Conditions de maintien en soins psychiatriques et respect des droits des patients

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Conditions de maintien en soins psychiatriques et respect des droits des patients

L’Essentiel : L’affaire concerne l’hospitalisation de Mme [X] [E], admise au Centre Hospitalier Spécialisé Psychiatrique le 28 décembre 2024. Lors de l’audience, elle a exprimé un état de bien-être physique et moral, tout en signalant des difficultés avec d’autres patients. Son avocate a plaidé pour une mainlevée, soulignant son amélioration et le soutien de son mari. Cependant, l’évaluation médicale a révélé la nécessité d’une surveillance constante. Le tribunal a décidé de maintenir l’hospitalisation, considérant que Mme [X] [E] ne pouvait pas consentir aux soins de manière pérenne, et a rendu sa décision le 6 janvier 2025.

Contexte de l’affaire

L’affaire se déroule au Centre Hospitalier Spécialisé Psychiatrique [1], où une audience a été tenue concernant l’hospitalisation de Mme [X] [E], née le 4 mars 1987. Le directeur de l’établissement, bien que régulièrement avisé, n’était pas présent, tout comme le mari de la défenderesse et le vice-procureur de la République.

Admission et hospitalisation

Mme [X] [E] a été admise en hospitalisation complète à la demande d’un tiers, par décision du directeur du centre, le 28 décembre 2024. Cette admission a été suivie d’une décision de maintien en hospitalisation complète le 31 décembre 2024, après une période d’observation.

État de santé de la défenderesse

Lors de l’audience, Mme [X] [E] a exprimé qu’elle se sentait bien tant sur le plan physique que moral. Elle a mentionné qu’elle respectait son traitement et qu’elle avait des contacts avec des psychiatres au Maroc et à Bordeaux. Cependant, elle a également signalé des difficultés liées à son environnement hospitalier, notamment des interactions indésirables avec d’autres patients.

Demande de mainlevée

L’avocate de Mme [X] [E] a plaidé pour la mainlevée de son hospitalisation, soulignant son amélioration et sa volonté de suivre son traitement. Elle a également noté le soutien de son mari, qui lui rendait visite.

Évaluation médicale

L’évaluation médicale a révélé que l’état mental de Mme [X] [E] nécessitait toujours des soins et une surveillance médicale constante. Les certificats médicaux requis ont été fournis et étaient conformes aux prescriptions légales. L’avis médical a souligné que, malgré des signes d’amélioration, une sortie prématurée pourrait entraîner des risques de rechute.

Décision du tribunal

Le tribunal a décidé de maintenir l’hospitalisation complète de Mme [X] [E], considérant qu’elle ne pouvait pas consentir aux soins de manière pérenne et que son état nécessitait une prise en charge sécurisée. La décision a été rendue le 6 janvier 2025, avec l’octroi d’une aide juridictionnelle provisoire à la défenderesse.

Notification et appel

La décision a été notifiée aux parties concernées, et il a été précisé que celle-ci pouvait faire l’objet d’un appel dans un délai de 10 jours. Le ministère public a également la possibilité d’interjeter appel dans le même délai.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions légales pour l’hospitalisation complète d’une personne atteinte de troubles mentaux ?

Selon l’article L.3212-1 du code de la santé publique, une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l’objet de soins psychiatriques sur décision du directeur d’un établissement que lorsque deux conditions sont réunies :

1° Ses troubles mentaux rendent impossible son consentement ;

2° Son état mental impose des soins immédiats assortis d’une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète.

Ces conditions visent à protéger les droits des patients tout en garantissant leur sécurité et celle des autres.

Il est donc essentiel que l’hospitalisation soit justifiée par des éléments médicaux clairs, attestant de l’incapacité du patient à consentir aux soins et de la nécessité d’une surveillance constante.

Quelles sont les procédures d’admission en soins psychiatriques en cas d’urgence ?

L’article L.3212-3 du code de la santé publique stipule qu’en cas d’urgence, lorsque le risque d’atteinte à l’intégrité du malade est grave, le directeur d’un établissement peut, à titre exceptionnel, prononcer l’admission en soins psychiatriques d’une personne malade à la demande d’un tiers.

Cette admission se fait sur la base d’un seul certificat médical, qui peut être émis par un médecin de l’établissement.

Il est important de noter que les certificats médicaux requis doivent être établis par deux psychiatres distincts, conformément aux dispositions des deuxième et troisième alinéas de l’article L.3211-2-2.

Cette procédure vise à garantir que l’admission en soins psychiatriques est justifiée et encadrée par des avis médicaux multiples.

Quelles sont les obligations du directeur d’établissement concernant la prolongation de l’hospitalisation complète ?

L’article L.3211-12-1 du code de la santé publique impose que l’hospitalisation complète d’un patient ne puisse se poursuivre sans que le magistrat du siège du tribunal judiciaire ait statué sur cette mesure.

Cette décision doit intervenir avant l’expiration d’un délai de 12 jours à compter de l’admission.

De plus, la saisine du tribunal doit être accompagnée de l’avis motivé d’un psychiatre de l’établissement, se prononçant sur la nécessité de poursuivre l’hospitalisation complète.

Ces dispositions garantissent un contrôle judiciaire sur les décisions d’hospitalisation, protégeant ainsi les droits des patients.

Quels sont les critères d’évaluation de la nécessité de maintenir l’hospitalisation complète ?

L’évaluation de la nécessité de maintenir l’hospitalisation complète repose sur plusieurs critères, notamment l’état mental du patient et sa capacité à consentir aux soins.

L’avis médical motivé, comme prévu par l’article L.3211-12-1 § II, doit indiquer si l’état du patient nécessite toujours des soins assortis d’une surveillance médicale constante.

Dans le cas de Mme [X] [E], il a été noté que son discours banalisait ses symptômes, ce qui justifie la poursuite de l’hospitalisation pour éviter des risques de rechute rapide.

Ainsi, la décision de maintenir l’hospitalisation complète est fondée sur des éléments médicaux concrets et une évaluation continue de l’état du patient.

Quelles sont les voies de recours possibles contre la décision de maintien de l’hospitalisation complète ?

La décision de maintien de l’hospitalisation complète peut être contestée par voie d’appel.

Selon les dispositions applicables, cette décision peut être frappée d’appel dans un délai de 10 jours à compter de la notification de la décision.

La déclaration d’appel doit être motivée et transmise au greffe de la cour d’appel compétente.

Le ministère public a également la possibilité d’interjeter appel dans le même délai, garantissant ainsi un contrôle supplémentaire sur les décisions d’hospitalisation.

Ces voies de recours sont essentielles pour assurer la protection des droits des patients et leur permettre de contester des décisions qui pourraient être perçues comme injustes.

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX

N° RG 24/04175 – N° Portalis DBX6-W-B7I-Z6FB
N° Minute :

ORDONNANCE DU 06 Janvier 2025

A l’audience publique du 06 Janvier 2025, devant Nous, Florent SZEWCZYK, magistrat du siège du Tribunal judiciaire de Bordeaux, assisté de Stéphanie TESSIER, Greffier,

siégeant au Centre Hospitalier Spécialisé Psychiatrique [1], dans une salle spécialement aménagée sur l’emprise de l’établissement et répondant aux exigences de l’article L 3211-12-2 du code de la santé publique,

DANS L’INSTANCE ENTRE :

REQUÉRANT :

M. Le directeur CENTRE HOSPITALIER [1]
régulièrement avisé, non comparant,

DÉFENDEUR :

Mme [X] [E]
née le 04 Mars 1987
actuellement hospitalisée au Centre Hospitalier Spécialisé [1],
régulièrement convoquée,
comparante assistée de Me Julie GABINSKI, avocat au barreau de BORDEAUX, avocat commis d’office,

PARTIE INTERVENANTE :
M. [B] [O] (mari) régulièrement avisé, non comparante

MINISTÈRE PUBLIC :

Madame le Vice-Procureur de la République régulièrement avisée, non comparante,

****
Vu le code de santé publique, et notamment ses articles L.3211-1, L.3211-2-1, L.3211-2-2, L.3211-12-1, L.3211-12-2, L.3212-1 à L.3212-12, R.3211-7 à R.3211-18, R.3211-24 à R.3211-26, R.3212-1 et R.3212-2,

Vu l’admission de Madame [X] [E] en hospitalisation complète, à la demande d’un tiers selon la procédure d’urgence, par décision du directeur du centre hospitalier spécialisé de [1] prononcée le 28 décembre 2024,

Vu la décision du directeur du centre hospitalier spécialisé de [1] du 31 décembre 2024 maintenant l’intéressée en hospitalisation complète à l’issue de la période d’observation,

Vu la requête du directeur du centre hospitalier spécialisé de [1] reçue au greffe le 31 décembre 2024 et les pièces jointes,

Vu l’avis du ministère public du 3 janvier 2025, mis à la disposition des parties,

Vu la comparution de l’intéressée et ses explications à l’audience tenue publiquement. Son traitement est très bien et se sent très bien. Elle respecte la prise de ses médicaments. En revanche, son hospitalisation est difficile avec des hommes qui fument et la draguent. Elle a un psychiatre au Maroc qui la suit via zoom et son médecin localement valide pour une ordonnance. Elle a aussi un psychiatre à Bordeaux et ils vont se mettre en lien. Elle se sent très bien moralement et physiquement. Elle prend son traitement et va acheter un réveil qui va sonner pour le prendre. Son mari (qui va lui rendre visite dans l’après-midi) est derrière elle comme son frère. Elle est entourée. Elle souhaite sortir car elle est enfermée dans sa chambre à cause des malades.

Vu les observations de son avocate qui indique que madame sollicite la mainlevée de son hospitalisation complète et qu’elle va mieux. Elle acquiesce à un traitement et il n’y a pas de difficultés de régularité et va s’acheter un réveil en ce sens. Son mari est bienveillant.

MOTIFS DE LA DÉCISION,

Aux termes des dispositions de l’article L.3212-1 du code de la santé publique : « Une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l’objet de soins psychiatriques sur décision du directeur d’un établissement (…) que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies:
1° Ses troubles mentaux rendent impossible son consentement;
2° Son état mental impose des soins immédiats assortis (…) d »une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète (…)».

Selon l’article L.3212-3 du code de la santé publique : «En cas d’urgence, lorsqu’il existe un risque grave d’atteinte à l’intégrité du malade, le directeur d’un établissement mentionné à l’article L.3222-1 peut, à titre exceptionnel, prononcer à la demande d’un tiers l’admission en soins psychiatriques d’une personne malade au vu d’un seul certificat médical émanant, le cas échéant, d’un médecin exerçant dans l’établissement. Dans ce cas, les certificats médicaux mentionnés aux deuxième et troisième alinéas de l’article L.3211-2-2 sont établis par deux psychiatres distincts.».

Enfin, en vertu de l’article L.3211-12-1 du code de la santé publique «I. L’hospitalisation complète d’un patient ne peut se poursuivre sans que le magistrat du siège du tribunal judiciaire, préalablement saisi par le directeur de l’établissement (…) ait statué sur cette mesure (…): 1° Avant l’expiration d’un délai de 12 jours à compter de l’admission (…).
II. La saisine mentionnée au I du présent article est accompagnée de l’avis motivé d’un psychiatre de l’établissement d’accueil se prononçant sur la nécessité de poursuivre l’hospitalisation complète.».

Il résulte des éléments figurant au dossier que l’intéressée a été admise au centre hospitalier spécialisé de [1] en raison d’une rupture avec l’état antérieur se manifestant par des troubles du comportement avec une désorganisation psycho comportementale. Elle souffrait d’une hyporexie et d’insomnies. Son discours était délirant, désorganisé et logorrhéique avec des coqs à l’âne.

Les certificats médicaux exigés par les textes figurent au dossier, ils ont été établis dans les délais requis et contiennent des indications propres à répondre aux prescriptions légales. La régularité de la procédure n’est d’ailleurs pas discutée.

L’avis médical motivé prévu par l’article L.3211-12-1 § II du code de la santé publique établi le 2 janvier 2025 relève que l’état mental de l’intéressée nécessite toujours des soins assortis d’une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète car elle tient un discours banalisant ses symptômes et l’épisode ayant conduit à son hospitalisation. En dépit d’un discours ambivalent sur la poursuite de l’hospitalisation, il apparaît nécessaire de la maintenir pour poursuivre l’amélioration en cours.

En toute hypothèse, une sortie prématurée serait de nature à présenter des risques de rechute rapide.

Dans ces conditions, la prise en charge dans un cadre contenant et sécurisé s’impose encore, afin de garantir l’observance des soins, et le cas échéant la réadaptation du traitement, ce qui ne peut se faire qu’en milieu hospitalier. Le maintien de l’hospitalisation complète s’avère par conséquent nécessaire à ce jour en raison de l’impossibilité pour l’intéressée de consentir aux soins de façon pérenne alors qu’ils sont indispensables pour stabiliser son état.

Dès lors, le maintien de l’hospitalisation complète de l’intéressée apparaît à ce jour justifié.

PAR CES MOTIFS

Statuant par mise à disposition au greffe le 06 Janvier 2025, par décision contradictoire rendue en premier ressort après débats en audience publique du 06 Janvier 2025,

Accorde l’aide juridictionnelle provisoire à Mme [X] [E],

Autorise le maintien de l’hospitalisation complète de Mme [X] [E],

Dit que la présente décision sera notifiée à :
Mme [X] [E],
Me Julie GABINSKI,
M. [B] [O] (mari)
Monsieur le Directeur du Centre Hospitalier Spécialisé Psychiatrique [1],
Ministère public.

Dit que les dépens comprenant les frais d’expertise seront supportés par le Trésor Public, en application des dispositions de l’article R 93-2° du Code de Procédure Pénale.

Le Greffier, Le Juge,

Cette décision peut être frappée d’appel dans un délai de 10 jours à compter de la présente notification par déclaration motivée transmise par tout moyen au greffe de la cour d’appel de BORDEAUX – [Adresse 3]. Cette déclaration peut notamment être envoyée par courriel à cette adresse : [Courriel 2]
Le ministère public peut, dans tous les cas, interjeter appel dans le même délai.

N° RG : N° RG 24/04175 – N° Portalis DBX6-W-B7I-Z6FB

Ordonnance en date du 06 Janvier 2025

Reçu notification de la présente le
Le patient
signature :

Reçu notification de la présente ordonnance le
le Directeur du Centre Hospitalier Spécialisé [1],

signature


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