L’Essentiel : Dans une affaire récente, la contrefaçon de marque a été retenue dans le cadre d’une publicité comparative, soulevant des questions sur l’utilisation des marques concurrentes. La société Carrefour a cité « E. Leclerc » pour désigner son concurrent, dévalorisant ainsi l’image de cette enseigne. Les juges ont souligné que cette utilisation portait atteinte aux fonctions de communication et de publicité de la marque Leclerc, justifiant ainsi une condamnation. En conséquence, la société Leclerc a obtenu 100 000 euros de dommages et intérêts pour l’atteinte portée à ses marques, illustrant les enjeux juridiques de la publicité comparative.
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Citation de marque dans une publicité comparativeLa finesse d’analyse juridique en matière de contrefaçon de marque ne semble plus avoir de limites. Dans cette affaire, les juges ont retenu la contrefaçon de marque dans le cadre d’une publicité comparative, ce qui amène à s’interroger sur la possibilité restante de procéder à une publicité comparative sans citer la marque d’un concurrent. La contrefaçon de marque a été retenue en dépit des dispositions du préambule de la Directive 2006/114/CE selon lesquelles il peut être nécessaire, pour rendre effective la publicité comparative, d’identifier les produits ou services d’un concurrent en faisant référence à une marque dont ce dernier est titulaire ; « une telle utilisation de la marque n’enfreint en effet pas ce droit exclusif à condition d’être faite dans le respect des règles édictées ». Dans la publicité en cause, la société Carrefour a utilisé les termes « E. Leclerc » pour désigner son concurrent. Ce faisant, elle a reproduit la marque communautaire du même nom et imité d’autres marques incluant le terme « Leclerc » qui constitue l’élément distinctif dominant, pour viser les produits et services visés dans les enregistrements de ces marques à savoir des produits de grande consommation qu’elle distribue elle-même également. Si l’usage des termes E. Leclerc dans la publicité litigieuse a bien pour but de désigner les magasins du réseau Leclerc, il a été fait pour présenter cette enseigne et les produits et services vendus sous un jour dévalorisant par une publicité comparative illicite. Le message véhiculé par la publicité litigieuse a porté ainsi atteinte à la fonction de communication et de publicité des marques de la demanderesse et doit être qualifié de contrefaçon. Fonctions de la marqueLes juges ont souligné qu’outre sa fonction principale d’identification et de garantie d’origine commerciale des produits et services visés par l’enregistrement, la marque a aussi une fonction de communication, d’investissement et de publicité. C’est sur ce volet qu’a été retenue la contrefaçon de marque. Ainsi que le rappelle la Cour de justice de l’Union européenne (ex. Affaire C-487/07 L’Oréal, §58), le droit exclusif prévu par la directive 89/104 a été octroyé afin de permettre au titulaire de la marque de protéger ses intérêts spécifiques en tant que titulaire de cette marque, c’est-à-dire d’assurer que cette dernière puisse remplir ses fonctions propres. Dès lors, l’exercice de ce droit doit être réservé aux cas dans lesquels l’usage du signe par un tiers porte atteinte ou est susceptible de porter atteinte aux fonctions de la marque parmi lesquelles figurent non seulement la fonction essentielle de la marque qui est de garantir aux consommateurs la provenance du produit ou du service, mais également les autres fonctions de celle-ci, comme notamment celle consistant à garantir la qualité de ce produit ou de ce service, ou celles de communication, d’investissement ou de publicité. 100 000 euros de dommages et intérêtsCompte tenu du contexte particulier des faits de l’espèce, qui s’inscrit dans le cadre de la concurrence que se font les parties qui tentent par « tous les moyens d’attirer l’attention au détriment des autres acteurs du secteur », et du fait que la campagne publicitaire a été diffusée pendant une durée limitée, la société Leclerc a obtenu 100.000 euros au titre de l’atteinte portée à ses marques. |
Q/R juridiques soulevées :
Qu’est-ce que la contrefaçon de marque dans le cadre d’une publicité comparative ?La contrefaçon de marque dans le cadre d’une publicité comparative se réfère à l’utilisation non autorisée d’une marque d’un concurrent dans le but de promouvoir ses propres produits ou services. Dans l’affaire mentionnée, les juges ont déterminé que la société Carrefour avait enfreint les droits de la marque E. Leclerc en l’utilisant pour dévaloriser cette enseigne dans une publicité comparative. Cette décision soulève des questions sur la légalité de la publicité comparative, notamment si elle peut être réalisée sans mentionner explicitement la marque d’un concurrent. Quelles sont les fonctions d’une marque selon la jurisprudence ?Les fonctions d’une marque, selon la jurisprudence, incluent principalement l’identification et la garantie de l’origine commerciale des produits et services. Cependant, la marque remplit également d’autres fonctions essentielles, telles que la communication, l’investissement et la publicité. La Cour de justice de l’Union européenne a souligné que le droit exclusif accordé aux titulaires de marques vise à protéger ces fonctions. Ainsi, toute utilisation d’une marque par un tiers qui porte atteinte à ces fonctions peut être considérée comme une contrefaçon. Quel montant de dommages et intérêts a été accordé à la société Leclerc ?La société Leclerc a obtenu 100 000 euros de dommages et intérêts en raison de l’atteinte portée à ses marques par la campagne publicitaire de Carrefour. Cette décision a été influencée par le contexte concurrentiel dans lequel les deux sociétés opèrent, où chaque acteur cherche à attirer l’attention des consommateurs. Le tribunal a pris en compte la durée limitée de la campagne publicitaire, ce qui a également joué un rôle dans l’évaluation des dommages. Cette somme vise à compenser le préjudice subi par Leclerc en raison de la dévalorisation de sa marque dans la publicité comparative. |
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