article L741-3 du CESEDA.

De plus, la consultation du fichier EURODAC n’est pas une obligation mais une faculté pour l’administration.

Monsieur [B] [C] n’a pas prouvé avoir déposé une demande d’asile, ce qui renforce la légitimité des actions de l’administration.

Ainsi, le moyen sera rejeté et l’ordonnance confirmée.

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

CHAMBRE 1-11, Rétention Administrative

ORDONNANCE

DU 04 JANVIER 2025

N° RG 25/00023 – N° Portalis DBVB-V-B7J-BOFVO

Copie conforme

délivrée le 04 Janvier 2025 par courriel à :

-l’avocat

-le préfet

-le CRA

-le JLD/TJ

-le retenu

-le MP

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance rendue par le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Marseille désigné pour le contrôle des mesures d’éloignement et de rétention en date du 03 Janvier 2025 à 12H04.

APPELANT

Monsieur [B] [C]

né le 03 Décembre 2004 à [Localité 9] (Tunisie)

de nationalité Tunisienne

 

comparant en visioconférence depuis le centre de rétention administrative de [Localité 6] en application des dispositions de la loi n°2024-42 du 26 janvier 2024.

Assisté de Maître Charlotte MIQUEL, avocate au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, commise d’office,

et de Madame [S] [I], interprète en langue arabe, inscrite sur la liste des experts de la cour d’appel d’Aix-en-Provence.

INTIMÉ

MONSIEUR LE PREFET DES ALPES-MARITIMES

Avisé et non représenté

MINISTÈRE PUBLIC

Avisé, non représenté

******

DÉBATS

L’affaire a été débattue en audience publique le 04 Janvier 2025 devant M. Guillaume KATAWANDJA, Conseiller à la cour d’appel délégué par le premier président par ordonnance, assisté de Madame Laure METGE, Greffier,

ORDONNANCE

Réputée contradictoire,

Prononcée par mise à disposition au greffe le 04 Janvier 2025 à 15h32,

Signée par M. Guillaume KATAWANDJA, Conseiller, et Madame Laure METGE, Greffier,

PROCÉDURE ET MOYENS

Vu les articles L 740-1 et suivants du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) ;

Vu l’arrêté portant obligation de quitter le territoire national pris le 10 décembre 2023 par le préfet des Alpes-Maritimes, notifié à Monsieur [B] [C] le même jour à 17h10;

Vu la décision de placement en rétention prise le 30 décembre 2024 par le préfet des Alpes-Maritimes, notifiée à Monsieur [B] [C] le même jour à 19h55 ;

Vu l’ordonnance du 03 Janvier 2025 rendue par le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Marseille désigné pour le contrôle des mesures d’éloignement et de rétention décidant le maintien de Monsieur [B] [C] dans des locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire pour une durée maximale de 26 jours ;

Vu l’appel interjeté le 03 Janvier 2025 à 16H44 par Monsieur [B] [C] ;

Monsieur [B] [C] a comparu et a été entendu en ses explications. Il déclare:

‘J’ai une adresse en France [Adresse 4] à [Localité 7] chez mon cousin [R] [Y]. Je demande à être libéré pour rentrer. En 2023 j’ai quitté la France pour la Belgique. Je suis en France depuis 3 semaines pour régulariser la situation. Mon père est en Italie et ma mère en Algérie. J’ai des cousins et des cousines en France. Je travaille tranquillement, pas de trafic de stupéfiants.’

Son avocate a été régulièrement entendue. Elle sollicite l’infirmation de l’ordonnance déférée et la remise en liberté du retenu. A cette fin, elle invoque l’irrecevabilité de la requête préfectorale en prolongation de la rétention, en ce qu’elle n’est pas accompagnée de toutes les pièces justificatives utiles, notamment la copie du registre de rétention actualisé qui ne vise pas les diligences consulaires réalisées. Elle estime en outre que le préfet n’a pas accompli les diligences nécessaires à l’exécution de la mesure d’éloignement durant les quatre premiers jours de rétention, notamment en ne consultant pas le fichier EURODAC en dépit d’une demande de l’étranger en ce sens.

Le préfet des Alpes-Maritimes, bien que régulièrement convoqué, n’était ni présent ni représenté.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1) Sur la recevabilité de l’appel

Aux termes des dispositions de l’article R743-10 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA), ‘L’ordonnance du magistrat du siège du tribunal judiciaire est susceptible d’appel devant le premier président de la cour d’appel, dans les vingt-quatre heures de son prononcé, par l’étranger, le préfet de département et, à Paris, le préfet de police. Lorsque l’étranger n’assiste pas à l’audience, le délai court pour ce dernier à compter de la notification qui lui est faite. Le délai ainsi prévu est calculé et prorogé conformément aux articles 640 et 642 du code de procédure civile.

Le ministère public peut interjeter appel de cette ordonnance selon les mêmes modalités lorsqu’il ne sollicite pas la suspension provisoire.’

Selon les dispositions de l’article R743-11 alinéa 1 du CESEDA, ‘A peine d’irrecevabilité, la déclaration d’appel est motivée. Elle est transmise par tout moyen au greffe de la cour d’appel qui l’enregistre avec mention de la date et de l’heure.’

L’ordonnance querellée a été rendue le 3 janvier 2025 à 12h04 et notifiée à M. [C] aux mêmes date et heure. Ce dernier a interjeté appel le même jour à 16h44 en adressant au greffe de la cour une déclaration d’appel motivée. Son recours sera donc déclaré recevable.

2) Sur le moyen tiré de l’irrecevabilité de la requête préfectorale en prolongation de la rétention

Aux termes de l’article R742-1 du CESEDA, ‘Le magistrat du siège du tribunal judiciaire est saisi aux fins de prolongation de la rétention par simple requête de l’autorité administrative, dans les conditions prévues au chapitre III, avant l’expiration, selon le cas, de la période de quatre jours mentionnée à l’article L. 742-1 ou de la période de prolongation ordonnée en application des articles L. 742-4, L. 742-5, L. 742-6 ou L. 742-7.

La requête est adressée par tout moyen au greffe du tribunal compétent conformément aux dispositions de l’article R. 743-1.’

Selon les dispositions de l’article R743-2 alinéas 1 et 2 du CESEDA, ‘A peine d’irrecevabilité, la requête est motivée, datée et signée, selon le cas, par l’étranger ou son représentant ou par l’autorité administrative qui a ordonné le placement en rétention.

Lorsque la requête est formée par l’autorité administrative, elle est accompagnée de toutes pièces justificatives utiles, notamment une copie du registre prévu à l’article L. 744-2.’

Selon les dispositions de l’article 2 du 6 mars 2018 portant autorisation du registre de rétention et d’un traitement automatiséde données à caractère personnel dénommé ‘logiciel de gestion individualisée des centres de rétention administrative et de son annexe, le registre de rétention enregistrent les données à caractère personnel et informations suivantes:

I. – Concernant l’étranger faisant l’objet de la mesure de placement en rétention administrative :

1° Nom(s), prénom(s), alias éventuels ;

2° Date et lieu de naissance, nationalité ;

3° Sexe ;

4° Situation familiale, nom(s), prénom(s) et âge des enfants mineurs accompagnants;

5° Photographie d’identité ;

6° Type et validité du document d’identité éventuel ;

7° Numéro de l’application de gestion des dossiers des ressortissants étrangers en France correspondant au dossier de l’étranger placé en rétention ;

8° Le cas échéant, qualité de sortant de prison ;

9° Signature.

II. – Concernant la procédure administrative de placement en rétention administrative :

1° Date et heure du prononcé et de la notification de l’arrêté préfectoral de placement en rétention et, le cas échéant, des décisions de prolongation ;

2° Lieu de placement en rétention, date et heure d’admission au centre de rétention administrative, date et heure d’un transfert d’un lieu de rétention administrative à un autre lieu de rétention et motif ;

3° Préfecture en charge de l’exécution de la mesure de placement en centre de rétention administrative ;

4° Service interpellateur ou réalisant le transfert : transfert éventuel depuis un autre centre de rétention administrative ou depuis un établissement pénitentiaire ;

5° Droits de la personne liés au placement en rétention (date et heure de la notification des droits, référence du procès-verbal de notification) ;

6° Agent chargé de la mesure d’admission en centre de rétention administrative : nom, prénom, grade, numéro d’identification, signature ;

7° Conditions particulières d’accueil, secteur d’hébergement, affectation d’une chambre et d’un lit ;

8° Origine, nature et date de la mesure d’éloignement, date de sa notification, interdiction de retour ;

9° Bagages placés en consigne : numéro de registre et de consigne, détail et état des bagages, date de restitution des bagages ;

10° Biens placés au coffre : numéro de registre et de coffre, liste des objets de valeur et des objets écartés, date de dépôt et de restitution ;

11° Objets laissés à la disposition du retenu ;

12° Mouvements d’argent : numéro de registre, détail du numéraire, date et heure de dépôt et de retrait des fonds ;

13° Compte rendu des incidents au centre de rétention (date, heure, circonstances) : mise à l’écart, dates de début et de fin de la mise à l’écart et avis de cette mesure aux autorités judiciaires et administratives compétentes, nom, prénom, grade et numéro d’identification de l’agent ayant décidé la mise à l’écart, date et heures d’une demande d’examen médical et, le cas échéant, date et heure de l’examen médical et des mesures prescrites nécessitant l’intervention d’un agent du centre de rétention administrative ;

14° Hospitalisation éventuelle : date et heure d’admission, coordonnées de l’établissement hospitalier, date et heure de sortie ;

15° Existence d’une procédure « étranger malade » : date de saisine de l’agence régionale de santé (ARS), avis de l’ARS, décision préfectorale ;

16° Nom, prénom et signature de l’interprète ;

17° Nom, prénom, grade et signature du personnel du centre de rétention administrative.

III. – Concernant les procédures juridictionnelles mises en ‘uvre au cours de la rétention:

1° Contentieux administratif : type de recours, juridiction saisie, date et heure de l’audience, décision, appel ;

2° Contentieux judiciaire : présentation devant le juge des libertés et de la détention (JLD) et saisine du JLD par le retenu, date de présentation, décision, appel, date d’audience de la cour d’appel, résultat, motif d’annulation ;

3° Demande d’asile : date et heure du dépôt de la demande, modalité d’instruction, décision de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides et date de celle-ci, recours auprès de la Cour nationale du droit d’asile.

IV. – Concernant la fin de la rétention et l’éloignement :

1° Demande de laissez-passer consulaire, consulat saisi, date de la demande d’identification ou de présentation consulaire, type de présentation, motif de non-présentation, date de l’entretien, moyen de transport utilisé, résultat de l’entretien, délivrance du laissez-passer consulaire, date de délivrance, date et fin de validité du laissez-passer consulaire ;

2° Réservation du moyen de transport national et international : date prévisionnelle de départ, moyen de transport utilisé, pays de destination, demande de routing, escorte ;

3° Fin de la rétention : date et motif de la fin de rétention.

Il importe de rappeler que le législateur ne donne pas de définition des pièces justificatives utiles. Il est toutefois considéré qu’il s’agit des pièces nécessaires à l’appréciation par le juge des libertés et de la détention des éléments de fait et de droit dont l’examen lui permet d’exercer pleinement ses pouvoirs. Les dispositions légales sanctionnent le défaut de dépôt d’une pièce justificative concomitamment à la requête préfectorale en prolongation par l’irrecevabilité de la demande. Par ailleurs, il ne peut être suppléé à l’absence du dépôt des pièces justificatives utiles par leur seule communication à l’audience, sauf s’il est justifié de l’impossibilité de joindre les pièces à la requête (Cass. 1ère Civ 6 juin 2012, pourvoi n°11-30.185, Cass.1ère Civ 13 février 2019, pourvoi n°18-11.655).

Par ailleurs, il est constant que toute requête en prolongation de la rétention administrative d’un étranger doit, à peine d’irrecevabilité, être accompagnée d’une copie de ce registre actualisé. L’absence de production avec la requête du préfet de cette copie est sanctionnée par l’irrecevabilité de la requête, cette irrecevabilité pouvant être accueillie sans que celui qui l’invoque ait à justifier d’un grief. La production d’une copie actualisée du registre a pour seul but de permettre au juge de contrôler l’effectivité de l’exercice des droits reconnus à létranger au cours de la mesure de rétention. Elle a pour fondement la volonté de pallier la difficulté voire l’impossibilité pour l’étranger, de rapporter la double preuve, d’une part, de la réalité d’une demande portant sur l’exercice de l’un des droits lui étant reconnus et, d’autre part, du refus opposé à cette demande, qui constitue un fait négatif. Il se déduit de ces considérations que la sanction qu’est l’irrecevabilité ne doit s’apprécier qu’à l’aune de la fonction assignée au registre. A ce titre, il sera rappelé que si le juge, gardien de la liberté individuelle, doit s’assurer d’après les mentions figurant au registre que l’étranger a été, au moment de la notification de la décision de placement en rétention, pleinement informé de ses droits et placé en mesure de les faire valoir, ce contrôle s’opère également par tous moyens.

En l’espèce, l’examen de la copie du registre de rétention jointe à la requête révèle que ce document comporte notamment les éléments d’identité de l’étranger et vise la mesure d’éloignement fondant la rétention mais aussi la décision administrative de placement en rétention. Si la saisine des autorités consulaires tunisiennes réalisée le 31 décembre 2024 n’y apparaît pas, le préfet joint à sa requête le mail adressé au consul de Tunisie aux fins d’identification de l’appelant et de délivrance d’un laissez-passer.

De plus, le préfet verse à l’appui de sa demande, outre la copie du registre de rétention, les arrêtés portant obligation de quitter le territoire et de placement en rétention et leurs récépissés de notification, l’arrêté dûment publié du préfet des Alpes-Maritimes en date du 25 novembre 2024 conférant délégation à Mme [P] [X] pour signer les arrêtés de placement en rétention, ainsi que la procédure de garde à vue antérieure à cette mesure.

La requête préfectorale est donc accompagnée des pièces justificatives utiles.

Le moyen sera rejeté.

3) Sur le moyen tiré du défaut de diligences de l’autorité préfectorale

Les dispositions de l’article 17 du règlement UE n°603/13 du 26 juin 2013 relatif à la création d’Eurodac pour la comparaison des empreintes digitales aux fins de l’application efficace du règlement UE n°604/2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l’Etat membre responsable de l’examen d’une demande de proteciton internationale dans l’un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, prévoient qu’ ‘En vue de vérifier si un ressortissant de pays tiers ou un apatride séjournant illégalement sur son territoire n’a pas auparavant introduit une demande de protection internationale dans un autre Etat membre, un Etat membre peut transmettre au système central les donnés dactyloscopiques relatives aux empreintes digitales qu’il peut avoir relevées sur un tel ressortissant de pays tiers ou apatride, âgé de 14 ans au moins, ainsi que le numéro de référence attribué par cet Etat membre.’

Aux termes de l’article L741-3 du CESEDA, ‘Un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L’administration exerce toute diligence à cet effet.’

Il appartient au juge des libertés et de la détention, en application de l’article L. 741-3 du CESEDA de rechercher concrètement les diligences accomplies par l’administration pour permettre que l’étranger ne soit maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. Cela induit, sauf circonstances insurmontables, la production de pièces par l’administration qui établissent ces diligences, en fonction de la situation de l’étranger.

En l’espèce, l’autorité préfectorale justifie de la saisine par mail du 31 décembre 2024 à 14h49, soit moins de vingt-quatre heures après le placement en rétention, du consul de Tunisie aux fins d’identification de M. [C] et de délivrance d’un laissez-passer. Cette démarche constitue une diligence nécessaire à l’exécution de la mesure d’éloignement au sens de l’article L741-3 du CESEDA.

Enfin, il importe de rappeler que la consultation du fichier EURODAC ne constitue qu’une faculté pour l’administration, étant observé que M. [C] n’apporte aucun élément établissant la réalité du dépôt d’une demande d’asile, pas plus qu’il ne démontre avoir sollicité de l’autorité préfectorale la consultation du fichier susvisé.

Le moyen sera donc rejeté.

Aussi, l’ordonnance entreprise sera confirmée.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par décision réputée contradictoire en dernier ressort, après débats en audience publique,

Déclarons recevable l’appel formé par Monsieur [B] [C],

Confirmons l’ordonnance du magistrat du siège du tribunal judiciaire de Marseille désigné pour le contrôle des mesures d’éloignement et de rétention en date du 03 Janvier 2025,

Les parties sont avisées qu’elles peuvent se pourvoir en cassation contre cette ordonnance dans un délai de 2 mois à compter de cette notification, le pourvoi devant être formé par déclaration au greffe de la Cour de cassation, signé par un avocat au conseil d’Etat ou de la Cour de cassation.

Le greffier Le président

Reçu et pris connaissance le :

Monsieur [B] [C]

Assisté d’un interprète en langue arabe

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-11, Rétentions Administratives

[Adresse 8]

Téléphone : [XXXXXXXX02] – [XXXXXXXX03] – [XXXXXXXX01]

Courriel : [Courriel 5]

Aix-en-Provence, le 04 Janvier 2025

À

– PREFECTURE DES ALPES MARITIMES

– Monsieur le directeur du centre de rétention administrative de [Localité 6]

– Monsieur le procureur général

– Monsieur le greffier du magistrat du siège du tribunal judiciaire de Marseille désigné pour le contrôle des mesures d’éloignement et de rétention

– Maître Charlotte MIQUEL

NOTIFICATION D’UNE ORDONNANCE

J’ai l’honneur de vous notifier l’ordonnance ci-jointe rendue le 04 Janvier 2025, suite à l’appel interjeté par :

Monsieur [B] [C]

né le 03 Décembre 2004 à [Localité 9] (Tunisie)

de nationalité Tunisienne

Je vous remercie de m’accuser réception du présent envoi.

Le greffier,

VOIE DE RECOURS

Nous prions Monsieur le directeur du centre de rétention administrative de bien vouloir indiquer au retenu qu’il peut se pourvoir en cassation contre cette ordonnance dans un délai de 2 mois à compter de cette notification, le pourvoi devant être formé par déclaration au greffe de la Cour de cassation.


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