L’Essentiel : C’était un nouveau rendez-vous, mais cette fois-ci, il était contentieux. La société Les Films 13 et Claude Lelouch ont été déboutés de leur action en concurrence déloyale contre Peugeot Citroën, qui avait réalisé un clip publicitaire inspiré du court-métrage « C’était un rendez-vous » (1976). Bien que les deux œuvres partagent un concept similaire, la cour a jugé que l’inspiration ne constituait pas une faute. Les différences notables entre les films et la relative notoriété du court-métrage auprès du grand public ont conduit à l’absence de risque de confusion, permettant ainsi à Peugeot Citroën de poursuivre son projet sans entrave.
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« C’était un rendez-vous »C’était un nouveau rendez-vous mais contentieux cette fois-ci. La société Les Films 13 qui finance et gère les films tournés par Claude Lelouch ainsi que ce dernier, ont été déboutés de leur action en concurrence déloyale contre Peugeot Citroën au titre de la réalisation d’un clip publicitaire inspiré du court-métrage « C’était un rendez-vous » (1976). Le concept mis en œuvre était celui d’une traversée de Paris par un homme conduisant une voiture à vive allure, se terminant sur les marches du Sacré Cœur par une rencontre avec une femme. La société Peugeot Citroën a réalisé, en 2014, pour faire la promotion, en Chine, de l’une de la DS 5LS R, un film publicitaire inspiré du court métrage de Claude Lelouch. Conditions de la concurrence déloyaleLa concurrence déloyale, comme le parasitisme, trouve son fondement dans l’article 1240 (anciennement 1382) du code civil qui dispose que tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ; ces deux notions requièrent l’application de critères distincts, la concurrence déloyale s’appréciant au regard du risque de confusion, considération étrangère au parasitisme qui suppose la circonstance selon laquelle, à titre lucratif et de façon injustifiée, une personne morale ou physique copie une valeur économique d’autrui, individualisée et procurant un avantage concurrentiel, fruit d’un savoir-faire, d`un travail intellectuel et d`investissements. Ces deux notions devant être appréciées à l’aune du principe de la liberté du commerce, ne sont sanctionnés au titre de la concurrence déloyale que des comportements fautifs tels que ceux visant à créer un risque de confusion dans l’esprit de la clientèle sur l’origine du produit, ou ceux, parasitaires, qui consistent à s’immiscer dans le sillage d’autrui afin de profiter, sans bourse délier, de ses efforts, de ses investissements et de son savoir-faire. Une inspiration audiovisuelle autoriséeSi les deux courts métrages mettaient en scène le même concept (un personnage masculin traversant Paris au volant d’un véhicule à vive allure, et retrouve un personnage féminin au sommet de la butte Montmartre) et que la productrice n’avait pas contesté s’être inspiré du court-métrage de Claude Lelouch, la concurrence déloyale n’a pas été retenue. Selon les juges d’appel, la notoriété du court métrage, qui est distincte de celle de Claude Lelouch n’était que relative, concernant des cinéphiles amateurs d’automobiles, et n’était pas une notoriété auprès du grand public. Effet de génération, la forte notoriété prétendue du court-métrage ne résultait pas des pièces produites. De quoi mettre à mal le droit d’adaptation d’une œuvre audiovisuelle, la Cour a considéré que le fait que le film litigieux trouve son inspiration dans le court-métrage « C’était un rendez-vous » ne peut être considéré comme fautif, dès lors que le fait de s’inspirer d’une œuvre préexistante n’est pas condamnable en soi et qu’en l’occurrence l’inspiration se limite à une thématique, ou à une idée, non appropriable – en l’espèce, un homme conduisant un véhicule luxueux à vive allure à travers Paris et retrouvant une femme sur la butte Montmartre – et à la reprise, dans le titre, du mot « Rendez-vous ». En outre, les deux films présentaient d’importantes différences (structures et plans). Compte tenu de ces différences, le risque de confusion ou d’assimilation pour le public concerné, principalement la clientèle chinoise à laquelle s’adresse le film publicitaire, n’a pas été retenu. |
Q/R juridiques soulevées :
Quel était le contexte du litige entre Les Films 13 et Peugeot Citroën ?Le litige entre Les Films 13, société de Claude Lelouch, et Peugeot Citroën a émergé suite à la réalisation d’un clip publicitaire par Peugeot Citroën, inspiré du court-métrage « C’était un rendez-vous » de 1976. Ce court-métrage mettait en scène une traversée rapide de Paris par un homme au volant d’une voiture, se terminant par une rencontre avec une femme sur les marches du Sacré-Cœur. Les Films 13 ont intenté une action en concurrence déloyale, arguant que le clip publicitaire portait atteinte à leur œuvre originale. Cependant, cette action a été rejetée par les juges, qui ont estimé que l’inspiration ne constituait pas une violation des droits d’auteur. Quelles sont les conditions nécessaires pour établir une concurrence déloyale ?La concurrence déloyale est régie par l’article 1240 du code civil, qui stipule qu’un acte causant un dommage à autrui oblige son auteur à réparer ce dommage. Pour qu’une action en concurrence déloyale soit retenue, il faut démontrer un risque de confusion dans l’esprit des consommateurs concernant l’origine d’un produit. Cela implique que le comportement fautif doit viser à créer une confusion, ou à profiter des efforts et investissements d’un concurrent sans compensation. Les critères d’appréciation incluent la notoriété de l’œuvre originale et la manière dont l’œuvre inspirée s’en distingue. Pourquoi la cour n’a-t-elle pas retenu la concurrence déloyale dans ce cas ?La cour a décidé de ne pas retenir la concurrence déloyale car, bien que les deux œuvres partagent un concept similaire, elles présentent des différences significatives. Les juges ont noté que la notoriété du court-métrage de Lelouch était limitée à un public de cinéphiles et n’était pas reconnue par le grand public. De plus, l’inspiration tirée du court-métrage ne portait que sur une thématique générale, sans appropriation des éléments spécifiques de l’œuvre. Les différences dans la structure et les plans des deux films ont également été prises en compte, ce qui a réduit le risque de confusion pour le public cible, principalement en Chine. Quelles implications cette décision a-t-elle sur le droit d’adaptation d’œuvres audiovisuelles ?Cette décision souligne que s’inspirer d’une œuvre préexistante n’est pas en soi condamnable, tant que l’inspiration ne se traduit pas par une copie directe ou une appropriation des éléments protégés. La cour a affirmé que le fait de reprendre une idée ou une thématique, comme celle d’un homme conduisant à travers Paris, ne constitue pas une violation des droits d’auteur. Cela établit un précédent important pour les adaptations audiovisuelles, en clarifiant que les créateurs peuvent s’inspirer d’œuvres antérieures tant qu’ils apportent des éléments originaux et distincts à leur propre création. Ainsi, la protection des œuvres originales doit être équilibrée avec la liberté de création et d’expression dans le domaine audiovisuel. |
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