Conditions de maintien en soins psychiatriques pour un individu en détention

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Conditions de maintien en soins psychiatriques pour un individu en détention

L’Essentiel : L’affaire concerne Monsieur [C], hospitalisé au Centre Hospitalier Spécialisé Psychiatrique de [Localité 1] sur ordre du préfet de la Gironde, en raison de troubles mentaux nécessitant une surveillance constante. Après son transfert d’un centre de détention, plusieurs arrêtés ont été pris pour justifier son hospitalisation complète. Des certificats médicaux attestent de son état mental, confirmant la nécessité de soins psychiatriques continus. Le tribunal, le 19 novembre 2024, a accordé l’aide juridictionnelle à Monsieur [C] et a autorisé son maintien en hospitalisation, décision susceptible d’appel dans un délai de 10 jours.

Contexte de l’affaire

L’affaire se déroule au Centre Hospitalier Spécialisé Psychiatrique de [Localité 1], où Monsieur [Z] [C], né le 04 août 1979 au Maroc, est hospitalisé. Le préfet de la Gironde a ordonné sa mise en œuvre de soins psychiatriques sous forme d’hospitalisation complète, en raison de troubles mentaux nécessitant une surveillance médicale constante.

Procédure judiciaire

Le préfet de la Gironde a pris plusieurs arrêtés, notamment celui du 08 novembre 2024, pour ordonner l’hospitalisation de Monsieur [C] après son transfert depuis un centre de détention. La requête du préfet a été enregistrée le 13 novembre 2024, et un avis du ministère public a été émis le 18 novembre 2024. Malgré la non-comparution de l’intéressé, son avocat a exprimé son accord avec l’appréciation du juge.

Évaluation médicale

Conformément aux dispositions du code de la santé publique, des certificats médicaux ont été fournis, attestant de l’état mental de Monsieur [C]. Un avis médical du 18 novembre 2024 a confirmé la nécessité de soins psychiatriques continus, en raison d’un tableau clinique inchangé et d’une fragilité émotionnelle persistante.

Justification de l’hospitalisation

L’hospitalisation complète de Monsieur [C] est justifiée par le risque de rechute rapide en cas de sortie prématurée, ainsi que par la nature de ses troubles mentaux, qui pourraient compromettre la sécurité des personnes et l’ordre public. La prise en charge en milieu hospitalier est considérée comme essentielle pour garantir l’observance des soins.

Décision du tribunal

Le tribunal a statué le 19 novembre 2024, accordant l’aide juridictionnelle provisoire à Monsieur [C] et autorisant le maintien de son hospitalisation complète. La décision a été notifiée aux parties concernées, y compris au ministère public et au directeur du centre hospitalier. Les frais d’expertise seront pris en charge par le Trésor Public.

Possibilité d’appel

La décision rendue peut faire l’objet d’un appel dans un délai de 10 jours suivant sa notification. Le ministère public a également la possibilité d’interjeter appel dans le même délai.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions nécessaires pour une hospitalisation complète sans consentement selon le Code de la santé publique ?

L’article L.3212-1 du Code de la santé publique précise les conditions requises pour qu’une personne atteinte de troubles mentaux puisse faire l’objet de soins psychiatriques sans son consentement.

Il stipule que :

« Une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l’objet de soins psychiatriques sur décision du directeur d’un établissement (…) que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies :

1° Ses troubles mentaux rendent impossible son consentement ;

2° Son état mental impose des soins immédiats assortis (…) d’une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète (…) ».

Ainsi, pour qu’une hospitalisation complète soit ordonnée, il est impératif que le patient ne puisse pas consentir à ses soins en raison de la gravité de ses troubles mentaux, et que ces troubles nécessitent des soins urgents et une surveillance médicale continue.

Quel est le rôle du représentant de l’État dans le processus d’admission en soins psychiatriques ?

L’article L.3213-1 du Code de la santé publique définit le rôle du représentant de l’État dans le département concernant l’admission en soins psychiatriques.

Il énonce que :

« Le représentant de l’Etat dans le département prononce par arrêté, au vu d’un certificat médical circonstancié ne pouvant émaner d’un psychiatre exerçant dans l’établissement d’accueil, l’admission en soins psychiatriques des personnes dont les troubles mentaux nécessitent des soins et compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l’ordre public.

Les arrêtés préfectoraux sont motivés et énoncent avec précision les circonstances qui ont rendu l’admission en soins nécessaire. »

Cela signifie que l’admission en soins psychiatriques doit être justifiée par un certificat médical et que l’arrêté préfectoral doit clairement expliquer les raisons de cette admission, notamment en lien avec la sécurité publique.

Quelles sont les obligations relatives à l’hospitalisation des détenus atteints de troubles mentaux ?

L’article D.398 du Code de procédure pénale impose des obligations spécifiques concernant l’hospitalisation des détenus atteints de troubles mentaux.

Il stipule que :

« Les détenus atteints des troubles mentaux visés à l’article L.3214-3 du code de la santé publique ne peuvent être maintenus dans un établissement pénitentiaire.

Au vu d’un certificat médical circonstancié et conformément à la législation en vigueur, il appartient à l’autorité préfectorale de faire procéder, dans les meilleurs délais, à leur hospitalisation d’office dans un établissement de santé habilité au titre de l’article L. 3214-1 du code de la santé publique.

Il n’est pas fait application, à leur égard, de la règle posée au second alinéa de l’article D.394 concernant leur garde par un personnel de police ou de gendarmerie pendant leur hospitalisation. »

Cela signifie que les détenus souffrant de troubles mentaux doivent être transférés dans un établissement de santé approprié et ne peuvent pas rester en prison, garantissant ainsi leur droit à des soins adaptés.

Comment se justifie le maintien de l’hospitalisation complète d’un patient ?

L’article L.3211-12-1 du Code de la santé publique précise les conditions dans lesquelles l’hospitalisation complète d’un patient peut être prolongée.

Il indique que :

« I.-L’hospitalisation complète d’un patient ne peut se poursuivre sans que le magistrat du siège du tribunal judiciaire, préalablement saisi par le représentant de l’Etat dans le département lorsqu’elle a été prononcée en application du chapitre III du présent titre, de l’article L.3214-3 du présent code ou de l’article 706-135 du code de procédure pénale, ait statué sur cette mesure :

1° Avant l’expiration d’un délai de 12 jours à compter de l’admission (…) ».

Ainsi, pour justifier le maintien de l’hospitalisation complète, il est nécessaire qu’un magistrat examine la situation du patient et se prononce sur la nécessité de prolonger cette mesure, en tenant compte de l’avis d’un psychiatre.

Quelles sont les conséquences d’une sortie prématurée d’un patient hospitalisé ?

La jurisprudence indique que la sortie prématurée d’un patient hospitalisé peut entraîner des risques significatifs.

Dans le cas de Monsieur [Z] [C], il a été noté que :

« En toute hypothèse, une sortie prématurée serait de nature à présenter des risques de rechute rapide. »

Cela souligne l’importance de maintenir le patient en hospitalisation complète pour garantir sa sécurité et celle des autres, ainsi que pour assurer la continuité des soins nécessaires à son état mental.

Le maintien en milieu hospitalier est donc justifié par la nécessité de prévenir des comportements potentiellement dangereux et de garantir une prise en charge adéquate.

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX

N° RG 24/03591 – N° Portalis DBX6-W-B7I-ZY5O
N° Minute : 24/02210

ORDONNANCE DU 19 Novembre 2024

A l’audience publique du 19 Novembre 2024, devant Nous, Sébastien FILHOUSE, magistrat du siège du Tribunal judiciaire de Bordeaux, assistée de Olivier PETRIAT, Greffier JLD,

siégeant au Centre Hospitalier Spécialisé Psychiatrique de [Localité 1], dans une salle spécialement aménagée sur l’emprise de l’établissement et répondant aux exigences de l’article L 3211-12-2 du code de la santé publique,

DANS L’INSTANCE ENTRE :

REQUÉRANT :

Monsieur le PREFET DE LA GIRONDE
régulièrement avisé, non comparant,

DÉFENDEUR :

M. [Z] [C]
né le 04 Août 1979 à [Localité 2] (MAROC) ()
actuellement hospitalisé au Centre Hospitalier Spécialisé de [Localité 1]
régulièrement convoqué, non comparant représenté par Me Karim KANANE, avocat au barreau de BORDEAUX, avocat commis d’office,

MINISTÈRE PUBLIC :

Madame le Vice-Procureur de la République régulièrement avisée, non comparante,

Vu le code de santé publique, et notamment ses articles L.3211-1, L.3211-2-1, L.3211-2-2, L.3211-12-1, L.3211-12-2, L.3213-1 à L.3213-11, L.3214-3, R.3211-7 à R.3211-18, R.3211-24 à R.3211-26 et R.3213-1 à R.3213-3,

Vu l’arrêté du 08 novembre 2024 du préfet de la Gironde et l’arrêté subséquent du préfet de la Gironde rendu le même jour ordonnant la mise en œuvre de soins psychiatriques en faveur de Monsieur [Z] [C] (alors incarcéré au centre de détention d'[Localité 5]) sous la forme d’une hospitalisation complète avec transfert en Unité Hospitalière Spécialement Aménagée (UHSA) du centre hospitalier de [Localité 1] (transfert effectif le 14 novembre 2024 à 12H30),

Vu l’arrêté du préfet de la Gironde du 18 novembre 2024 maintenant l’intéressé en hospitalisation complète à l’issue de la période d’observation,

Vu la requête du préfet de la Gironde enregistrée au greffe le 13 novembre 2024 et les pièces jointes,

Vu l’avis du ministère public du 18 novembre 2024, mis à la disposition des parties,

Vu la non-comparution de l’intéressé qui refuse de comparaître (Cf. courrier de ce jour),

Vu les observations de son avocat au terme desquelles  il s’en remet à l’appréciation du juge

MOTIFS DE LA DECISION

Au terme des dispositions de l’article L.3212-1 du code de la santé publique : « Une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l’objet de soins psychiatriques sur décision du directeur d’un établissement (…) que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies: 1° Ses troubles mentaux rendent impossible son consentement ; 2° Son état mental impose des soins immédiats assortis (…) d »une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète (…)» ;

En vertu de l’article L.3213-1 du code de la santé publique «Le représentant de l’Etat dans le département prononce par arrêté, au vu d’un certificat médical circonstancié ne pouvant émaner d’un psychiatre exerçant dans l’établissement d’accueil, l’admission en soins psychiatriques des personnes dont les troubles mentaux nécessitent des soins et compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l’ordre public. Les arrêtés préfectoraux sont motivés et énoncent avec précision les circonstances qui ont rendu l’admission en soins nécessaire.»

L’article D.398 du code de procédure pénale dispose que «Les détenus atteints des troubles mentaux visés à l’article L.3214-3 du code de la santé publique ne peuvent être maintenus dans un établissement pénitentiaire. Au vu d’un certificat médical circonstancié et conformément à la législation en vigueur, il appartient à l’autorité préfectorale de faire procéder, dans les meilleurs délais, à leur hospitalisation d’office dans un établissement de santé habilité au titre de l’article L. 3214-1 du code de la santé publique. Il n’est pas fait application, à leur égard, de la règle posée au second alinéa de l’article D.394 concernant leur garde par un personnel de police ou de gendarmerie pendant leur hospitalisation».

L’article L.3214-3 du code de la santé publique poursuit que «Lorsqu’une personne détenue nécessite des soins immédiats assortis d’une surveillance constante en milieu hospitalier en raison de troubles mentaux rendant impossible son consentement et constituant un danger pour elle-même ou pour autrui, le préfet de police à Paris ou le représentant de l’Etat dans le département dans lequel se trouve l’établissement pénitentiaire d’affectation du détenu prononce par arrêté, au vu d’un certificat médical circonstancié, son admission en soins psychiatriques sous la forme d’une hospitalisation complète dans les conditions prévues au II de l’article L.3214-1. Le certificat médical ne peut émaner d’un psychiatre exerçant dans l’établissement d’accueil. Le régime de cette hospitalisation est celui prévu pour les hospitalisations ordonnées en application de l’article L.3213-1. Les arrêtés préfectoraux sont motivés et énoncent avec précision les circonstances qui ont rendu la mesure de soins psychiatriques nécessaire. Ils désignent l’établissement mentionné à l’article L.3222-1 qui assure la prise en charge de la personne malade et sont inscrits sur le registre mentionné à l’article L.3212-11.»

L’article L.3214-1 II du code de la santé publique prévoit que «Lorsque leurs troubles mentaux rendent impossible leur consentement, les personnes détenues peuvent faire l’objet de soins psychiatriques sans consentement en application de l’article L. 3214-3. Les personnes détenues admises en soins psychiatriques sans consentement sont uniquement prises en charge sous la forme mentionnée au 1° du I de l’article L.3211-2-1», soit sous la forme de l’hospitalisation complète. «Leur hospitalisation est réalisée dans un établissement de santé mentionné à l’article L.3222-1 au sein d’une unité hospitalière spécialement aménagée ou, sur la base d’un certificat médicale, au sein d’une unité adaptée».

L’article L.3211-12-1 du code de la santé publique prévoit que «I.-L’hospitalisation complète d’un patient ne peut se poursuivre sans que le magistrat du siège du tribunal judiciaire, préalablement saisi par le représentant de l’Etat dans le département lorsqu’elle a été prononcée en application du chapitre III du présent titre, de l’article L.3214-3 du présent code ou de l’article 706-135 du code de procédure pénale, ait statué sur cette mesure : 1° Avant l’expiration d’un délai de 12 jours à compter de l’admission (…). II. La saisine mentionnée au I du présent article est accompagnée de l’avis motivé d’un psychiatre de l’établissement se prononçant sur la nécessité de poursuivre l’hospitalisation complète.».

Il résulte des éléments figurant au dossier que l’intéressé, atteint de surdité (et dont les entretiens se déroulent au moyen d’un ardoise) a été admis en provenance du centre de détention d’[Localité 5] au sein de l’UHSA du centre hospitalier spécialisé de [Localité 1] en raison d’une tension interne importante avec un risque de passage à l’acte hétéro-agressif, avec graphorée, quérulence (ciblée à l’encontre du SPIP notamment), colère, tristesse et impulsivité fluctuante.

Les certificats médicaux exigés par les textes figurent au dossier, ils ont été établis dans les délais requis et contiennent des indications propres à répondre aux prescriptions légales.

L’avis médical motivé prévu par l’article L.3211-12-1 II du code de la santé publique établi le 18 novembre 2024 relève que l’état mental de l’intéressé nécessite toujours des soins assortis d’une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, et ce au regard d’un tableau clinique inchangé et d’une assise émotionnelle encore fragile en lien avec une quérulence administrativo-judiciaire aux fins de remise en liberté.

En toute hypothèse, une sortie prématurée serait de nature à présenter des risques de rechute rapide.

Dans ces conditions, la prise en charge dans un cadre contenant et sécurisé s’impose encore, afin de garantir l’observance des soins, et le cas échéant la réadaptation du traitement, ce qui ne peut se faire qu’en milieu hospitalier.

De plus, au regard des circonstances qui ont donné lieu à la mesure d’hospitalisation et des troubles dont il souffre, l’état de santé de Monsieur [C] doit être regardé comme pouvant compromettre la sûreté des personnes ou porter atteinte, de façon grave, à l’ordre public.

Dès lors, le maintien de l’hospitalisation complète de l’intéressé apparaît à ce jour justifié.

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PAR CES MOTIFS

Statuant par mise à disposition au greffe le 19 Novembre 2024, par décision contradictoire rendue en premier ressort après débats en audience publique du 19 Novembre 2024,

Accorde l’aide juridictionnelle provisoire à M. [Z] [C],

Autorise le maintien de l’hospitalisation complète de M. [Z] [C],

Dit que la présente décision sera notifiée à :
M. [Z] [C]
Me Karim KANANE
Ministère public
Monsieur le préfet de la Gironde

et adressée pour information au Directeur du Centre Hospitalier de [Localité 1].

Dit que les dépens comprenant les frais d’expertise seront supportés par le Trésor Public, en application des dispositions de l’article R 93-2° du Code de Procédure Pénale.

Le Greffier, Le Juge,

Cette décision peut être frappée d’appel dans un délai de 10 jours à compter de la présente notification par déclaration motivée transmise par tout moyen au greffe de la cour d’appel de BORDEAUX – [Adresse 4]. Cette déclaration peut notamment être envoyée par courriel à cette adresse : [Courriel 3]
Le ministère public peut, dans tous les cas, interjeter appel dans le même délai.

N° RG : N° RG 24/03591 – N° Portalis DBX6-W-B7I-ZY5O
M. [Z] [C]
Ordonnance en date du 19 Novembre 2024

Reçu notification de la présente le
Le patient
signature :

Reçu notification de la présente ordonnance le
le Directeur du Centre Hospitalier Spécialisé de [Localité 1],

signature


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