Conditions de maintien des soins psychiatriques et respect des droits du patient

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Conditions de maintien des soins psychiatriques et respect des droits du patient

L’Essentiel : Le 20 décembre 2024, [X] [T] a été admis en hospitalisation complète à l’EPSM de [Localité 3] Métropole, suite à une demande d’urgence de son frère. Le 21 décembre, des certificats médicaux ont conduit à la décision de maintenir l’hospitalisation. Le 26 décembre, le directeur a saisi le magistrat pour un contrôle de la mesure. Le conseil de [X] [T] a demandé la mainlevée, arguant de sa capacité à consentir aux soins. Cependant, l’évaluation médicale a confirmé la nécessité de prolonger l’hospitalisation, entraînant une décision du magistrat le 30 décembre pour maintenir la mesure jusqu’à six mois.

Admission en hospitalisation complète

Le 20 décembre 2024, [X] [T] a été admis en hospitalisation complète à l’EPSM de [Localité 3] Métropole sur décision du directeur de l’établissement, suite à une demande d’urgence formulée par son frère. Cette admission a été effectuée conformément à l’article L3212-3 du code de la santé publique.

Décision de maintien en hospitalisation

Le 21 décembre 2024, sur la base de certificats médicaux établis aux 24 et 72 heures, il a été décidé de maintenir [X] [T] en hospitalisation complète. Le 26 décembre, le directeur de l’établissement a saisi le magistrat du siège pour un contrôle de la mesure après 12 jours d’hospitalisation.

Demande de mainlevée de la mesure

Le conseil de [X] [T] a demandé la mainlevée de l’hospitalisation, arguant que le patient était en capacité de signer la notification de ses droits et que son hospitalisation était inutile. [X] [T] a également exprimé son consentement aux soins, tandis que le directeur de l’établissement a soutenu la poursuite de la mesure.

Notification des droits du patient

Selon l’article L3211-3 du code de la santé publique, le patient doit être informé de la décision d’admission et de ses droits. Bien que [X] [T] n’ait pas pu signer la notification, il a été informé de la décision d’admission et de ses droits, comme l’atteste la notification du 20 décembre 2024.

Évaluation de l’état de santé du patient

L’article L.3212-1 stipule qu’une hospitalisation sans consentement est justifiée si les troubles mentaux du patient rendent impossible son consentement et nécessitent des soins immédiats. Les pièces médicales et l’avis du docteur [K] ont confirmé la nécessité de prolonger l’hospitalisation en raison de la persistance des troubles et de l’incapacité de [X] [T] à consentir aux soins.

Décision du magistrat

Après délibération, le magistrat a ordonné la poursuite de l’hospitalisation complète de [X] [T], précisant que cette mesure resterait en vigueur jusqu’à une levée médicale ou une décision de placement sous soins ambulatoires sans consentement, et ce, pour une durée maximale de six mois. La décision a été prononcée le 30 décembre 2024.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions de l’hospitalisation sans consentement selon le Code de la santé publique ?

L’article L3212-1 du Code de la santé publique stipule que :

« Une personne atteinte de troubles mentaux ne peut être hospitalisée sans son consentement sur décision du directeur de l’établissement que si ses troubles rendent impossible son consentement et que son état impose des soins immédiats assortis d’une surveillance constante en milieu hospitalier. »

Cette disposition souligne que l’hospitalisation sans consentement est strictement encadrée.

Il est impératif que les troubles mentaux du patient soient tels qu’ils rendent impossible son consentement.

De plus, il doit être établi que l’état du patient nécessite des soins immédiats, ce qui justifie une surveillance constante en milieu hospitalier.

Le juge, dans ce cadre, ne peut pas substituer son avis à l’évaluation médicale des troubles psychiques du patient.

Cette évaluation est essentielle pour garantir que les droits du patient soient respectés tout en assurant sa sécurité et celle des autres.

Comment se déroule la notification des droits du patient lors de l’admission en soins psychiatriques ?

L’article L3211-3 alinéa 2 du Code de la santé publique précise que :

« Avant chaque décision prononçant le maintien des soins en application des articles L. 3212-4, L. 3212-7 et L. 3213-4 ou définissant la forme de la prise en charge en application des articles L. 3211-12-5, L. 3212-4, L. 3213-1 et L. 3213-3, la personne faisant l’objet de soins psychiatriques est, dans la mesure où son état le permet, informée de ce projet de décision et mise à même de faire valoir ses observations, par tout moyen et de manière appropriée à cet état. »

Il est donc essentiel que le patient soit informé de la décision d’admission et de ses droits, dans la mesure où son état le permet.

Cette notification doit être faite le plus rapidement possible et d’une manière appropriée à l’état du patient.

En cas d’impossibilité de signer la notification, comme cela a été le cas pour [X] [T], il est nécessaire que le directeur d’établissement prenne les mesures nécessaires pour informer le patient des décisions prises à son encontre.

La jurisprudence a également précisé que cette procédure contradictoire préalable n’est pas applicable à la décision d’admission en soins psychiatriques, ce qui renforce l’importance de la notification des droits.

Quels sont les recours possibles pour un patient hospitalisé sans consentement ?

L’article L3211-3 alinéa 3 du Code de la santé publique stipule que :

« Le patient doit être informé :
– le plus rapidement possible et d’une manière appropriée à son état de la décision d’admission et de la décision maintenant les soins ainsi que des raisons qui motivent ces décisions,
– dès l’admission ou aussitôt que son état le permet, et, par la suite après chacune des décisions maintenant les soins s’il en fait la demande, de sa situation juridique, de ses droits et des voies de recours qui lui sont ouvertes. »

Cela signifie que le patient a le droit d’être informé de sa situation juridique et des voies de recours disponibles.

Il peut demander des informations sur les décisions qui le concernent et sur les raisons de son hospitalisation.

Les voies de recours peuvent inclure la possibilité de contester la décision d’hospitalisation devant un juge, qui examinera si les conditions légales pour l’hospitalisation sans consentement sont remplies.

Il est donc crucial que le patient soit informé de ses droits et des recours possibles pour garantir une protection adéquate de ses intérêts.

En l’espèce, [X] [T] a été informé de ses droits, ce qui est conforme aux exigences légales.

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE

Magistrat Délégué
Dossier – N° RG 24/02331 – N° Portalis DBZS-W-B7I-ZDCL

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

ORDONNANCE DU 30 Décembre 2024

DEMANDEUR
M. LE DIRECTEUR DE L’EPSM DE L’AGGLOMÉRATION LILLOISE – Hôpital [5] – [Adresse 2] [Localité 4]
Représenté par Mme [P],

DEFENDEUR
Monsieur [X] [T]
EPSM DE L’AGGLOMÉRATION LILLOISE – Hôpital [5] – [Adresse 2] [Localité 4]
Présent, assisté de Maître Xavier RAES, avocat commis d’office,

TIERS
Monsieur [N] [T]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Non comparant

MADAME LA PROCUREURE DE LA REPUBLIQUE
Non comparant – conclusions écrites du procureur de la République en date du 27/12/2024

COMPOSITION

MAGISTRAT : Aurore JEAN BAPTISTE, Magistrat Délégué
GREFFIER : Louise DIANA

DEBATS

En audience publique du 30 Décembre 2024 qui s’est tenue dans la salle d’audience de L’EPSM de L’AGGLOMÉRATION LILLOISE, la décision ayant été mise en délibéré au 30 Décembre 2024.

Ordonnance contradictoire, en premier ressort, par mise à disposition au greffe le 30 Décembre 2024 par Aurore JEAN BAPTISTE, Magistrat délégué, assisté de Louise DIANA, Greffier.

Vu l’article 455 du code de procédure civile ;Vu la requête en date du 26 Décembre 2024 présentée par LE DIRECTEUR DE L’EPSM AGGLOMERATION LILLOISE-SITE [5] et les pièces jointes ;Vu les pièces visées par l’article R 3211-12 du code de la santé publique ;Vu la présence d’un avocat pour l’audience de ce jour ;Vu les conclusions du Ministère Public ;
Les parties présentes entendues.

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

[X] [T] a fait l’objet le 20 décembre 2024 d’une admission en hospitalisation complète à l’EPSM de [Localité 3] Métropole sur décision du directeur d’établissement selon la procédure prévue à l’article L3212-3 du code de la santé publique soit sur la demande d’un tiers (son frère) en urgence.

Sur la base des certificats médicaux établis aux échéances de 24 et de 72 heures son maintien en hospitalisation complète a été décidé le 21 décembre suivant.

Par requête en date du 26 décembre 2024, le directeur de l’établissement psychiatrique a saisi le magistrat du siège désigné par le Président aux fins de contrôle à 12 jours de la mesure.

Par mention écrite au dossier, le ministère public a fait connaître son avis requérant le maintien de l’hospitalisation sous contrainte.

***

Entendu le conseil de [X] [T] demande la mainlevée de la mesure et développe les moyens suivants :
– il n’est pas caractérisé l’impossibilité pour le patient de signer la notification des droits du 20 décembre 2024 alors que le certificat médical de la même date indique que [X] [T] était en capacité de comprendre et était orienté. Cette irrégularité fait grief.
Il est fait observer que [X] [T] estime que son hospitalisation est inutile et qu’il consent aux soins.

Le directeur de l’établissement demande la poursuite de la mesure. L’impossibilité de signer la notification est attestée et la notification est orale.

[X] [T] dit ne pas vouloir mettre fin à l’hospitalisation pour le moment. Il ne se rappelle plus si il pouvait signer.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la notification de l’admission du patient et de ses droits :

Il ressort de l’article L3211-3 alinéa 2 du code de la santé publique : “Avant chaque décision prononçant le maintien des soins en application des articles L. 3212-4, L. 3212-7 et L. 3213-4 ou définissant la forme de la prise en charge en application des articles L. 3211-12-5, L. 3212-4, L. 3213-1 et L. 3213-3, la personne faisant l’objet de soins psychiatriques est, dans la mesure où son état le permet, informée de ce projet de décision et mise à même de faire valoir ses observations, par tout moyen et de manière appropriée à cet état.
En outre, toute personne faisant l’objet de soins psychiatriques en application des chapitres II et III du présent titre ou de l’article 706-135 du code de procédure pénale est informée :
a) Le plus rapidement possible et d’une manière appropriée à son état, de la décision d’admission et de chacune des décisions mentionnées au deuxième alinéa du présent article, ainsi que des raisons qui les motivent ;
b) Dès l’admission ou aussitôt que son état le permet et, par la suite, à sa demande et après chacune des décisions mentionnées au même deuxième alinéa, de sa situation juridique, de ses droits, des voies de recours qui lui sont ouvertes et des garanties qui lui sont offertes en application de l’article L. 3211-12-1.
L’avis de cette personne sur les modalités des soins doit être recherché et pris en considération dans toute la mesure du possible”.

La première chambre civile a jugé que cette procédure contradictoire préalable n’était pas applicable à la décision d’admission en soins psychiatriques (1re Civ., 29 septembre 2021, pourvoi n° 20-14.611, publié).

Il résulte, par ailleurs, de l’article L. 3211-3, alinéa 3, du CSP que le patient doit être informé :
– le plus rapidement possible et d’une manière appropriée à son état de la décision d’admission
et de la décision maintenant les soins ainsi que des raisons qui motivent ces décisions,
– dès l’admission ou aussitôt que son état le permet, et, par la suite après chacune des décisions
maintenant les soins s’il en fait la demande, de sa situation juridique, de ses droits et des voies
de recours qui lui sont ouvertes.

En l’espèce, il ressort que [X] [T] a été admis en hospitalisation sous contrainte le 20 décembre sur décision du directeur d’établissement qui lui a été notifiée le même jour. Il est fait mention que [X] [T] n’était pas en état de signer la présente notification qui a donc fait l’objet de la signature de deux infirmiers.

Si [X] [T] n’a pas été en mesure de signer la notification de la décision d’admission et de ses droits, il ressort que le texte impose au directeur d’établissement de porter à la connaissance du patient les décisions prises à son encontre, ce qui a été fait en l’espèce comme en atteste la notificiation du 20 décembre 2024 qui indique que [X] [T] a été informé de la décision d’admission et a eu connaissance de ses droits.

En outre, s’il n’est pas indiqué sur la notification, les raisons pour lesquellesn’a pas été en capacité de la signer, il convient de se reférer au certificat d’admission qui relève les troubles suivants : “des troubles du comportement avec incohérences de comportement, hallucinations, un déni de sa pathologie avec refus de soins, une mise en danger de lui-même”.

En conséquence, le moyen sera rejeté.

Sur la poursuite de la mesure :

En application de l’article L.3212-1 du code de la santé publique, une personne atteinte de troubles mentaux ne peut être hospitalisée sans son consentement sur décision du directeur de l’établissement que si ses troubles rendent impossible son consentement et que son état impose des soins immédiats assortis d’une surveillance constante en milieu hospitalier.

Le juge ne peut substituer son avis à l’évaluation par les médecins tant des troubles psychiques du patient que de son consentement aux soins (Cour de cassation, civ 1ère, 27 septembre 2017, pourvoi n°16-22.544).

En l’espèce, il résulte des pièces médicales, de l’avis motivé établi par le docteur [K] le 26 décembre 2024 et des débats de l’audience que l’hospitalisation sous contrainte de l’intéressé doit être prolongée, en l’état de la persistance des troubles et de l’impossibilité pour le patient de consentir valablement aux soins nécessités par son état de santé.

Il ressort en effet de l’avis motivé précité que le patient est réticent à confier la symptomatologie et continue à avoir un vécu dangereux de son environnement. L’humeur est instable, avec de l’anxiété liée au vécu de persécution, de la méfiance pathologique vis à vis des soignants, le conduisant à minimiser les symptômes pour convaincre qu’il va bien et doit quitter l’hôpital ou encore à négocier les médicaments dont il ne voit pas l’utilité.

PAR CES MOTIFS,

Le magistrat délégué statuant après débats, par ordonnance mise à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort

ORDONNE la poursuite de l’hospitalisation complète de Monsieur [X] [T].

DIT que cette mesure emporte effet jusqu’à levée médicale ou décision médicale de placement sous soins ambulatoires sans consentement et à défaut jusqu’à un délai de six mois suivant le prononcé de cette décision.

Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition au greffe le 30 Décembre 2024.

Le Greffier, Le Magistrat Délégué,

Louise DIANA Aurore JEAN BAPTISTE


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