Dans le contexte actuel de lutte contre la propagation du virus covid-19, le Gouvernement a prorogé et complété le dispositif d’aides exceptionnelles aux auteurs et titulaires de droits voisins avec la nouvelle Ordonnance no 2020-1599 du 16 décembre 2020. Le dispositif vise à réduire l’impact de l’annulation et du remboursement des prestations non exécutées tant aux entrepreneurs de spectacles vivants, aux organisateurs de manifestations sportives qu’aux exploitants d’établissements d’activités physiques et sportives.
Possibilité de délivrer des avoirs
S’agissant du secteur culturel, l’ordonnance du 7 mai 2020 avait permis partiellement, aux entreprises du spectacle vivant (producteurs, salles de spectacles, revendeurs) de préserver une partie de leur trésorerie et de continuer à préparer la reprise des activités culturelles, de maintenir l’emploi autant que possible et également de conserver une capacité d’investissement tant sur le plan de l’entretien des lieux que du développement artistique des spectacles (pour lesquels des frais avaient déjà été engagés). Avec l’instauration de prêts garantis par l’Etat, la possibilité de délivrer des avoirs à leurs clients ont permis de préserver les « ressources » des entreprises en cause.
S’agissant du théâtre privé, une majorité d’artistes a pu reporter ses représentations à une date ultérieure et peu de demandes de remboursement ont été recensées, entre 1,5 % et 3 % des billets de spectacle vendus.
Périmètre de l’Ordonnance du 16 décembre 2020
La nouvelle ordonnance adapte toutefois les mesures qui avaient été instaurées par l’ordonnance du 7 mai 2020, afin d’en ajuster le champ d’application à la nouvelle période concernée.
Elle modifie à nouveau les obligations de certains entrepreneurs du spectacle vivant, organisateurs ou propriétaires des droits d’exploitation d’une manifestation sportive et exploitants d’établissements d’activités physique et sportives pour leur permettre de proposer à leurs clients, pour une période limitée dans le temps, un avoir valable sur une période adaptée à la nature de la prestation, ne pouvant excéder dix mois (pour les contrats d’accès à un établissements d’activités physique et sportives et leurs éventuels services associés), douze mois (pour les contrats d’accès à une ou plusieurs prestations de spectacles vivants) ou dix-huit mois (pour contrats de vente de titres d’accès donnant l’accès à une ou plusieurs manifestations sportives et leurs services associés), dans le but d’équilibrer le soutien aux entreprises et associations des secteurs de la culture et du sport en cette période de crise avec le respect du droit des consommateurs.
Cette alternative au remboursement permet en effet de sauvegarder la trésorerie des entreprises et associations concernées, particulièrement touchées par le contexte de crise sanitaire et économique.
Aides « anonymisées » aux auteurs
La nouvelle ordonnance prolonge d’une année de la possibilité offerte aux organismes de gestion collective d’apporter une aide financière aux auteurs et titulaires de droits voisins en difficulté.
L’ordonnance vise, par ailleurs, à prolonger l’application dans le temps de l’ordonnance n° 2020-353 du 27 mars 2020 relative aux aides exceptionnelles à destination de titulaires de droits d’auteurs et de droits voisins en raison des conséquences de la propagation du virus covid-19 et des mesures prises pour limiter cette propagation.
Cette dernière ordonnance, prise en application de l’article 11 de la loi du 23 mars 2020, autorise exceptionnellement les organismes de gestion collective à utiliser une partie des sommes que la loi (article L. 324-7 du code de la propriété intellectuelle) leur impose de consacrer à des actions artistiques et culturelles (festivals, résidence d’artistes, bourses d’écriture, éducation artistique et culturelle…) pour le versement d’aides aux auteurs et aux titulaires de droits voisins dont les revenus ont été gravement impactés par les conséquences de la propagation du virus covid-19.
L’exploitation des œuvres s’étant interrompue ou ayant fortement diminué pendant cette période, la rémunération des ayants-droit s’en est trouvée gravement affectée.
Ce dispositif est vital pour l’avenir de la création française, car les auteurs et artistes, qui sont fréquemment non-salariés et sont dépendants des revenus d’exploitations de leurs œuvres, ont besoin à très court terme d’aides financières. A titre d’exemple, le manque à gagner pour la Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (SACEM) lié à la crise sanitaire a été évalué à 250 millions d’euros sur un montant total de collecte de 1,1 milliard d’euros. Cette société a néanmoins pu débloquer, sur le fondement de l’ordonnance du 23 mars 2020, une enveloppe de 6 millions d’euros pour ses sociétaires en difficulté financière.
Cette possibilité offerte aux organismes de gestion collective expire le 31 décembre 2020. Or, la situation d’urgence se prolongera en 2021 dans la mesure où les rémunérations reversées aux ayants droit en 2021 le seront au titre de l’année 2020, année qui n’a généré que peu de droits en raison de la crise sanitaire et de la fermeture des établissements qui exploitent les œuvres (théâtres, salles de concert…).
Il est également prévu, pour des raisons tenant au respect de la vie privée des auteurs et des artistes aidés pour cause de détresse matérielle, de déroger à l’obligation prévue à l’article L. 326-2 du code de la propriété intellectuelle de rendre public le nom des bénéficiaires des aides versées par les organismes de gestion collective.
Cette dérogation est limitée aux aides individuelles, à caractère social, versées en application de l’ordonnance du 27 mars 2020, de sorte que les noms des bénéficiaires des autres mécanismes d’aides continueront d’être publiés. Cette information restera néanmoins tenue à la disposition du ministre de la culture et de la commission de contrôle des organismes de gestion des droits d’auteur et des droits voisins pour l’exercice de leur contrôle.