Compétence juridictionnelle en matière de location saisonnière et force majeure.

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Compétence juridictionnelle en matière de location saisonnière et force majeure.

L’Essentiel : M. [F] [B] a loué une maison à [Localité 6] pour un séjour du 9 au 23 juillet 2022. Le 18 juillet, il a dû quitter la location en raison d’incendies, demandant un remboursement de 10.825 euros pour les jours non utilisés. Face à l’absence d’accord, il a assigné la société Le Collectionist devant le tribunal judiciaire de Paris. Cependant, la société a soulevé une exception d’incompétence, arguant que le juge des contentieux de la protection d’Arcachon était compétent. Le juge a finalement statué en faveur de cette incompétence, transmettant le dossier à Arcachon.

Contexte de la location

M. [F] [B] a loué une maison, désignée comme « [Adresse 1] », située à [Localité 6], pour un séjour prévu du 9 au 23 juillet 2022 via le site internet de la SAS Le Collectionist.

Interruption du séjour

Le 18 juillet 2022, M. [B] a dû quitter la location de manière anticipée en raison des incendies qui ont affecté la région. Il a alors demandé un remboursement de 10.825 euros à la société Le Collectionist pour les cinq jours de location non utilisés.

Procédure judiciaire

Face à l’absence d’accord, M. [B] a assigné la société Le Collectionist devant le tribunal judiciaire de Paris le 16 novembre 2023, demandant le remboursement en raison de la force majeure ayant entraîné la résolution du contrat.

Exception d’incompétence soulevée

Le 12 mars 2024, la société Le Collectionist a soulevé une exception d’incompétence territoriale et matérielle, arguant que le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité d’Arcachon était le tribunal compétent pour cette affaire.

Arguments de la société Le Collectionist

La société a soutenu que, selon l’article L. 213-4-4 du code de l’organisation judiciaire, le juge des contentieux de la protection est compétent pour les actions relatives à un contrat de location d’immeubles à usage d’habitation, y compris les locations saisonnières.

Réponse de M. [B]

En réponse, M. [B] a contesté cette incompétence, affirmant que le tribunal judiciaire de Paris était compétent, car le contrat concernait une location saisonnière et non un contrat d’habitation au sens strict.

Décision du juge de la mise en état

Le juge de la mise en état a statué que le tribunal judiciaire de Paris était incompétent, affirmant que le litige relevait bien des compétences du juge des contentieux de la protection d’Arcachon, étant donné que la location concernait un immeuble à usage d’habitation.

Conséquences de la décision

La décision a entraîné la transmission du dossier au juge des contentieux de la protection d’Arcachon, tout en réservant les dépens et les demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la compétence territoriale et matérielle du juge des contentieux de la protection dans le cadre d’un contrat de location saisonnière ?

La compétence du juge des contentieux de la protection est régie par l’article L. 213-4-4 du code de l’organisation judiciaire, qui stipule que ce juge connaît des actions dont un contrat de louage d’immeubles à usage d’habitation ou un contrat portant sur l’occupation d’un logement est l’objet, la cause ou l’occasion.

Cette compétence est exclusive et d’ordre public, ce qui signifie qu’elle ne peut être écartée par les parties.

En vertu de l’article R. 213-9-7 du même code, le juge des contentieux de la protection territorialement compétent est celui où se situe le bien loué.

Dans le cas présent, M. [B] a loué une maison pour un séjour de vacances, et bien que ce soit une location saisonnière, la maison constitue un immeuble à usage d’habitation.

Ainsi, les demandes de M. [B] visant à obtenir le remboursement des sommes versées pour cette location relèvent bien de la compétence du juge des contentieux de la protection, car elles concernent un contrat de louage d’immeuble à usage d’habitation.

Quelles sont les implications de l’article 789 du code de procédure civile concernant les exceptions de compétence ?

L’article 789 du code de procédure civile précise que le juge de la mise en état est, à compter de sa désignation et jusqu’à son dessaisissement, seul compétent pour statuer sur les exceptions de procédure.

Cela signifie que toute question relative à la compétence d’une juridiction doit être soulevée devant le juge de la mise en état, qui est le seul habilité à trancher cette question avant que l’affaire ne soit jugée sur le fond.

De plus, l’article 75 du même code impose que la partie qui soulève une exception d’incompétence doit la motiver et indiquer devant quelle juridiction elle souhaite que l’affaire soit portée.

Dans cette affaire, la société Le Collectionist a soulevé une exception d’incompétence en arguant que le tribunal judiciaire de Paris n’était pas compétent pour connaître de l’affaire, ce qui a conduit le juge de la mise en état à examiner cette question.

Comment la qualification du contrat de location influence-t-elle la compétence juridictionnelle ?

La qualification du contrat de location est cruciale pour déterminer la compétence juridictionnelle.

L’article L. 213-4-4 du code de l’organisation judiciaire précise que le juge des contentieux de la protection est compétent pour les actions relatives à un contrat de louage d’immeubles à usage d’habitation.

Dans le cas présent, bien que M. [B] ait loué une maison pour un séjour de vacances, cette maison est considérée comme un immeuble à usage d’habitation.

M. [B] n’a pas réussi à démontrer en quoi une maison de vacances se distinguerait d’un immeuble à usage d’habitation.

Ainsi, le contrat litigieux est bien qualifié de contrat de louage d’immeuble à usage d’habitation, ce qui confère au juge des contentieux de la protection la compétence exclusive pour connaître du litige.

Quelles sont les conséquences de l’exception d’incompétence sur le déroulement de l’instance ?

L’exception d’incompétence a des conséquences significatives sur le déroulement de l’instance.

Lorsque le juge de la mise en état déclare une juridiction incompétente, comme cela a été le cas pour le tribunal judiciaire de Paris dans cette affaire, l’affaire doit être transmise à la juridiction compétente.

Cela est prévu par l’article 789 du code de procédure civile, qui stipule que le juge de la mise en état est seul compétent pour statuer sur les exceptions de procédure.

Dans cette affaire, le juge a ordonné la transmission du dossier au juge des contentieux de la protection d’Arcachon, ce qui signifie que toutes les demandes et les éléments de preuve devront être examinés par cette nouvelle juridiction.

En conséquence, le tribunal judiciaire de Paris n’aura plus à se prononcer sur le fond de l’affaire, et le sort des demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile sera réservé jusqu’à ce que la nouvelle juridiction se prononce.

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copies
délivrées le :

18° chambre
1ère section

N° RG 23/14710
N° Portalis 352J-W-B7H-C3FZD

N° MINUTE : 4

Assignation du :
16 Novembre 2023

contradictoire

ORDONNANCE DU JUGE DE LA MISE EN ETAT
rendue le 21 Novembre 2024

DEMANDEUR

Monsieur [F] [B]
[Adresse 3]
[Localité 5]

représenté par Maître Benjamin SARFATI de la SELARL INTERVISTA, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #E1227

DEFENDERESSE

S.A.S. LE COLLECTIONIST
[Adresse 2]
[Localité 4]

représentée par Maître Florent GUYON de l’AARPI LOG Avocats, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #P0517

MAGISTRAT DE LA MISE EN ETAT

Madame Diana SANTOS CHAVES, Juge,

assistée de Monsieur Christian GUINAND, Greffier principal,

DEBATS

A l’audience du 12 septembre 2024, avis a été donné aux avocats que l’ordonnance serait rendue par mise à disposition au greffe le 7 novembre 2024.
Puis, le délibéré a été prorogé jusqu’au 21 novembre 2024.

ORDONNANCE

Rendue par mise à disposition au greffe
Contradictoire
en premier ressort

FAITS ET PROCEDURE

M. [F] [B] a loué une maison, la  » [Adresse 1] « , située [Adresse 1] à [Localité 6], pour un séjour du 9 au 23 juillet 2022, sur le site internet de la SAS Le Collectionist.

Le 18 juillet 2022, M. [B] a été contraint de quitter de façon anticipée les lieux loués en raison des incendies qui ont touché la région.

Il a sollicité auprès de la société Le Collectionist le remboursement d’une somme de 10.825 euros correspondant aux 5 jours de location dont il avait été privé.

Les parties n’étant pas parvenu à un accord, par acte extrajudiciaire en date du 16 novembre 2023, M. [B] a fait assigner la société Le Collectionist devant le tribunal judiciaire de Paris, aux fins principales de condamnation en paiement de la somme de 10.825 euros correspondant aux jours de non jouissance du bien loué, estimant que la survenance d’une force majeure avait entrainé la résolution du contrat de plein droit.

Par conclusions d’incident du 12 mars 2024, la société Le Collectionnist a soulevé devant le juge de la mise en état une exception d’incompétence territoriale et matérielle du tribunal judiciaire de Paris au profit du juge des contentieux et de la protection du tribunal de proximité d’Arcachon.

Par dernières conclusions d’incident notifiées par voie électronique le 30 août 2024, la société Le Collectionist demande au juge de la mise en état de :
 » In limine litis
– Juger le Tribunal Judiciaire de Paris incompétent matériellement et territorialement pour connaître de la présente affaire,
– Désigner le Juge des Contentieux de la Protection du Tribunal de Proximité d’Arcachon comme juridiction compétente pour connaître de la présente affaire,
– Ordonner la transmission du dossier au Juge des Contentieux de la Protection du Tribunal de Proximité d’Arcachon.
En tout état de cause
– Débouter M. [F] [B] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
– Condamner M. [F] [B] à verser à la société Le Collectionist la somme de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile,
– Condamner M. [F] [B] aux entiers dépens.  »

La société Le Collectionist soutient qu’en application de l’article L. 213-4-4 du code de l’organisation judiciaire, le juge des contentieux de la protection est compétent pour connaitre des actions relatives à un contrat de louage d’immeubles à usage d’habitation; qu’il s’agit d’une compétence exclusive et d’ordre public ; qu’en application de l’article R. 213-9-7 du même code, le juge des contentieux de la protection territorialement compétent est celui du lieu de situation de l’immeuble ; que cette compétence s’applique à tout type de location immobilière, y compris les locations saisonnières ; que le contrat ayant lié les parties est un contrat de location saisonnière ayant pour objet la mise à disposition temporaire par son propriétaire d’un bien à usage d’habitation, moyennant le versement d’une somme d’argent ; que cette qualification ne peut être contestée par le demandeur. Elle fait valoir que la compétence du juge du lieu de situation de l’immeuble est exclusive et d’ordre public ; que cette compétence est légitime dans le cas d’espèce où il s’agit d’apprécier les conséquences des incendies dans la région sur le contrat de location saisonnière.

Par conclusions en réponse sur incident notifiées par voie électronique le 12 juillet 2024, M. [B] demande au juge de la mise en état de :
 » – JUGER que le Juge des Contentieux de la Protection du Tribunal de Proximité d’Arcachon est incompétent matériellement et territorialement pour connaître de la présente affaire ;
– JUGER que le Tribunal Judiciaire de Paris est compétent matériellement et territorialement pour connaître de la présente affaire ;
– DEBOUTER Le Collectionist de l’ensemble de ses demandes ;
EN TOUT ETAT DE CAUSE
– CONDAMNER la société Le Collectionist à verser à [F] [B] la somme de 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– CONDAMNER la société Le Collectionist aux entiers dépens.  »

Il fait valoir que la compétence d’exception du juge des contentieux de la protection vise à permettre un traitement privilégié des locataires et occupants de bien immobilier, parties présumées faibles du contrat en centralisant le contentieux lié à leur habitation devant le juge du lieu où ils habitent ; que cette compétence doit être d’interprétation stricte ; que la présente instance ne porte ni sur un contrat de louage d’immeubles à usage d’  » habitation  » ni sur un contrat portant sur l’occupation d’un « logement « ; que le contrat en cause n’a pas pour objet la location d’un lieu d’habitation mais la location saisonnière d’un lieu de vacances. Il soutient en outre que le contrat de location n’est pas l’objet, la cause ou l’occasion principal et direct de son action; que ses demandes sont fondées sur le droit de la consommation, les conditions générales du Collectionist et le droit de la responsabilité du mandataire, aucune de ces demandes n’ayant directement pour objet le contrat de location; que la société Le Collectionist qui a indiqué à plusieurs reprises n’être qu’un mandataire entre le client et le bailleur et ne pas être partie au contrat, ne peut prétendre sans se contredire que le litige a pour objet un contrat de location. Il estime qu’en application des articles R. 631-3 du code de la consommation et 42 du code de procédure civile, en qualité de consommateur, le demandeur pouvait saisir la juridiction du lieu de sa résidence au moment de la conclusion du contrat ou de la survenance du fait dommageable, ou la juridiction du domicile du défendeur, de sorte que le tribunal judiciaire de Paris est compétent.

L’affaire a été appelée par le juge de la mise en état à l’audience d’incidents du 12 septembre 2024 et mise en délibéré au 7 novembre 2024, prorogée successivement au 19 puis au 21 novembre 2024, par mise à disposition.

*

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l’exception d’incompétence

Selon l’article 789 du code de procédure civile, le juge de la mise en état est, à compter de sa désignation et, jusqu’à son dessaisissement, seul compétent, à l’exclusion de toute autre formation du tribunal, pour statuer sur les exceptions de procédure.

Aux termes de l’article 75 du code de procédure civile, s’il est prétendu que la juridiction saisie en première instance ou en appel est incompétente, la partie qui soulève cette exception doit, à peine d’irrecevabilité, la motiver et faire connaître dans tous les cas devant quelle juridiction elle demande que l’affaire soit portée.

L’article L. 213-4-4 du code de l’organisation judiciaire dispose que le juge des contentieux de la protection connaît des actions dont un contrat de louage d’immeubles à usage d’habitation ou un contrat portant sur l’occupation d’un logement est l’objet, la cause ou l’occasion ainsi que des actions relatives à l’application de la loi n° 48-1360 du 1er septembre 1948 portant modification et codification de la législation relative aux rapports des bailleurs et locataires ou occupants de locaux d’habitation ou à usage professionnel et instituant des allocations de logement.

En vertu de l’article R. 213-9-7 du même code, le juge des contentieux de la protection territorialement compétent est celui où se situe le bien loué.

Il s’agit d’une compétence d’ordre public.

En l’espèce, les demandes de M. [B] visent à obtenir le remboursement de sommes versées au titre de la location d’une villa pour un séjour de vacances, villa qui constitue un immeuble à usage d’habitation, M. [B] n’expliquant pas en quoi une maison de vacances se distingue d’un immeuble à usage d’habitation. Cette action ne peut qu’être considérée comme une action dont un contrat de louage d’immeuble à usage d’habitation ou un contrat portant sur l’occupation d’un logement est l’objet, la cause ou l’occasion au sens de l’article L. 213-4-4 du code de l’organisation judiciaire. La qualification que M. [B] souhaite voir donnée à la société Le Collectionist et les moyens de droit soulevés au soutien de son action sont indifférents dès lors que le contrat litigieux porte bien sur l’occupation d’un immeuble à usage d’habitation.

Il en résulte que le juge des contentieux de la protection est seul compétent pour connaître du présent litige.

L’immeuble objet du contrat est situé dans la commune de [Localité 6], commune du ressort du tribunal de proximité d’Arcachon, dont le juge du contentieux de la protection est territorialement compétent.

En conséquence, il sera fait droit à l’exception d’incompétence, le tribunal judiciaire de Paris étant incompétent au profit du juge des contentieux de la protection d’Arcachon.

Sur les demandes accessoires

La présente ordonnance ne mettant pas fin à l’instance, le transfert du dossier étant ordonné à la juridiction de renvoi, il convient de réserver les dépens et le sort des demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Il est rappelé que l’exécution provisoire est de droit.

*

PAR CES MOTIFS

Le juge de la mise en état, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par ordonnance contradictoire et susceptible d’appel dans les conditions de l’article 795 du code de procédure civile,

Déclare le tribunal judiciaire de Paris incompétent pour connaître de l’instance introduite par M. [F] [B] à l’encontre de la SAS Le Collectionist,

Dit que la juridiction compétente est le juge des contentieux de la protection d’Arcachon,

Ordonne la transmission de la présente affaire par les soins du greffe à la juridiction compétente avec une copie de la présente ordonnance,

Réserve les dépens et les demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Faite et rendue à Paris le 21 Novembre 2024.

Le Greffier Le Juge de la mise en état

Christian GUINAND Diana SANTOS CHAVES


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