Interdépendance des contrats dans une opération de location financière

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Interdépendance des contrats dans une opération de location financière

L’Essentiel : La présente affaire concerne un contrat de location financière conclu entre une société locataire, désignée comme la société A, et une société de location, désignée comme la société B. Ce contrat portait sur un matériel de bureautique fourni par une société de fourniture, désignée comme la société C, responsable de la maintenance. Suite à la résolution du contrat de maintenance par la société A, cette dernière a informé la société B de la caducité du contrat de location. La société B a alors assigné la société A en paiement des loyers impayés, entraînant un litige sur l’interdépendance des contrats.

Contexte de l’affaire

La présente affaire concerne un contrat de location financière conclu le 2 décembre 2016 entre une société locataire, désignée comme la société A, et une société de location, désignée comme la société B. Ce contrat portait sur un matériel de bureautique fourni par une société de fourniture, désignée comme la société C, qui était également responsable de la maintenance du matériel.

Résolution du contrat de maintenance

Le 8 janvier 2020, la société A a notifié à la société C la résolution du contrat de maintenance en raison d’un manquement de cette dernière à ses obligations. Par la suite, le 13 janvier 2020, la société A a informé la société B de la caducité du contrat de location financière, en raison de la résolution du contrat de maintenance.

Liquidation de la société de fourniture

Le 28 janvier 2020, la société C a été mise en liquidation judiciaire, ce qui a eu des conséquences sur les relations contractuelles entre les parties impliquées.

Litige sur les loyers impayés

Suite à la mise en liquidation de la société C, la société B a assigné la société A en paiement des loyers impayés. En réponse, la société A a opposé la caducité du contrat de location financière, arguant que celle-ci découlait de la résolution du contrat de maintenance.

Arguments juridiques

La société A a contesté la décision de la cour d’appel qui a rejeté sa demande de caducité du contrat de location financière, la condamnant à payer une somme à la société B. Elle a soutenu que les contrats étaient interdépendants et que la résolution unilatérale du contrat de maintenance entraînait automatiquement la caducité du contrat de location.

Analyse de la décision de la cour d’appel

La cour d’appel a affirmé que la résolution du contrat de maintenance ne pouvait être constatée par le juge sans la mise en cause préalable de la société C. Cependant, la cour a omis de prendre en compte que la caducité pouvait être invoquée sans cette mise en cause, en raison de l’interdépendance des contrats.

Conclusion de la Cour

En conclusion, la cour a reconnu que la résolution par voie de notification est opposable à celui contre lequel la caducité est invoquée, sans qu’il soit nécessaire de mettre en cause le cocontractant du contrat résolu. Ainsi, la cour d’appel a violé les dispositions du code civil relatives à la caducité des contrats interdépendants.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la portée de l’interdépendance des contrats dans le cadre d’une opération incluant une location financière ?

La portée de l’interdépendance des contrats est clairement définie par l’article 1186 du Code civil.

Cet article stipule que lorsque l’exécution de plusieurs contrats est nécessaire à la réalisation d’une même opération, et que l’un d’eux disparaît,

sont caducs les contrats dont l’exécution est rendue impossible par cette disparition, ainsi que ceux pour lesquels l’exécution du contrat disparu était une condition déterminante du consentement d’une partie.

La caducité n’intervient toutefois que si le contractant contre lequel elle est invoquée connaissait l’existence de l’opération d’ensemble.

Ainsi, dans le cas présent, la société Nogar’auto a résilié le contrat de maintenance avec la société Olicopie, ce qui a conduit à la demande de caducité du contrat de location financière avec la société Locam.

Cette interdépendance implique que la résolution d’un contrat peut entraîner la caducité des contrats connexes, sans qu’il soit nécessaire de mettre en cause le cocontractant du contrat résolu.

Quelles sont les conditions de la résolution d’un contrat selon le Code civil ?

Les conditions de la résolution d’un contrat sont énoncées dans les articles 1224 et 1226 du Code civil.

L’article 1224 précise que la résolution peut résulter soit de l’application d’une clause résolutoire, soit, en cas d’inexécution suffisamment grave, d’une notification du créancier au débiteur ou d’une décision de justice.

Cela signifie qu’un créancier peut mettre fin à un contrat en cas de manquement grave de la part du débiteur, sans avoir besoin d’une décision judiciaire préalable.

L’article 1226, quant à lui, indique que le créancier peut, à ses risques et périls, résoudre le contrat par voie de notification.

Le débiteur a alors la possibilité de contester cette résolution devant le juge à tout moment.

Dans le cas de la société Nogar’auto, la résolution du contrat de maintenance a été effectuée par notification, ce qui est conforme aux dispositions légales.

La nécessité de mettre en cause le cocontractant dans le cadre de la caducité d’un contrat est-elle requise ?

La question de la nécessité de mettre en cause le cocontractant dans le cadre de la caducité d’un contrat est abordée dans la jurisprudence.

Il en résulte que la résolution par voie de notification est opposable à celui contre lequel est invoquée la caducité d’un contrat,

par voie de conséquence de l’anéantissement préalable du contrat interdépendant, sans qu’il soit nécessaire de mettre en cause le cocontractant du contrat préalablement résolu.

Dans l’affaire en question, la cour d’appel a commis une erreur en exigeant la mise en cause de la société Olicopie,

alors que la société Nogar’auto avait déjà résolu le contrat de maintenance, rendant ainsi caduc le contrat de location financière avec la société Locam.

Cette interprétation erronée des textes a conduit à un rejet de la demande de caducité, ce qui constitue une violation des articles 1186, 1224 et 1226 du Code civil.

COMM.

FM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 5 février 2025

Cassation

M. VIGNEAU, président

Arrêt n° 55 FS-B

Pourvoi n° Q 23-23.358

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 5 FÉVRIER 2025

La société Nogar’auto, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Q 23-23.358 contre l’arrêt rendu le 19 octobre 2023 par la cour d’appel de Lyon (6e chambre), dans le litige l’opposant à la société Locam-location automobiles matériels, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Guillou, conseiller, les observations de la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de la société Nogar’auto, de la SCP Claire Leduc et Solange Vigand, avocat de la société Locam-location automobiles matériels, et l’avis de Mme Henry, avocat général, après débats en l’audience publique du 10 décembre 2024 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Guillou, conseiller rapporteur, Mme Schmidt, conseiller doyen, MM. Bedouet, Calloch, Chazalette, Mme Gouarin, conseillers, Mmes Brahic-Lambrey, Champ, M. Boutié, Mmes Coricon, Buquant, conseillers référendaires, Mme Henry, avocat général, et Mme Sezer, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée, en application de l’article R. 431-5 du code de l’organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Lyon, 19 octobre 2023), le 2 décembre 2016, la société Nogar’auto a conclu avec la société Locam-location automobiles matériels (la société Locam) un contrat de location financière portant sur un matériel de bureautique fourni par la société Olicopie, celle-ci en assurant aussi la maintenance.

2. Le 8 janvier 2020, après vaine mise en demeure, se prévalant d’un manquement de la société Olicopie à ses obligations, la société Nogar’auto lui a notifié la résolution du contrat de maintenance. Le 13 janvier 2020, elle a notifié à la société Locam la caducité par voie de conséquence du contrat de location financière.

3. Le 28 janvier 2020, la société Olicopie a été mise en liquidation.

4. Assignée en paiement des loyers impayés par la société Locam, la société Nogar’auto a opposé la caducité du contrat de location financière en conséquence de la résolution du contrat de maintenance préalablement prononcée.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

5. La société Nogar’Auto fait grief à l’arrêt de rejeter sa demande de caducité du contrat de location financière à compter du 9 janvier 2020 et de la condamner à payer à la société Locam la somme de 10 335,60 euros avec intérêts, alors « que les contrats concomitants ou successifs qui s’inscrivent dans une opération incluant une location financière sont interdépendants, de sorte que lorsque le contrat de fourniture et de maintenance d’un matériel est unilatéralement résilié, le contrat de location du matériel est caduc de plein droit ; que le créancier peut résoudre unilatéralement le contrat de fourniture par voie de notification, après délivrance d’une mise en demeure et sans saisir le juge, en cas d’inexécution suffisamment grave ; qu’en déboutant la société Nogar’Auto de sa demande de caducité du contrat de location financière conclu avec la société Locam en raison de l’absence de mise en cause de la société Olicopie, placée en liquidation judiciaire postérieurement à la résiliation unilatérale du contrat conclu avec elle par la société Nogar’Auto, la cour d’appel a violé les articles 1186, 1224 et 1226 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 1186, alinéas 2 et 3, 1224 et 1226 du code civil :

6. Selon le premier de ces textes, lorsque l’exécution de plusieurs contrats est nécessaire à la réalisation d’une même opération et que l’un d’eux disparaît, sont caducs les contrats dont l’exécution est rendue impossible par cette disparition et ceux pour lesquels l’exécution du contrat disparu était une condition déterminante du consentement d’une partie, la caducité n’intervenant toutefois que si le contractant contre lequel elle est invoquée connaissait l’existence de l’opération d’ensemble.

7. Aux termes du deuxième de ces textes, la résolution résulte soit de l’application d’une clause résolutoire, soit, en cas d’inexécution suffisamment grave, d’une notification du créancier au débiteur ou d’une décision de justice.

8. Selon le troisième de ces textes, le créancier peut, à ses risques et périls, résoudre le contrat par voie de notification, le débiteur pouvant à tout moment saisir le juge pour contester la résolution.

9. Il en résulte que la résolution par voie de notification est opposable à celui contre lequel est invoquée la caducité d’un contrat, par voie de conséquence de l’anéantissement préalable du contrat interdépendant, sans qu’il soit nécessaire de mettre en cause le cocontractant du contrat préalablement résolu.

10. Pour rejeter la demande de caducité du contrat de location financière, l’arrêt, après avoir rappelé l’interdépendance des contrats en cause, retient que si la société Nogar’auto a résolu unilatéralement le contrat de maintenance du 2 décembre 2016, cette résolution ne peut être constatée par le juge, à défaut de mise en cause préalable de la société Olicopie.

11. En statuant ainsi, la cour d’appel a violé les textes susvisés.


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