L’Essentiel : La Cour de cassation a rejeté le pourvoi de M. [E], qui contestait son absence de qualité de coauteur d’un film publicitaire commandé par la société Dmax. La cour d’appel a établi que M. [E] n’avait pas participé à la conception de l’œuvre non sonorisée, mais avait plutôt réalisé un travail indépendant en intégrant sa bande sonore à une œuvre préexistante, sans collaboration avec l’auteur initial, M. [Y]. En écartant la présomption de coauteur selon l’article L. 113-7 du code de la propriété intellectuelle, la cour a conclu que M. [E] ne pouvait pas agir en contrefaçon.
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Après avoir rappelé que l’objet de la commande de la société Dmax à la société Pause B films était la réalisation d’un film publicitaire sans musique, la cour d’appel a retenu que M. [E] ne démontrait ni même n’alléguait avoir pris part à la conception de cette oeuvre non sonorisée, qu’il justifiait d’un travail indépendant effectué sur la base de la version définitive du film préalablement réalisé et que la bande son qu’il avait créée avait été incorporée à l’oeuvre préexistante, objet de la commande, sans la collaboration de son auteur, M. [Y]. Ayant ainsi écarté la présomption simple posée à l’article L. 113-7 du code de la propriété intellectuelle, elle en a exactement déduit que M. [E] n’était pas coauteur de l’oeuvre audiovisuelle sur le fondement de laquelle il agissait en contrefaçon. ——- CIV. 1 CF COUR DE CASSATION Audience publique du 29 mars 2023 Rejet Mme DUVAL-ARNOULD, conseiller doyen faisant fonction de président Arrêt n° 215 F-D Pourvoi n° Q 22-13.809 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 29 MARS 2023 M. [H] [E], domicilié [Adresse 3], a formé le pourvoi n° Q 22-13.809 contre l’arrêt rendu le 11 janvier 2022 par la cour d’appel de Paris (pôle 5, chambre 1), dans le litige l’opposant : 1°/ à la société Karus productions, société à responsabilité limitée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 2], 2°/ à la société Pause B films, société à responsabilité limitée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 1], défenderesses à la cassation. Le demandeur invoque, à l’appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Chevalier, conseiller, les observations de la SCP Thomas-Raquin, Le Guerer, Bouniol-Brochier, avocat de M. [E], de la SCP Melka-Prigent-Drusch, avocat de la société Karus productions, de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Pause B films, après débats en l’audience publique du 14 février 2023 où étaient présents Mme Duval-Arnould, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Chevalier, conseiller rapporteur, M. Jessel, conseiller, et Mme Tinchon, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure1. Selon l’arrêt attaqué (Paris, 11 janvier 2022), par un devis accepté le 22 juillet 2015, la société Dmax a commandé la réalisation d’un film de communication non sonorisé à la société Pause B films, laquelle en a confié la rédaction du scénario et la réalisation à M. [Y], gérant de la société Karus productions. La société Dmax ayant souhaité que la composition de la musique du film soit confiée à M. [E], l’oeuvre audiovisuelle a été réalisée en octobre 2015. 2. M. [E], ayant constaté qu’une version modifiée de cette oeuvre intégrant une autre bande sonore que la sienne était diffusée sans son autorisation, notamment sur les sites internet des sociétés Pause B films et Karus productions, a assigné ces sociétés en contrefaçon de droit d’auteur. Examen du moyenEnoncé du moyen 3. M. [E] fait grief à l’arrêt de dire qu’il n’est pas coauteur de l’oeuvre audiovisuelle réalisée pour le compte de la société Dmax, de le dire en conséquence irrecevable à agir en atteinte de ses droits d’auteur et de le débouter de l’ensemble de ses demandes indemnitaires sur le fondement du « 1°/ que constitue une oeuvre audiovisuelle les séquences animées d’images sonorisées ou non ; qu’en retenant en l’espèce que « l’oeuvre initiale, qui est une oeuvre de commande d’un film publicitaire non sonorisée, n’est en conséquence pas une oeuvre audiovisuelle au sens de l’article L. 113-7″ du code de la propriété intellectuelle ; la cour d’appel a violé l’article L. 112-2 6° du code de la propriété intellectuelle ; 2°/ que constitue une oeuvre audiovisuelle, les séquences animées d’images, sonorisées ou non ; qu’est présumé, sauf preuve contraire, coauteur d’une oeuvre audiovisuelle réalisée en collaboration, l’auteur des compositions musicales spécialement réalisées pour l’oeuvre ; qu’en déniant 3°/ qu’une oeuvre audiovisuelle est réputée achevée lorsque sa version définitive a été établie d’un commun accord entre, d’une part, le réalisateur ou, éventuellement, les coauteurs et, d’autre part, le producteur et toute modification de cette version par addition, suppression ou changement d’un Réponse de la Cour 4. Aux termes de l’article L. 113-2 du code de la propriété intellectuelle, est dite de collaboration l’oeuvre à la création de laquelle ont concouru plusieurs personnes physiques et est dite composite l’oeuvre nouvelle à laquelle est incorporée une oeuvre préexistante sans la collaboration de l’auteur de cette dernière. 5. Une oeuvre de collaboration se caractérise par une participation concertée et une communauté d’inspiration (1re Civ., 21 mars 2018, pourvoi n° 17-14.728, Bull. 2018, I, n° 57). 6. Selon l’article L. 113-3 du même code, une oeuvre est la propriété commune des coauteurs devant exercer leurs droits d’un commun accord, tandis qu’une oeuvre composite est la propriété de l’auteur qui l’a réalisée, sous réserve des droits de l’auteur de l’oeuvre préexistante. 7. Selon l’article L. 113-7 de ce code, est présumé, sauf preuve contraire, coauteur d’une oeuvre audiovisuelle réalisée en collaboration l’auteur des compositions musicales. 8. Après avoir rappelé que l’objet de la commande de la société Dmax à la société Pause B films était la réalisation d’un film publicitaire sans musique, la cour d’appel a retenu que M. [E] ne démontrait ni même n’alléguait avoir pris part à la conception de cette oeuvre non sonorisée, qu’il justifiait d’un travail indépendant effectué sur la base de la version définitive du film préalablement réalisé et que la bande son qu’il avait créée avait été incorporée à l’oeuvre préexistante, objet de la commande, sans la collaboration de son auteur, M. [Y]. 9. Ayant ainsi écarté la présomption simple posée à l’article L. 113-7 du code de la propriété intellectuelle, elle en a exactement déduit que M. [E] n’était pas coauteur de l’oeuvre audiovisuelle sur le fondement de laquelle il agissait en contrefaçon. 10. Il s’ensuit que le moyen, inopérant en sa première branche, n’est pas fondé pour le surplus. PAR CES MOTIFS, la Cour :REJETTE le pourvoi ; Condamne M. [E] aux dépens ; En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [E] et le condamne à payer à chacune des sociétés Pause B films et Karus productions la somme de 1 500 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf mars deux mille vingt-trois. |
Q/R juridiques soulevées :
Quel était l’objet de la commande de la société Dmax à la société Pause B films ?L’objet de la commande de la société Dmax à la société Pause B films était la réalisation d’un film publicitaire sans musique. Cette spécificité est cruciale car elle détermine les droits d’auteur et la nature de la collaboration entre les différents intervenants dans la création de l’œuvre. La cour d’appel a souligné que M. [E] n’avait ni démontré ni allégué avoir participé à la conception de cette œuvre non sonorisée. Cela signifie que, malgré la commande, M. [E] n’était pas impliqué dans le processus créatif initial, ce qui a des implications sur son statut de coauteur. Quelles étaient les conclusions de la cour d’appel concernant M. [E] ?La cour d’appel a conclu que M. [E] ne pouvait pas être considéré comme coauteur de l’œuvre audiovisuelle en question. Elle a écarté la présomption de coauteur prévue par l’article L. 113-7 du code de la propriété intellectuelle, qui stipule que l’auteur des compositions musicales est présumé coauteur d’une œuvre audiovisuelle réalisée en collaboration. La cour a également noté que M. [E] avait effectué un travail indépendant basé sur une version définitive du film préalablement réalisé, et que la bande sonore qu’il avait créée avait été intégrée à l’œuvre préexistante sans la collaboration de son auteur, M. [Y]. Cela a conduit à la conclusion que M. [E] n’avait pas les droits d’auteur qu’il revendiquait. Quels articles du code de la propriété intellectuelle ont été mentionnés dans cette affaire ?Plusieurs articles du code de la propriété intellectuelle ont été mentionnés dans cette affaire. L’article L. 113-2 définit ce qu’est une œuvre de collaboration et une œuvre composite. L’article L. 113-3 stipule que les œuvres de collaboration sont la propriété commune des coauteurs, tandis que les œuvres composites appartiennent à l’auteur qui les a réalisées, sous réserve des droits de l’auteur de l’œuvre préexistante. L’article L. 113-7, en particulier, est crucial car il établit la présomption de coauteur pour l’auteur des compositions musicales dans le cadre d’œuvres audiovisuelles réalisées en collaboration. La cour a écarté cette présomption dans le cas de M. [E], ce qui a été déterminant pour le rejet de son pourvoi. Quelles étaient les conséquences de la décision de la cour de cassation ?La décision de la cour de cassation a eu plusieurs conséquences importantes. Tout d’abord, elle a rejeté le pourvoi de M. [E], confirmant ainsi la décision de la cour d’appel. Cela signifie que M. [E] n’a pas été reconnu comme coauteur de l’œuvre audiovisuelle et n’a donc pas pu agir en contrefaçon. En outre, M. [E] a été condamné aux dépens, ce qui implique qu’il doit payer les frais de justice liés à cette affaire. De plus, en vertu de l’article 700 du code de procédure civile, il a été condamné à verser 1 500 euros à chacune des sociétés Pause B films et Karus productions, ce qui représente une sanction financière supplémentaire pour avoir engagé une action en justice qui a été jugée infondée. |
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