L’Essentiel : Le 16 décembre 2016, un salarié, en qualité de magasinier, a été victime d’un accident de travail. Le tribunal judiciaire de Marseille a, par un jugement du 19 octobre 2022, débouté le salarié de sa demande de reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur, estimant que les circonstances de l’accident étaient indéterminées. Le salarié a formé un recours en révision le 22 février 2024, assignant l’employeur et la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) du Var. Le tribunal a déclaré le recours irrecevable, condamnant le salarié à verser une indemnité à l’employeur et à supporter les dépens.
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Contexte de l’AccidentLe 16 décembre 2016, un salarié de la société [7], en qualité de magasinier, a été victime d’un accident de travail. Cet accident a été pris en charge par la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) du Var, qui a déclaré l’état de l’assuré consolidé le 30 novembre 2023. Jugement InitialPar un jugement rendu le 19 octobre 2022, le pôle social du tribunal judiciaire de Marseille a débouté le salarié de sa demande de reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur. Le tribunal a estimé que les circonstances de l’accident étaient indéterminées et que les conditions nécessaires pour établir la faute inexcusable n’étaient pas prouvées. Recours en RévisionLe salarié, par l’intermédiaire de son conseil, a formé un recours en révision le 22 février 2024, contestant le jugement précédent. Il a assigné la société [7] ainsi que la CPAM du Var, dénonçant cette action au procureur de la République. L’affaire a été fixée à l’audience de plaidoirie du 23 octobre 2024. Demandes du SalariéLe salarié a demandé au tribunal de juger recevable et fondé son recours en révision, de reconnaître la faute inexcusable de son employeur, et d’ordonner la majoration de sa rente. Il a également sollicité la désignation d’un médecin-expert pour évaluer ses préjudices, une provision de 10.000 € pour son préjudice corporel, et la condamnation de l’employeur à payer 2.000 € en vertu de l’article 700 du code de procédure civile. Arguments de l’EmployeurLa société [7] a contesté la recevabilité du recours, arguant que les conditions n’étaient pas remplies et a demandé la condamnation du salarié à lui verser une indemnité de 2.000 €. Sur le fond, elle a soutenu que le salarié ne prouvait pas l’existence d’une faute inexcusable et a demandé à être déboutée de toutes les demandes. Position de la CPAMLa CPAM du Var, dispensée de comparaître, a communiqué ses écritures en se rapportant à l’appréciation du tribunal sur la recevabilité de l’action en révision et la reconnaissance de la faute inexcusable. Elle a également demandé que la mission d’expertise soit limitée et a sollicité le remboursement des sommes avancées si la faute inexcusable était reconnue. Décision du TribunalLe tribunal a déclaré le recours en révision irrecevable, estimant que le salarié n’avait pas prouvé que son employeur avait retenu de mauvaise foi un document décisif. En outre, le tribunal a condamné le salarié à payer 1.500 € à la société [7] en application de l’article 700 du code de procédure civile et a ordonné qu’il supporte les dépens. ConclusionAinsi, le tribunal a statué en faveur de l’employeur, rejetant les demandes du salarié et confirmant l’irrecevabilité de son recours en révision. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les conditions de recevabilité du recours en révision selon le code de procédure civile ?Le recours en révision est régi par l’article 593 du code de procédure civile, qui stipule que ce recours vise à faire rétracter un jugement passé en force de chose jugée afin qu’il soit à nouveau statué en fait et en droit. L’article 595 précise les causes limitatives d’ouverture de ce recours, énonçant : « 1. S’il se révèle, après le jugement, que la décision a été surprise par la fraude de la partie au profit de laquelle elle a été rendue ; Dans tous ces cas, le recours n’est recevable que si son auteur n’a pu, sans faute de sa part, faire valoir la cause qu’il invoque avant que la décision ne soit passée en force de chose jugée. » Ainsi, pour qu’un recours en révision soit recevable, il doit respecter trois conditions fondamentales : la cause de révision ne doit pas avoir été connue de l’auteur avant le jugement, l’auteur doit prouver qu’il n’a pas pu faire valoir sa cause sans faute de sa part, et la cause de révision doit être déterminante pour la décision attaquée. Quelles sont les implications de la faute inexcusable de l’employeur dans le cadre d’un accident du travail ?La faute inexcusable de l’employeur est définie par l’article L. 452-1 du code de la sécurité sociale, qui stipule que l’employeur est responsable des accidents du travail survenus à ses salariés lorsqu’il a eu connaissance du danger et n’a pas pris les mesures nécessaires pour le prévenir. Cet article précise que : « Lorsque l’accident est dû à une faute inexcusable de l’employeur, la victime ou ses ayants droit peuvent demander une majoration de la rente d’incapacité permanente. » Pour établir la faute inexcusable, il est nécessaire de prouver que l’employeur avait conscience du danger et qu’il n’a pas mis en œuvre les mesures de sécurité adéquates. Dans le cas présent, le salarié a soutenu que l’accident était causé par un état défectueux du sol, ce qui pourrait impliquer une négligence de l’employeur dans l’entretien des lieux de travail. Comment la jurisprudence interprète-t-elle la notion de pièces décisives dans le cadre d’un recours en révision ?La jurisprudence considère qu’une pièce est décisive si elle a un impact significatif sur la décision rendue. Selon l’article 595 du code de procédure civile, pour qu’un recours en révision soit recevable, il faut que la pièce nouvellement découverte ait été retenue par une autre partie de mauvaise foi et qu’elle soit déterminante pour la décision. Dans le cas présent, le compte-rendu d’accident, bien qu’évoqué par le salarié, n’a pas été jugé décisif par le tribunal. En effet, le document ne contenait pas de description précise des circonstances de l’accident et ne prouvait pas que l’employeur avait connaissance du danger avant l’accident. Ainsi, le tribunal a conclu que le compte-rendu ne permettait pas de vérifier que l’employeur avait connaissance de l’irrégularité du sol, ce qui est essentiel pour établir la faute inexcusable. Quelles sont les conséquences d’un recours en révision irrecevable sur les demandes d’indemnisation ?Lorsque le recours en révision est déclaré irrecevable, comme dans le cas présent, cela signifie que le jugement initial reste en vigueur et que les demandes d’indemnisation qui en découlent ne peuvent pas être réexaminées. Le tribunal a ainsi condamné le salarié à payer une somme à l’employeur sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, qui prévoit que « la partie qui succombe peut être condamnée à payer à l’autre partie une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. » Dans cette affaire, le tribunal a alloué à l’employeur une indemnité de 1.500 €, ce qui souligne que le salarié, en échouant dans sa demande de révision, a également perdu la possibilité de faire valoir ses droits à indemnisation pour la faute inexcusable de l’employeur. |
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE
POLE SOCIAL
[Adresse 8]
[Adresse 8]
[Localité 1]
JUGEMENT N°25/00126 du 05 Février 2025
Numéro de recours: N° RG 24/01114 – N° Portalis DBW3-W-B7I-4TY4
AFFAIRE :
DEMANDEUR
Monsieur [P] [R]
né le 05 Août 1984 à [Localité 5] (BOUCHES-DU-RHONE)
[Adresse 6]
[Localité 4]
représenté par Me Talissa FERRER BARBIERI, avocat au barreau d’AIX-EN- PROVENCE
c/ DEFENDERESSE
S.A.S. [7]
[9]
[Adresse 10]
[Localité 5]
représentée par Me Denis FERRE, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par
Me Myriam BENDAFI, avocat au barreau de MARSEILLE
Appelée en la cause:
Organisme CPAM DU VAR
[Adresse 2]
[Localité 3]
dispensée de comparaître
DÉBATS : À l’audience publique du 23 Octobre 2024
COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :
Président : MEO Hélène, Première Vice-Présidente
Assesseurs : PESCE-CASTELLA Catherine
TOMAO Jean-Claude
L’agent du greffe lors des débats : MULLERI Cindy
À l’issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 08 Janvier 2025, prorogé au 05 Février 2025
NATURE DU JUGEMENT
contradictoire et en premier ressort
Le 16 décembre 2016, [P] [R], salarié de la société [7] en qualité de magasinier, a été victime d’un accident de travail qui a été pris en charge au titre de la législation sur les risques professionnels par la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) du Var, laquelle a déclaré l’état de l’assuré consolidé le 30 novembre 2023.
Par jugement du 19 octobre 2022, le pôle social du tribunal judiciaire de Marseille a débouté [P] [R] de son action tendant à la reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur à l’origine dudit accident du travail aux motifs que les circonstances de l’accident sont indéterminées et que les conditions de la faute inexcusable (conscience du danger par l’employeur et absence de mesures adaptées pour prévenir le risque) ne sont pas établies.
Suivant requête remise en propre au greffe le 22 février 2024, [P] [R], par l’intermédiaire de son conseil, a formé un recours en révision à l’égard du jugement susvisé puis a assigné la société [7] ainsi que la CPAM du Var à l’audience de mise en état dématérialisée su 29 mai 2024, en dénonçant cette action au procureur de la République.
Après établissement d’un calendrier de procédure, l’affaire a été fixée à l’audience de plaidoirie du 23 octobre 2024.
[P] [R], représenté par son conseil qui reprend oralement ses dernières conclusions en réplique n° 2, demande au tribunal de :
juger recevable et bien-fondé le recours en révision ;dire et juger que l’accident dont il a été victime est dû à la faute inexcusable de son employeur, la société [7] ;En conséquence :
ordonner la majoration de la rente à son taux maximum ;désigner un médecin-expert pour l’examiner et évaluer les préjudices qu’il a subis avec la mission détaillée dans ses conclusions aux frais de l’employeur ;lui allouer une provision de 10.000 € à valoir sur l’indemnisation de son préjudice corporel ;condamner l’employeur au paiement de la somme de 2.000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Au soutien de sa demande de révision, [P] [R] rappelle qu’il a, au cours de l’instance initiale, sollicité en vain de son employeur la production du compte-rendu de l’accident établi par son chef d’agence, la société [7] ayant indiqué dans un premier temps qu’elle n’entendait pas le produire avant de préciser qu’elle ne disposait pas de ce document alors que postérieurement au jugement du 19 octobre 2022, [D] [Z], membre du CSE, lui a volontairement transmis ce compte-rendu. En réponse aux arguments de la société [7], il fait valoir que l’accident est survenu 10 jours après son embauche et que son employeur ne l’avait pas informé d’un site intranet ni communiqué les codes d’accès lui permettant d’avoir connaissance des documents internes à la société. Sur le fond, il estime qu’il ressort du compte-rendu ainsi que de celui de la réunion du CHSCT du 23 décembre 2016 que l’accident a été causé par un état défectueux du sol, plus précisément par un trou dont l’existence a été constatée le jour de l’accident.
La société [7], représentée à l’audience par son conseil, soutient oralement ses dernières écritures récapitulatives et responsives en sollicitant du tribunal de :
In limine litis et à titre principal :
juger que les conditions du recours en révision ne sont pas remplies et déclarer irrecevable le recours ;condamner [P] [R] à lui verser une indemnité de 2.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile ;Sur le fond, à titre subsidiaire :
dire et juger que [P] [R] ne rapporte pas la preuve de l’existence d’une faute inexcusable ;le débouter purement et simplement de l’ensemble de ses demandes ;le condamner à lui verser une indemnité de 2.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civileÀ titre encore plus subsidiaire :
limiter la mission d’expertise aux seuls postes de préjudices non couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale, et dont le détail figure dans ses conclusions auxquelles il est renvoyé pour un exposé complet des demandes ;débouter [P] [R] de ses autres demandes ;dire et juger qu’en tout état de cause la CPAM du Var fera l’avance de l’ensemble des indemnités et provisions allouées au salarié.
S’agissant de la recevabilité du recours, la société [7] rappelle le libellé de l’article 593 du code de procédure civile et soutient, d’une part, que son intention frauduleuse n’est pas établie puisqu’elle n’a jamais indiqué que le compte-rendu n’existait pas et, d’autre part, que la pièce recouvrée n’a pas de caractère décisif et enfin, que [P] [R] ne démontre pas s’être trouvé durant la procédure antérieure dans l’impossibilité d’obtenir ce compte-rendu.
Sur le fond, elle estime que les conditions de la faute inexcusable ne sont toujours pas remplies en l’absence de certitude sur les circonstances exactes de l’accident et d’établissement de sa conscience du danger puisque la nouvelle pièce ne permet aucunement d’établir qu’elle avait connaissance de l’existence d’une irrégularité du sol avant l’accident.
La CPAM du Var, dispensée de comparaître, a communiqué des écritures aux termes desquelles elle s’en rapporte à l’appréciation du tribunal quant à la recevabilité de l’action en révision, la reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur, la majoration de l’indemnité en capital et la demande de provision en sollicitant toutefois qu’elle soit ramenée à de plus justes proportions au regard du taux d’incapacité retenu à hauteur de 5 %. S’agissant de l’expertise, la caisse sollicite que la mission de l’expert soit limitée aux chefs repris dans ses écritures auxquelles il est renvoyé. En dernier lieu, elle réclame la condamnation de la société [7], dans l’hypothèse où sa faute inexcusable est reconnue, à lui rembourser l’intégralité des sommes dont elle serait tenue de faire l’avance.
En application de l’article 455 du code de procédure civile, il sera renvoyé aux écritures des parties pour un exposé plus ample de leurs moyens et prétentions.
L’affaire a été mise en délibéré au 8 janvier 2025, prorogée au 5 février 2025.
Sur la demande en révision
Selon l’article 593 du code de procédure civile, le recours en révision tend à faire rétracter un jugement passé en force de chose jugée pour qu’il soit à nouveau statué en fait et en droit.
L’article 595 précise les causes limitatives d’ouverture de ce recours comme suit:
» 1. S’il se révèle, après le jugement, que la décision a été surprise par la fraude de la partie au profit de laquelle elle a été rendue ;
2. Si, depuis le jugement, il a été recouvré des pièces décisives qui avaient été retenues par le fait d’une autre partie ;
3. S’il a été jugé sur des pièces reconnues ou judiciairement déclarées fausses depuis le jugement ;
4. S’il a été jugé sur des attestations, témoignages ou serments judiciairement déclarés faux depuis le jugement.
Dans tous ces cas, le recours n’est recevable que si son auteur n’a pu, sans faute de sa part, faire valoir la cause qu’il invoque avant que la décision ne soit passée en force de chose jugée « .
Quelle que puisse être la cause d’ouverture précisément invoquée dans une espèce donnée, le recours en révision ne sera possible que si trois conditions de base sont respectées. La cause de révision invoquée ne doit pas s’être révélée à l’auteur du recours en révision avant que la décision attaquée n’ait été rendue. Puis, le requérant doit n’avoir pu faire valoir sans faute de sa part la cause de révision avant que la décision attaquée ne soit passée en force de chose jugée. Enfin, la cause de révision invoquée doit avoir un caractère déterminant au regard de la décision attaquée.
En l’espèce, [P] [R] expose que malgré plusieurs demandes de sa part suivies d’une sommation de communiquer il n’a pu, dans le cadre de l’instance, obtenir de son employeur la communication du compte-rendu d’accident que son chef d’agence avait établi devant lui le jour de l’accident, la société [7] ayant dans un premier temps indiqué qu’elle ne souhaitait pas communiquer des éléments internes avant d’indiquer aux termes de conclusions qu’elle n’avait pas conservé le compte-rendu.
[P] [R] explique que par courriel du 18 décembre 2023, alors qu’il était toujours en arrêt de travail, [D] [Z], membre du CSE, qu’il avait contactée pour pouvoir bénéficier des chèques-cadeaux qui venaient d’être dématérialisés, lui a transmis ce document ainsi que le procès-verbal du CSE, après qu’il lui ait indiqué qu’il n’avait jamais eu accès au compte-rendu d’accident.
Il ajoute que contrairement à ce que soutient l’employeur, il n’avait pas accès à l’intranet de l’entreprise sur lequel seul le procès-verbal du CSE était accessible à l’ensemble des salariés dans la mesure où il avait été embauché seulement 10 jours avant l’accident du travail et que son employeur ne lui avait pas communiqué de code d’accès ni même informé de l’existence d’un intranet.
Il en déduit que la société [7] a été d’une particulière mauvaise foi en soutenant que ce compte-rendu n’existait pas et a fait preuve d’une rétention dolosive.
La société [7] retorque qu’elle n’a jamais soutenu que le compte-rendu n’existait pas de sorte qu’il ne peut lui être reproché une intention frauduleuse puisque [P] [R] ne démontre pas que, contrairement à ce qu’elle a indiqué dans le cadre de l’instance initiale, elle avait conservé ce document.
Elle fait par ailleurs valoir que le salarié ne démontre pas le caractère décisif de la pièce recouvrée puisque le compte-rendu n’est ni daté ni signé et ne relate pas les circonstances de l’accident. Elle ajoute que par ailleurs, il n’est pas établi que le trou dont il est fait mention dans le compte-rendu soit la cause de l’accident ni qu’elle avait connaissance de ce trou avant l’accident.
En dernier lieu, l’employeur estime que [P] [R] n’établit pas s’être trouvé dans l’impossibilité d’obtenir ce compte-rendu pendant la procédure puisqu’il pouvait se rapprocher d’un représentant du personnel à cette fin, nonobstant sa récente embauche, alors par ailleurs que [D] [Z] indique dans son attestation que tous les procès-verbaux du CSE sont mis à la disposition des salariés après leur approbation en réunion plénière sur l’intranet accessible à tous les salariés de la société.
L’action en révision n’est recevable qu’en cas de tromperie ou de mauvaise foi, ce qui implique que son auteur avait sciemment pour objectif de tromper le juge. Dès lors, la manœuvre doit être volontaire.
Par ailleurs, il n’est pas suffisant de caractériser la tromperie, encore faut-il que cette dernière ait déterminé le sens de sa décision
Ainsi, le recours en révision fondé sur l’article 595 2° du code de procédure civile sera recevable à condition pour le demandeur de démontrer qu’il a eu connaissance de la rétention d’une pièce décisive par une autre partie, qui l’a retenue de mauvaise foi, dans l’objectif de tromper l’esprit du juge.
En outre, n’est pas considérée comme une rétention de pièces l’absence de communication d’une pièce qui était accessible à toute personne accomplissant les diligences nécessaires.
En l’espèce, [P] [R] se prévaut du compte-rendu de l’accident rédigé par son chef d’agence. Il ne résulte pas des éléments fournis que ce document pouvait être obtenu à partir de l’intranet de l’entreprise accessible à tous les salariés.
Pour autant, l’employeur n’a jamais indiqué que ce document n’existait pas puisque, dans un premier temps, il a précisé ne pas souhaiter diffuser des éléments internes à la société, puis indiquer dans le cadre de la procédure en recherche de la faute inexcusable ne pas avoir conservé ce document.
Or, aucun élément ne permet de démontrer que l’employeur avait conservé ce document puisque [P] [R] n’a pu en avoir possession que par l’intermédiaire d’un membre du CSE.
Le requérant échoue dès lors à démontrer que son employeur a volontairement dissimulé ladite pièce dans le but de tromper la religion du tribunal.
Par ailleurs, la pièce litigieuse doit être décisive.
Or, en l’espèce, le compte-rendu d’accident, au-delà du fait qu’il n’est effectivement pas signé, ne contient aucune description de l’accident, mais permet uniquement de savoir qu’il est survenu le 16 décembre 2016 à 13h35 dans la cour de la société [9] et que l’état du sol était mauvais, le supérieur de [P] [R] ayant préconisé après l’accident de positionner un cône de signalement du trou puis une rénovation du revêtement.
Il ne permet donc pas de connaître les circonstances précises de survenue de l’accident ni de vérifier que l’employeur avait, préalablement à l’accident, connaissance du danger auquel était exposé son salarié.
La preuve du caractère décisif de ce document n’est donc pas non plus rapportée.
Il en est de même du procès-verbal de réunion du CHSCT du 23 décembre 2016 qui ne donne aucun élément supplémentaire puisque l’accident de [P] [R] y est évoqué en ces termes : « Sur Palette, dans la déclaration, l’état du sol est mauvais, il faut signaler le trou et refaire le revêtement ».
Par conséquent, l’action en révision engagée par [P] [R] est irrecevable.
Sur les autres demandes
L’équité commande d’allouer à la société [7] la somme de 1.500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
[P] [R], qui succombe, supportera les dépens.
Le tribunal, statuant après débats publics, par mise à disposition au greffe après en avoir délibéré, par jugement contradictoire et en premier ressort:
DÉCLARE irrecevable le recours en révision formé par [P] [R] ;
CONDAMNE [P] [R] à payer à la société [7] la somme de 1.500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE [P] [R] aux dépens ;
DIT que tout appel de la présente décision doit, à peine de forclusion, être formé dans le mois de la réception de sa notification.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE
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