Examen des conditions de communication des pièces dans un contexte de remboursement entre co-emprunteurs.

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Examen des conditions de communication des pièces dans un contexte de remboursement entre co-emprunteurs.

L’Essentiel : M. [X] et Mme [N] ont contracté deux emprunts solidaires en 2011 et 2013. En raison de défauts de paiement, la Caisse d’épargne a exigé le remboursement total des prêts. Mme [N] a remboursé partiellement la dette grâce à la vente d’un bien immobilier. Suite à leur séparation, elle a assigné M. [X] le 3 avril 2019 pour récupérer la moitié de la somme versée. Elle conteste ensuite la décision de la cour d’appel qui a écarté des pièces de son dossier, arguant d’une violation des règles de communication en procédure civile. La cour a justifié son choix par le non-respect des délais.

Contexte des emprunts

M. [X] et Mme [N] ont contracté deux emprunts solidaires auprès de la Caisse d’épargne de Bourgogne Franche-Comté en 2011 et 2013.

Défaillance de paiement

En raison du non-paiement des échéances par les emprunteurs, la banque a décidé de prononcer la déchéance du terme des prêts et a exigé le remboursement des sommes dues.

Remboursement partiel

Mme [N] a remboursé une partie de la dette à la banque grâce à la vente d’un bien immobilier qui lui appartenait.

Action en justice

Suite à leur séparation, Mme [N] a assigné M. [X] le 3 avril 2019 pour obtenir le remboursement de la moitié de la somme qu’elle avait versée à la banque.

Premier moyen du pourvoi principal

Mme [N] conteste la décision de la cour d’appel qui a écarté des débats un dossier de pièces déposé par son conseil, arguant que cela violait les règles de communication des pièces en procédure civile.

Réponse de la Cour d’appel

La cour d’appel a justifié sa décision en indiquant que les pièces n’avaient pas été communiquées simultanément avec les écritures, ce qui justifiait leur exclusion des débats, sans qu’il soit nécessaire d’examiner si l’autre partie avait pu les étudier en temps utile.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la portée de l’article 906 du code de procédure civile concernant la communication des pièces ?

L’article 906 du code de procédure civile stipule que « les parties doivent communiquer simultanément au dépôt et à la notification des conclusions les pièces produites à leur soutien ».

Cette obligation vise à garantir un équilibre entre les parties en leur permettant de prendre connaissance des éléments de preuve présentés par l’autre partie.

Cependant, la jurisprudence a précisé que le juge n’est pas tenu d’écarter des débats les pièces qui n’ont pas été communiquées simultanément, à condition que la partie adverse ait eu la possibilité d’examiner, discuter et répondre à ces pièces en temps utile.

Dans l’affaire en question, la cour d’appel a écarté des pièces produites par Mme [N] au motif qu’elles n’avaient pas été communiquées simultanément avec des écritures.

Elle a considéré que cette absence de simultanéité justifiait l’écartement, sans vérifier si M. [X] avait effectivement eu la possibilité d’examiner ces pièces.

Ainsi, la cour d’appel a pu légalement justifier sa décision en se fondant sur l’article 906, mais elle aurait dû également prendre en compte la possibilité d’examen des pièces par la partie adverse.

Quelles sont les implications des articles 15 et 135 du code de procédure civile dans cette affaire ?

L’article 15 du code de procédure civile dispose que « le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ».

Cela signifie que chaque partie doit avoir la possibilité de connaître et de discuter les éléments de preuve présentés par l’autre partie.

De son côté, l’article 135 précise que « les parties doivent communiquer au juge les éléments de preuve qu’elles entendent produire ».

Dans le cadre de cette affaire, l’argument de Mme [N] repose sur le fait que les pièces écartées auraient dû être admises, car M. [X] avait eu la possibilité de les examiner avant la clôture de l’instruction.

La cour d’appel, en écartant ces pièces, a potentiellement violé le principe de la contradiction, car elle n’a pas vérifié si M. [X] avait été mis en mesure de discuter ces éléments.

Ainsi, la décision de la cour d’appel pourrait être contestée au regard des articles 15 et 135, car elle semble avoir négligé le droit de M. [X] à une défense pleine et entière.

Comment la cour d’appel a-t-elle justifié l’écartement des pièces produites par Mme [N] ?

La cour d’appel a justifié l’écartement des pièces produites par Mme [N] en se basant sur le fait qu’elles n’avaient pas été communiquées simultanément avec des écritures.

Elle a relevé que l’avocate de Mme [N] s’était constituée le 15 avril 2022, mais n’avait pas déposé de conclusions avant d’envoyer un dossier de pièces au greffe le 1er décembre 2022.

L’arrêt a donc conclu que, faute de communication simultanée, ces pièces devaient être écartées des débats.

Cependant, la cour d’appel n’a pas effectué la recherche demandée par le moyen, qui aurait consisté à vérifier si M. [X] avait eu la possibilité d’examiner et de discuter ces pièces.

En l’absence de cette vérification, la décision de la cour d’appel pourrait être considérée comme insuffisamment motivée, car elle n’a pas pris en compte le droit à un procès équitable pour M. [X].

Ainsi, bien que la cour ait agi en conformité avec l’article 906, elle a omis d’appliquer les principes de contradiction et d’équité qui sous-tendent le droit à un procès juste.

CIV. 1

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 22 janvier 2025

Cassation partielle sans renvoi

Mme CHAMPALAUNE, président

Arrêt n° 106 F-D

Pourvoi n° P 23-14.548

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 22 JANVIER 2025

Mme [P] [N], domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi n° P 23-14.548 contre l’arrêt rendu le 26 janvier 2023 par la cour d’appel de Besançon (2e chambre civile), dans le litige l’opposant à M. [M] [X], domicilié [Adresse 2], défendeur à la cassation.

M. [X] a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l’appui de son recours, trois moyens de cassation.

Le demandeur au pourvoi incident invoque, à l’appui de son recours, trois moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Peyregne-Wable, conseiller, les observations de la SARL Le Prado – Gilbert, avocat de Mme [N], de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de M. [X], après débats en l’audience publique du 26 novembre 2024 où étaient présentes Mme Champalaune, président, Mme Peyregne-Wable, conseiller rapporteur, Mme Guihal, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Besançon, 26 janvier 2023), M. [X] et Mme [N] (les emprunteurs) ont contracté solidairement deux emprunts au cours des années 2011 et 2013 auprès de la Caisse d’épargne de Bourgogne Franche-Comté (la banque).

2. Faute de règlement des échéances par les emprunteurs, la banque a prononcé la déchéance du terme des prêts et exigé le remboursement des sommes dues.

3. La banque a été désintéressée à hauteur d’une certaine somme par Mme [N] en suite de la vente d’un bien immobilier lui appartenant en propre.

4. Le 3 avril 2019, après séparation du couple, Mme [N] a assigné M. [X] en remboursement de la moitié de la somme versée à la banque.

Examen des moyens

Sur le premier moyen du pourvoi principal

Enoncé du moyen

5. Mme [N] fait grief à l’arrêt d’écarter des débats le dossier de pièces déposé au greffe le 1er décembre 2022 par son conseil, alors « que l’obligation, imposée par l’article 906 du code de procédure civile, de communiquer simultanément au dépôt et à la notification des conclusions les pièces produites à leur soutien, n’impose pas au juge d’écarter des débats les pièces communiquées non simultanément à la notification des conclusions dès lors qu’il constate que leur destinataire a été mis, en temps utile, en mesure de les examiner, de les discuter et d’y répondre ; qu’en écartant des débats des pièces communiquées le 13 septembre 2022 par Mme [N], plusieurs mois avant la clôture de l’instruction, au seul motif que faute d’avoir été communiquées simultanément à des écritures, lesdites pièces doivent être écartées des débats, comme le demande le conseil de l’appelant, sans constater que l’appelant n’aurait pas été en mesure de les examiner, de les discuter et d’y répondre en temps utile, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 15, 135 et 906 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

6. Après avoir relevé qu’une avocate s’était constituée pour le compte de Mme [N] le 15 avril 2022, qu’elle n’avait pas déposé de conclusions mais avait adressé le 1er décembre 2022 au greffe de la cour un dossier comportant sept pièces, selon un bordereau de communication de pièces daté du 13 septembre 2022, l’arrêt retient que faute d’avoir été communiquées simultanément avec des écritures, ces pièces doivent être écartées des débats.

7. En l’état de ces énonciations, constatations et appréciations, la cour d’appel, qui n’était pas tenue d’effectuer la recherche invoquée par le moyen, que l’absence de dépôt de conclusions rendait inopérante, a légalement justifié sa décision.


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