Condamnation judiciaire c/ Liberté de la presse

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Condamnation judiciaire c/ Liberté de la presse

L’Essentiel : Deux frères, condamnés par l’AMF et le Conseil d’État, ont tenté de faire supprimer un article du journal Les Echos utilisant leur nom comme mot-clé. La Cour de cassation a statué en faveur de la liberté d’expression, affirmant que la suppression des noms dans l’article viderait celui-ci de son sens. Elle a souligné que l’archivage d’articles de presse ne peut être assimilé à une base de données de décisions judiciaires, et que les restrictions à la liberté de la presse ne peuvent pas être étendues à ce cas. Ainsi, le droit d’opposition ne s’applique pas ici.

Demande de suppression d’un article de presse

Deux frères exerçant dans la finance ont poursuivi sans succès le journal Les Echos au titre de l’utilisation de leur nom de famille comme mot-clé sur les moteurs de recherche de ce site qui donnait accès à un article faisant état de leur condamnation par l’AMF et le Conseil d’Etat.  Il était demandé à la société Les Echos la suppression du site web «lesechos.fr de leurs données personnelles à la fois du titre et du texte de tous les traitements automatiques.

Atteinte disproportionnée à la liberté de la presse

Saisie de l’affaire, après deux décisions au fond, la Cour de cassation a fait primer la liberté d’expression sur « le droit » à l’anonymisation. Le fait d’imposer à un organe de presse, soit de supprimer du site internet dédié à l’archivage de ses articles, qui ne peut être assimilé à l’édition d’une base de données de décisions de justice, l’information elle-même contenue dans l’un de ces articles, le retrait des nom et prénom des personnes visées par la décision privant celui-ci de tout intérêt, soit d’en restreindre l’accès en modifiant le référencement habituel, excède les restrictions qui peuvent être apportées à la liberté de la presse.

Quid du droit d’opposition ?

Le droit d’opposition de la loi informatique et libertés connaît plusieurs exceptions. Parmi celles-ci, les  dispositions dérogatoires de l’article 67 de la loi du 6 janvier 1978 visant les « traitements de données à caractère personnel mis en oeuvre aux seules fins d’exercice à titre professionnel de l’activité de journaliste, dans le respect des règles déontologiques de cette profession » applicables également à l’archivage d’articles de presse.

Les personnes visées ne pouvaient donc se prévaloir des dispositions de l’article 38 de ladite loi qui permettent à toute personne physique « de s’opposer pour des motifs légitimes à ce que des données à caractère personnel la concernant fassent l’objet d’un traitement ».

Presse, un régime distinct de celui des bases de jurisprudence

Imposer à un organe de presse, de supprimer de son site Internet dédié à l’archivage de ses articles, lequel ne peut s’assimiler à l’édition d’une base de données de décisions de justice, soit l’information elle-même, le retrait des noms et prénoms des personnes visées par la décision vidant l’article de tout intérêt, soit d’en restreindre l’accès en modifiant le référencement habituel, excèdent, les restrictions qui peuvent être apportées à la liberté de la presse.

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Q/R juridiques soulevées :

Quel était l’objet de la demande des deux frères envers le journal Les Echos ?

Les deux frères, exerçant dans le domaine de la finance, ont demandé au journal Les Echos de supprimer leur nom de famille utilisé comme mot-clé sur les moteurs de recherche du site.

Cette demande était motivée par la présence d’un article qui relatait leur condamnation par l’Autorité des marchés financiers (AMF) et le Conseil d’État. Ils souhaitaient que leurs données personnelles soient retirées, tant du titre que du texte de tous les traitements automatiques sur le site « lesechos.fr ».

Quelle a été la décision de la Cour de cassation concernant cette affaire ?

La Cour de cassation a tranché en faveur de la liberté d’expression, considérant qu’elle prime sur le droit à l’anonymisation dans ce contexte.

Elle a jugé que demander à un organe de presse de supprimer des informations de son site, qui est dédié à l’archivage de ses articles, constitue une atteinte disproportionnée à la liberté de la presse.

En effet, le retrait des noms et prénoms des personnes visées par la décision aurait vidé l’article de son intérêt, et restreindre l’accès à l’information en modifiant le référencement habituel excède les limites acceptables.

Quelles sont les exceptions au droit d’opposition selon la loi informatique et libertés ?

Le droit d’opposition, tel que défini par la loi informatique et libertés, comporte plusieurs exceptions.

L’article 67 de la loi du 6 janvier 1978 prévoit des dispositions dérogatoires pour les traitements de données à caractère personnel réalisés à des fins journalistiques, à condition de respecter les règles déontologiques de la profession.

Ainsi, dans le cas des deux frères, ils ne pouvaient pas invoquer l’article 38 de cette loi, qui permet à toute personne de s’opposer à un traitement de données personnelles pour des motifs légitimes.

En quoi le régime de la presse est-il distinct de celui des bases de jurisprudence ?

Le régime applicable à la presse est fondamentalement différent de celui des bases de jurisprudence.

Imposer à un organe de presse de supprimer des informations de son site d’archivage, qui ne peut être assimilé à une base de données de décisions de justice, constitue une atteinte à la liberté de la presse.

Le retrait des noms et prénoms des personnes visées par une décision judiciaire viderait l’article de son contenu informatif, et restreindre l’accès à ces informations en modifiant le référencement habituel excède les restrictions qui peuvent être apportées à la liberté de la presse.


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