Adoption simple et consentement : enjeux familiaux et droits des tiers

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Adoption simple et consentement : enjeux familiaux et droits des tiers

L’Essentiel : Mme [H] [F], née en 1986 à Paris, a consenti à son adoption simple par M. [P] [G] en mai 2022, avec l’accord de sa mère, Mme [J] [O]. En janvier 2023, M. [P] [G] a déposé une requête pour formaliser cette adoption. Cependant, le procureur a émis des réserves en février 2024, en raison du refus de Mme [H] [F] d’informer son père biologique. Lors de l’audience d’octobre 2024, M. [P] [G] a souligné son rôle parental, tandis que Mme [H] [F] a confirmé son consentement, expliquant l’absence de relations avec son père. Le tribunal a finalement prononcé l’adoption.

Origines Familiales

Mme [H] [F] est née en 1986 à Paris, issue du mariage de Mme [J] [O] et de M. [C] [F], qui ont divorcé en 1991. Elle a une sœur, Mme [S] [F], née en 1981. Mme [J] [O] s’est remariée en 1995 avec M. [P] [G], avec qui elle a eu deux enfants, [Y] [G] et [T] [G].

Demande d’Adoption

En mai 2022, Mme [H] [F] a consenti à son adoption simple par M. [P] [G], avec l’accord de sa mère. En janvier 2023, M. [P] [G] a déposé une requête pour formaliser cette adoption et ajouter son nom de famille à celui de l’adoptée.

Réserves du Procureur

Le procureur de la République a émis un avis réservé en février 2024, en raison du refus de Mme [H] [F] d’informer son père biologique de l’adoption.

Audience et Témoignages

L’audience a eu lieu en octobre 2024, avec la présence de M. [P] [G], Mme [H] [F], Mme [J] [O] et M. [V] [W]. M. [P] [G] a souligné son rôle parental auprès de Mme [H] [F] et de sa sœur, précisant que cette adoption était souhaitée par Mme [H] [F] en raison de l’absence de contact avec son père biologique.

Consentements et Relations Familiales

Mme [H] [F] a confirmé son consentement à l’adoption, expliquant qu’elle n’avait plus de relations avec son père depuis plusieurs années. Mme [J] [O] a également réaffirmé son accord, tout comme M. [V] [W], qui a précisé ne jamais avoir rencontré le père de l’adoptée.

Décision du Tribunal

Le ministère public a donné un avis favorable à l’adoption. Le tribunal a prononcé l’adoption simple de Mme [H] [F] par M. [P] [G], avec effet rétroactif à la date de la requête. L’adoptée portera désormais le nom de famille [F]-[G]. La décision a été mise en délibéré et sera notifiée aux parties concernées.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la procédure d’adoption simple en France ?

L’adoption simple est régie par les articles 343 à 347 du Code civil.

L’article 343 stipule que « l’adoption simple est une adoption qui n’emporte pas la rupture des liens de filiation de l’adopté avec sa famille d’origine ».

Cela signifie que l’adopté conserve ses liens avec ses parents biologiques tout en établissant une nouvelle filiation avec l’adoptant.

L’article 344 précise que « l’adoption simple peut être demandée par toute personne majeure ou mineure, à condition que l’adoptant soit âgé d’au moins 28 ans ».

Dans le cas présent, M. [P] [G] remplit cette condition, ayant 59 ans au moment de la demande.

L’article 345 exige le consentement de l’adopté si celui-ci est âgé de plus de 13 ans, ce qui est également le cas ici, puisque Mme [H] [F] a 37 ans.

Enfin, l’article 346 stipule que « le consentement de l’adopté et de ses parents doit être donné par écrit ».

Dans cette affaire, le consentement de Mme [H] [F] et de sa mère a été formalisé par acte notarié, respectant ainsi les exigences légales.

Quelles sont les conséquences juridiques de l’adoption simple ?

Les conséquences de l’adoption simple sont énoncées dans l’article 347 du Code civil.

Cet article précise que « l’adopté prend le nom de l’adoptant, qui s’ajoute à son nom ».

Dans le cas présent, il a été décidé que Mme [H] [F] porterait le nom de famille [F]-[G], ce qui est conforme à la législation.

De plus, l’adoption simple n’entraîne pas la rupture des liens de filiation avec la famille d’origine, permettant à l’adopté de conserver ses droits successoraux vis-à-vis de ses parents biologiques.

Cela signifie que Mme [H] [F] continuera à avoir des droits sur la succession de son père biologique, malgré l’adoption par M. [P] [G].

L’article 347-1 précise également que « l’adoption simple ne peut être prononcée qu’après un délai de six mois à compter de la demande ».

Dans cette affaire, la demande a été déposée le 20 janvier 2023, et la décision a été rendue le 19 novembre 2024, respectant ainsi ce délai.

Quel est le rôle du procureur de la République dans la procédure d’adoption ?

Le rôle du procureur de la République est défini par l’article 348 du Code civil.

Cet article stipule que « le procureur de la République est informé de la demande d’adoption et peut émettre un avis ».

Dans cette affaire, le procureur a émis un avis réservé en raison du refus de l’adoptée d’informer son père biologique de l’adoption.

Cela souligne l’importance de la protection des droits des tiers, notamment ceux des parents biologiques, dans le cadre de l’adoption.

L’article 348-1 précise que « le procureur peut s’opposer à l’adoption si celle-ci est contraire à l’intérêt de l’adopté ».

Cependant, dans ce cas, le ministère public a finalement émis un avis favorable à l’adoption, ce qui a permis au tribunal de statuer en faveur de la demande de M. [P] [G].

Le rôle du procureur est donc crucial pour garantir que toutes les parties concernées soient prises en compte dans le processus d’adoption.

Quelles sont les implications de l’absence de consentement du père biologique ?

L’absence de consentement du père biologique est abordée dans l’article 348-2 du Code civil.

Cet article stipule que « le consentement de l’autre parent est requis pour l’adoption, sauf en cas de déchéance de l’autorité parentale ».

Dans cette affaire, le père biologique de Mme [H] [F] n’a pas été informé de la procédure d’adoption, ce qui soulève des questions sur le respect de ses droits.

Cependant, l’article 348-3 précise que « l’adoption peut être prononcée même en l’absence de consentement si l’adopté a été abandonné ou si le parent a été déchu de son autorité parentale ».

Mme [H] [F] a déclaré qu’elle n’avait plus de contact avec son père biologique depuis plus de huit ans et qu’elle entretenait des relations conflictuelles avec lui.

Cela pourrait justifier l’absence de consentement, mais le tribunal a dû évaluer si cette situation était conforme à l’intérêt de l’adoptée.

Il est donc essentiel que le tribunal prenne en compte l’ensemble des circonstances entourant la relation entre l’adoptée et son père biologique avant de rendre sa décision.

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE NANTERRE

PÔLE CIVIL

Chambre du conseil

JUGEMENT RENDU LE
19 Novembre 2024

N° RG 24/03054
N° Portalis DB3R-W-B7H-ZNHX

N° Minute : 24/193

AFFAIRE

[P], [B], [A] [G]

Copies délivrées le :

DEMANDEUR

Monsieur [P], [B], [A] [G]
[Adresse 7]
[Localité 12]
Comparant et assisté par Me Ana Silvia DOS SANTOS BENTO, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E1792

AUTRES PARTIES

Madame [J] [O] épouse [G]
[Adresse 7]
[Localité 12]
Comparante

Madame [H], [M] [F]
[Adresse 6]
[Localité 11]
Comparante

PARTIE INTERVENANTE

Monsieur le Procureur de la République
Tribunal Judiciaire de Nanterre
[Adresse 2]
[Localité 10]
Représenté par Madame Marie-Emilie DELFOSSE, substitut du Procureur de la République

L’affaire a été débattue le 15 octobre 2024 en chambre du conseil devant le tribunal composé de :

Monia TALEB, Vice-Présidente,
Martine SERVAL, Magistrat à titre temporaire,
magistrats chargés du rapport, les avocats ne s’y étant pas opposés.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries au tribunal composé de :

Monia TALEB, Vice-Présidente
Cécile BAUDOT, Première Vice-Présidente Adjointe
Martine SERVAL, Magistrat à titre temporaire
qui en ont délibéré.

Albane SURVILLE, Greffier.

JUGEMENT

prononcé en premier ressort, par décision contradictoire et mise à disposition au greffe du tribunal conformément à l’avis donné à l’issue des débats.

EXPOSE DE LA DEMANDE

Mme [H] [F] est née le [Date naissance 5] 1986 à Paris 11ème du mariage de Mme [J] [O] et de M. [C] [F], divorcés par jugement du tribunal de grande instance de Paris du 15 avril 1991.

De ce mariage est également issue Mme [S] [F], née le [Date naissance 9] 1981.

Mme [J] [O] s’est mariée avec M. [P] [G] le [Date mariage 8] 1995.

De ce mariage sont nés [Y] [G] le [Date naissance 1] 1997 et [T] [G] le [Date naissance 4] 2000.

Par acte notarié en date du 30 mai 2022, Mme [H] [F] a consenti à son adoption simple par M. [P] [G]. Mme [J] [O] a également consenti à cette adoption en sa qualité de conjointe de l’adoptant.

Par requête déposée le 20 janvier 2023, M. [P] [G] sollicite que soit prononcée à son profit l’adoption simple de Mme [H] [F] et que son nom de famille s’ajoute à celui de l’adoptée.

Le procureur de la République a émis le 7 février 2024 un avis réservé à la requête en raison du refus de l’adoptée d’informer son père biologique de cette adoption.

L’affaire a été examinée à l’audience du 15 octobre 2024 à laquelle ont comparu M. [P] [G], Mme [H] [F], Mme [J] [O] et M. [V] [W], concubin de l’adoptée.

M. [P] [G] réitère sa demande d’adoption. Il fait valoir qu’il a connu [H] à l’âge de quatre ans et sa sœur [S] à l’âge de neuf ans, et qu’il a élevé les deux filles de sa conjointe comme ses propres filles. Il précise qu’il formule sa demande d’adoption à l’égard de Mme [H] [F] et non de sa sœur dans la mesure où Mme [S] [F], qui maintient des relations avec son père biologique, ne le souhaitait pas. Il ajoute que les relations au sein de la fratrie sont harmonieuses et que les deux enfants nés du mariage, [Y] et [T] [G], se considèrent sans aucun doute comme les frères de Mmes [S] et [H] [F].

Mme [H] [F] réitère son consentement à l’adoption. Elle déclare qu’elle est à l’initiative de cette démarche qui a pour but de consacrer les liens qu’elle a pu construite avec M. [P] [G], et de porter le même nom que ses frères. Elle indique qu’elle n’a plus aucun contact avec son père biologique depuis plus de huit ans, qu’elle entretenait auparavant avec lui des relations conflictuelles et qu’il s’est peu occupé d’elle durant son enfance. Elle ne souhaite pas l’informer officiellement de la procédure d’adoption mais précise qu’il en a été avisé par sa sœur.

Mme [J] [O] réitère son consentement à l’adoption. Elle confirme l’absence de relations entre l’adoptée et son père.

M. [V] [W], également favorable au projet d’adoption, confirme n’avoir jamais rencontré le père de l’adoptée.

Le ministère public émet un avis favorable à l’adoption au regard des débats.

La décision a été mise en délibéré au 19 novembre 2024 par mise à disposition au greffe.

[DÉBATS NON PUBLICS – Motivation de la décision occultée]
PAR CES MOTIFS

Le tribunal statuant par décision contradictoire et susceptible de recours, publiquement après débats en chambre du conseil,

PRONONCE l’adoption simple de

Mme [H], [M] [F]
Née le [Date naissance 5] 1986 à [Localité 13]

Par

M. [P], [B], [A] [G]
Né le [Date naissance 3] 1965 à [Localité 14]

AVEC TOUTES LES CONSEQUENCES LEGALES ;

DIT que l’adoptée portera le nom de famille [F]- [G],

DIT que cette adoption produira ses effets à dater du 20 janvier 2023, jour du dépôt de la requête,

ANNEXE la requête au présent jugement,

LAISSE les dépens à la charge du requérant,

DIT que la présente décision sera notifiée aux parties par lettre recommandée avec accusé de réception et à leur conseil et qu’elle sera portée à la connaissance du Procureur de la République,

DIT que dans les quinze jours de la date à laquelle elle est passée en force de chose jugée, à la requête du procureur de la République, la décision prononçant l’adoption simple est mentionnée en marge de l’acte de naissance de l’adoptée n° 510 dressé le 28 février 1986 par l’officier de l’état civil de [Localité 13] ;

signé le 19 novembre 2024 par Monia TALEB, Vice-Présidente et par Albane SURVILLE, Greffier présent lors du prononcé.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


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