Caducité d’une saisie conservatoire en raison de l’absence de titre exécutoire

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Caducité d’une saisie conservatoire en raison de l’absence de titre exécutoire

L’Essentiel : Le dirigeant d’entreprise décédé en 2015 a laissé pour héritiers ses enfants et son conjoint survivant. En 2017, le tribunal a ordonné l’ouverture des opérations de comptes pour la liquidation de l’indivision successorale. Un héritier a interjeté appel d’un jugement homologuant un état liquidatif. Pendant l’appel, l’une des héritières est décédée. En 2024, le juge a autorisé deux héritiers à pratiquer une saisie conservatoire sur un bien immobilier, en garantie d’une créance. Un héritier a ensuite demandé la mainlevée de cette saisie, arguant de son caractère caduc. Le juge a finalement déclaré la saisie caduque, sans dommages et intérêts.

Décès et héritiers

Le dirigeant d’entreprise [U] [K] est décédé le [Date décès 6] 2015, laissant pour héritiers ses enfants, à savoir un héritier [P] [K], une héritière [J] [K] épouse [G], un héritier [H] [K], et son conjoint survivant, une héritière [A] [F].

Jugements et procédures

Par jugement prononcé le 31 mai 2017, le tribunal de grande instance de Paris a ordonné l’ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de l’indivision successorale. Un jugement du 29 septembre 2021 a homologué un projet d’état liquidatif en date du 28 juillet 2020. L’héritier [H] [K] a interjeté appel de ce dernier jugement. Pendant l’instance d’appel, l’héritière [A] [F] épouse [K] est décédée le [Date décès 4] 2022.

Saisie conservatoire

Suivant une ordonnance sur requête en date du 29 mai 2024, le juge de l’exécution a autorisé les héritiers [P] [K] et [J] [K] épouse [G] à pratiquer, au préjudice de l’héritier [H] [K], une saisie conservatoire entre les mains d’un notaire, chargé de la vente d’un bien indivis immobilier, en garantie d’une créance évaluée provisoirement à 80 000 €, correspondant à la valeur d’un lingot d’or détenu par l’héritier [H] [K].

Demande de mainlevée

Par acte du 24 décembre 2024, l’héritier [H] [K] a assigné devant le juge de l’exécution les héritiers [P] [K] et [J] [K] épouse [G] pour obtenir la mainlevée de la saisie conservatoire, arguant que cette mesure est caduque et que la créance invoquée n’est pas fondée. Il a également sollicité des dommages et intérêts pour son préjudice.

Arguments des défendeurs

Les défendeurs ont soutenu que les demandes de l’héritier [H] [K] étaient infondées. Ils ont fait valoir qu’ils avaient respecté les exigences légales en signifiant des conclusions à la cour d’appel, mais le juge a considéré que ces démarches ne satisfaisaient pas aux prescriptions nécessaires.

Décision du juge de l’exécution

Le juge de l’exécution a déclaré caduque la saisie conservatoire pratiquée le 28 juin 2024, en raison de l’absence de démarches pour obtenir un titre exécutoire. Cette déclaration emporte mainlevée de la saisie. Le juge a également décidé qu’il n’y avait pas lieu à dommages et intérêts ni à l’application de l’article 700 du code de procédure civile, condamnant les héritiers [P] [K] et [J] [K] épouse [G] aux dépens.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la caducité de la saisie conservatoire et ses conséquences ?

La saisie conservatoire pratiquée le 28 juin 2024 est déclarée caduque en raison du non-respect des exigences de l’article R 511-7 du code des procédures civiles d’exécution.

Cet article stipule que le créancier doit, dans le mois suivant l’exécution de la mesure, introduire une procédure ou accomplir les formalités nécessaires à l’obtention d’un titre exécutoire, à peine de caducité.

En l’espèce, les défendeurs ont signifié des conclusions après l’ordonnance de clôture, ce qui ne satisfait pas aux prescriptions de cet article.

Ainsi, la caducité de la saisie entraîne nécessairement sa mainlevée, ce qui signifie que la saisie ne peut plus produire d’effets juridiques.

Quelles sont les conditions pour obtenir des dommages et intérêts dans ce contexte ?

Le juge a décidé qu’il n’y avait pas lieu d’allouer des dommages et intérêts au demandeur, Monsieur [H] [K], en raison de la caducité de la saisie conservatoire.

Pour qu’une demande de dommages et intérêts soit fondée, il faut prouver un préjudice direct et certain résultant d’une faute ou d’une illégalité.

Dans ce cas, le juge a estimé que les circonstances de la cause ne justifiaient pas une telle allocation, ce qui signifie que le demandeur n’a pas réussi à démontrer l’existence d’un préjudice.

De plus, l’article 700 du code de procédure civile, qui permet d’allouer une indemnité à la partie qui a gagné, n’a pas été appliqué ici, renforçant l’idée que la demande de dommages et intérêts était infondée.

Quelles sont les implications de l’ordonnance de clôture sur la procédure ?

L’ordonnance de clôture intervenue le 2 juillet 2024 a des implications significatives sur la procédure d’appel en cours.

Elle signifie que les parties ne peuvent plus soumettre de nouvelles demandes ou conclusions à la cour d’appel, sauf si cette ordonnance est révoquée.

Les défendeurs ont tenté de faire valoir que la signification de leurs conclusions après l’ordonnance de clôture était valide, mais le juge a considéré que cela ne satisfaisait pas aux exigences légales.

Ainsi, l’ordonnance de clôture a eu pour effet de rendre caduque la saisie conservatoire, car les défendeurs n’ont pas respecté les délais et formalités imposés par la loi.

Quelles sont les conséquences de la décision du juge de l’exécution ?

La décision du juge de l’exécution a plusieurs conséquences juridiques importantes.

Tout d’abord, la saisie conservatoire est déclarée caduque, ce qui signifie qu’elle ne peut plus être exécutée et n’a plus d’effet sur les biens du débiteur.

Ensuite, cette déclaration de caducité entraîne automatiquement la mainlevée de la saisie, permettant ainsi à Monsieur [H] [K] de retrouver la pleine disposition de ses biens.

Enfin, le juge a condamné les défendeurs aux dépens, ce qui signifie qu’ils devront supporter les frais liés à la procédure, renforçant ainsi la notion de responsabilité dans le cadre de la saisie conservatoire.

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS


REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
N° RG 25/80004
N° Portalis 352J-W-B7J-C6WY7

N° MINUTE :

CE aux avocats
CCC aux parties en LRAR
Le :
PÔLE DE L’EXÉCUTION
JUGEMENT rendu le 05 février 2025

DEMANDEUR

Monsieur [H] [M] [U] [K]
né le [Date naissance 1] 1957 à [Localité 10]
[Adresse 2]
[Localité 10]

représenté par Me Cyrielle DUFLOUX, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #D0356

DÉFENDEURS

Monsieur [P] [U] [E] [R] [K]
né le [Date naissance 5] 1951 à [Localité 10]
[Adresse 9]
[Localité 11]

Madame [J] [A] [V] [W] [K] épouse [G]
née le [Date naissance 3] 1954 à [Localité 10]
[Adresse 7]
[Localité 10]

représentés par Me Florence PETER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #D0934

JUGE : M. Michel LAMHOUT, Vice-président, juge de l’Exécution par délégation du Président du Tribunal judiciaire de PARIS.

GREFFIER : Madame Amel OUKINA, greffière principale,

DÉBATS : à l’audience du 15 Janvier 2025 tenue publiquement,

JUGEMENT : rendu publiquement par mise à disposition au greffe, contradictoire, susceptible d’appel

FAITS ET PROCÉDURE :

Monsieur [U] [K] est décédé le [Date décès 6] 2015, laissant pour héritiers ses enfants, à savoir Monsieur [P] [K], Madame [J] [K] épouse [G], Monsieur [H] [K], et son conjoint survivant Madame [A] [F].

Par jugement prononcé le 31 mai 2017, le tribunal de grande instance de Paris a ordonné l’ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de l’indivision successorale.

Par jugement du 29 septembre 2021, le tribunal de grande instance de Paris a homologué un projet d’état liquidatif en date du 28 juillet 2020.

Monsieur [H] [K] a interjeté appel de ce dernier jugement.

Madame [A] [F] épouse [K] est décédée le [Date décès 4] 2022 pendant le cours de l’instance d’appel.

Suivant une ordonnance sur requête en date du 29 mai 2024, le juge de l’exécution a autorisé Monsieur [P] [K] et Madame [J] [K] épouse [G] à pratiquer, au préjudice de Monsieur [H] [K], une saisie conservatoire entre les mains de Maître [S] [L], notaire à [Localité 12], chargé de la vente d’un bien indivis immobilier entre les consorts [K], non compris dans la masse successorale, situé [Adresse 8], moyennant un prix de 685 000 €, et ce en garantie d’une créance évaluée provisoirement à 80 000 €, correspondant à la valeur d’un lingot d’or (dépendant de la masse successorale) détenu par Monsieur [H] [K], outre la part de ce dernier dans les diverses dépenses acquittées par les requérants au titre du passif successoral.

La saisie conservatoire a été pratiquée auprès du notaire susmentionné le 28 juin 2024.

Par acte du 24 décembre 2024, Monsieur [H] [K] a assigné devant le juge de l’exécution Monsieur [P] [K] et Madame [J] [K] épouse [G] aux fins d’obtenir la mainlevée de la saisie conservatoire régularisée le 28 juin 2024 aux motifs que :
– cette mesure est caduque faute de toute démarche tendant à l’obtention d’un titre exécutoire,
– la créance invoquée à son encontre n’est pas fondée en son principe, ni menacée en son recouvrement.
Le demandeur sollicite également 5 000 € de dommages et intérêts en réparation de son préjudice, outre une indemnité de 2 500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Suivant conclusions soutenues à l’audience du 15 janvier 2025, les défendeurs font valoir que les demandes susmentionnées sont infondées.

MOTIFS ET DÉCISION :

Il importe de relever que dans le cadre de l’instance d’appel ayant trait à la liquidation de la succession de Monsieur [U] [K] (et dont il n’est pas démontré qu’elle a été étendue à la succession de son conjoint décédé le [Date décès 4] 2022), une ordonnance de clôture est intervenue le 2 juillet 2024.

Les saisissants font valoir qu’ils ont signifié le 6 juillet 2024 par RPVA des conclusions à la cour d’appel (lesquelles ont été signifiées le 12 juillet 2024 à Monsieur [H] [K]), aux termes desquelles ils sollicitent la conversion de la saisie conservatoire en saisie attribution, outre la révocation de l’ordonnance de clôture.

Ils en déduisent qu’ils se sont conformés aux exigences de l’article R 511-7 du code des procédures civiles d’exécution imposant au créancier, dans le mois qui suit l’exécution de la mesure, à peine de caducité, d’introduire une procédure ou accomplir les formalités nécessaires à l’obtention d’un titre exécutoire.

En l’occurrence, il convient de considérer que le dépôt et la signification de conclusions postérieures à l’ordonnance de clôture (que la cour d’appel n’est pas tenue de révoquer, de sorte qu’il n’est aucunement acquis qu’elle sera amenée à statuer sur les demandes qui auraient été formulées dans lesdites écritures) ne satisfait pas aux prescriptions de ce texte.

Il s’ensuit que la saisie conservatoire pratiquée le 28 juin 2024 en exécution de l’ordonnance sur requête rendue le 29 mai 2024 est caduque.

Ce constat emporte nécessairement mainlevée de ladite saisie.

Les circonstances de la cause ne justifient pas l’allocation de dommages et intérêts ainsi que l’application de l’article 700 du code de procédure civile au profit du demandeur.

PAR CES MOTIFS :

Le Juge de l’Exécution, statuant publiquement, par jugement contradictoire, en premier ressort, et par mise à disposition :

– Déclare caduque la saisie conservatoire pratiquée le 28 juin 2024, en exécution de l’ordonnance sur requête rendue le 29 mai 2024, entre les mains de Maître [Z] [S] [L], notaire à [Localité 12], au préjudice de Monsieur [H] [K],

– Dit que cette déclaration de caducité emporte mainlevée de ladite saisie,

– Dit n’y avoir lieu à dommages et intérêts et à application de l’article 700 du code de procédure civile,

– Condamne Monsieur [P] [K] et Madame [J] [K] épouse [G] aux dépens, outre les frais d’exécution,

LE GREFFIER LE JUGE DE L’EXÉCUTION


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