Clause abusive et saisie immobilière : Questions / Réponses juridiques

·

·

Clause abusive et saisie immobilière : Questions / Réponses juridiques

La société Crédit Foncier de France a émis un commandement de payer à l’encontre de Monsieur [X] [P] et Madame [W] [L] pour un montant de 168.693,95 euros, lié à des prêts notariés. Le 2 juillet 2024, le juge a validé la saisie et ordonné la vente forcée de l’immeuble. Madame [L]-[P] a contesté cette décision, arguant que certaines clauses du contrat de prêt étaient abusives, notamment celle de déchéance du terme. La cour d’appel a jugé cette clause non écrite, tout en maintenant la validité du contrat et en ordonnant la vente de l’immeuble.. Consulter la source documentaire.

Sur la recevabilité de la demande nouvelle en cause d’appel

La question de la recevabilité de la demande nouvelle en cause d’appel est régie par les articles 564 et 565 du Code de procédure civile. Ces articles stipulent que les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions, sauf pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers ou de la survenance ou de la révélation d’un fait nouveau.

Il est précisé que ne sont pas nouvelles les prétentions d’appel qui tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent.

En l’espèce, Mme [L]-[P] n’a soulevé aucune contestation sur le montant ou l’exigibilité des créances lors de sa comparution devant le juge de l’exécution de première instance. Cependant, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a jugé que le juge national est tenu d’examiner d’office le caractère abusif d’une clause contractuelle dès qu’il dispose des éléments nécessaires à cet effet.

Ainsi, la demande en annulation de la clause de déchéance du terme, présentée pour la première fois en cause d’appel, est recevable.

Sur la qualification de la clause de ‘déchéance du terme’

La qualification de la clause de déchéance du terme contenue dans l’acte authentique de prêt est régie par l’article L. 213-6 du Code de l’organisation judiciaire, qui stipule que le juge de l’exécution connaît de manière exclusive des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s’élèvent à l’occasion de l’exécution forcée.

Il peut donc se prononcer sur la nullité d’un engagement résultant d’un acte notarié exécutoire. De plus, l’article L. 132-1 du Code de la consommation précise que dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels, les clauses abusives sont réputées non écrites.

La CJUE a également précisé que l’appréciation du caractère abusif d’une clause doit tenir compte de l’ensemble des circonstances entourant la conclusion du contrat. En l’espèce, la clause relative à la déchéance du terme ne prévoit pas de préavis raisonnable permettant à l’emprunteur de régulariser ses paiements.

Cette absence de préavis crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, rendant la clause abusive et donc non écrite.

Sur les conséquences de la qualification de la clause de déchéance du terme en ‘clause abusive’

Il est établi que le caractère abusif de la clause de déchéance du terme n’entraîne ni la nullité du contrat de prêt, ni la perte de son caractère exécutoire. Cela signifie que la clause annulée n’affecte pas l’objet principal de la convention, qui est de mettre à disposition de l’emprunteur une somme d’argent.

L’article R. 321-3 du Code des procédures civiles d’exécution précise que la nullité du commandement de payer n’est pas encourue au motif que les sommes réclamées sont supérieures à celles qui sont dues au créancier.

Ainsi, même si la clause de déchéance du terme est déclarée abusive, cela ne remet pas en cause la validité du commandement de payer. Les sommes dues au titre des mensualités échues et impayées demeurent exigibles.

En conséquence, la créance de la S.A. Crédit Foncier de France sera fixée aux montants des mensualités échues, et la vente forcée de l’immeuble pourra être ordonnée.

Sur l’orientation de la procédure

L’orientation de la procédure de saisie immobilière est régie par les dispositions du Code des procédures civiles d’exécution. Il convient d’autoriser la vente forcée sur la mise à prix mentionnée au cahier des conditions de vente.

Cette autorisation est nécessaire pour permettre au créancier de récupérer les sommes dues par la vente du bien saisi. La procédure doit respecter les modalités prévues par la loi, garantissant ainsi les droits des parties impliquées.

Sur les dépens et l’article 700 du Code de procédure civile

Les articles 696 et 700 du Code de procédure civile stipulent que la partie perdante est condamnée aux dépens et que, sauf considération d’équité, la partie tenue aux dépens doit supporter les frais irrépétibles de procédure exposés par l’autre partie.

Dans cette affaire, les dépens de première instance et d’appel seront compris dans les frais de vente soumis à taxe. Il n’est pas inéquitable de laisser à la charge des parties les frais irrépétibles qu’elles ont exposés, compte tenu de la solution donnée au litige.


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Chat Icon