Atteinte à l’image et contrefaçon : l’exception de nullité de l’assignation

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Atteinte à l’image et contrefaçon : l’exception de nullité de l’assignation

Une action fondée sur l’invocation de faits susceptibles de porter atteinte à l’image ou à la réputation d’une personne, même morale, relève de la diffamation et, de ce fait, ne peut être poursuivie que sur le fondement de la loi du 29 juillet 1881, en sorte que l’assignation qui ne respecte pas les conditions de cette même loi doit être annulée (en ce sens Cour de cassation, 1ère chambre civile, 26 septembre 2019, n° 18-18.939 et 18-18.944).

Toutefois, le demandeur reste autorisé à invoquer un fait susceptible de porter atteinte à son image ou à sa réputation, sur des actes argués de contrefaçon de droits d’auteur dont une des conséquences serait un préjudice d’image dont l’existence pour une personne morale est admise (en ce sens Cour de cassation, 1ère chambre civile, 21 mars 2018, n° 17-14.582). Ces demandes n’ont pas à être requalifiées et l’exception de nullité sera alors rejetée.

L’article 12 du code de procédure civile prévoit que le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables.Il doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s’arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée.

Toutefois, il ne peut changer la dénomination ou le fondement juridique lorsque les parties, en vertu d’un accord exprès et pour les droits dont elles ont la libre disposition, l’ont lié par les qualifications et points de droit auxquels elles entendent limiter le débat.

Le litige né, les parties peuvent aussi, dans les mêmes matières et sous la même condition, conférer au juge mission de statuer comme amiable compositeur, sous réserve d’appel si elles n’y ont pas spécialement renoncé.

Aux termes de l’article 29 alinéa 1er de la loi du 29 juillet 1881 sur la presse, toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé est une diffamation. La publication directe ou par voie de reproduction de cette allégation ou de cette imputation est punissable, même si elle est faite sous forme dubitative ou si elle vise une personne ou un corps non expressément nommés, mais dont l’identification est rendue possible par les termes des discours, cris, menaces, écrits ou imprimés, placards ou affiches incriminés.

Conformément à l’article 53 de la même loi, la citation précisera et qualifiera le fait incriminé, elle indiquera le texte de loi applicable à la poursuite.Si la citation est à la requête du plaignant, elle contiendra élection de domicile dans la ville où siège la juridiction saisie et sera notifiée tant au prévenu qu’au ministère public.

Toutes ces formalités seront observées à peine de nullité de la poursuite.

L’article 834 du code de procédure civile dispose que dans tous les cas d’urgence, le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence, peuvent ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend.

L’article 835 du même code prévoit que le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.Dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, ils peuvent accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire.

Résumé de l’affaire : La société Jours de Passions, éditrice du magazine « Jours de chasse », a assigné la société Éditions Les Arènes en raison de la publication imminente d’un livre intitulé « Les nouveaux seigneurs », qui reproduit partiellement quatre articles de son magazine sans autorisation. Jours de Passions a demandé la suspension de la publication, le retour des exemplaires déjà distribués, des dommages et intérêts, ainsi que des informations sur le nombre d’exemplaires imprimés. En défense, Éditions Les Arènes a contesté la validité de l’assignation, arguant que les demandes relevaient d’une action en diffamation et que la matérialité des droits d’auteur n’était pas établie. Le juge des référés a rejeté l’exception de nullité de l’assignation, a déclaré qu’il n’y avait pas lieu à référé pour le reste des demandes, et a condamné Jours de Passions aux dépens ainsi qu’à verser 3000 euros à Éditions Les Arènes.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la nature de l’assignation et les conséquences de son éventuelle nullité ?

L’assignation délivrée par la société Jours de Passions vise à obtenir la suspension de la publication du livre “Les nouveaux seigneurs” en raison d’une prétendue contrefaçon de droits d’auteur.

Selon l’article 12 du code de procédure civile, le juge doit trancher le litige conformément aux règles de droit applicables. Il doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s’arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée.

Cependant, si l’assignation ne respecte pas les conditions de la loi du 29 juillet 1881 sur la presse, elle peut être déclarée nulle. En effet, l’article 29 alinéa 1er de cette loi stipule que toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération d’une personne est considérée comme diffamation.

Ainsi, si l’assignation est fondée sur des faits susceptibles de porter atteinte à l’image de la société Jours de Passions, elle doit respecter les conditions de cette loi, sous peine de nullité.

En l’espèce, le juge a rejeté l’exception de nullité de l’assignation, considérant que les demandes de la société Jours de Passions ne relevaient pas de la diffamation, mais d’une action en contrefaçon de droits d’auteur.

Quelles sont les conditions de la contrefaçon de droits d’auteur ?

La contrefaçon de droits d’auteur est définie par le code de la propriété intellectuelle. Selon l’article L.111-1, l’auteur d’une œuvre de l’esprit jouit, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous.

Ce droit comprend des attributs d’ordre intellectuel et moral, ainsi que des attributs d’ordre patrimonial. L’article L.122-1 précise que le droit d’exploitation de l’auteur inclut le droit de représentation et le droit de reproduction.

Pour qu’il y ait contrefaçon, il faut que la reproduction d’une œuvre soit effectuée sans l’autorisation de l’auteur ou de ses ayants droit. En l’espèce, la société Jours de Passions allègue que la société Éditions Les Arènes a reproduit des articles de son magazine sans autorisation.

Cependant, la société Éditions Les Arènes conteste l’originalité des articles invoqués et leur protection par le droit d’auteur. En vertu de la jurisprudence, il appartient à la société Jours de Passions de démontrer l’originalité des œuvres qu’elle prétend protégées.

En l’absence de telles caractéristiques, la contestation de la société Éditions Les Arènes est considérée comme sérieuse, ce qui empêche le juge des référés d’ordonner les mesures demandées.

Quelles sont les mesures que peut ordonner le juge des référés en matière de droits d’auteur ?

Le juge des référés peut ordonner diverses mesures en cas d’urgence, conformément aux articles 834 et 835 du code de procédure civile. L’article 834 stipule que le juge peut ordonner toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou qui justifient l’existence d’un différend.

L’article 835 précise que même en présence d’une contestation sérieuse, le juge peut prescrire des mesures conservatoires ou de remise en état pour prévenir un dommage imminent ou faire cesser un trouble manifestement illicite.

Dans le cadre d’une action en contrefaçon de droits d’auteur, le juge peut ordonner la suspension de la commercialisation d’une œuvre litigieuse, le retour des exemplaires distribués, ainsi que la communication d’informations sur la distribution de l’œuvre.

Cependant, pour que ces mesures soient ordonnées, il faut que l’existence des droits d’auteur invoqués ne soit pas sérieusement contestable. Dans le cas présent, la société Jours de Passions n’a pas réussi à établir l’originalité des articles, ce qui a conduit le juge à rejeter ses demandes.

Quels sont les critères pour accorder des dommages et intérêts en cas de contrefaçon ?

Les dommages et intérêts en cas de contrefaçon de droits d’auteur sont régis par l’article 1382 du code civil, qui impose de prouver l’existence d’un préjudice.

La société Jours de Passions a demandé 5000 euros à titre de dommages et intérêts provisionnels, arguant que la publication imminente du livre litigieux portait atteinte à ses droits patrimoniaux et à son image.

Pour obtenir des dommages et intérêts, la partie demanderesse doit démontrer l’existence d’un préjudice réel et chiffrable. En l’espèce, le juge a constaté que la société Jours de Passions n’avait pas établi l’originalité des articles, ce qui a conduit à un rejet de ses demandes.

De plus, le préjudice allégué doit être imminent et susceptible de causer un dommage irréparable. La société Jours de Passions a évoqué une situation financière critique, mais n’a pas fourni de preuves suffisantes pour justifier l’octroi de dommages et intérêts.

Quelles sont les conséquences des frais de justice dans cette affaire ?

Les frais de justice sont régis par l’article 696 du code de procédure civile, qui stipule que la partie perdante est condamnée aux dépens, sauf décision motivée du juge.

Dans cette affaire, la société Jours de Passions, ayant perdu son procès, a été condamnée à payer les dépens. De plus, l’article 700 du même code permet au juge de condamner la partie perdante à verser une somme à l’autre partie pour couvrir les frais exposés et non compris dans les dépens.

Le juge a décidé de condamner la société Jours de Passions à verser 3000 euros à la société Éditions Les Arènes à ce titre. Cette décision est fondée sur l’équité et la situation économique de la partie condamnée.

Ainsi, la société Jours de Passions devra supporter les frais de justice, ce qui peut avoir un impact significatif sur sa situation financière déjà précaire.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

11 septembre 2024
Tribunal judiciaire de Paris
RG n°
24/56093
TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

N° RG 24/56093 – N° Portalis 352J-W-B7I-C5XQH

N° : 1/MC

Assignation du :
05 Septembre 2024

[1]

[1] 2 Copies exécutoires
délivrées le :

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
rendue le 11 septembre 2024

par Jean-Christophe GAYET, Premier Vice-Président adjoint
au Tribunal judiciaire de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal,

Assisté de Marion COBOS, Greffier.
DEMANDERESSE

Société JOURS DE PASSIONS
[Adresse 2]
[Localité 4]

représentée par Maître Maud LAMBERT de la SELEURL Maud Lambert Selarlu, avocat au barreau de PARIS – R207

DEFENDERESSE

S.A.S. EDITIONS LES ARENES
[Adresse 1]
[Localité 3]

représentée par Maître Vincent TOLEDANO, avocat au barreau de PARIS – #A0859

DÉBATS

A l’audience du 10 Septembre 2024, tenue publiquement, présidée par Jean-Christophe GAYET, Premier Vice-Président adjoint, assisté de Marion COBOS, Greffier,

Nous, Président,

Après avoir entendu les conseils des parties comparantes,

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

La société Jours de Passions se présente comme éditrice du magazine “Jours de chasse”, disponible en version papier et numérique.
La société Éditions Les Arènes se présente comme une maison d’édition littéraire généraliste.
Ayant été informée fin août 2024 que la société Éditions Les Arènes programmait, le 12 septembre 2024, la publication d’un livre intitulé “Les nouveaux seigneurs”, comportant la reproduction à tout le moins partielle de quatre articles publiés dans le magazine “Jours de chasse” sur lequel elle détient des droits d’auteur portait atteinte à ses droits, la société Jours de Passions a été autorisée, par ordonnance du 4 septembre 2024, à la faire assigner à heure indiquée.
Par acte de commissaire de justice du 5 septembre 2024, la société Jours de Passions a fait assigner la société Éditions Les Arènes à heure indiquée à l’audience du 10 septembre 2024 du juge des référés de ce tribunal, à titre principal, en suspension de la publication.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Selon son assignation et les moyens développés oralement à l’audience, la société Jours de Passions demande au juge des référés de :- rejeter l’exception de nullité de l’assignation
– dire que la commercialisation du livre “Les nouveaux seigneurs” de [R] [W] par la société Éditions Les Arènes doit être suspendue le temps qu’il soit justifié par cette société de la suppression des reproductions illicites de ce livre
– ordonner à la société Éditions Les Arènes d’organiser le retour des exemplaires du livre “Les nouveaux seigneurs” remis aux journalistes en pré-lecture et déjà distribués aux vendeurs et à justifier de ce retour dans les cinq jours ouvrés de la décision à intervenir, sous astreinte de 500 euros par exemplaire
– se réserver la liquidation de l’astreinte
– condamner la société Éditions Les Arènes à lui verser 5000 euros à titre de dommages et intérêts provisionnels en réparation de l’atteinte portée à ses droits patrimoniaux
– communiquer le nombre d’exemplaires du livre “Les nouveaux seigneurs” imprimés, publiés et distribués à d’autres personnes que son auteur
– dire n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire
– condamner la société Éditions Les Arènes à lui verser 5000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens.

Au soutien de ses demandes, la société Jours de Passions fait principalement valoir que :- les faits sont présentés de manière biaisée par la défenderesse, tandis que ses demandes sont fondées sur la contrefaçon de droits d’auteur en raison de la reproduction à l’identique des articles sur lesquels elle revendique ces droits, non sur une quelconque diffamation

– le juge des référés n’a pas à statuer sur la titularité des droits d’auteur transmis par les éventuels auteurs, dès lors qu’elle établit que les articles litigieux ont été publiés au nom du magazine dont elle est propriétaire et les reproduit en mentionnant ce même nom, bénéficiant ainsi de la présomption de titularité des droits patrimoniaux d’auteur qu’elle revendique compte tenu de cette publication
– le livre “Les nouveaux seigneurs” contient en son milieu un feuillet de photos incluant la reproduction non autorisée de 17 pages d’articles, selon elle originaux, antérieurement publiés dans le magazine “Jours de chasse”, cette publication étant étrangère à toute revue de presse
– outre l’atteinte à ses droits patrimoniaux d’auteur, la publication imminente de ce livre comporte un risque d’atteinte à sa réputation et à son image compte tenu que les articles reproduits ont été réalisés avec la collaboration des propriétaires des domaines de chasse concernés en lien avec la ligne éditoriale du magazine “Jours de chasse”, tandis que le livre litigieux les reproduit au soutien de propos polémiques et vindicatifs à l’encontre de ces mêmes propriétaires
– la reproduction des articles litigieux n’était pas nécessaire pour débattre du sujet du livre et le choix de reproductions de photographies de familles, de proches et de trophées de chasse plutôt que des domaines de chasse manifeste la volonté de la société défenderesse de dévaloriser les sujets traités par le magazine “Jour de chasse” et laisse entendre qu’elle a autorisé ces reproductions, voire cautionné les propos de l’auteur
– depuis la crise du Covid-19 sa situation financière est critique, en sorte que l’atteinte à son image et à sa réputation met en péril son existence justifiant tant les mesures de suspension et de retrait du livre litigieux que la provision et la communication d’informations qu’elle réclame
– contrairement aux communiqués de presse opposés par la défenderesse, la publication du livre litigieux est imminente compte tenu des commandes en ligne dont elle établit la matérialité.

Dans ses conclusions visées à l’audience et les moyens développés oralement à l’audience, la société Éditions Les Arènes demande au juge des référés de :- avant toute défense au fond, requalifier l’action et déclarer nulle l’assignation délivrée par la société Jours de Passions le 5 septembre 2024
– à défaut et à titre subsidiaire, dire n’y avoir lieu à référé et débouter la société Jours de Passions de toutes ses demandes, irrecevables et mal fondées
– condamner la société Jours de Passions à lui payer 3000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

En défense, la société oppose que :- les demandes relèvent en réalité d’une action en diffamation, compte tenu que la demanderesse allègue une atteinte à sa réputation et à son image, imposant la requalification de l’action, dont les conditions de validité n’ont pas été respectées, devant conduire à la nullité de l’assignation
– la matérialité même des faits n’est pas établie, dans la mesure où la demanderesse ne produit aucune pièce établissant qu’elle est titulaire des droits d’auteur sur les articles et les photographies qu’elle invoque
– l’originalité des articles invoqués n’est pas démontrée, la demanderesse n’établissant pas en quoi ils seraient éligibles à la protection par le droit d’auteur
– la contrefaçon alléguée est inexistante, dans la mesure où le livre litigieux n’est pas actuellement paru et qu’elle a décidé d’en reporter la publication
– la demanderesse ne lui a adressé aucune mise en demeure préalable à la saisine du juge des référés, malgré leurs échanges antérieurs à la demande de saisine de la juridiction en extrême urgence
– elle n’a fait qu’user de l’exception de revue de presse qui autorise la publication des extraits d’articles en cause sans l’autorisation de leurs auteurs ou ayants droit
– la liberté d’expression doit primer sur une éventuelle atteinte aux droits d’auteur invoqués en demande, compte tenu du critère de gravité de l’atteinte aux droits d’auteur que la publication supposerait, lequel n’est pas rempli compte tenu que l’éventuelle atteinte alléguée pourrait être réparée pécuniairement
– le préjudice invoqué est inexistant en raison de l’ancienneté des pièces produites au soutien de sa situation financière et du fait qu’aucune perte financière n’existe compte tenu de l’absence de toute vente du livre litigieux.

MOTIVATION

1 – Sur l’exception de nullité de l’assignation

L’article 12 du code de procédure civile prévoit que le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables.Il doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s’arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée.

Toutefois, il ne peut changer la dénomination ou le fondement juridique lorsque les parties, en vertu d’un accord exprès et pour les droits dont elles ont la libre disposition, l’ont lié par les qualifications et points de droit auxquels elles entendent limiter le débat.

Le litige né, les parties peuvent aussi, dans les mêmes matières et sous la même condition, conférer au juge mission de statuer comme amiable compositeur, sous réserve d’appel si elles n’y ont pas spécialement renoncé.

Aux termes de l’article 29 alinéa 1er de la loi du 29 juillet 1881 sur la presse, toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé est une diffamation. La publication directe ou par voie de reproduction de cette allégation ou de cette imputation est punissable, même si elle est faite sous forme dubitative ou si elle vise une personne ou un corps non expressément nommés, mais dont l’identification est rendue possible par les termes des discours, cris, menaces, écrits ou imprimés, placards ou affiches incriminés.

Conformément à l’article 53 de la même loi, la citation précisera et qualifiera le fait incriminé, elle indiquera le texte de loi applicable à la poursuite.Si la citation est à la requête du plaignant, elle contiendra élection de domicile dans la ville où siège la juridiction saisie et sera notifiée tant au prévenu qu’au ministère public.
Toutes ces formalités seront observées à peine de nullité de la poursuite.

Il en résulte qu’une action fondée sur l’invocation de faits susceptibles de porter atteinte à l’image ou à la réputation d’une personne, même morale, relève de la diffamation et, de ce fait, ne peut être poursuivie que sur le fondement de la loi du 29 juillet 1881, en sorte que l’assignation qui ne respecte pas les conditions de cette même loi doit être annulée (en ce sens Cour de cassation, 1ère chambre civile, 26 septembre 2019, n° 18-18.939 et 18-18.944).
L’article 834 du code de procédure civile dispose que dans tous les cas d’urgence, le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence, peuvent ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend.
L’article 835 du même code prévoit que le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.Dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, ils peuvent accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire.

En application de l’article L.111-1 du code de la propriété intellectuelle, l’auteur d’une œuvre de l’esprit jouit sur cette œuvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous ; ce droit comporte des attributs d’ordre intellectuel et moral ainsi que des attributs d’ordre patrimonial.
Selon l’article L.122-1 du même code, le droit d’exploitation appartenant à l’auteur comprend le droit de représentation et le droit de reproduction.
Au cas présent, la société Jours de Passions invoque des droits d’auteur qu’elle détient de quatre articles publiés par le magazine “Jours de chasse” dont elle est propriétaire, ce dont elle justifie par un communique de presse du 5 juillet 2017 (sa pièce n°1), non contesté en défense.
Elle argue, ensuite, d’une reproduction non autorisée de tout ou partie de ces articles dans le livre litigieux, qu’elle affirme être à paraître le 12 septembre 2024, en sorte que l’urgence à empêcher l’atteinte aux droits d’auteur qu’elle invoque s’en trouverait justifiée.
Ce n’est qu’au titre du préjudice, qu’elle qualifie d’imminent et susceptible de porter atteinte à sa survie, compte tenu des conséquences pécuniaires qui pourraient en résulter, qu’elle expose un risque d’atteinte à son image et à sa réputation (pages 7 et 9 de son assignation).

Ainsi, elle ne fonde pas son action sur l’invocation d’un fait susceptible de porter atteinte à son image ou à sa réputation, mais sur des actes argués de contrefaçon de droits d’auteur dont une des conséquences serait un préjudice d’image dont l’existence pour une personne morale est admise (en ce sens Cour de cassation, 1ère chambre civile, 21 mars 2018, n° 17-14.582).
Dès lors, les demandes de la société Jours de Passions n’ont pas à être requalifiées et l’exception de nullité de la société Éditions Les Arènes sera rejetée.
2 – Sur les demandes principales en suspension de commercialisation et retour des exemplaires distribués

L’article 834 du code de procédure civile dispose que dans tous les cas d’urgence, le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence, peuvent ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend.
L’article 835 du même code prévoit que le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.Dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, ils peuvent accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire.

En application de l’article L.111-1 du code de la propriété intellectuelle, l’auteur d’une œuvre de l’esprit jouit sur cette œuvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous ; ce droit comporte des attributs d’ordre intellectuel et moral ainsi que des attributs d’ordre patrimonial.
Selon l’article L.122-1 du même code, le droit d’exploitation appartenant à l’auteur comprend le droit de représentation et le droit de reproduction.
Il en résulte que la protection d’une œuvre de l’esprit est acquise à son auteur sans formalité et du seul fait de la création d’une forme originale en ce sens qu’elle porte l’empreinte de sa personnalité et n’est pas la banale reprise d’un fonds commun non appropriable (en ce sens Cour de cassation, 1ère chambre civile, 28 novembre 2012, n° 11-20.531).
Lorsque la protection par le droit d’auteur est contestée en défense, l’originalité d’une œuvre doit être explicitée par celui qui s’en prétend l’auteur, seul ce dernier étant à même d’identifier les éléments traduisant sa personnalité. En effet, le principe de la contradiction prévu à l’article 16 du code de procédure civile commande que le défendeur puisse connaître précisément les caractéristiques revendiquées de l’œuvre qui fondent l’atteinte alléguée et apporter la preuve de l’absence d’originalité de l’œuvre.
L’originalité des œuvres éligibles à la protection au titre du droit d’auteur n’est pas une condition de recevabilité de l’action en contrefaçon, ce dont il se déduit qu’elle constitue une condition de fond permettant d’en apprécier le bien fondé (en ce sens Cour de cassation, chambre commerciale, 29 janvier 2013, n°11-27.351).
En l’occurrence, force est de constater que si la société Jours de Passions invoque des droits d’auteur sur les articles : “invitation au château de [8] chez [Z] [A]” paru au printemps 2012, “chez [J] [N] à [7] en Sologne” paru au printemps 2016, “chez [T] et [O] [V] au Domaine [6]” paru à l’été 2016, et “chez [Y] et [B] [S] [5] en Sologne” paru à l’hiver 2016, elle n’articule aucune caractéristique originale propre à chacun de ces articles.
Or, dans la mesure où la société Éditions Les Arènes conteste l’originalité des articles invoqués et leur protection par le droit d’auteur, il revenait à la demanderesse d’exposer ces caractéristiques susceptibles de fonder, à tout le moins de manière vraisemblable s’agissant d’un référé, les droits d’auteur qu’elle invoque.
À défaut de présenter, fût-ce succinctement, de telles caractéristiques, la société Éditions Les Arènes oppose aux demandes de la société Jours de Passions une contestation sérieuse de l’existence des droits d’auteur invoqués, les faisant échapper à la compétence du juge des référés.
En conséquence, l’ensemble des demandes de la société Jours de Passions sera rejetée.
3 – Sur les frais du procès et l’exécution provisoire

3.1 – S’agissant des frais du procès

Aux termes de l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge de l’autre partie.
L’article 700 du code de procédure civile dispose que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a lieu à condamnation.
La société Jours de Passions, partie perdante à l’instance, sera condamnée aux dépens.
Parties tenues aux dépens, la société Jours de Passions sera condamnée à payer 3000 euros à la société Éditions Les Arènes à ce titre.

3.2 – S’agissant de l’exécution provisoire

En application des articles 514 et 514-1 du code de procédure civile, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n’en dispose autrement et, par exception, le juge ne peut pas écarter l’exécution provisoire de droit lorsqu’il statue en référé.

PAR CES MOTIFS

Le juge des référés, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par ordonnance contradictoire et en premier ressort ,

Rejette l’exception de nullité de l’assignation soulevée par la société Éditions Les Arènes ;

Dit n’y avoir lieu à référé pour le surplus ;

Condamne la société Jours de Passions aux dépens ;

Condamne la société Jours de Passions à payer 3000 euros à la société Éditions Les Arènes en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Fait à Paris le 11 septembre 2024

Le Greffier, Le Président,

Marion COBOS Jean-Christophe GAYET


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