Concurrence et Abus de Position Dominante : L’Affaire Microsoft et Digitechnic

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Concurrence et Abus de Position Dominante : L’Affaire Microsoft et Digitechnic

L’Essentiel : L’affaire entre Digitechnic et Microsoft illustre les enjeux de la concurrence sur le marché des logiciels. Digitechnic a contesté le refus de Microsoft de lui accorder une licence de distribution, arguant que cela nuirait à la concurrence. Le Conseil de la concurrence a d’abord jugé que ce refus n’était pas anticoncurrentiel, mais la Cour d’appel de Paris a censuré cette décision. Elle a souligné que le Conseil aurait dû examiner si les alternatives logicielles étaient réellement substituables aux produits Microsoft. La Cour a également évoqué un possible abus de position dominante, en raison du retard injustifié dans l’octroi des licences.

La société Digitechnic avait saisi le Conseil de la concurrence contre un refus opposé par la société Microsoft de lui accordé le bénéfice d’une licence de distribution de ces produits (prix spécial distributeurs). Par décision du 22 décembre 2004, le conseil de la concurrence avait estimé que le refus de la société Microsoft n’avait pas d’effet anti-concurrentiel sur le marché de la vente d’ordinateurs. Le refus de licence n’étant pas, en soi, anticoncurrentiel, sauf si le bien intellectuel du propriétaire est essentiel à l’activité du demandeur. En l’espèce, il existait des produits logiciels alternatifs.
Dans cette décision, la Cour d’appel de Paris censure cette décision. Le conseil de la concurrence aurait notamment dû rechercher si les suites logicielles d’application proposées par d’autres éditeurs et celles proposées par la société Microsoft elle-même aux assembleurs titulaires de licences pour les systèmes d’exploitation Microsoft , constituaient en France, des produits véritablement substituables notamment pour les acquéreurs d’ordinateurs prééquipés de logiciels d’exploitation, et notamment de produits Windows édités par Microsoft. D’autre part, le conseil ne pouvait s’arrêter au taux de croissance du chiffre d’affaires de la société Digitechnic pour conclure au caractère « non essentiel » de l’octroi des licences en cause :
« il ne peut être exclu que la société Microsoft ait abusé de sa position dominante sur le marché des systèmes d’exploitation des ordinateurs personnels et sur celui des logiciels d’application de bureautique, en différant pendant près de vingt mois, sans justification objective, l’octroi aux assembleurs, qui représentaient une part non négligeable de sa clientèle, de licences de distribution de la suite logicielle d’application Pack Office Pro qu’elle concédait par ailleurs aux équipementiers Dell Computer et Gateway 2000 ».

Cour d’appel de Paris, 24 mai 2005

Mots clés : logiciels,concurrence,microsoft,Digitechnic,logiciel,licence,distributeur,abus de position dominante

Thème : Concurrence sur le marché des logiciels

A propos de cette jurisprudence : juridiction :  Cour d’appel de Paris | 24 mai 2005 | Pays : France

Q/R juridiques soulevées :

Quel était le motif de la saisine du Conseil de la concurrence par la société Digitechnic ?

La société Digitechnic a saisi le Conseil de la concurrence en raison d’un refus de la société Microsoft de lui accorder une licence de distribution de ses produits, spécifiquement un prix spécial pour les distributeurs.

Ce refus a été perçu par Digitechnic comme un obstacle à sa capacité à commercialiser des logiciels, ce qui pourrait nuire à sa compétitivité sur le marché.

Le Conseil de la concurrence a examiné si ce refus avait des effets anti-concurrentiels sur le marché de la vente d’ordinateurs, concluant que ce n’était pas le cas, car des alternatives logicielles existaient.

Quelle a été la décision du Conseil de la concurrence concernant le refus de Microsoft ?

Le Conseil de la concurrence, par sa décision du 22 décembre 2004, a estimé que le refus de Microsoft de délivrer une licence à Digitechnic n’avait pas d’effet anti-concurrentiel sur le marché.

Il a souligné que le refus de licence n’était pas, en soi, anticoncurrentiel, sauf si le bien intellectuel en question était essentiel à l’activité du demandeur.

Dans ce cas précis, le Conseil a noté qu’il existait des produits logiciels alternatifs sur le marché, ce qui a influencé sa décision.

Comment la Cour d’appel de Paris a-t-elle réagi à la décision du Conseil de la concurrence ?

La Cour d’appel de Paris a censuré la décision du Conseil de la concurrence, estimant qu’il aurait dû examiner plus en profondeur la question de la substituabilité des produits logiciels.

Elle a souligné que le Conseil devait évaluer si les suites logicielles d’autres éditeurs et celles de Microsoft étaient véritablement substituables pour les acquéreurs d’ordinateurs prééquipés.

Cette analyse était déterminante pour déterminer si le refus de licence avait des implications anti-concurrentielles.

Quels éléments la Cour d’appel a-t-elle jugés insuffisants dans l’analyse du Conseil de la concurrence ?

La Cour d’appel a jugé que le Conseil de la concurrence ne pouvait pas se limiter à examiner le taux de croissance du chiffre d’affaires de Digitechnic pour conclure que l’octroi des licences n’était pas essentiel.

Elle a également noté que le Conseil aurait dû prendre en compte le comportement de Microsoft, qui avait différé l’octroi de licences pendant près de vingt mois sans justification objective.

Cela a soulevé des questions sur un éventuel abus de position dominante de la part de Microsoft sur le marché des systèmes d’exploitation et des logiciels d’application.

Quelles implications cette décision pourrait-elle avoir sur le marché des logiciels ?

Cette décision de la Cour d’appel de Paris pourrait avoir des implications significatives sur le marché des logiciels, notamment en renforçant la vigilance des autorités de régulation face aux pratiques des entreprises dominantes.

Elle souligne l’importance d’une analyse approfondie des effets de refus de licence sur la concurrence, en particulier dans des marchés où des alternatives existent.

Cela pourrait également inciter d’autres entreprises à contester des refus similaires, en espérant que les tribunaux reconnaissent des abus de position dominante dans des situations analogues.


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