Le motif du recours au CDD d’usage doit être précis et vérifiable sous peine de requalification en CDI. L’employeur qui engage un collaborateur dans le cadre d’un CDD d’usage doit faire figurer sur le contrat l’objet particulier de celui-ci, et justifier du caractère temporaire de cet objet, en indiquant son terme, par une date ou l’intervention d’un fait déterminé. Mention des CDD d’usageEn l’occurrence, les CDDU de l’artiste choriste accompagnant un chanteur , dès le 4 avril 2011 jusqu’au 20 août 2012, sont ainsi libellés : motifs : « emploi d’usage des secteurs du spectacle, de l’audiovisuel, de l’action culturelle et de la production cinématographique (code du travail : article D.121-2) », ils mentionnent les dates d’engagement, la durée horaire du travail quotidien, la nature de l’emploi « musicien », le lieu de travail est ainsi spécifié « le salarié pourra être occupé à divers endroits ». Ce motif a été jugé trop large et imprécis (requalification des CDDU en CDI). L’accord interbranche du 12 octobre 1998L’accord interbranche du 12 octobre 1998 relatif au contrat à durée déterminée d’usage, étendu le 21 mai 1999, vise l’article D.121-2 du code du travail, devenu l’article D.1242-1 et avait vocation à s’appliquer à la relation. Il stipulait : « 3.2. CDD de droit commun Les signataires entendent réserver le recours au CDD d’usage, dans leurs branches d’activité, aux seuls cas où les particularités de ces branches le justifient. En conséquence : a) Les employeurs doivent recourir au contrat à durée déterminée de droit commun dans tous les cas prévus par la loi ; b) Lorsqu’ils recourent à des CDD de droit commun, les employeurs versent aux salariés la prime de précarité et font application des textes en vigueur en matière de congés payés ; c) Toutefois, si les salariés concernés exercent l’emploi d’artiste du spectacle ou l’un des emplois figurant dans les listes ci-après, les employeurs, en accord avec les intéressés, cotiseront, au titre des contrats en cause, aux organismes sociaux du spectacle. 3.3. Objet du contrat L’employeur qui engage un collaborateur dans le cadre d’un CDD d’usage devra faire figurer sur le contrat l’objet particulier de celui-ci, et justifier du caractère temporaire de cet objet, en indiquant son terme, par une date ou l’intervention d’un fait déterminé. » La convention collective nationale régissant les rapports entre les entrepreneurs de spectacles et les artistes dramatiques, lyriques, chorégraphiques, marionnettistes, de variétés et musiciens en tournées du 7 février 2003, étendue par arrêté du 20 octobre 2004, dont se prévaut Mme [Z], au motif justifié qu’il apparait, à l’occasion, sur ses bulletins de paie et dans le champ de laquelle entre indubitablement l’activité de l’entreprise, stipule, en son article 11, « le contrat doit obligatoirement comporter : (‘)
Les dates de début et de fin de tournée (‘) » Dès lors que les deux textes obligent le contrat à durée déterminée d’usage à contenir l’objet particulier pour lequel il est conclu, force est de constater que cette exigence s’appliquait à la relation entre les parties. Mentions insuffisantesCela étant, il est manifeste que les contrats conclus dès 2011 ne mentionnaient aucun objet particulier, et ainsi la définition précise de leur motif, serait-ce la tournée ou les concerts dont il s’agissait et qui n’étaient pas même évoqués en leur principe jusqu’au 29 juin 2011, alors que le recours d’usage à de tels contrats n’en dispense pas l’employeur. En effet, l’article L.1242-2 du code du travail dispose qu’il ne peut être recouru à un tel contrat que pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire, quand bien même il serait d’usage dans le secteur d’activité. Le besoin d’emploi a caractère temporaireL’article L.1242-1 du code du travail dit qu’« un contrat de travail à durée déterminée, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise. » Il importe, par application de l’accord cadre sur le travail à durée déterminée conclu le 18 mars 1999, mis en ‘uvre par la directive 1999/70/CE du 28 juin 1999, en ses clauses 1 et 5, qui a pour objet de prévenir les abus résultant de l’utilisation de contrats à durée déterminée successifs, de vérifier que le recours à l’utilisation de tels contrats est justifié par des raisons objectives qui s’entendent de l’existence d’éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l’emploi. En tout état de cause, les irrégularités formelles des contrats dès l’origine imposent la requalification de la relation dans sa durée et il doit être considéré que les contrats à durée déterminée successifs de Mme [W] [Z] sont réputés conclus à durée indéterminée, en application des articles L. 1242-12 et L.1245-1 du code du travail, dans sa version issue de la loi du 21 janvier 2008, qui énonce que « est réputé à durée indéterminée tout contrat de travail conclu en méconnaissance des dispositions des articles L.1242-1 à L.1242-4, L.1242-6 à L.1242-8, L.1242-12, alinéa premier, L.1243-11, alinéa premier, L.1243-13, L.1244-3 et L.1244-4. » |
→ Questions / Réponses juridiques
Qu’est-ce qu’un prêt de main d’œuvre licite ?Un prêt de main d’œuvre est considéré comme licite lorsque l’entreprise prêteuse ne facture à l’entreprise utilisatrice que les salaires versés au salarié, les charges sociales afférentes et les frais professionnels remboursés. Si l’entreprise prêteuse facture des montants supérieurs à ces éléments, le prêt est requalifié en opération à but lucratif, ce qui entraîne des sanctions judiciaires. Cette réglementation vise à protéger les droits des salariés et à éviter les abus dans les relations de travail. Il est donc déterminant pour les entreprises de respecter ces conditions afin d’éviter des litiges et des sanctions.Quels arguments la société Py a-t-elle avancés dans l’affaire Issey Miyake ?La société Py a contesté l’existence d’un prêt de main d’œuvre illicite avec Issey Miyake, affirmant qu’elle prenait en charge l’intégralité des défilés de mode pour la marque. Elle a soutenu que cette prise en charge constituait une prestation de service complexe, et non un simple prêt de main d’œuvre. Py a ainsi tenté de démontrer que les tâches réalisées étaient spécifiques et que la société Issey Miyake n’avait pas les moyens de les accomplir en interne. Cette argumentation visait à prouver que les relations entre les deux entreprises ne relevaient pas d’un prêt de main d’œuvre, mais d’une collaboration plus large.Comment la société IMESA a-t-elle contesté le prêt de main d’œuvre ?La société IMESA a également contesté l’existence d’un prêt de main d’œuvre illicite, en précisant que les contrats de mise à disposition avaient été signés avec la société IM Japon, et non avec elle-même. Elle a fait valoir que la société Py, en tant que sous-traitante, était responsable de l’organisation logistique, de la composition de l’équipe, du casting des mannequins, ainsi que de la fourniture du matériel et des décors. IMESA a ainsi tenté de démontrer qu’elle n’était pas directement impliquée dans le prêt de main d’œuvre, ce qui aurait pu la protéger des accusations de pratiques illicites.Quels éléments ont conduit à la confirmation du jugement en faveur du salarié ?Le salarié a réussi à prouver l’existence d’un prêt de main d’œuvre illicite en se basant sur les contrats de mise à disposition et sur le fait qu’il travaillait exclusivement pour la société IMESA depuis 2002. Il a également souligné qu’il n’avait jamais donné son accord exprès et écrit pour cette mise à disposition. De plus, le caractère lucratif du prêt a été établi, car le montant facturé était supérieur à ses salaires, charges sociales et frais professionnels. Ces éléments ont conduit à la confirmation du jugement qui lui a alloué une somme de 5 000 euros pour le prêt illicite de main d’œuvre.Quelles sont les conséquences d’une opération à but lucratif selon le code du travail ?Selon l’article L. 8241-1 du code du travail, toute opération à but lucratif ayant pour objet exclusif le prêt de main-d’œuvre est interdite. Cependant, certaines exceptions existent, notamment pour les opérations réalisées dans le cadre du travail temporaire, des entreprises de travail à temps partagé, ou des agences de mannequins titulaires d’une licence. Les opérations de prêt de main d’œuvre ne poursuivent pas de but lucratif si l’entreprise prêteuse ne facture que les salaires, charges sociales et frais professionnels. En cas de non-respect de ces règles, des sanctions peuvent être appliquées.Comment le conseil de prud’hommes a-t-il évalué le caractère lucratif de l’opération ?Le conseil de prud’hommes a constaté que le montant facturé par la société Py était supérieur au salaire majoré des charges sociales, ce qui a été interprété comme un indicateur du caractère lucratif de l’opération. La société Py n’a pas contesté ce point, ce qui a renforcé la position du salarié. En conséquence, les faits de prêt de main d’œuvre illicite ont été établis, et le préjudice subi par le salarié a été reconnu. Le jugement a donc été infirmé pour allouer des dommages et intérêts au salarié, en réparation du préjudice subi.Qu’est-ce que le marchandage et quelles en sont les conséquences ?Le marchandage, selon l’article L. 8231-1, est défini comme toute opération à but lucratif de fourniture de main-d’œuvre qui cause un préjudice au salarié ou élude l’application de dispositions légales. Dans cette affaire, le marchandage a été retenu car l’opération a maintenu le salarié dans une situation de précarité, caractérisée par une succession de CDD. Cela a également eu pour effet d’éluder les dispositions légales qui favorisent le recours au CDI. Les faits de marchandage ont donc été établis, entraînant des sanctions pour la société Py. |
Laisser un commentaire