« Avis de tempête » sur un format d’émission | Affaire FTV

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« Avis de tempête » sur un format d’émission | Affaire FTV

L’Essentiel : Une société de production a perdu son action en contrefaçon contre France Télévisions concernant l’émission « Météo à la carte ». Elle avait proposé une adaptation française du Great British Weather Show, mais n’a pas réussi à prouver l’originalité de son format. La cour a souligné que la protection des droits d’auteur ne s’applique qu’à la forme originale d’une œuvre, et non à des concepts ou idées. Les éléments revendiqués, tels que l’interaction avec les téléspectateurs, étaient jugés trop banals pour justifier une protection. En conséquence, l’action en contrefaçon a été déclarée irrecevable.

Adaptation d’un format préexistant

Une société production a été déboutée de son action en contrefaçon de format d’émission contre France Télévisions (émission « Météo à la carte »). A l’origine, la société s’était rapprochée du diffuseur public pour lui proposer la déclinaison française du Great British Weather Show (TGBWS) diffusé sur la chaîne BBC.

Protection des formats d’émission

La société a agi en contrefaçon de droits d’auteur en visant la protection des œuvres audiovisuelles prévu par l’article L 112-2 6° du code de la propriété intellectuelle et la protection jurisprudentielle attachée au format d’une émission audiovisuelle. L’originalité du format reposerait sur la participation des téléspectateurs qui envoient des photographies du ciel de la région dans laquelle ils habitent, qui structure l’émission composée d’une alternance de reportages sur la thématique de la météo.

Il est acquis que la propriété intellectuelle ne protège pas les idées ou le concept mais seulement la forme originale sous laquelle ils sont exprimés. L’action en contrefaçon a donc été examinée non pas au regard de la protection d’un concept mais du format ou de l’émission.

Le format doit être entendu comme étant une sorte de mode d’emploi qui décrit un déroulement formel, toujours le même, consistant en une succession de séquences dont le découpage est préétabli, la création consistant, en dehors de la forme matérielle, dans l’enchaînement des situations et des scènes, c’est-à-dire dans la composition du plan, comprenant un point de départ, une action et un dénouement, le format constituant un cadre au sein duquel l’œuvre va pouvoir se développer.

Selon la formule consacrée, conformément à l’article L 111-1 du code de la propriété intellectuelle, l’auteur d’une œuvre de l’esprit jouit sur cette œuvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous comportant des attributs d’ordre intellectuel et moral ainsi que des attributs d’ordre patrimonial.  La protection d’une œuvre de l’esprit est acquise à son auteur du seul fait de la création d’une forme originale en ce sens qu’elle porte l’empreinte de la personnalité de son auteur et n’est pas la banale reprise d’un fonds commun non appropriable. Dans ce cadre toutefois, il appartient à celui qui se prévaut d’un droit d’auteur, de définir et d’expliciter les contours de l’originalité qu’il allègue.

Seul l’auteur, dont le juge ne peut suppléer la carence, est en mesure d’identifier les éléments traduisant sa personnalité et qui justifient son monopole.

Contrefaçon exclue

La société de production n’a pas suffisamment défini  ce qu’elle revendiquait dans son  format. En effet les scripts censés constituer le format de l’émission n’étaient que la reprise des différents moments qui se succèdent dans les épisodes et des commentaires des séquences retranscrits dans la superposition des photographies de la séquence d’envoi des photographies du ciel.  Un format n’est protégeable que lorsqu’il contient des règles suffisamment précises et détaillées pour permettre de déterminer la forme des émissions futures, ce qui n’était pas le cas en l’espèce, indépendamment du fait que les scripts et les DVD aient pu servir de base à un projet d’adaptation de l’émission en France.

Participation du public : un concept déjà connu

La société de production ne revendiquait pas la propriété du thème de la météo ni l’interactivité mais exposait qu’aucune émission grand public et à fréquence régulière n’évoquait le thème de la météo en France avant son émission et soutient qu’il s’agissait là d’un concept original. Là aussi, la société de production n’a pas déterminé précisément les traits caractéristiques du programme télévisuel qui porteraient l’empreinte de son activité créatrice.

Le fait que l’émission soit composée d’une succession de reportages sur les problématiques quotidiennes liées à la météo alternées par un fil rouge, à savoir l’envoi des photographies du ciel par les téléspectateurs est un concept insuffisant pour emporter la reconnaissance de droits d’auteur à défaut de précisions sur le contour de l’émission revendiqué.

La séquence interactive consistant à appeler les spectateurs tout au long de l’émission qui dure une heure à envoyer des photographies du ciel de leur région en direct afin de recouvrir à la fin du programme la carte du pays installée sur un plateau en plein air relève de l’idée.  L’interactivité avec les téléspectateurs est un procédé usuel dans le paysage audiovisuel actuel français et à l’étranger qui est banal et insusceptible de protection.

Il s’agissait en réalité d’un talk-show, d’une émission de divertissement en plein air sur la météo, sujet particulièrement cher aux anglais, à destination d’un public familial qui mêle l’humour à des informations classiques sur les phénomènes météorologiques courants tels les nuages, le soleil, les tempêtes. En conséquence l’action en contrefaçon du format ou de l’émission TGBWS a été jugée irrecevable.

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Q/R juridiques soulevées :

Quelle était la raison de l’action en contrefaçon de la société de production contre France Télévisions ?

La société de production a intenté une action en contrefaçon de format d’émission contre France Télévisions en raison de la diffusion de l’émission « Météo à la carte », qu’elle considérait comme une adaptation non autorisée de son concept inspiré du Great British Weather Show (TGBWS) de la BBC.

Elle avait initialement proposé à France Télévisions de créer une version française de ce programme, mettant en avant l’originalité de son format, qui incluait la participation des téléspectateurs à travers l’envoi de photographies du ciel de leur région.

Cette interaction était censée structurer l’émission, qui alternait entre des reportages sur la météo et des contributions du public. Cependant, la société a finalement été déboutée, car le tribunal a jugé que son format n’était pas suffisamment original pour être protégé.

Quelles sont les conditions de protection des formats d’émission selon le droit d’auteur ?

La protection des formats d’émission repose sur plusieurs principes du droit d’auteur, notamment l’originalité et la forme sous laquelle une idée est exprimée. Selon l’article L 112-2 6° du code de la propriété intellectuelle, la protection ne s’applique pas aux idées ou concepts en eux-mêmes, mais uniquement à la manière dont ils sont présentés.

Pour qu’un format soit protégé, il doit être défini de manière précise et détaillée, permettant ainsi de déterminer la structure des émissions futures. Cela implique que le format doit inclure un enchaînement de séquences et des règles claires qui le distinguent des autres formats existants.

En l’espèce, la société de production n’a pas réussi à démontrer que son format contenait des éléments suffisamment distinctifs pour justifier une protection, ce qui a conduit à l’irrecevabilité de son action en contrefaçon.

Pourquoi la société de production n’a-t-elle pas réussi à prouver la contrefaçon ?

La société de production n’a pas réussi à prouver la contrefaçon car elle n’a pas suffisamment défini les éléments constitutifs de son format. Les scripts qu’elle a présentés étaient essentiellement des reprises des moments de l’émission, sans apporter de détails sur la structure ou les règles précises qui auraient pu caractériser son format.

Le tribunal a noté que pour qu’un format soit protégeable, il doit contenir des éléments distinctifs et des règles claires permettant de déterminer la forme des émissions futures. En l’occurrence, les éléments fournis par la société étaient trop vagues et ne permettaient pas de distinguer son format des autres émissions existantes.

De plus, le fait que l’interactivité avec le public soit un procédé courant dans le paysage audiovisuel a également joué en défaveur de la société, car cela a été considéré comme un concept banal et non original.

Quelles étaient les caractéristiques du programme « Météo à la carte » qui ont été jugées insuffisantes pour la protection par le droit d’auteur ?

Le programme « Météo à la carte » a été jugé insuffisant pour la protection par le droit d’auteur en raison de son manque d’originalité et de spécificité. Bien que la société de production ait soutenu que l’émission offrait une approche unique de la météo en France, le tribunal a constaté que les éléments présentés ne constituaient pas une œuvre originale.

La structure de l’émission, qui alternait des reportages sur des problématiques météorologiques et des contributions du public, était considérée comme un concept déjà connu et largement utilisé dans d’autres formats.

L’interactivité, bien que présente, était jugée banale et ne suffisait pas à établir un droit d’auteur. En conséquence, le tribunal a conclu que l’émission ne portait pas l’empreinte de l’activité créatrice de la société de production, ce qui a conduit à l’irrecevabilité de son action en contrefaçon.


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