Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Versailles
Thématique : Évaluation du taux d’incapacité permanente partielle : enjeux de transmission d’informations médicales.
→ RésuméContexte de l’affaireLe 24 juillet 2018, une victime, exerçant en qualité d’employée de restauration au sein d’une société, a déclaré une maladie professionnelle à la caisse, sur la base d’un certificat médical attestant d’une tendinopathie de l’épaule droite. Cette maladie a été reconnue par la caisse au titre des maladies professionnelles. Évaluation de l’incapacitéLa date de consolidation de l’état de santé de la victime a été fixée au 21 octobre 2019. Par la suite, la caisse a attribué un taux d’incapacité permanente partielle de 12 % à la victime, ce qui a été contesté par la société employeur. Cette dernière a alors saisi la commission de recours amiable, puis le tribunal judiciaire de Nanterre. Décision du tribunalLe 21 décembre 2023, le tribunal a débouté la société de son recours, confirmant le taux d’incapacité permanente partielle de 12 % attribué à la victime. Le tribunal a également rejeté toutes les autres demandes de la société et l’a condamnée aux dépens. Appel de la sociétéLe 29 décembre 2023, la société a interjeté appel, demandant à la cour de juger recevable et fondée son appel. Elle a contesté l’absence de transmission du rapport détaillé d’attribution du taux d’incapacité au médecin mandaté par l’employeur, arguant que cela compromettait son droit à un procès équitable. Arguments de la caisseLa caisse a demandé à la cour de déclarer opposable la décision fixant le taux d’incapacité à 12 %. Elle a également soutenu que l’absence de transmission du rapport d’évaluation des séquelles ne rendait pas la décision inopposable à la société, citant des précédents juridiques. Motifs de la décision de la courLa cour a ordonné une consultation médicale sur pièces pour déterminer le taux d’incapacité permanente partielle de la victime, en tenant compte de l’éventuelle existence d’un état pathologique antérieur. La caisse et la société ont été tenues de transmettre leurs pièces au consultant dans un délai imparti. Conclusion et prochaines étapesLa cour a réservé les dépens et a précisé que le consultant devait déposer son rapport écrit au greffe de la cour d’appel avant le 30 juin 2025. Les parties disposeront ensuite d’un délai pour formuler leurs conclusions. L’affaire sera radiée du rôle des affaires en cours jusqu’à la réception du rapport de consultation. |
COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 89E
Ch.protection sociale 4-7
ARRÊT N°
CONTRADICTOIRE
DU 06 FEVRIER 2025
N° RG 24/00293 – N° Portalis DBV3-V-B7I-WJ2Y
AFFAIRE :
S.A.S.U. [9]
C/
[7]
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 21 Décembre 2023 par le pôle social du tribunal judiciaire de NANTERRE
N° RG : 20/01291
Copies exécutoires délivrées à :
Me Michel PRADEL
[8]
Copies certifiées conformes délivrées à :
S.A.S.U. [9]
[8]
Dr [O] [F]
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE SIX FEVRIER DEUX MILLE VINGT CINQ,
La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
S.A.S.U. [9]
[Adresse 3]
[Localité 5]
représentée par Me Michel PRADEL de la SELARL PRADEL AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : G0304 substituée par Me Nadia CHEHAT, avocate au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 88
APPELANTE
****************
[7]
Département juridique
[Adresse 4]
[Localité 2]
représenté par Mme [N] [S] (Représentant légal) en vertu d’un pouvoir général
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 05 Décembre 2024, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Marie-Bénédicte JACQUET, conseillère, faisant fonction de présidente, chargée d’instruire l’affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Marie-Bénédicte JACQUET, conseillère, faisant fonction de présidente,
Madame Aurélie PRACHE, présidente de chambre,
Madame Charlotte MASQUART, conseillère,
Greffière, lors des débats et du prononcé : Madame Juliette DUPONT,
EXPOSÉ DU LITIGE
Le 24 juillet 2018, Mme [T] [P] (l’assurée), exerçant en qualité d’employée de restauration au sein de la société [9] (la société), a déclaré à la [7] (la caisse) une maladie professionnelle sur la base d’un certificat médical initial établi le 25 juin 2018 faisant état de ‘tendinopathie de la coiffe des rotateurs de l’épaule droite’que la caisse a prise en charge au titre du tableau n° 57 des maladies professionnelles.
La consolidation de l’état de santé de l’assurée a été par la suite fixée la date du 21 octobre 2019.
Par courrier du 17 février 2020, la caisse a fixé un taux d’incapacité permanente partielle de 12 %.
Contestant le taux d’incapacité permanente partielle de 12 % attribué, la société a saisi la commission de recours amiable puis le pôle social du tribunal judiciaire de Nanterre.
Par jugement contradictoire en date 21 décembre 2023, le tribunal a :
– débouté la société de son recours ;
– fixé à 12 % le taux d’incapacité permanente partielle attribué à l’assurée à la date de consolidation de son état de santé le 21 octobre 2019, dans les rapports caisse/employeur ;
– rejeté toutes les autres et plus amples demandes ;
– condamné la société aux dépens.
Par déclaration reçue le 29 décembre 2023, la société a interjeté appel.
Par conclusions écrites, déposées et soutenues à l’audience, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens, conformément à l’article 455 du code de procédure civile, la société demande à la cour :
– de la dire et juger recevable et bien fondée dans son appel ;
– de réformer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Nanterre en date du 21 décembre 2023 en toutes ses dispositions ;
– de juger que l’absence de transmission du rapport détaillé d’attribution du taux d’incapacité permanente partielle au médecin mandaté par l’employeur ne lui permet pas de lui garantir un procès équitable ;
– de juger qu’en l’état du dossier, les éléments ne permettent pas de justifier du bien fondé du taux d’incapacité permanente partielle à l’assurée ;
– en conséquence de désigner tel expert aux fins de donner un avis sur le taux d’incapacité permanente partielle opposable à elle indépendamment de tout état antérieur ou cause totalement étrangère au travail ;
– d’enjoindre à la caisse de transmettre l’entier dossier médical de l’assurée, comprenant le rapport détaillé de l’attribution du taux d’incapacité permanente partielle, au docteur [C] [K], médecin mandaté par la société ;
– de juger qu’elle accepte de consigner telle somme qui sera fixée par la Cour, à titre d’avances sur les frais d’expertise et qu’elle s’engage à prendre à sa charge l’ensemble des frais d’expertise, quelle que soit l’issue du litige.
La société expose que la caisse fixe unilatéralement le taux d’IPP sans droit de regard de l’employeur ; que la contestation du taux d’IPP étant une contestation d’ordre médical, mais que le médecin mandaté par elle n’a pu avoir connaissance du rapport détaillé d’attribution du taux d’IPP ; que la commission médicale de recours amiable n’a pas rendu de décision et que pour bénéficier d’un procès équitable et pour lui permettre de débattre à armes égales, la désignation d’un expert est nécessaire afin que son médecin puisse obtenir le rapport médical relatif au taux d’IPP.
Par conclusions écrites, déposées et soutenues à l’audience, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens, conformément à l’article 455 du code de procédure civile, la caisse demande à la cour :
à titre principal,
– de déclarer opposable à la société la décision de la caisse fixant à 12% le taux d’IPP de l’assurée consécutif à la maladie professionnelle déclarée le 25 juin 2018 ;
à titre subsidiaire,
– de confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Nanterre maintenant à 12% le degré de réduction de la capacité de travail de l’assurée consécutif à la maladie professionnelle déclarée le 25 juin 2018 ;
– de confirmer la décision de la caisse fixant à 12% le taux d’IPP de l’assurée consécutif à la maladie professionnelle déclarée le 25 juin 2018 ;
– de débouter la requérante de toutes ses demandes, fins et conclusions.
La caisse demande le rejet de la demande d’inopposabilité du fait de l’absence de transmission du rapport d’évaluation des séquelles, la Cour de cassation ayant estimé que l’inobservation par la commission médicale de recours amiable de son obligation de transmettre ce rapport n’entraînait pas l’inopposabilité de la décision attributive du taux d’IPP à l’égard de la société.
A titre subsidiaire, elle soutient que le taux d’IPP correspond aux séquelles de l’assurée et doit être maintenu.
PAR CES MOTIFS
La cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et par mise à disposition au greffe,
Avant dire droit, sur la fixation du taux d’incapacité permanente partielle de Mme [T] [P] ;
Ordonne une consultation médicale sur pièces confiée au :
M. [O] [F]
Masseur kinésithérapeute
Expert auprès de la Cour d’appel de Versailles
Cabinet médical
[Adresse 11]
01.34.72.90.60
[Courriel 10]
afin de déterminer, après avoir pris connaissance de l’ensemble des pièces du dossier, à la date de consolidation fixée au 21 octobre 2019, le taux d’incapacité permanente partielle de Mme [T] [P], au titre de la maladie professionnelle qu’elle a déclaré le 24 juillet 2018, prise en charge par la [7] ;
Dit que le consultant devra se prononcer, en particulier, sur l’existence d’un état pathologique antérieur à cette maladie, et qu’il pourra formuler, à cet effet, toutes observations utiles ;
Dit que la [7] transmettra sous pli confidentiel, directement à l’attention du consultant désigné, conformément aux dispositions de l’article R. 142-16-3 du code de la sécurité sociale, et du médecin conseil de l’employeur, le docteur [C] [K] ([Adresse 1]), l’intégralité du rapport médical mentionné à l’article L. 142-6 et du rapport de la commission médicale de recours amiable, dans les dix jours qui suivent la notification du présent arrêt ;
Dit que la société [9] devra transmettre ses pièces au consultant dans le même délai ;
Dit n’y avoir lieu à ordonner l’avance des frais de consultation ;
Dit que le consultant devra déposer son rapport écrit au greffe de la cour d’appel de céans au plus tard, avant le 30 juin 2025 ;
Dit qu’à réception de ce rapport, les parties disposeront chacune d’un délai de deux mois pour formuler et notifier leurs conclusions, outre quinze jours supplémentaires pour toute réponse ou réplique éventuelle ;
Rappelle qu’en application de l’article R. 142-18-2 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au litige, les honoraires dus au consultant sont réglés selon le tarif fixé par l’arrêté du 21 décembre 2018 modifié relatif aux honoraires et aux frais de déplacement des médecins consultants mentionnés à l’article R. 142-16-1 du code de la sécurité sociale ;
Rappelle qu’en application de l’article L. 142-11 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au litige, les frais résultant de cette consultation incombent à la [6] ;
Dit qu’à l’issue de sa mission, le consultant adressera au greffe de la cour de céans les pièces justificatives (RIB, références du dossier, date d’intervention, régime d’appartenance de l’assuré, total des honoraires et des frais de déplacement, convocation et factures) ;
Dit que l’affaire sera radiée du rôle des affaires en cours et qu’elle sera enrôlée à nouveau sur l’initiative des parties ou à la diligence de la cour, au plus tard, à réception du rapport de consultation ;
Réserve les dépens.
Prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Marie-Bénédicte JACQUET, conseillère, faisant fonction de présidente, et par Madame Juliette DUPONT, greffière, à laquelle la magistrate signataire a rendu la minute.
La greffière La conseillère
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