Cour d’appel de Rennes, 5 février 2025, RG n° 22/02582
Cour d’appel de Rennes, 5 février 2025, RG n° 22/02582

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Rennes

Thématique : Évaluation du loyer commercial : enjeux de surface et de valorisation des locaux.

Résumé

Contexte de l’Affaire

La présente affaire concerne un bail commercial conclu le 3 mai 2006 entre un bailleur, représenté par la SCI DL Investissements, et un preneur, la société Juneo, pour des locaux destinés à un usage de bar, restauration et vente à emporter. Le bail initial, d’une durée de 9 ans, a été renouvelé tacitement après son expiration en 2015.

Demande de Renouvellement et Conflit

En juillet 2018, le bailleur a signifié un congé avec offre de renouvellement à un loyer annuel de 40 000 euros. En réponse, le preneur a demandé le renouvellement de son bail aux mêmes conditions que le bail précédent, avec un loyer de 16 900 euros. Un conflit est né concernant la valeur locative des locaux, entraînant la saisine de la commission de conciliation des baux commerciaux.

Expertise et Jugement Initial

Une expertise a été ordonnée pour évaluer la valeur locative, qui a été fixée à 26 250 euros par la commission. Cependant, le juge des loyers commerciaux, par un jugement du 17 mars 2022, a fixé le loyer à 20 731,50 euros, déboutant le bailleur de ses demandes et ordonnant l’apurement des comptes.

Appel de la SCI DL Investissements

Le bailleur a interjeté appel de cette décision, demandant une contre-expertise sur divers points, notamment la surface pondérée et l’attractivité de la terrasse. Il a également sollicité une revalorisation du loyer à 27 577 euros, tout en contestant la surface retenue par l’expert.

Réponse de la Société Juneo

Le preneur a demandé la confirmation du jugement initial, arguant que le bailleur ne contestait pas la valeur locative déterminée et que les demandes de ce dernier étaient irrecevables. La société Juneo a soutenu que les valeurs de référence utilisées par l’expert étaient pertinentes et que la majoration demandée pour la terrasse était excessive.

Décision de la Cour

La cour a confirmé le jugement du tribunal de première instance, rejetant les demandes du bailleur. Elle a maintenu la surface pondérée à 81,30 m², jugé que la valeur locative de 20 731,50 euros était appropriée et a débouté le bailleur de sa demande de contre-expertise. En conséquence, le bailleur a été condamné à verser des frais irrépétibles au preneur.

Conclusion

La décision finale a confirmé le jugement initial en toutes ses dispositions, déboutant le bailleur de ses demandes et condamnant ce dernier à payer des frais d’appel. Cette affaire illustre les complexités des baux commerciaux et les enjeux liés à la détermination de la valeur locative.

5ème Chambre

ARRÊT N°-41

N° RG 22/02582 – N° Portalis DBVL-V-B7G-SVVY

(Réf 1ère instance : 19/00001)

SCI DL INVESTISSEMENTS

C/

S.A.R.L. JUNEO

Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l’égard de toutes les parties au recours

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 05 FEVRIER 2025

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Virginie PARENT, Présidente,

Assesseur : Madame Pascale LE CHAMPION, Présidente,

Assesseur : Madame Virginie HAUET, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Catherine VILLENEUVE, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l’audience publique du 11 Décembre 2024

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 05 Février 2025 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats

****

APPELANTE :

SCI DL INVESTISSEMENTS agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représentée par Me Jean-David CHAUDET de la SCP JEAN-DAVID CHAUDET, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Anne Sophie FINOCCHIARO de la SELAS FIDAL, Plaidant, avocat au barreau d’ANGERS

INTIMÉE :

S.A.R.L. JUNEO RESTAURATION

[Adresse 5]

[Localité 4]

Représentée par Me Jean-Maurice CHAUVIN de la SELARL CHAUVIN JEAN-MAURICE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES

Par acte authentique en date du 3 mai 2006, M. et Mme [N], aux droits desquels est venue la SCI DL Investissements, ont donné à bail à la société Vemey, aux droits de laquelle est venue la société Juneo, des locaux sis [Adresse 1] et [Adresse 3] et [Adresse 5] à [Localité 7], destinés à usage de bar, restauration et vente à emporter.

Le bail a été conclu moyennant un loyer annuel de 21 735 euros hors taxes, pour une durée de 9 ans ayant commencé à courir le 3 mai 2006, pour se terminer le 2 mai 2015. Il s’est ensuite poursuivi par tacite reconduction.

Par acte d’huissier de justice du l6 juillet 2018, la SCI DL Investissements a fait signifier un congé avec offre de renouvellement pour une durée de 9 ans à compter du 1er avril 2019 moyennant un loyer annuel de 40 000 euros hors taxes.

Par acte d’huissier de justice du 17 décembre 2018, la société Juneo a sollicité le renouvellement de son bail commercial pour une durée de 9 ans à compter du 1er janvier 2019, aux mêmes clauses et conditions que le bail expiré, sous réserve de l’application de la loi du 18 juin 2014 et du décret du 3 novembre 2014, moyennant un loyer annuel de 16 900 euros hors taxes.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 15 janvier 2019, la société Junéo a saisi la commission de conciliation des baux commerciaux du département d’Ille-et-Vilaine. En parallèle et selon lettre de mission du 17 janvier 2019, la SCI DL Investissement a mandaté le cabinet Mercure Emeraude, expert-immobilier, aux fins d’évaluer la valeur locative de l’immeuble objet du bail commercial.

Selon rapport en date du 4 février 2019, ledit expert a estimé, pour une surface pondérée de 112 m², la valeur locative annuelle des lieux loués à

29 792 euros hors droits par la méthode de comparaison et celle de 704 euros par la méthode du loyer moyen constaté, hors droits également.

Selon avis en date du 9 avril 2019, la commission des baux commerciaux du département d’Ille-et-Vilaine a retenu une surface pondérée de 85m² et fixé la valeur locative annuelle à 22 100 euros, majorée de 20% en raison de la terrasse et de sa surface, soit un total de 26 250 euros.

Par assignation en date du 30 avril 2019, la société Juneo a fait citer la SCI DL Investissements devant le juge des loyers commerciaux.

Par jugement du l2 septembre 2019, le juge des loyers commerciaux a prononcé le renouvellement du bail à compter du 1er janvier 2019 aux mêmes clauses et conditions, à l’exception du loyer et, avant-dire droit sur le montant du loyer, a ordonné une expertise.

L’expert a déposé son rapport le 5 mai 2021.

Par jugement en date du 17 mars 2022, le juge des loyers commerciaux du tribunal judiciaire de Saint-Malo a :

– débouté la SCI DL Investissements de ses demandes,

– fixé le loyer du bail renouvelé à la somme annuelle 20 731,50 euros à compter du 1er janvier 2019,

– ordonné l’apurement des comptes entre les parties sur cette base,

– dit que les sommes dues produiront intérêts au taux légal depuis le jour de 1’échéance du loyer jusqu’au paiement,

– dit que, conformément aux dispositions de l’article L.145-57 du code de commerce, dans le délai d’un mois qui suivra la signification de la décision, les parties procéderont à la rédaction d’un bail et que faute pour l’une ou l’autre de procéder à la signature dudit bail, le présent jugement vaudra bail,

– condamné la SCI DL Investissements à payer à la société Junéo une indemnité de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la SCI DL Investissements aux dépens,

– rappelle que 1’exécution provisoire est de droit.

Le 21 avril 2022, la SCI DL Investissements a interjeté appel de cette décision et aux termes de ses dernières écritures notifiées le 5 décembre 2022, elle demande à la cour de :

– infirmer le jugement entrepris en ce qu’il l’a déboutée de ses demandes, fixé le loyer du bail renouvelé à la somme annuelle de 20 731,50 euros à compter du 1er janvier 2019, ordonné l’apurement des comptes entre les parties sur cette base, dit que les sommes dues produiront intérêts au taux légal depuis le jour de l’échéance du loyer jusqu’au paiement, dit que conformément aux dispositions de l’article L.145-57 du code du commerce, dans les délais d’un mois qui suivra la signification de la décision, les parties procéderont à la rédaction d’un bail et que faute pour l’une ou l’autre de procéder à la signature dudit bail, le présent jugement vaudra bail, l’a condamnée à payer à la société Juneo une indemnité de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, l’a condamnée aux dépens, rappelé que l’exécution provisoire est de droit,

– ordonner une contre-expertise ou un complément d’expertise sur les points suivants :

* calcul de la surface pondérée,

* vérifier l’autorisation administrative relative à l’occupation de la terrasse, et d’apprécier le facteur de majoration lié à l’existence de cette terrasse,

* évaluer les conséquences de la modification des facteurs locaux commercialité sur le calcul de la valeur locative,

* recueillir l’ensemble des renseignements attachés aux locaux de référence

Subsidiairement,

– fixer la valeur locative annuelle des locaux situés [Adresse 8] et [Adresse 3] et [Adresse 5] à [Localité 7] à la somme de 27 577 euros HT HC et à tout le moins à une somme qui ne serait être inférieure à 25 480 euros HT HC à compter du renouvellement du bail,

– débouter la société Juneo de sa demande tendant à constater qu’elle ne conteste pas que la valeur locative déterminée en fonction des prix couramment pratiqués dans le voisinage tient compte de l’avantage procuré par l’existence de la terrasse et constater l’accord des parties sur ce point,

– débouter la société Juneo de sa demande tendant à constater que les parties ont conclu en première instance à l’homologation de la surface pondérée proposée par l’expert judiciaire, soit 81,30 m², ayant constaté que les parties sont liées par un contrat judiciaire pour la prise en compte de cette surface de 81,30 m²,

– débouter la société Juneo de sa demande tendant à déclarer irrecevable sa demande de fixer cette surface pondérée à 89 m²,

– condamner la société Juneo à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner la société Juneo en tous les dépens de première instance et d’appel, en ce compris les frais d’expertise.

Par dernières conclusions notifiées le 4 avril 2023, la société Juneo demande à la cour de :

– débouter la SCI DL Investissements de toutes ses demandes, fins et conclusions,

– confirmer le jugement rendu par le juge des loyers commerciaux du tribunal judiciaire de Saint-Malo le 17 mars 2022,

– juger que la SCI DL Investissements ne conteste pas que la valeur locative déterminée en fonction des prix couramment pratiqués dans le voisinage tient compte de l’avantage procuré par l’existence de la terrasse et constater l’accord des parties sur ce point,

– juger que les parties ont conclu en première instance à l’homologation de la surface pondérée proposée par l’expert judiciaire, soit 81,30 m² ayant constaté que les parties sont liées par un contrat judiciaire pour la prise en compte de cette surface à 81,30 m²,

– déclarer en conséquence irrecevable la demande de la SCI DL Investissements de fixer cette surface pondérée à 89 m² tant au regard de l’article 565 du code de procédure civile qu’au regard du contrat judiciaire formé entre les parties,

– subsidiairement, la déclarer mal fondée et fixer la surface pondérée à 81,30 m²,

– débouter la SCI DL Investissements de sa demande de revalorisation de prix de base du m² pondéré proposé par l’expert judiciaire M. [U] soit 255 euros HT du m²,

– confirmer le jugement du juge des loyers commerciaux de [Localité 4] en

date du 17 mars 2022 en toutes ses dispositions et,

– y additant, devant la cour, condamner la SCI DL Investissements à payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’en tous les dépens.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 14 novembre 2024.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et par mise à disposition au greffe,

Déboute la société Juneo de ses demandes d’irrecevabilité ;

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Déboute la SCI DL Investissements de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

Condamne la SCI DL Investissements à payer à la société Juneo la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles en cause d’appel ;

Condamne la SCI DL Investissements aux entiers dépens d’appel.

Le greffier, La présidente,

 


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