Stratégie de contournement d’une clause compromissoire
Les clauses compromissoires peuvent être écartées grâce à une savante présentation des demandes contentieuses. Dans cette affaire, les juges ont écarté l’application d’une clause d’arbitrage stipulée au bénéfice de l’AMAPA dans un accord signé entre deux parties pour mettre un terme à leur différend issu de l’exécution de contrats d’auteur. Article 1448 du code de procédure civileEn apparence, la question semblait bien relevait exclusivement du tribunal arbitral de l’AMAPA. Selon l’article 1448 du code de procédure civile, lorsqu’un litige relevant d’une convention d’arbitrage est porté devant une juridiction, celle-ci se déclare incompétente sauf si le tribunal arbitral n’est pas encore saisi et la convention d’arbitrage manifestement nulle ou inapplicable. Pirouette juridictionnelleEn l’espèce l’action de l’une des parties était présentée comme une demande de nullité du procès-verbal de médiation ne respectant pas le processus de médiation conventionnelle tel que défini par l’article 1530 du code de procédure civile et comme entaché de nullité du fait de manoeuvres dolosives qui auraient vicié son consentement. La partie lésée demandait en conséquence des dommages-intérêts pour réparer la perte de chance de bénéficier d’un accord équitable. Le litige ne portait donc pas sur le différend ayant opposé les parties dans l’exécution des contrats d’auteur, mais sur une demande de dommages-intérêts pour perte de chance de bénéficier d’un accord équitable du fait de prétendus manoeuvres dolosives durant le processus de médiation de sorte que les clauses compromissoires invoquées par l’AMAPA n’étaient pas applicables. En outre, le règlement de médiation de l’AMAPA dans sa version d’octobre 2012 applicable au litige indiquait qu’à l’issue du délai de deux mois pendant lequel les médiateurs tentent de parvenir à un règlement amiable, et en l’absence de règlement amiable, « chaque partie peut demander la mise en oeuvre de la procédure d’arbitrage », de sorte qu’il s’agit d’une possibilité offerte aux parties, le recours à l’arbitrage ne s’imposant pas aux parties. L’exception d’incompétence soulevée a été rejetée. Compétence de l’AMAPAPour rappel, l’Association de Médiation et d’Arbitrage des Professionnels de l’Audiovisuel (AMAPA) a pour objet de faciliter le règlement des litiges dans le secteur du cinéma et de la télévision. Le recours à l’AMAPA ne peut se faire que volontairement. Néanmoins, la possibilité pour un auteur ou un producteur de recourir à l’AMAPA peut être donnée par avance dans une clause du contrat appelée « clause AMAPA ». Si la « clause AMAPA » n’a pas été stipulée lors de la conclusion du contrat, il est possible de la substituer par la signature d’un « avenant ». En outre, si aucune « clause AMAPA » n’a été stipulée au contrat, il est possible de recourir à l’AMAPA en signant, au moment de l’apparition du litige, un « compromis de médiation ». La clause type de l’AMAPA est la suivante : « Tout différend qui viendrait à se produire à propos du contrat, concernant notamment sa validité, son interprétation et/ou son exécution, sera réglé par voie de médiation, conformément aux règlements de l’Association de médiation et d’arbitrage des professionnels de l’audiovisuel (AMAPA) que les parties déclarent accepter, en leur qualité de professionnels. Les parties acceptent d’ores et déjà qu’il soit fait application du règlement de médiation de l’AMAPA dans sa rédaction à la date du litige. En cas d’échec de la médiation, le différend sera soumis aux tribunaux compétents, sauf si les parties décident alors de signer un compromis donnant compétence à l’AMAPA pour organiser un arbitrage. » |
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Qu’est-ce qu’un redressement URSSAF concernant les redevances versées aux artistes ?Le redressement URSSAF en matière de redevances versées aux artistes se réfère à une procédure par laquelle l’URSSAF (Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales) remet en question la nature des paiements effectués par une association ou un employeur à des artistes. Dans le cas de l’Orchestre de Chambre de Paris, l’URSSAF a contesté la qualification des redevances versées aux artistes, arguant qu’elles devaient être requalifiées en salaires. L’URSSAF a soutenu que l’association n’avait pas fourni de détails suffisants sur les droits dus à chaque musicien, ce qui a conduit à un redressement. Quel est le rôle de l’aléa économique dans la requalification des redevances ?L’aléa économique est un critère qui peut influencer la requalification des redevances en salaires. Dans le cas de l’Orchestre de Chambre de Paris, l’URSSAF a soutenu que les redevances versées aux artistes ne présentaient pas d’aléa économique, car elles étaient considérées comme forfaitaires et non proportionnelles aux revenus générés par l’exploitation des œuvres. L’URSSAF a mis en avant que le minimum garanti non remboursable accordé aux artistes n’était pas lié à la performance économique de l’enregistrement, ce qui a conduit à la conclusion que les redevances ne pouvaient pas être considérées comme des rémunérations aléatoires. Cependant, cette position a été contestée par l’association, qui a finalement obtenu gain de cause. Comment la rémunération des artistes est-elle définie selon le code du travail ?Selon l’article L 7121-8 du code du travail, la rémunération due à un artiste pour la vente ou l’exploitation de son enregistrement n’est pas considérée comme un salaire si la présence physique de l’artiste n’est plus nécessaire pour l’exploitation de cet enregistrement. Cette rémunération doit être fonction des revenus générés par la vente ou l’exploitation de l’enregistrement, plutôt que d’être liée au salaire perçu pour la production de l’interprétation. Cela signifie que les artistes peuvent percevoir des redevances qui ne sont pas directement liées à un salaire fixe, mais plutôt à la performance commerciale de leurs œuvres. Quelles sont les conditions de légalité pour les avances sur recettes proportionnelles ?Les avances sur recettes d’exploitation sont légales sous certaines conditions. Premièrement, les royalties doivent être versées pendant toute la durée de protection des interprètes, qui était de 50 ans à l’époque de l’affaire. Deuxièmement, le montant de l’avance annuelle ne doit pas être fixe, mais doit être négocié régulièrement. Il est également déterminant que ce montant ne soit pas disproportionné par rapport aux salaires des artistes. Ces conditions visent à garantir que les artistes reçoivent une compensation équitable pour leur travail tout en permettant aux associations de gérer leurs finances de manière flexible. Comment les juges ont-ils pris en compte l’évolution des modes d’exploitation musicale ?Les juges ont reconnu l’impact des réseaux numériques et des nouveaux modes d’accès aux répertoires musicaux sur l’activité des orchestres. Ils ont noté que ces évolutions permettent aux formations orchestrales de mieux valoriser leurs droits de propriété intellectuelle et d’augmenter leurs recettes d’exploitation. Cette prise en compte des changements dans l’industrie musicale a été essentielle pour déterminer la légitimité des redevances versées aux artistes. Les juges ont ainsi rejeté le mode de calcul de l’URSSAF, qui ne tenait pas compte des délais entre le versement des avances et la réception des revenus d’exploitation, soulignant l’importance d’une évaluation juste et adaptée à la réalité du marché. |
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