Conception de site internet ; les pénalités contractuelles modérées

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Conception de site internet ; les pénalités contractuelles modérées

L’Essentiel : Dans le cadre d’un contrat de conception de site internet, les pénalités contractuelles peuvent être modérées par le juge si elles sont jugées excessives. Dans une affaire récente, une clause pénale de 20% des sommes dues a été considérée comme manifestement excessive, le taux habituellement pratiqué étant de 8%. Le tribunal a donc réduit cette pénalité à 580,03 euros, condamnant le client à régler cette somme avec intérêts au taux légal. Cette décision souligne l’importance de la proportionnalité dans les clauses pénales des contrats, afin d’éviter des sanctions disproportionnées.

Les pénalités contractuelles stipulées par le contrat de conception de site peuvent être modérées par le juge lorsqu’elles présentent un caractère excessif.

20% est excessif

En l’occurrence, les conditions générales du contrat prévoient l’application, à titre de clause pénale, d’une indemnité égale à 20% des sommes restant dues, en cas de défaut de paiement total ou partiel des sommes dues à leur échéance.

Le taux de référence de 8%

Or, ce taux de 20% apparaît manifestement excessif au regard des taux habituellement pratiqués en matière de résiliation contractuelle, fixés à 8% des sommes dues.

Modération du juge

Le montant de la clause pénale a été réduit d’office à la somme de 580, 03 euros au paiement de laquelle le client a été condamné avec intérêts au taux légal.

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-3

ARRÊT AU FOND

DU 29 JUIN 2023

N° 2023/86

Rôle N° RG 19/19068 – N° Portalis DBVB-V-B7D-BFJSL

SA LOCAL.FR

C/

[N] [S]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Raphaëlle MAHE DES PORTES

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce de DRAGUIGNAN en date du 06 Août 2019 enregistrée au répertoire général sous le n° 2019/1539.

APPELANTE

SA LOCAL.FR, prise en la personne de son représentant légal,

dont le siège social est sis [Adresse 2]

représentée par Me Raphaëlle MAHE DES PORTES de la SCP CHABAS ET ASSOCIÉS, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

INTIME

Monsieur [N] [S],

demeurant [Adresse 1]

défaillant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 28 Mars 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Philippe DELMOTTE, Président, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de:

Monsieur Philippe DELMOTTE, Président

Madame Françoise PETEL, Conseillère

Madame Françoise FILLIOUX, Conseillère

Greffier lors des débats : Madame Laure METGE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe, après prorogation, le 29 Juin 2023.

ARRÊT

Défaut,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 29 Juin 2023

Signé par Monsieur Philippe DELMOTTE, Président et Madame Laure METGE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Exposé du litige

Le 16 octobre 2018, M. [S], qui exerce à titre individuel une activité de débroussaillage, élagage, entretien et création de jardin, a commandé à la société Local FR (la société) la création d’un site internet pour son entreprise et a souscrit un abonnement dénommé ‘local visibilité’ d’une durée de 48 mois à compter de la mise en ligne du site prévue en novembre 2018.

Les frais techniques d’installation s’élevaient à 538, 80€ TTC payables immédiatement, en une seule fois, par prélèvement bancaire; l’abonnement s’échelonnait sur une durée de 48 mois, courant à compter de novembre 2018, chaque échéance s’élevant à 142,80€ TTC, le total des prestations de la société s’élevant à 7393,20€.

Une seule échéance a été honorée, les prélèvements suivants ont été rejetés faute de provision suffisante.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 1er février 2019, la société a mis en demeure M. [S] de lui régler la somme totale de 8740, 48€ se décomposant comme suit:

– 824, 40€ au titre des échéances échues impayées

– 6426€ au titre des échéances à échoir

– 1450,08€ au titre de la pénalité de 20%

– 40€ au titre de l’indemnité forfaitaire de recouvrement

Cette mise en demeure étant demeurée infructueuse, la société a assigné en paiement M. [S] devant le tribunal de commerce de Draguignan.

Par jugement du 6 août 2019, le tribunal a débouté la société de ses demandes et l’a condamnée aux entiers dépens de l’instance.

Par déclaration du 16 décembre 2019, la société a relevé appel de cette décision.

Vu les conclusions du 16 mars 2020 de la société demandant à la cour

– d’infirmer le jugement

– de dire que M. [S] n’a pas respecté ses obligations contractuelles

– de le condamner à lui payer

+ la somme globale de 8740,48€

+ celle de 1500€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens

– de débouter M. [S] de ses demandes.

La déclaration d’appel ainsi que les conclusions de la société appelante ont été signifiées à M. [S] par acte d’huissier du 13 mars 2020 dans les conditions de l’article 658 du code de procédure civile ; M. [S], qui n’a pas comparu devant le tribunal, n’a pas constitué avocat devant la cour.

La clôture de l’instruction du dossier est intervenue le 28 février 2023.

Motifs

Par suite du bon de commande signé par M. [S], la société justifie de la création et de la mise en ligne du site internet dénommé www.paysagiste- d’etf.fr pour l’entreprise de l’intimé située au [Localité 3](83) ; il ressort d’ailleurs de l’échange des courriels entre le client et la société que M. [S] a approuvé la création du site, à l’exception d’une correction à apporter au logo de l’entreprise qui a été effectuée par la société (courriel du 21 novembre 2018).

Après avoir réglé une échéance, M. [S] a cessé tout réglement, sans dénoncer les conditions du contrat ou critiquer la réalité, la nature ou la qualité des prestions effectuées par la société.

L’article 1.5.2 des conditions générales prévoit que le défaut total ou partiel de paiement à l’échéance de toute somme due au titre du contrat entraîne de plein droit et sans mise en demeure préalable l’exigibilité immédiate de toutes les sommes dues par le client au titre du contrat, quel que soit le mode de réglement prévu.

Par suite, au vu du bon de commande, des conditions générales du contrat, de la facture et de la mise en demeure, la société est fondée à réclamer à M. [S]

1. la somme principale de 7250,40€ ;

2. les intérêts moratoires au taux légal courant sur cette somme à compter de la mise en demeure du 1er février 2019, faute pour la société d’avoir demandé, dans ses conclusions, l’application de la clause contractuelle relative au taux d’intérêt légal majoré relatif aux intérêts moratoires;

3. la somme de 40€ au titre de l’indemnité forfaitaire de recouvrement laquelle n’est pas réductible ;

4. la clause pénale :

Les conditions générales du contrat prévoient à cet égard l’application, à titre de clause pénale, d’une indemnité égale à 20% des sommes restant dues, en cas de défaut de paiement total ou partiel des sommes dues à leur échéance.

Ce taux de 20% apparaît manifestement excessif au regard des taux habituellement pratiqués en matière de résiliation contractuelle, fixés à 8% des sommes dues ; le montant de la clause pénale sera donc réduit d’office à la somme de 580, 03 au paiement de laquelle M. [S] sera condamné avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.

Le jugement déféré sera donc infirmé en toutes ses dispositions et M. [S] condamné au paiement des sommes précitées.

PAR CES MOTIFS

Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau ;

Condamne M. [S] à payer à la société Local FR :

– la somme de 7250,40€ avec intérêts au taux légal à compter du 1er février 2019

– celle de 580, 03€ au titre de la clause pénale contractuelle avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt

– celle de 40€ au titre de l’indemnité forfaitaire de recouvrement

Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamne M. [S] à payer à la société Local FR la somme de 1500€.

Condamne M. [S] aux entiers dépens de première instance et d’appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les pénalités contractuelles stipulées par le contrat de conception de site ?

Les pénalités contractuelles stipulées par le contrat de conception de site prévoient une indemnité égale à 20% des sommes restant dues en cas de défaut de paiement total ou partiel.

Cette clause pénale est appliquée automatiquement sans qu’il soit nécessaire d’envoyer une mise en demeure préalable. Cependant, le juge a la possibilité de modérer cette pénalité si elle est jugée excessive.

Dans ce cas précis, le taux de 20% a été considéré comme excessif par rapport aux pratiques habituelles, qui se situent autour de 8% des sommes dues.

Pourquoi le taux de 20% a-t-il été jugé excessif ?

Le taux de 20% a été jugé excessif car il dépasse largement les taux habituellement pratiqués en matière de résiliation contractuelle, qui sont généralement fixés à 8% des sommes dues.

Cette évaluation est fondée sur le principe de proportionnalité, qui vise à garantir que les pénalités contractuelles ne soient pas punitives mais plutôt compensatoires.

Le juge a donc le pouvoir d’intervenir pour réduire ce taux afin de le rendre conforme aux standards du marché et éviter des abus.

Quel a été le montant final de la clause pénale après modération par le juge ?

Après modération par le juge, le montant de la clause pénale a été réduit à 580,03 euros.

Cette décision a été prise en tenant compte du caractère excessif de la clause initiale de 20%.

Le juge a également ordonné que cette somme soit payée avec des intérêts au taux légal, à compter de la date de l’arrêt.

Quels étaient les montants réclamés par la société Local FR dans sa mise en demeure ?

Dans sa mise en demeure, la société Local FR a réclamé un total de 8740,48 euros, décomposé comme suit :

– 824,40 euros au titre des échéances échues impayées,
– 6426 euros au titre des échéances à échoir,
– 1450,08 euros au titre de la pénalité de 20%,
– 40 euros au titre de l’indemnité forfaitaire de recouvrement.

Cette mise en demeure a été envoyée par lettre recommandée avec accusé de réception, mais elle est restée sans réponse de la part de M. [S].

Quel a été le jugement du tribunal de commerce de Draguignan concernant cette affaire ?

Le tribunal de commerce de Draguignan a rendu un jugement le 6 août 2019, déboutant la société Local FR de ses demandes et la condamnant aux entiers dépens de l’instance.

Ce jugement a été contesté par la société, qui a relevé appel de cette décision.

L’appel a été examiné par la Cour d’appel d’Aix-en-Provence, qui a finalement infirmé le jugement initial et a condamné M. [S] à payer les sommes dues.

Quelles sommes M. [S] a-t-il été condamné à payer par la Cour d’appel ?

La Cour d’appel a condamné M. [S] à payer plusieurs sommes à la société Local FR, dont :

– 7250,40 euros avec intérêts au taux légal à compter du 1er février 2019,
– 580,03 euros au titre de la clause pénale contractuelle avec intérêts au taux légal à compter de l’arrêt,
– 40 euros au titre de l’indemnité forfaitaire de recouvrement,
– 1500 euros en vertu de l’article 700 du code de procédure civile.

De plus, M. [S] a été condamné aux entiers dépens de première instance et d’appel.


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