L’Essentiel : La société Monsanto détient un brevet européen sur une séquence d’ADN conférant une résistance à un herbicide dans le soja. Cependant, des producteurs argentins ont utilisé cette séquence dans la farine de soja, incitant Monsanto à saisir la Cour de justice européenne. Les juges ont statué que le brevet ne s’applique qu’à une invention exerçant sa fonction initiale. Étant donné que la séquence d’ADN était devenue un résidu dans la farine, elle n’était plus protégée. Ainsi, Monsanto ne peut interdire la commercialisation de cette farine contenant son invention à l’état de résidu.
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La société Monsanto est titulaire d’un brevet européen sur une séquence d’ADN qui, introduite dans l’ADN d’une plante de soja, la rend résistante à un herbicide. Ayant constaté que des producteurs argentins de farine de soja utilisaient une partie de l’ADN déposé, la société Monsato a saisi la Cour de justice européenne d’une question préjudicielle. Les juges européens ont considéré qu’un brevet européen ne peut être invoqué qu’à l’égard d’une invention exerçant effectivement la fonction pour laquelle elle est brevetée. En l’occurrence, la séquence d’ADN n’était plus protégée car se retrouvant à l’état de résidu dans la farine de soja, laquelle est une matière morte obtenue au terme de plusieurs opérations de traitement du soja. En conséquence, la protection conférée aux brevets européens est exclue lorsque l’information génétique a cessé d’exercer la fonction qui était la sienne dans la plante initiale dont elle est issue. En conclusion, Monsanto ne peut interdire, sur la base de la directive, la commercialisation de la farine de soja en provenance d’Argentine contenant son invention biotechnologique à l’état de résidu. Mots clés : ADN Thème : ADN A propos de cette jurisprudence : juridiction : Cour de justice des com. europ. | Date : 6 juillet 2010 | Pays : France |
Q/R juridiques soulevées :
Qu’est-ce qu’un brevet européen ?Un brevet européen est un droit de propriété intellectuelle qui confère à son titulaire le droit d’interdire à d’autres d’exploiter une invention sur le territoire des États membres de l’Office européen des brevets. Ce droit est accordé pour une durée maximale de 20 ans, à condition que l’invention soit nouvelle, implique une activité inventive et soit susceptible d’application industrielle. Les brevets européens sont régis par la Convention sur le brevet européen, qui a été signée en 1973 et est entrée en vigueur en 1977. Cette convention permet aux inventeurs de demander un brevet unique qui est valable dans plusieurs pays européens, simplifiant ainsi le processus de protection des inventions à l’échelle continentale. Pourquoi Monsanto a-t-elle saisi la Cour de justice européenne ?Monsanto a saisi la Cour de justice européenne pour clarifier si elle pouvait invoquer son brevet sur une séquence d’ADN dans le cas où celle-ci se retrouvait sous forme de résidu dans la farine de soja produite en Argentine. La question centrale était de savoir si la protection du brevet s’appliquait toujours lorsque l’invention avait perdu sa fonction initiale. Cette démarche visait à protéger les droits de propriété intellectuelle de Monsanto face à des pratiques commerciales qui pourraient nuire à ses intérêts économiques. En effet, la société souhaitait s’assurer qu’elle pouvait contrôler l’utilisation de sa technologie, même après transformation, afin de préserver sa position sur le marché. Quelle a été la conclusion de la Cour de justice européenne ?La Cour de justice européenne a conclu que la séquence d’ADN n’était plus protégée par le brevet, car elle ne remplissait plus la fonction pour laquelle elle avait été brevetée, étant devenue un résidu dans la farine de soja. Cette décision a été fondée sur l’idée que la protection des brevets ne s’applique que tant que l’invention conserve ses caractéristiques fonctionnelles. Ainsi, une fois que la séquence d’ADN a été transformée et ne peut plus exercer son rôle initial, elle ne peut plus être considérée comme une invention protégée. Cette conclusion a des implications importantes pour la manière dont les entreprises peuvent protéger leurs innovations dans le domaine de la biotechnologie. Quelles sont les implications de cette décision pour l’industrie biotechnologique ?Cette décision pourrait limiter la capacité des entreprises à revendiquer des droits de propriété intellectuelle sur des produits dérivés de leurs inventions, en particulier lorsque ces produits subissent des transformations qui altèrent leur fonction initiale. Cela soulève des questions sur la manière dont les entreprises peuvent protéger leurs innovations face à des pratiques commerciales internationales. Les entreprises pourraient devoir adapter leurs stratégies de protection des brevets pour tenir compte des transformations que leurs produits peuvent subir au cours de la chaîne de valeur. En conséquence, cela pourrait également influencer les investissements dans la recherche et le développement de nouvelles technologies, car les entreprises pourraient percevoir un risque accru lié à la protection de leurs inventions. ConclusionL’affaire Monsanto soulève des questions importantes sur la protection des innovations biotechnologiques et les droits de propriété intellectuelle. La décision de la Cour de justice européenne met en lumière les défis auxquels sont confrontées les entreprises dans un environnement commercial mondial, où les lois sur les brevets peuvent varier et où les produits peuvent être transformés de manière à éroder la protection des inventions. Cette situation appelle à une réflexion sur l’équilibre entre la protection des droits des inventeurs et la nécessité d’encourager l’innovation dans le secteur biotechnologique. Pour en savoir plus, vous pouvez consulter le document complet [ici](https://www.uplex.fr/contrats/wp-content/uploads/1members/pdf/CJCE_6_7_2010_Monsato.pdf). |
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