Type de juridiction : Tribunal judiciaire
Juridiction : Tribunal judiciaire de Paris
Thématique : Délai de notification et responsabilité bancaire en cas de fraude
→ RésuméContexte de l’affaireDans cette affaire, une victime a assigné une banque, la BNP PARIBAS, devant le tribunal pour obtenir le remboursement de sommes perdues à la suite de virements frauduleux. La victime réclame un total de 50 000 euros pour les virements, ainsi que des indemnités pour préjudice moral et frais irrépétibles. Les faits de la fraudeLa victime a reçu un appel d’un prétendu représentant de sa banque, qui l’a informée d’un piratage de son compte. Ce dernier, en possession d’informations confidentielles, a demandé à la victime de modifier son code secret et d’approuver des opérations sur son compte. Suite à cet appel, deux virements de 25 000 euros chacun ont été effectués vers une banque irlandaise. Malgré les assurances de la banque concernant le remboursement, la victime a constaté que son compte avait été débité de la somme totale de 50 000 euros. Actions entreprises par la victimeAprès avoir signalé la fraude à la police et mis en demeure la banque de rembourser les sommes perdues, la victime a fondé sa demande sur l’article L. 133-19-II du code monétaire et financier, qui stipule que la banque doit rembourser les montants des virements frauduleux signalés dans un délai raisonnable. La victime conteste également avoir commis une négligence, arguant qu’elle a agi de bonne foi en répondant à un appel de sa banque. Position de la banqueLa banque, de son côté, a soulevé une fin de non-recevoir, arguant que l’action de la victime était forclose, car elle aurait dû assigner dans un délai de treize mois suivant la date des opérations contestées. La banque a demandé au tribunal de condamner la victime à payer des frais irrépétibles. Interprétation juridique et décision du tribunalLe tribunal a examiné l’interprétation de l’article L. 133-24 du code monétaire et financier, qui impose à l’utilisateur de signaler les opérations non autorisées dans un délai de treize mois. Le tribunal a conclu que la victime avait respecté ce délai en signalant la fraude le jour même. Par conséquent, la fin de non-recevoir soulevée par la banque a été rejetée, et la banque a été condamnée à payer les dépens de l’incident. Conclusion et prochaines étapesLe juge a renvoyé l’affaire à une audience ultérieure pour que la banque présente ses conclusions au fond. La décision souligne l’importance de la notification rapide des opérations non autorisées et clarifie les obligations des banques en matière de sécurité des transactions. |
TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]
[1] Copies délivrées le 04/02/2025
A Me ZIEGLER
Me PENIN
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9ème chambre 2ème section
N° RG 24/05220 – N° Portalis 352J-W-B7I-C4K44
N° MINUTE :
ORDONNANCE DU JUGE DE LA MISE EN ETAT
rendue le 04 Février 2025
DEMANDERESSE
Madame [T] [Y]
Sis [Adresse 3]
[Localité 4]
représentée par Maître Jocelyn ZIEGLER et Maître Alexandre DAKOS, de la SELEURL Jocelyn Ziegler SARL, avocats au barreau de PARIS, avocats plaidant, vestiaire #D1012
DEFENDERESSE
S.A. BNP PARIBAS
[Adresse 1]
[Localité 2]
représentée par Maître Dominique PENIN du LLP KRAMER LEVIN NAFTALIS & FRANKEL LLP, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #J0008
MAGISTRAT DE LA MISE EN ETAT
M. Gilles MALFRE, Premier Vice-président adjoint
assisté de Madame Camille CHAUMONT, Greffière
DEBATS
A l’audience sur incident du 3 décembre 2024, tenue en audience publique, avis a été donné aux avocats que l’ordonnance serait rendue le 04 Février 2025.
ORDONNANCE
Rendue publiquement par mise à disposition au greffe
Contradictoire
En premier ressort
Par acte du 25 mars 2024, Mme [Y] a fait assigner la BNP PARIBAS devant le présent tribunal, afin qu’elle soit condamnée à lui payer la somme de 50 000 euros en remboursement de deux virements frauduleux, avec intérêts au taux légal à compter du 7 juillet 2022, outre la somme de 8 000 euros en réparation de son préjudice moral et celle de10 000 euros au titre de ses frais irrépétibles.
La requérante expose avoir reçu le 16 juin 2022, à 20h17, un appel du numéro 0140141010 correspondant à celui de sa banque, à l’occasion duquel son interlocuteur, qui détenait des informations confidentielles la concernant, l’a alertée sur le piratage de son compte, lui précisant avoir bloqué ces deux comptes d’épargne (livret A et livret durable), du fait de virements frauduleux vers des bénéficiaires situés à [Localité 5].
Elle ajoute que son correspondant lui a demandé de se connecter sur l’application BNP et de modifier son code secret et lui a envoyé, via l’application, des notifications lui demandant d’annuler les bénéficiaires frauduleux et « d’approuver l’ajout des comptes bénéficiaires Livret A et Livret durable », ce qu’elle a fait. Elle indique que son interlocuteur lui a communiqué un nouveau code client et un nouveau code secret temporaire pour se connecter à son espace client.
Elle souligne qu’une quinzaine de minutes plus tard, elle rappelé le même numéro de téléphone, pour avoir confirmation de la résolution de la fraude, mais qu’un autre opérateur lui a alors indiqué que deux virements, d’un montant de 25 000 euros chacun, avait été exécutés depuis son compte vers une banque irlandaise. En réponse à sa demande d’annulation de ces deux virements, elle précise qu’on lui a assuré que ces sommes seraient recréditées, information qui lui a été confirmée lors d’un nouvel appel qu’elle a effectué le soir même à 21h30.
Elle note que le lendemain matin, elle a à nouveau contacté sa banque, qui lui a indiqué qu’un rappel de fonds avait été ordonné, mais avoir constaté le soir même que son compte avait été débité des 50 000 euros.
Le 24 juin 2022, elle a déposé plainte au commissariat de police de [Localité 6].
Par lettre du 7 juillet 2022, elle a mis en demeure sa banque, en vain, de lui rembourser la somme de 50 000 euros.
A l’appui de ses demandes, Mme [Y] soutient, au visa de l’article L. 133-19-II du code monétaire et financier, que la banque doit lui rembourser le montant des deux virements puisqu’elle a signalé le caractère frauduleux de ces opérations dans les minutes qui ont suivi.
Elle reproche en outre à la banque de ne pas avoir mis en place un système d’authentification forte, lors de l’exécution des deux virements litigieux.
Elle conteste par ailleurs avoir commis une négligence grave, alors qu’elle a été mise en confiance par le fait d’avoir été contactée depuis un numéro émanant de sa banque, outre que son interlocuteur disposait d’informations confidentielles la concernant. Elle ajoute n’avoir communiqué aucun code et avoir immédiatement signalé la fraude.
Par conclusions d’incident du 28 novembre 2024, la BNP PARIBAS demande au juge de la mise en état de juger l’action de Mme [Y] forclose et de condamner cette dernière à lui payer la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Par conclusions d’incident du 26 novembre 2024, Mme [Y] sollicite du juge de la mise qu’il rejette cette fin de non-recevoir. Subsidiairement, si la forclusion de son action était retenue, elle s’oppose à sa condamnation au titre des frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS
Le juge de la mise en état, statuant publiquement, par ordonnance contradictoire, susceptible d’appel, par mise à disposition au greffe,
REJETTE la fin de non-recevoir soulevée par la SA BNP PARIBAS ;
RENVOIE l’affaire à l’audience de mise en état du 11 mars 2025, 9h30, afin que la SA BNP PARIBAS conclue au fond ;
CONDAMNE la SA BNP PARIBAS aux dépens de l’incident ;
REJETTE la demande de condamnation au titre des frais irrépétibles formée par la SA BNP PARIBAS.
La greffière Le juge de la mise en état
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