Réévaluation des conditions d’hospitalisation psychiatrique et respect des droits du patient

·

·

Réévaluation des conditions d’hospitalisation psychiatrique et respect des droits du patient

L’Essentiel : Le 10 janvier 2025, le préfet de Seine-Saint-Denis a ordonné l’admission d’un patient en soins psychiatriques sans consentement, entraînant une hospitalisation complète. Cette décision a été prise en raison de l’état mental du patient, nécessitant une prise en charge immédiate. Le 16 janvier, un magistrat a ordonné la mainlevée de l’hospitalisation, mais le préfet a réintégré le patient le 24 janvier. Le 28 janvier, le préfet a saisi le tribunal pour poursuivre l’hospitalisation. Un certificat médical a décrit le patient comme en rupture de traitement, mais sans troubles mentaux majeurs. Le magistrat a finalement ordonné la mainlevée de l’hospitalisation.

Admission en soins psychiatriques

Le 10 janvier 2025, le préfet de Seine-Saint-Denis a ordonné l’admission d’un patient en soins psychiatriques sans consentement, entraînant une hospitalisation complète. Cette décision a été prise en raison de l’état mental du patient, qui nécessitait une prise en charge immédiate.

Ordonnance de mainlevée

Le 16 janvier 2025, un magistrat du tribunal judiciaire de Bobigny a ordonné la mainlevée de l’hospitalisation complète, avec un délai de vingt-quatre heures pour la mise en place d’un programme de soins. Cependant, le préfet a décidé de réintégrer le patient en hospitalisation complète le 24 janvier 2025, après avoir constaté des complications dans son état.

Procédure judiciaire

Le 28 janvier 2025, le préfet a saisi le tribunal pour poursuivre l’hospitalisation complète. Le procureur de la République a soutenu cette demande par écrit le 31 janvier 2025. Les débats ont eu lieu le 3 février 2025, où l’avocate du patient a présenté ses observations.

Évaluation médicale

Un certificat médical établi le 24 janvier 2025 a décrit le patient comme étant en rupture de traitement et tendu. Un avis médical ultérieur a noté l’absence de symptomatologie psychiatrique majeure, bien que le patient ait montré des signes d’irritabilité. Le patient a exprimé son désir de se réinsérer dans la société et de retrouver un emploi, tout en reconnaissant ses problèmes liés à la consommation de cannabis.

Conclusion du magistrat

Après avoir examiné les éléments médicaux et les déclarations du patient, le magistrat a conclu qu’il n’y avait pas de troubles mentaux justifiant la poursuite de l’hospitalisation complète. Par conséquent, la mainlevée de l’hospitalisation a été ordonnée, avec effet dans un délai maximal de vingt-quatre heures pour permettre l’établissement d’un programme de soins. Les dépens ont été laissés à la charge de l’État, et l’ordonnance a été notifiée au parquet.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions légales pour l’hospitalisation complète d’un patient en soins psychiatriques ?

L’article L. 3212-1, I, du code de la santé publique précise que pour qu’une personne atteinte de troubles mentaux puisse faire l’objet de soins psychiatriques sur décision du directeur d’un établissement, deux conditions doivent être réunies :

1° Ses troubles mentaux rendent impossible son consentement ;

2° Son état mental impose des soins immédiats, justifiant soit une hospitalisation complète avec surveillance médicale constante, soit une prise en charge sous une forme moins contraignante.

Ces conditions visent à protéger les droits des patients tout en garantissant la nécessité de soins appropriés.

Il est donc essentiel que l’hospitalisation complète soit justifiée par des éléments médicaux clairs, attestant de l’incapacité du patient à consentir et de la nécessité de soins immédiats.

Quel est le rôle du magistrat dans la prolongation de l’hospitalisation complète ?

L’article L. 3211-12-1, I-1°, du code de la santé publique stipule que l’hospitalisation complète d’un patient ne peut se poursuivre sans que le magistrat du siège du tribunal judiciaire ait statué sur cette mesure.

Le directeur de l’établissement ou le représentant de l’État dans le département doit saisir le juge dans un délai de huit jours à compter de l’admission du patient.

Le magistrat doit statuer avant l’expiration d’un délai de douze jours suivant l’admission, garantissant ainsi un contrôle judiciaire sur la prolongation de l’hospitalisation.

Cette procédure vise à protéger les droits des patients et à assurer que leur détention en milieu psychiatrique est justifiée et conforme à la législation en vigueur.

Quelles sont les obligations concernant le respect des libertés individuelles des patients en soins psychiatriques ?

L’article L. 3211-3, alinéa 1er, du code de la santé publique impose que les restrictions à l’exercice des libertés individuelles des personnes atteintes de troubles mentaux soient adaptées, nécessaires et proportionnées à leur état mental.

Il est également stipulé que la dignité de la personne doit être respectée et que sa réinsertion doit être recherchée.

Cela signifie que toute mesure d’hospitalisation doit être justifiée par des raisons médicales et ne doit pas excéder ce qui est nécessaire pour garantir la sécurité du patient et celle des autres.

Les établissements de santé doivent donc veiller à ce que les droits des patients soient respectés tout en leur fournissant les soins nécessaires.

Quels éléments médicaux sont nécessaires pour justifier la poursuite de l’hospitalisation complète ?

Dans le cas présent, les éléments médicaux présentés lors des débats n’ont pas permis de démontrer l’existence de troubles mentaux nécessitant des soins.

L’avis médical a constaté l’absence de symptomatologie psychiatrique majeure, bien que des signes d’irritabilité et d’intolérance à la frustration aient été notés.

Cependant, ces éléments ne suffisent pas à justifier une hospitalisation complète, car ils ne démontrent pas que le patient représente un danger pour lui-même ou pour autrui.

Ainsi, la décision de mainlevée de l’hospitalisation complète a été ordonnée, car les éléments médicaux ne soutenaient pas la nécessité de maintenir le patient en soins psychiatriques.

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BOBIGNY

ORDONNANCE STATUANT SUR LA POURSUITE D’UNE MESURE D’HOSPITALISATION COMPLÈTE

DÉLAI DE 12 JOURS

ADMISSION SUR DÉCISION D’UN REPRÉSENTANT DE L’ETAT

Article L. 3211-12-1 du code de la santé publique

N° RG 25/00810 – N° Portalis DB3S-W-B7J-2SFY
MINUTE: 25/211

Nous, Thomas SCHNEIDER, juge, magistrat du siège du tribunal judiciaire de Bobigny désigné par le président en application de l’article R. 213-12-2 du code de l’organisation judiciaire, assisté de Lucie BEAUROY-EUSTACHE, greffier, avons rendu la décision suivante concernant:

LA PERSONNE EN SOINS PSYCHIATRIQUES :

Monsieur [O] [P]
né le 06 Mars 1998 à [Localité 3]
[Adresse 1]
[Localité 3]

Etablissement d’hospitalisation: L’EPS DE [4]

présent assistéde Me Niamé DOUCOURE , avocat commis d’office

PERSONNE A L’ORIGINE DE LA SAISINE

MONSIEUR LE PRÉFET DE LA SEINE SAINT DENIS
Absent

INTERVENANT

L’EPS DE [4]
Absent

MINISTÈRE PUBLIC

Absent
A fait parvenir ses observations par écrit le 31 janvier 2025

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Par arrêté du 10 janvier 2025, le préfet de Seine-Saint-Denis a admis M. [O] [P] en soins psychiatriques sans consentement sous la forme d’une hospitalisation complète.

Par ordonnance du 16 janvier 2025, le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Bobigny a ordonné la mainlevée de l’hospitalisation complète avec un effet différé de vingt-quatre heures pour la mise en place éventuelle d’un programme de soins.

Par arrêté du 17 janvier 2025, le préfet a décidé de la mise en place d’un programme de soins à compter du même jour.

Par arrêté du 24 janvier 2025, il a décidé de la réintégration du patient en hospitalisation complète.

Le 28 janvier 2025, le préfet a saisi le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Bobigny aux fins de poursuite de l’hospitalisation complète.

Le procureur de la République a donné un avis favorable au maintien de l’hospitalisation par réquisitions écrites du 31 janvier 2025.

Les débats se sont déroulés à l’audience publique tenue le 3 février 2025 dans la salle d’audience aménagée à l’établissement public de santé de [4], situé [Adresse 2].

Me Niamé Doucouré, avocate de la personne hospitalisée, a été entendue en ses observations.

L’ordonnance a été mise en délibéré à ce jour.

MOTIVATION

L’article L. 3211-12-1, I-1°, du code de la santé publique dispose que l’hospitalisation complète d’un patient ne peut se poursuivre sans que le magistrat du siège du tribunal judiciaire, préalablement saisi par le directeur de l’établissement lorsque l’hospitalisation a été prononcée en application du chapitre II du présent titre ou par le représentant de l’État dans le département lorsqu’elle a été prononcée en application du chapitre III du présent titre, de l’article L. 3214-3 du présent code ou de l’article 706-135 du code de procédure pénale, ait statué sur cette mesure avant l’expiration d’un délai de douze jours à compter de l’admission prononcée en application des chapitres II ou III du présent titre ou de l’article L. 3214-3 du même code. Le juge est alors saisi dans un délai de huit jours à compter de cette admission.

L’article L. 3212-1, I, du même code précise qu’une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l’objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d’un établissement mentionné à l’article L. 3222-1 que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies : 1° ses troubles mentaux rendent impossible son consentement ; 2° son état mental impose des soins immédiats assortis soit d’une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d’une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous la forme mentionnée au 2° du I de l’article L. 3211-2-1.

L’article L. 3211-3, alinéa 1er du même code prévoit que, lorsqu’une personne atteinte de troubles mentaux fait l’objet de soins psychiatriques en application des dispositions des chapitres II et III du présent titre ou est transportée en vue de ces soins, les restrictions à l’exercice de ses libertés individuelles doivent être adaptées, nécessaires et proportionnées à son état mental et à la mise en œuvre du traitement requis. En toutes circonstances, la dignité de la personne doit être respectée et sa réinsertion recherchée.

En l’espèce, le certificat médical de demande de réintégration établi le 24 janvier 2025 par le docteur [G] [N], médecin, décrit l’état suivant du patient : hospitalisé pour trouble du comportement, en rupture de traitement, à l’arrivée, tendu et refuse l’entretien.

L’avis médical motivé dressé le 31 janvier 2025 par le docteur [G] [N], psychiatre de l’établissement, relate l’état suivant du patient : absence de symptomatologie psychiatrique majeure, mais une irritabilité et une intolérance à la frustration, motivé pour reprendre un travail, adhésion fragile aux soins.

M. [O] [P] a déclaré à l’audience que l’hospitalisation se passe plutôt mal ; que l’enfermement est difficile, car il veut se réinsérer dans la société et retrouver un emploi dans la pâtisserie, qu’il a perdu début janvier lors de la première hospitalisation ; qu’il a la visite de sa mère ; que la première hospitalisation est due au fait qu’il a été retrouvé dans la rue avec un katana dans la rue pour un clip de rap ; qu’il a été réhospitalisé, car il s’est présenté aux urgences générales et a giflé un agent de sécurité qui lui refusait de sortir fumer ; qu’il s’agit de sa dixième hospitalisation en psychiatrie depuis 2017 à cause de sa consommation de cannabis, qui provoque chez lui des décompensations en raison du manque de sommeil ; qu’il n’a pas fumé depuis un mois et veut reprendre un suivi avec un addictologue, ce qu’il avait arrêté ; et qu’il prend des médicaments pour l’anxiété.

L’avis médical constate l’absence de symptomatologie psychiatrique majeure. S’il mentionne une irritabilité et une intolérance à la frustration, il ne donne aucune explication permettant de dire qu’il s’agit des manifestations d’un trouble psychiatrique. Il ressort de l’audition de M. [O] [P] qu’il est calme, de bon contact, sans élément délirant, et conscient de la nécessité d’un suivi addictologique.

Il en résulte que les éléments médicaux versés aux débats ne permettent pas de démontrer l’existence de troubles mentaux qui nécessitent des soins et compromettent la sûreté des personnes ou portent gravement atteinte à l’ordre public.

La mainlevée de l’hospitalisation complète sera donc ordonnée.

En application de l’article L. 3211-12 du code de la santé publique, la mainlevée de l’hospitalisation complète prendra effet dans un délai maximal de vingt-quatre heures afin qu’un programme de soins puisse, le cas échéant, être établi en application de l’article L. 3211–2-1 du même code.

PAR CES MOTIFS

Le magistrat du siège,

Ordonne la mainlevée de l’hospitalisation complète de M. [O] [P] ;

Dit que cette mainlevée prendra effet dans un délai maximal de vingt-quatre heures afin qu’un programme de soins puisse, le cas échéant, être établi ;

Laisse les dépens à la charge de l’État ;

Rappelle que l’ordonnance bénéficie de l’exécution provisoire.

Fait et jugé à Bobigny le 3 février 2025.

Le Greffier

Lucie BEAUROY-EUSTACHE
Le Juge

Thomas SCHNEIDER
Ordonnance notifiée au parquet le à

le greffier

Vu et ne s’oppose :

Déclare faire appel :


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Chat Icon