L’Essentiel : En matière de cession de droits de propriété intellectuelle, la responsabilité de l’Avocat est souvent mise en question. La Cour de cassation a récemment statué que l’Avocat n’est pas tenu d’expliquer aux cessionnaires la nature des droits acquis, même en cas de maladresse rédactionnelle. Dans une affaire, les acquéreurs ont été déboutés de leurs demandes, la juridiction ayant jugé que la consultation de l’annexe de l’acte, contenant des informations claires sur les droits de propriété intellectuelle, suffisait à garantir leur compréhension. Cette décision souligne l’importance de la clarté dans les documents juridiques et le rôle limité de l’Avocat dans ce contexte.
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En matière de cession de fonds de commerce assortie d’une cession distincte de droits de propriété intellectuelle, l’Avocat n’a pas l’obligation d’expliquer aux cessionnaires la nature des droits de propriété intellectuelle acquis.
Pour débouter les acquéreurs de leur demandes à l’égard du Cabinet, la juridiction a considéré que que la consultation de l’annexe de l’acte comportant l’enveloppe Soleau et son contenu permettaient aux acquéreurs de se convaincre, nonobstant une maladresse rédactionnelle, ainsi que cela était précisé sans aucune ambiguïté dans le compromis de vente, de la bonne compréhension sur la nature des droits de propriété intellectuelle acquis. République française CIV. 1 CF COUR DE CASSATION Audience publique du 18 janvier 2023 Rejet non spécialement motivé Mme DUVAL-ARNOULD, conseiller doyen faisant fonction de président Décision n° 10062 F Pourvoi n° Y 21-24.485 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS Motifs #1 DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 18 JANVIER 2023 1°/ M. [X] [G], 2°/ Mme [T] [I], épouse [G], domiciliés tous deux [Adresse 1], ont formé le pourvoi n° Y 21-24.485 contre l’arrêt rendu le 23 septembre 2021 par la cour d’appel de Colmar (2e chambre civile), dans le litige les opposant : 1°/ à la société L’Immobilière alsacienne, société à responsabilité limitée, dont le siège est société Cabinet d’affaires Michel Simond, [Adresse 2], 2°/ à la société L’Alsace économique (Alsec), société par actions simplifiée, ayant pour nom commercial Hans et associés, ayant toutes deux leur siège [Adresse 3], défenderesses à la cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Kerner-Menay, conseiller, les observations écrites de la SCP Alain Bénabent, avocat de M. et Mme [G], de la SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de la société L’Immobilière alsacienne, de la SARL Le Prado – Gilbert, avocat de la société L’Alsace économique, de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Fiduciaire d’audit et de consultants juridiques, après débats en l’audience publique du 29 novembre 2022 où étaient présents Mme Duval-Arnould, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Kerner-Menay, conseiller rapporteur, M. Chevalier, conseiller, et Mme Tinchon, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision. #2 1. Les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l’encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation. 2. En application de l’article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi. EN CONSÉQUENCE, la Cour : Dispositif REJETTE le pourvoi ; Condamne M. et Mme [G] aux dépens ; En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Annexe Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit janvier deux mille vingt-trois. MOYENS ANNEXES à la présente décision Moyens produits par la SCP Alain Bénabent, avocat aux Conseils, pour M. et Mme [G] PREMIER MOYEN DE CASSATION Monsieur et Madame [G] font grief à l’arrêt infirmatif attaqué d’avoir déclaré mal-fondées leurs demandes formées à l’encontre du Cabinet Fidac, au titre des droits de intellectuelle 1°) ALORS QUE l’avocat rédacteur d’acte est tenu à l’égard de toutes les parties, quelles que soient leurs compétences personnelles, d’une obligation de conseil et, le cas échéant, de mise en garde en ce qui concerne, notamment, les effets et les risques des stipulations convenues ; que l’existence d’une clause claire dans l’acte ne le dispense pas de les informer sur les conséquences qui s’y attachent ; qu’en retenant, pour débouter les époux [G] de leur demandes à l’égard du Cabinet Fidac, que « ce libellé ainsi que la consultation de l’annexe n°2 comportant ladite enveloppe et son contenu permettaient aux acquéreurs de se convaincre, nonobstant cette maladresse rédactionnelle, ainsi que cela était précisé sans aucune ambiguïté dans le compromis de vente » (arrêt attaqué, p. 13 § 2), cependant que le Cabinet Fidac devait s’assurer, au titre de son devoir de conseil, de la bonne compréhension des époux [G] sur la nature des droits de < intellectuelle 2°) ALORS, EN OUTRE, QUE les époux [G] faisaient également valoir que le Cabinet Fidac n’avait pas inséré dans l’acte de cession de clause de séquestre du prix de cession des droits de < intellectuelle intellectuelle DEUXIEME MOYEN DE CASSATION Monsieur et Madame [G] font grief à l’arrêt infirmatif attaqué d’avoir déclaré mal-fondées leurs demandes formées à l’encontre de la société Alsec au titre des droits de < intellectuelle 1°) ALORS QUE dans leurs dernières conclusions d’appel, déposées et signifiées le 3 février 2020, les époux [G] faisaient valoir que la société Alsec aurait dû les alerter, d’une part, sur le fait que la société Mont Blanc avait comptabilisé une dette de 6.365,20 euros envers la société Concept Marketing et, d’autre part, que les rémunérations perçues par Mme [M] en 2012 de la société Mont Blanc étaient d’un montant de 96.000 euros, (concl., p. 16, 17 et 18), ce qui aurait permis de mettre en lumière les risques attachés à l’acquisition des fonds de commerce ; qu’en s’abstenant de répondre à ce moyen déterminant, permettant de caractériser un manquement de la société d’expertise comptable à son devoir de conseil, la cour d’appel n’a pas satisfait aux exigences de l’article 455 du code de procédure civile. 2°) ALORS QUE l’expert comptable, qui est investi d’une mission générale incluant un devoir de conseil, n’en est pas déchargé, même partiellement, par les compétences personnelles de son client ; qu’en considérant qu’« aucun manquement de [la société Alsec] à son devoir de conseil n’est caractérisé, quand bien même elle n’a pas expressément déconseillé l’acquisition aux termes de son rapport, les éléments ainsi mis en exergue étant en effet suffisants pour alerter la vigilance de M. [G], qui était chef d’entreprise, fût-ce dans une autre spécialité » (arrêt attaqué, p. 15 § 1), estimant ainsi que l’expert-comptable n’avait pas à déconseiller l’acquisition des fonds de commerce compte tenu des compétences présumées de M. [G], en sa qualité de chef d’entreprise exerçant dans une autre spécialité, la cour d’appel a violé l’article 1147 du code civil, devenu l’article 1231-1 du même code. TROISIEME MOYEN DE CASSATION Monsieur et Madame [G] font grief à l’arrêt infirmatif attaqué d’avoir déclaré leurs demandes formées à l’encontre du Cabinet Michel Simond au titre des droits de < intellectuelle 1°) ALORS QU’ en retenant qu’ « en l’absence de lien contractuel, la responsabilité de l’intermédiaire ne peut être recherchée sur le fondement de la responsabilité contractuelle mais uniquement sur un fondement quasi-délictuel, pour faute prouvée » (arrêt attaqué, p. 15 § 6 et 7), aux motifs inopérants que si M. [G] avait personnellement réglé la note d’honoraires du cabinet Michel Simond, celle-ci était adressée à la société MGVH et que ce dernier s’était vu confier le 17 juin 2013, un mandat de vente des fonds de commerce avec exclusivité par les époux [M], agissant au nom de chacune des sociétés cédantes (arrêt attaqué, p. 15 § 7), cependant que, d’une part, le « dossier d’acquisition personnalisée », destiné à renseigner l’acquéreur, mentionnait le nom de l’acquéreur, « Monsieur [G] [X] » et, d’autre part, que la facture établie par le Cabinet Michel Simond, certes au nom de «SARL MGVH » alors en cours de formation, mais « représentée par la époux [G] », indiquant « HONORAIRES Cabinet MICHEL SIMOND Alsace. Acquisition Fonds de commerce et droits de < intellectuelle 2°) ALORS, AU SURPLUS, QU’ en écartant toute violation par le Cabinet Michel Simond à son devoir d’information à l’égard des époux [G], motifs pris que l’étude réalisée, qui avait conclu à une « belle rentabilité » ne portait que sur la cession des fonds de commerce à l’exclusion des droits de < intellectuelle intellectuelle intellectuelle |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la décision de la Cour de cassation concernant l’obligation de l’avocat en matière de cession de droits de propriété intellectuelle ?La Cour de cassation a statué que l’avocat n’a pas l’obligation d’expliquer aux cessionnaires la nature des droits de propriété intellectuelle acquis lors d’une cession de fonds de commerce. Cette décision repose sur le principe que les parties à la transaction, même si elles ne sont pas des experts en la matière, sont censées comprendre les implications des documents qu’elles signent. Cette position est renforcée par le fait que la consultation de l’annexe de l’acte, qui contenait des informations sur les droits de propriété intellectuelle, a permis aux acquéreurs de se convaincre de la nature des droits acquis. Ainsi, même en cas de maladresse rédactionnelle, la cour a jugé que les cessionnaires avaient suffisamment d’informations pour comprendre les enjeux. Quels étaient les arguments des époux [G] dans leur pourvoi contre la décision de la cour d’appel ?Les époux [G] ont formulé plusieurs moyens de cassation dans leur pourvoi, arguant principalement que le Cabinet Fidac, en tant qu’avocat rédacteur de l’acte, avait une obligation de conseil envers eux. Ils ont soutenu que l’avocat devait les informer des conséquences des stipulations convenues, notamment en ce qui concerne la distinction entre une enveloppe Soleau et un brevet. Ils ont également fait valoir que le Cabinet Fidac n’avait pas inclus dans l’acte de cession une clause de séquestre pour le prix de cession des droits de propriété intellectuelle, ce qui aurait pu les protéger. En outre, ils ont critiqué la cour d’appel pour avoir écarté tout manquement à ce devoir de conseil, malgré les mises en garde qui n’étaient pas suffisamment claires concernant la cession distincte des droits de propriété intellectuelle. Comment la cour d’appel a-t-elle justifié son rejet des demandes des époux [G] ?La cour d’appel a justifié son rejet des demandes des époux [G] en affirmant que la consultation de l’annexe de l’acte, qui contenait des informations sur les droits de propriété intellectuelle, avait permis aux acquéreurs de comprendre la nature des droits acquis. Elle a également noté que, malgré une maladresse rédactionnelle, le compromis de vente précisait clairement les droits en question. De plus, la cour a estimé que les mises en garde fournies par le rédacteur de l’acte sur les risques liés à l’absence de séquestre étaient suffisantes pour informer les acquéreurs. Ainsi, elle a conclu que le Cabinet Fidac avait respecté son devoir de conseil, et que les époux [G] avaient été suffisamment informés des implications de leur acquisition. Quels étaient les autres moyens de cassation soulevés par les époux [G] concernant la société Alsec et le Cabinet Michel Simond ?Concernant la société Alsec, les époux [G] ont soutenu que cette dernière aurait dû les alerter sur des dettes comptabilisées par une autre société, ce qui aurait pu influencer leur décision d’acquisition. Ils ont argué que l’absence de réponse de la cour d’appel à ce moyen constituait un manquement à ses obligations. En ce qui concerne le Cabinet Michel Simond, les époux [G] ont fait valoir qu’il existait un lien contractuel entre eux et le cabinet, malgré l’absence d’un contrat formel. Ils ont également critiqué le cabinet pour ne pas avoir respecté son devoir d’information, en se basant sur une étude qui ne tenait pas compte des droits de propriété intellectuelle dans son évaluation de la rentabilité de la cession. Ces arguments visaient à démontrer que les différents intervenants dans la transaction avaient failli à leur devoir de conseil, ce qui aurait pu les conduire à une acquisition moins éclairée. |
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