Appel d’offre de l’INPI : contester une offre anormalement basse

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Appel d’offre de l’INPI : contester une offre anormalement basse

L’Essentiel : Dans le cadre d’un appel d’offres lancé par l’INPI pour une solution éditique, la société Tessi éditique a contesté la décision de ne pas retenir son offre au profit de Numen services. Tessi soutient que l’offre de Numen est anormalement basse, étant inférieure de près de 50% à la sienne, ce qui compromettrait la bonne exécution du marché. Cependant, l’INPI a justifié le choix de Numen par des processus de standardisation et des coûts de main-d’œuvre réduits. Le tribunal a finalement rejeté la requête de Tessi, considérant que l’INPI n’avait pas commis d’erreur manifeste d’appréciation.

Dans le cadre d’un appel d’offres pour ses services internes, l’INPI est en droit de retenir l’offre d’un prestataire particulièrement compétitive en termes de prix en comparaison aux autres offres reçues.

Appel d’offre de l’INPI

Par un avis d’appel public à la concurrence du 4 juillet 2022, l’Institut national de la propriété intellectuelle (INPI) a lancé une consultation en vue de renouveler le marché de prestation de la solution éditique pour ses courriers sortants.

La société Tessi éditique a présenté une candidature pour se voir attribuer ce marché, dont elle était précédemment titulaire.

Par un courrier du 9 novembre 2022, elle a été informée par le pouvoir adjudicateur que l’offre qu’elle avait déposée n’était pas retenue et que la société Numen services était désignée comme attributaire.

Par une requête, la société Tessi éditique a demandé en vain au juge du référé précontractuel, statuant sur le fondement des articles L. 551-1 et suivants du code de justice administrative, d’annuler la décision du 9 novembre 2022.

Tessi éditique c/ Numen

La société requérante soutient que c’est à tort que l’INPI n’a pas écarté l’offre de la société Numen services comme étant anormalement basse.

A l’appui de ce moyen, elle fait valoir que le prix de la prestation estimé à partir du devis quantitatif estimé (DQE) est inférieur de presque 50% à son propre prix, qu’elle-même n’est pas en mesure de diminuer ses prix à ce niveau sans produire à perte et que ceux-ci correspondent à l’état du marché, sans produire d’éléments précis et circonstanciés à l’appui de ses allégations.

Pour sa part, la société Numen services a justifié dans la réponse apportée à l’INPI ses prix par, entre autres, la mise en place de processus de standardisation améliorant l’efficacité des missions, ainsi que des coûts de main d’œuvre réduits, qui sont détaillés par prix.

L’INPI a alors estimé que les prix bas étaient cohérents au regard des prestations exigées. Dans ces conditions, le moyen tiré de l’erreur manifeste d’appréciation qu’aurait commis l’INPI en n’écartant pas l’offre de la société éditique comme anormalement basse doit être écarté.

Recours contre une offre anormalement basse

Aux termes de l’article L. 2152-7 du code de la commande publique : « Les critères d’attribution n’ont pas pour effet de conférer une liberté de choix illimitée à l’acheteur et garantissent la possibilité d’une véritable concurrence. ».

L’article L. 2152-8 du même code dispose que : « Le marché est attribué au soumissionnaire ou, le cas échéant, aux soumissionnaires qui ont présenté l’offre économiquement la plus avantageuse sur la base d’un ou plusieurs critères objectifs, précis et liés à l’objet du marché ou à ses conditions d’exécution. ».

Il résulte de ces dispositions que le pouvoir adjudicateur définit librement la méthode de notation pour la mise en œuvre de chacun des critères de sélection des offres qu’il a définis et rendus publics.

Il lui est notamment loisible, pour évaluer le montant des offres qui lui sont présentées, d’établir une « simulation » consistant à multiplier les prix unitaires proposés par les candidats par le nombre d’interventions envisagées, à la triple condition que cette simulation corresponde à l’objet du marché, que le choix du contenu de la simulation n’ait pas pour effet d’en privilégier un aspect particulier de telle sorte que le critère du prix s’en trouverait dénaturé, et que le montant des offres proposées par chaque candidat soit reconstitué en recourant à la même simulation.

Compétence du juge administratif

Aux termes de l’article L. 551-1 du code de justice administrative :

« Le président du tribunal administratif, ou le magistrat qu’il délègue, peut être saisi en cas de manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles est soumise la passation par les pouvoirs adjudicateurs de contrats administratifs ayant pour objet l’exécution de travaux, la livraison de fournitures ou la prestation de services, avec une contrepartie économique constituée par un prix ou un droit d’exploitation, ou la délégation d’un service public.Le juge est saisi avant la conclusion du contrat. ».

Aux termes de l’article L. 2152-1 du code de la commande publique :

« L’acheteur écarte les offres irrégulières, inacceptables ou inappropriées. » et son article L. 2152-2 prévoit que : « Une offre irrégulière est une offre qui ne respecte pas les exigences formulées dans les documents de la consultation, en particulier parce qu’elle est incomplète () ».

L’article R. 2152-2 du même code dispose que : « Dans toutes les procédures, l’acheteur peut autoriser tous les soumissionnaires concernés à régulariser les offres irrégulières dans un délai approprié, à condition qu’elles ne soient pas anormalement basses. La régularisation des offres irrégulières ne peut avoir pour effet d’en modifier des caractéristiques substantielles. ».


Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, 12 décembre 2022, n° 2215652

Vu la procédure suivante :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 18 novembre, 1er et 7 décembre 2022, la société Tessi éditique, représentée par Me Lapisardi, demande au juge des référés, statuant en application des dispositions de l’article L. 551-1 du code de justice administrative, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d’annuler la décision du 9 novembre 2022 par laquelle l’Institut national de la propriété intellectuelle (INPI) a rejeté son offre déposée en vue de l’attribution d’un marché portant sur l’acquisition d’une solution éditique pour ses courriers sortants ;

2°) d’enjoindre à l’INPI de reprendre la procédure de passation au stade de l’ouverture des offres et d’écarter l’offre de la société Numen services ;

3°) à titre subsidiaire, d’annuler la procédure de passation de ce marché ;

4°) de mettre à la charge de l’INPI la somme de 5 000 euros au titre de l’article

L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

— la méthode de notation des offres retenue par l’INPI est contraire aux principes de transparence et d’égalité des candidats dès lors que le prix estimé de sa prestation est largement supérieur à celui du marché actuel, dont elle est titulaire, et que celui de la société Numen services ne peut résulter que d’un prix anormalement bas ; il ne justifie pas de la temporalité de la simulation et n’apporte pas la preuve que l’hypothèse de simulation a bien été établie avant l’ouverture des offres ;

— l’offre de la société attributaire ne pouvait être retenue sans avoir cherché à expliquer son prix anormalement bas ; il résulte des éléments versés à l’instance que l’offre a été jugée régulière alors qu’elle était anormalement basse ;

— l’INPI a méconnu les principes d’intangibilité des offres et d’égalité des candidats en négociant directement avec la société Numen services sur les aspects tant financier que technique de son offre, des prix essentiels ayant manqué au bordereau de prix unitaires initial et les demandes de « précisions » ayant en réalité consisté en la description d’éléments substantiels de son offre ;

— le caractère lacunaire de l’offre de l’attributaire la rendait irrégulière et non régularisable et aurait dû conduire à ce qu’elle soit écartée de la procédure avant toute analyse.

Par un mémoire en défense enregistré le 25 novembre 2022, l’Institut national de la propriété intellectuelle (INPI), représenté par Me Delvigne, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la société Tessi éditique au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés.

Les mémoires et les pièces ont été communiqués à la société Numen services, qui n’a pas produit d’observations en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— le code de la commande publique ;

— le code de justice administrative.

Le président du tribunal a désigné M. Raimbault, premier conseiller, pour statuer sur les litiges mentionnés à l’article L. 551-1 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement convoquées à l’audience publique du 1er décembre 2022 à 15h30.

Ont été entendus au cours de l’audience publique, tenue en présence de Mme Dieng, greffière d’audience :

— le rapport de M. Raimbault, juge des référés,

— les observations de Me Houte, substituant Me Lapisardi, représentant la société Tessi éditique,

— et les observations de Me Gouhier, substituant Me Delvigne, représentant l’INPI.

En application de l’article R. 522-8 du code de justice administrative, la clôture de l’instruction a été reportée au 7 décembre 2022 à 15h.

Considérant ce qui suit :

1. Par un avis d’appel public à la concurrence du 4 juillet 2022, l’Institut national de la propriété intellectuelle (INPI) a lancé une consultation en vue de renouveler le marché de prestation de la solution éditique pour ses courriers sortants. La société Tessi éditique a présenté une candidature pour se voir attribuer ce marché, dont elle était précédemment titulaire. Par un courrier du 9 novembre 2022, elle a été informée par le pouvoir adjudicateur que l’offre qu’elle avait déposée n’était pas retenue et que la société Numen services était désignée comme attributaire. Par la présente requête, la société Tessi éditique demande au juge du référé précontractuel, statuant sur le fondement des articles L. 551-1 et suivants du code de justice administrative, d’annuler la décision du 9 novembre 2022.

Sur les conclusions à fin d’annulation et d’injonction :

2. Aux termes de l’article L. 551-1 du code de justice administrative : « Le président du tribunal administratif, ou le magistrat qu’il délègue, peut être saisi en cas de manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles est soumise la passation par les pouvoirs adjudicateurs de contrats administratifs ayant pour objet l’exécution de travaux, la livraison de fournitures ou la prestation de services, avec une contrepartie économique constituée par un prix ou un droit d’exploitation, ou la délégation d’un service public. () Le juge est saisi avant la conclusion du contrat. ».

En ce qui concerne le moyen tiré de ce que l’offre retenue était anormalement basse :

3. Aux termes de l’article L. 2152-5 du code de la commande publique : « Une offre anormalement basse est une offre dont le prix est manifestement sous-évalué et de nature à compromettre la bonne exécution du marché. ». L’article L. 2152-6 du même code dispose que : « L’acheteur met en œuvre tous moyens lui permettant de détecter les offres anormalement basses. / Lorsque une offre semble anormalement basse, l’acheteur exige que l’opérateur économique fournisse des précisions et justifications sur le montant de son offre. / Si, après vérification des justifications fournies par l’opérateur économique, l’acheteur établit que l’offre est anormalement basse, il la rejette dans des conditions prévues par décret en Conseil d’Etat. ». Il résulte de ces dispositions que, quelle que soit la procédure de passation mise en œuvre, il incombe au pouvoir adjudicateur qui constate qu’une offre paraît anormalement basse de solliciter auprès de son auteur toutes précisions et justifications de nature à expliquer le prix proposé. Si les précisions et justifications apportées ne sont pas suffisantes pour que le prix proposé ne soit pas regardé comme manifestement sous-évalué et de nature, ainsi, à compromettre la bonne exécution du marché, il appartient au pouvoir adjudicateur de rejeter l’offre, sauf à porter atteinte à l’égalité entre les candidats à l’attribution d’un marché public. Le juge du référé précontractuel exerce un contrôle limité à l’erreur manifeste d’appréciation sur la décision du pouvoir adjudicateur de rejeter une offre comme anormalement basse sur ce fondement.

4. En premier lieu, il résulte de l’instruction que sept prix proposés par la société Numen services étaient très bas. L’INPI a alors demandé à cette société de lui fournir des précisions et des justifications concernant notamment ces prix, sur le fondement des dispositions précitée, de sorte que, à supposer que la société requérante ait maintenu le moyen tiré de ce que l’INPI n’aurait pas cherché à vérifier que l’offre était anormalement basse, il manque en fait.

5. En second lieu, la société requérante soutient que c’est à tort que l’INPI n’a pas écarté l’offre de la société Numen services comme étant anormalement basse. A l’appui de ce moyen, elle fait valoir que le prix de la prestation estimé à partir du devis quantitatif estimé (DQE) est inférieur de presque 50% à son propre prix, qu’elle-même n’est pas en mesure de diminuer ses prix à ce niveau sans produire à perte et que ceux-ci correspondent à l’état du marché, sans produire d’éléments précis et circonstanciés à l’appui de ses allégations. Pour sa part, la société Numen services a justifié dans la réponse apportée à l’INPI ses prix par, entre autres, la mise en place de processus de standardisation améliorant l’efficacité des missions, ainsi que des coûts de main d’œuvre réduits, qui sont détaillés par prix. L’INPI a alors estimé que les prix bas étaient cohérents au regard des prestations exigées. Dans ces conditions, le moyen tiré de l’erreur manifeste d’appréciation qu’aurait commis l’INPI en n’écartant pas l’offre de la société éditique comme anormalement basse doit être écarté.

En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance des principes d’intangibilité des offres et d’égalité de traitement des candidats :

6. Aux termes de l’article L. 2152-1 du code de la commande publique : « L’acheteur écarte les offres irrégulières, inacceptables ou inappropriées. » et son article L. 2152-2 prévoit que : « Une offre irrégulière est une offre qui ne respecte pas les exigences formulées dans les documents de la consultation, en particulier parce qu’elle est incomplète () ». L’article R. 2152-2 du même code dispose que : « Dans toutes les procédures, l’acheteur peut autoriser tous les soumissionnaires concernés à régulariser les offres irrégulières dans un délai approprié, à condition qu’elles ne soient pas anormalement basses. La régularisation des offres irrégulières ne peut avoir pour effet d’en modifier des caractéristiques substantielles. ».

7. La société requérante soutient que le caractère lacunaire de l’offre de l’attributaire la rendait irrégulière et non régularisable et aurait dû conduire à ce qu’elle soit écartée de la procédure avant toute analyse, et que par ailleurs l’INPI a méconnu les principes d’intangibilité des offres et d’égalité des candidats en négociant directement avec la société Numen services sur les aspects tant financier que technique de son offre, des prix essentiels ayant manqué au bordereau de prix unitaires initial et les demandes de « précisions » ayant en réalité consisté en la description d’éléments substantiels de son offre.

8. Il résulte de l’instruction qu’après réception des offres, l’INPI, qui avait précisé dans les documents de la consultation qu’il était susceptible de mettre en œuvre les dispositions précitées de l’article R. 2152-2 du code de la commande publique, a adressé aux sociétés Tessi éditique et Numen services des formulaires « OUV6 » comportant des demandes de précisions. Celui adressé à la société attributaire, qui visait également à s’assurer qu’elle n’avait pas présenté une offre anormalement basse ainsi qu’il a été rappelé au point 4, portait sur la régularisation de cinq prix manquant au bordereau de prix unitaires et sur cinquante-trois demandes de précisions et a appelé de la part de la candidate une réponse d’une vingtaine de pages.

9. Toutefois, d’une part, si de nombreuses questions ont été posées et si certaines portaient sur certains aspects essentiels de la solution proposée, il n’en résulte pas pour autant que les réponses de la société Numen services auraient conduit à modifier des caractéristiques substantielles de son offre, ni que cette dernière aurait été lacunaire au point de devoir être écartée sans pouvoir faire l’objet de précisions. Par ailleurs, l’INPI fait valoir sans être utilement contesté que les prix complétés par la société attributaire figuraient à d’autres endroits du bordereau et que ces compléments ont ainsi été sans incidence sur le montant estimé de l’offre.

10. D’autre part, il résulte de l’instruction que l’INPI, qui a également posé vingt-six questions à la société Tessi éditique et lui a demandé de compléter son bordereau de prix, s’est borné à faire préciser aux candidats certains points de leur offre, ainsi qu’il y était fondé, et que les doutes quant au caractère exagérément bas de l’offre de la société Numen services, ainsi que sa moindre qualité technique qui résulte des notes obtenues, l’a conduit à poser des questions plus nombreuses.

En revanche il n’a pas, ce faisant, mis en œuvre de négociations avec la société Numen services. Par suite, les moyens tirés de ce que les dispositions mentionnées au point 6 auraient été méconnus ou qu’il aurait été porté atteinte au principe d’égalité de traitement entre les candidats doivent être écartés.

En ce qui concerne le moyen tiré de l’illégalité de la méthode de notation des offres :

11. Aux termes de l’article L. 2152-7 du code de la commande publique : « Les critères d’attribution n’ont pas pour effet de conférer une liberté de choix illimitée à l’acheteur et garantissent la possibilité d’une véritable concurrence. ». L’article L. 2152-8 du même code dispose que : « Le marché est attribué au soumissionnaire ou, le cas échéant, aux soumissionnaires qui ont présenté l’offre économiquement la plus avantageuse sur la base d’un ou plusieurs critères objectifs, précis et liés à l’objet du marché ou à ses conditions d’exécution. ». Il résulte de ces dispositions que le pouvoir adjudicateur définit librement la méthode de notation pour la mise en œuvre de chacun des critères de sélection des offres qu’il a définis et rendus publics. Il lui est notamment loisible, pour évaluer le montant des offres qui lui sont présentées, d’établir une « simulation » consistant à multiplier les prix unitaires proposés par les candidats par le nombre d’interventions envisagées, à la triple condition que cette simulation corresponde à l’objet du marché, que le choix du contenu de la simulation n’ait pas pour effet d’en privilégier un aspect particulier de telle sorte que le critère du prix s’en trouverait dénaturé, et que le montant des offres proposées par chaque candidat soit reconstitué en recourant à la même simulation.

12. Sur le fondement des dispositions et principes rappelés au point 11, l’INPI a noté le sous-critère n° 1 du critère prix par la méthode du « devis quantitatif estimé » (DQE). La société Tessi éditique soutient qu’il a ainsi méconnu les principes de transparence et d’égalité des candidats dès lors que le prix estimé de sa prestation est largement supérieur à celui du marché en cours, dont elle est titulaire, que celui de la société Numen services ne peut résulter que d’un prix anormalement bas, et que l’Institut ne justifie pas de la temporalité de la simulation et n’apporte pas la preuve que l’hypothèse de simulation a bien été établie avant l’ouverture des offres.

13. Toutefois, en premier lieu, la seule circonstance que le prix de la simulation soit supérieur au prix du marché actuel n’établit pas, par lui-même, que les principes mentionnés au point 11 auraient été méconnus, dès lors qu’il était loisible à l’INPI, sans méconnaître par là-même les principes rappelés au point 11, de réaliser la simulation en modifiant la structure des prestations par rapport à celle à laquelle elle recourt actuellement. Par ailleurs, alors que l’INPI a adressé à la société requérante son propre DQE et qu’il lui appartenait, si elle entendait préserver les éléments protégés par le secret des affaires, de verser cette pièce en faisant application de la procédure prévue aux articles R. 611-30 et R. 412-2-1 du code de justice administrative, elle ne précise pas en quoi la méthode retenue, dont elle a connaissance, aurait été susceptible de méconnaître ces principes.

14. En deuxième lieu, ainsi qu’il a été dit au point 5, il ne résulte pas de l’instruction que l’offre de la société Numen services serait anormalement basse.

15. En troisième lieu, alors que l’Institut a précisé avoir réalisé les simulations elles-mêmes sur la base des bordereaux de prix unitaires complétés à la suite de ses demandes de précisions, la société Tessi éditique n’indique pas en quoi cette temporalité aurait été de nature à méconnaître les principes rappelés au point 11.

16. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions à fin d’annulation et d’injonction de la société Tessi éditique ne peuvent qu’être rejetées.

Sur les frais de l’instance :

17. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu’une somme soit mise sur leur fondement à la charge de l’INPI, qui n’est pas la partie perdante à la présente instance. En revanche il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à ce titre une somme de 1 500 euros à la charge de la société Tessi éditique, à verser à l’INPI.

O R D O N N E :

Article 1er : La requête de la société Tessi éditique est rejetée.

Article 2 : La société Tessi éditique versera la somme de 1 500 euros à l’INPI au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à la société Tessi éditique, à l’Institut national de la propriété intellectuelle (INPI) et à la société Numen services.

Fait, à Cergy, le 12 décembre 202Le juge des référés,

signé

G. Raimbault

La République mande et ordonne au ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Q/R juridiques soulevées :

Quel est l’objet de l’appel d’offres lancé par l’INPI ?

L’Institut national de la propriété intellectuelle (INPI) a lancé un appel d’offres le 4 juillet 2022 pour renouveler le marché de prestation de la solution éditique destinée à ses courriers sortants. Cet appel d’offres a pour but de sélectionner un prestataire capable de fournir des services d’éditique, un domaine essentiel pour la gestion des communications écrites de l’INPI.

La société Tessi éditique, qui était déjà titulaire de ce marché, a soumis une candidature pour continuer à fournir ces services. Cependant, malgré sa candidature, l’INPI a décidé de ne pas retenir son offre, désignant plutôt la société Numen services comme attributaire du marché.

Quelles sont les raisons invoquées par Tessi éditique pour contester la décision de l’INPI ?

Tessi éditique a contesté la décision de l’INPI en soutenant que l’offre de Numen services devait être écartée en tant qu’anormalement basse. Elle a fait valoir que le prix proposé par Numen était inférieur de près de 50 % à son propre prix, ce qui, selon elle, ne lui permettrait pas de réaliser des bénéfices sans subir de pertes.

Tessi a également affirmé que ses prix reflétaient l’état du marché et qu’elle n’avait pas les moyens de réduire ses tarifs à un tel niveau. Toutefois, elle n’a pas fourni d’éléments précis et circonstanciés pour étayer ses allégations, ce qui a affaibli sa position.

Comment l’INPI a-t-il justifié le choix de l’offre de Numen services ?

L’INPI a justifié le choix de l’offre de Numen services en soulignant que cette dernière avait fourni des explications sur ses prix, notamment en mettant en avant des processus de standardisation qui augmentaient l’efficacité des missions et des coûts de main-d’œuvre réduits. Ces justifications ont été jugées suffisantes par l’INPI, qui a estimé que les prix bas étaient cohérents avec les prestations exigées.

Ainsi, l’INPI a conclu qu’il n’y avait pas d’erreur manifeste d’appréciation dans sa décision de retenir l’offre de Numen services, malgré les objections de Tessi éditique.

Quelles sont les dispositions légales concernant les offres anormalement basses ?

Selon l’article L. 2152-5 du code de la commande publique, une offre est considérée comme anormalement basse si son prix est manifestement sous-évalué et susceptible de compromettre la bonne exécution du marché. L’acheteur est tenu de mettre en œuvre des moyens pour détecter de telles offres.

Si une offre semble anormalement basse, l’acheteur doit demander des précisions et justifications à l’opérateur économique. Si, après vérification, l’offre est jugée anormalement basse, elle doit être rejetée pour garantir l’égalité entre les candidats.

Quel est le rôle du juge administratif dans ce type de litige ?

Le juge administratif, en vertu de l’article L. 551-1 du code de justice administrative, peut être saisi en cas de manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence lors de la passation de contrats administratifs. Il intervient avant la conclusion du contrat pour examiner la légalité de la procédure.

Dans le cadre de ce litige, le juge a examiné les arguments de Tessi éditique concernant l’offre de Numen services et a évalué si l’INPI avait commis une erreur manifeste d’appréciation en ne rejetant pas l’offre comme anormalement basse. Le juge a finalement rejeté la requête de Tessi, confirmant la légitimité de la décision de l’INPI.


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