L’Essentiel : Dans une affaire récente, deux réalisatrices ont contesté la cession par leur producteur d’extraits de leur œuvre à un tiers. Le contrat stipulait que les extraits ne pouvaient être reproduits que pour l’exploitation de l’œuvre, excluant ainsi les œuvres dérivées. Selon l’ARCEPicle L. 132-24 du code de la propriété intellectuelle, la cession des droits d’auteur doit être clairement définie. Les juges ont conclu que la cession des droits d’adaptation et d’exploitation par extraits restait réservée aux auteurs, et que la cession sans autorisation constituait une faute contractuelle, entraînant des dommages et intérêts pour les réalisatrices.
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Cession d’extraits audiovisuels Le contrat de production audiovisuelle doit il aussi stipuler le droit pour le producteur de céder des extraits de l’œuvre audiovisuelle ? De façon générale, le producteur dispose du droit d’utiliser des extraits de l’œuvre pour promouvoir l’œuvre mais dispose t-il du droit de céder (à titre payant) des extraits de l’œuvre aux fins d’incorporation dans des oeuvres tierces ? L’exception de courte citation est elle applicable en matière de courts extraits audiovisuels ? Une réponse claire à ces questions vient d’être apportée par les juges. Dans cette affaire, deux réalisatrices ont découvert que leur producteur avait cédé, moyennant paiement, un extrait de leur oeuvre au producteur d’un second documentaire produit par un tiers. Les réalisatrices étaient en désaccord sur la portée de leur cession et notamment sur le droit du producteur de céder des extraits de leur documentaire. Le contrat de production audiovisuelle stipulait que les auteurs autorisaient la reproduction d’extraits uniquement “pour les besoins de l’exploitation de l’oeuvre” et non pour des oeuvres dérivées. Droits des réalisateurs En vertu de l’article L. 132-24 du code de la propriété intellectuelle, le contrat qui lie le producteur aux auteurs d’une oeuvre audiovisuelle emporte, sauf clause contraire et sans préjudice des droits reconnus à l’auteur, cession au profit du producteur des droits exclusifs d’exploitation de l’oeuvre audiovisuelle. Cette disposition n’est pas incompatible avec l’article L. 131-3 du même code, lequel dispose: « La transmission des droits de l’auteur est subordonnée à la condition que chacun des droits cédés fasse l’objet d’une mention distincte dans l’acte de cession et que le domaine d’exploitation des droits cédés soit délimité quant à son étendue et à sa destination, quant au lieu et quant à la durée. » Comme rappelé par les juges, la présomption édictée en faveur du producteur est une présomption simple qui vaut sauf clause contraire et peut être combattue par tout moyen de preuve. Or, la cession des droits d’auteur doit s’interpréter strictement, de surcroît, lorsque les auteurs/réalisateurs se réservent les droits non expressément cédés. Il s’ensuit que les droits d’adaptation et d’exploitation par extraits, non inclus dans la cession, étaient réservés aux auteurs et non à la société de production audiovisuelle. Cette cession d’un droit spécifique (droit de céder les extraits de l’œuvre) est soumise à la condition d’une rémunération spécifique des auteurs/réalisateurs. Contrefaçon ou faute contractuelle ? Toutefois, la cession d’extraits par le producteur sans l’autorisation des auteurs/réalisateurs ne s’analyse pas en une contrefaçon mais en une faute contractuelle ayant entraîné un préjudice moral pour les auteurs. Les auteurs/réalisateurs, en vertu de l’article 1142 du code civil, ont obtenu la somme de 3 000 euros de dommages et intérêts chacun (« Toute obligation de faire ou de ne pas faire se résout en dommages et intérêts en cas d’inexécution de la part du débiteur »). Mots clés : Contrat de production audiovisuelle Thème : Contrat de production audiovisuelle A propos de cette jurisprudence : juridiction : Tribunal judiciaire de Paris | Date. : 25 janvier 2013 | Pays : France |
Q/R juridiques soulevées :
Le contrat de production audiovisuelle doit-il stipuler le droit pour le producteur de céder des extraits de l’œuvre ?Le contrat de production audiovisuelle doit effectivement préciser les droits du producteur concernant la cession d’extraits de l’œuvre. En général, le producteur a le droit d’utiliser des extraits pour promouvoir l’œuvre, mais la cession à titre payant d’extraits pour incorporation dans des œuvres tierces nécessite une mention explicite dans le contrat. Cette nécessité de précision découle de l’article L. 132-24 du code de la propriété intellectuelle, qui stipule que la cession des droits d’exploitation doit être clairement définie. Les juges ont souligné que la cession des droits d’adaptation et d’exploitation par extraits, si non expressément cédés, reste réservée aux auteurs. Quelles sont les implications de la présomption en faveur du producteur ?La présomption en faveur du producteur, selon l’article L. 132-24, est une présomption simple, ce qui signifie qu’elle peut être contestée par les auteurs. Cela implique que, même si le producteur bénéficie d’une présomption de cession des droits d’exploitation, les auteurs peuvent prouver que certains droits, comme ceux de céder des extraits, n’ont pas été cédés. Les juges rappellent que la cession des droits d’auteur doit être interprétée de manière stricte, surtout lorsque les auteurs se réservent des droits non expressément cédés. Ainsi, la cession d’un droit spécifique, comme celui de céder des extraits, doit être accompagnée d’une rémunération spécifique pour les auteurs. Comment les juges ont-ils qualifié la cession d’extraits sans autorisation ?Les juges ont qualifié la cession d’extraits par le producteur sans l’autorisation des auteurs/réalisateurs non pas comme une contrefaçon, mais comme une faute contractuelle. Cette distinction est importante car elle implique que le producteur a manqué à ses obligations contractuelles envers les auteurs. En conséquence, les auteurs ont subi un préjudice moral, ce qui leur a permis d’obtenir des dommages et intérêts. Selon l’article 1142 du code civil, toute inexécution d’une obligation contractuelle peut donner lieu à des dommages et intérêts, ce qui a été appliqué dans ce cas avec une indemnisation de 3 000 euros pour chaque auteur. Quelles sont les conditions de cession des droits d’auteur selon le code de la propriété intellectuelle ?Selon l’article L. 131-3 du code de la propriété intellectuelle, la cession des droits d’auteur doit être clairement définie dans l’acte de cession. Chaque droit cédé doit faire l’objet d’une mention distincte, et le domaine d’exploitation doit être délimité en termes d’étendue, de destination, de lieu et de durée. Cela signifie que pour qu’un producteur puisse céder des extraits d’une œuvre, il doit obtenir une autorisation explicite des auteurs, accompagnée d’une rémunération spécifique. Cette exigence vise à protéger les droits des auteurs et à garantir qu’ils soient dûment compensés pour l’utilisation de leur travail. |
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